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Méthodologie proposée :

Dans le document La Riche, Prieuré Saint-Cosme (Page 39-44)

Extrait de carte topographique au 1/25

2- Méthodologie proposée :

Afin de ne pas fermer le site aux visites, il a été décidé de procéder en deux phases. La phase 1 (1 500 m²) comprend l'église romano-gothique et ses abords sud, dont une zone funéraire. La phase 2 (2 500 m²), comprend la salle capitulaire, l'extension à l'est de l'infirmerie, le "sous-prieuré", la chapelle carolingienne, et les abords de ces édifices, notamment la zone funéraire à l'est de la salle capitulaire.

D'autre part, ces deux tranches correspondent à deux "plateaux" de niveau distincts qui seront structurants du nouvel aménagement des jardins. La tranche 1 sera stabilisée à une niveau correspondant aux niveaux de circulation des 15-16ème siècles (plateau

"Renaissance"), tandis que la tranche 2, plus basse, correspondra aux niveaux romans, car c'est à ce niveau que les accès se font dans le réfectoire et l'infirmerie.

2.1 Décapage mécanique

D'une façon générale, il sera procédé au décapage mécanique au godet lisse des couches superficielles de terrain. Ces couches se divisent en trois grands ensembles :

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37 - les couches liées aux aménagements des 19ème et 20ème siècles, à l'époque où le site

était un hameau rural, peu à peu réhabilité en tant que site patrimonial, à partir de la fin de la seconde guerre mondiale ;

- les couches liées aux démolitions consécutives à la suppression du prieuré, au milieu du 18ème siècle ;

- les couches correspondant à l'important remblai qu'a connu l'ensemble du site au 15ème siècle.

L'épaisseur cumulée de ces niveaux varie de quelques dizaines de centimètres à plus d'1,50 m. Ils seront décapés sous surveillance archéologique, une attention particulière étant portée à l'interface entre les couches du 18ème siècle et celles du 15ème siècle. Le diagnostic

avait cependant mis en évidence l'absence d'aménagements importants au 15ème siècle dans

les espaces non bâtis.

Dans la salle capitulaire, il ne subsiste plus que des niveaux liés à la démolition du milieu du 18ème siècle, et quelques tombes en partie inférieure. Dans l'église, le sol du 15ème

siècle, qui représente son dernier état, est encore conservé, et servira de limite au décapage mécanique.

2.2 Etude des niveaux du haut Moyen-Age

Le diagnostic n'a pas révélé de niveaux anthropiques antérieurs aux 9-10ème siècles.

La première attestation par les textes date de l'an 900, où nous savons qu'il y avait alors une pêcherie en rive de l'île, sans préjuger d'autres types d'occupation. Une présence religieuse organisée est toutefois très peu probable, sauf peut-être un petit oratoire dédié aux saints Cosme et Damien.

A cette époque, la topographie était différente, puisque les moines ont progressivement exhaussé le niveau du sol du monastère, tant pour régulariser l'assiette de leur monastère que pour échapper aux inondations (au 15ème siècle). A l'origine, un bourrelet

de rive accueille l'église carolingienne, puis l'église romano-gothique. Les niveaux les plus anciens sont donc facilement accessibles dans ces zones, mais plus profondément enfouis ailleurs.

Comme il est question de réhabiliter les niveaux "renaissance" (tranche 1) et "romans" (tranche 2), on ne descendra pas plus bas à la recherche des niveaux alto-médiévaux, sauf aux abords de la chapelle carolingienne. On profitera éventuellement de la fouille de structures en creux pour repérer ces niveaux, mais sans les fouiller à moins d'une découverte exceptionnelle.

2.3 Étude de l'église romano-gothique

Le projet de mise en valeur vise à retrouver le niveau de circulation le plus récent de l’église, celui qui a été installé lors des remaniements gothiques, de la fin du 15ème siècle. Ce

niveau est encore partiellement visible dans le transept sud. La mise en valeur ne pouvant consister à simplement exposer le carrelage du 15ème siècle, la fouille démontera ce niveau

de sol jusqu’aux sols du 12ème siècle. Ponctuellement, ceux-ci seront traversés pour

s’assurer des liens stratigraphiques avec les maçonneries.

Une attention particulière sera portée au déambulatoire, dans la mesure où c’est un dispositif rare au début de l’époque romane. L’église de Saint-Cosme pourrait apporter des éléments sur la genèse de ce type d’aménagement. En effet, il apparaît qu’il a été rajouté à un état plus ancien de l’église. Le diagnostic a montré que, dès l’origine, il y avait un

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déambulatoire, peut-être en bois, hypothèse déjà émise par le docteur Ranjard en 1948. Toutefois, les données acquises lors du diagnostic sont fragiles, et une fouille exhaustive de la partie nord du déambulatoire, celle qui est détruite, sera réalisée. Pour ce qui est de la partie sud, après un décapage manuel et en fonction des résultats de la fouille de la partie nord, il sera décidé s’il convient ou non de la fouiller également.

Une attention particulière sera portée à l’annexe bâtie au flanc nord du déambulatoire, détectée par le diagnostic. Étant donnée la densité de sépultures découvertes, il est vraisemblable qu’il s’agisse d’une chapelle funéraire, créée peut-être au 15ème siècle.

Enfin, l’étude de bâti s’attachera à préciser les trois phases de construction de l’église déjà connues (dont une révélée par le diagnostic), voire d’en ajouter. Elle contribuera également à nourrir la problématique de l’ajout du déambulatoire par l’analyse fine des raccords entre les différentes phases. Enfin, l’analyse du décor peint, très mal conservé mais jamais étudié, sera réalisée.

2.4 Étude de bâti

Cette étude vise à retracer l’évolution des différents bâtiments du prieuré, établir leur restitution volumétrique pour ceux qui sont ruinés, et à obtenir si possible des précisions sur la mise en œuvre des matériaux.

Elle utilisera les méthodes d’enregistrement stratigraphique de l’archéologie du bâti. Sauf exception, il n’est pas prévu de piquetage des maçonneries ou de sondages dans celles-ci, car les édifices, sont soit déjà restaurés, soit ne vont pas l’être prochainement et ne doivent pas être fragilisés. Le relevé pierre à pierre sera limité aux zones accessibles sans échafaudage important. Un élévateur pourra être loué pour une campagne d’examen des parties hautes de l’église. Des photographies redressées de celle-ci ont déjà été réalisées dans le cadre du diagnostic, et serviront de base aux relevés (il n’existe pas de relevés exécutés par un architecte des Monuments Historiques). Son plan archéologique complet sera réalisé dans le cadre de la fouille.

L’étude sera naturellement étroitement corrélée à la fouille stratigraphique du sol, et c’est pourquoi elle aura lieu en même temps que celle-ci. Elle sera confiée à Bastien Lefebvre, docteur de l’université de Tours, spécialiste de l’archéologie du bâti médiéval.

Une attention particulière sera portée à la charpente du logis du prieur, qui semble dater du 15ème siècle. Elle sera menée avec l’appui scientifique de Frédéric Épaud, chargé

de recherches au CNRS, membre du LAT et spécialiste des charpentes médiévales.

2.5 Étude anthropologique

Cette étude sera menée par Matthieu Gaultier, anthropologue du service de l’archéologie du département d’Indre-et-Loire. Il sera secondé par deux autres anthropologues, dès la phase terrain. D’autre part, de nombreux fouilleurs de l’équipe ont une bonne pratique de la fouille de sépultures.

2.5.1 Rappel des apports du diagnostic

Le diagnostic a permis d'identifier un peu moins de quarante tombes dont quatre ont été fouillées à cette occasion. Le diagnostic ayant porté sur 10% de l'emprise, ce sont donc entre 400 et 500 individus qui vont être découverts et étudiés. Il a permis de comprendre,

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d'une part, la dynamique de dévolution de l'espace à vocation funéraire et d'appréhender, d'autre part, la variété des types de sépultures.

Aucune sépulture associée à la première église du 11ème siècle n'a été identifiée. Les

premières inhumations datent du 12ème siècle et sont implantées au nord-est de l'église

romane (entre la salle capitulaire et l'infirmerie). L'utilisation de cet espace comme lieu de sépulture semble continue jusqu'au 14ème siècle. Une zone secondaire d'inhumations au sud

de la nef de l'église est également utilisée à l'époque romane mais apparemment sur un laps de temps plus court (12ème-13ème siècles).

A partir des 13ème et 14ème siècles, la gestion de l'espace sépulcral évolue. L'église, et

surtout la porterie adjointe en avant de l'édifice, commencent à être investies par quelques sépultures d'individus bénéficiant d'un traitement privilégié (découverte de la sépulture du sous-doyen couverte d'une plate-tombe gravée : 13ème siècle, identification de sépultures à

coffrage anthropomorphe dans la porterie).

A partir du 15ème siècle, on continue d'inhumer à l'intérieur du prieuré mais comme

aucune tombe postérieure au 14ème n'a été repérée dans les espaces funéraires romans, il

semble que toutes les sépultures sont implantées dans les bâtiments : nef de l'église, déambulatoire, galerie du cloître, salle capitulaire. Malgré cette colonisation de l'espace, aucune sépulture (à l'exception de celle de Ronsard) n'est implantée dans le chœur de l'église gothique.

Une grande variété de pratiques sépulcrales a été identifiée : tombes en "pleine terre", coffrages ou cercueils de bois (cloués ou non), coffrages anthropomorphes et tombes bénéficiant d'un traitement privilégié (plate-tombes constituées d'une épaisse dalle d'ardoise ou en calcaire sculpté).

Le diagnostic permet de poser la question de l'apparition et de la disparition de certaines architectures funéraires. Quant à la population elle-même, la fouille de quatre sépultures reste insuffisante pour permettre de se faire une idée de l'évolution des pratiques funéraires portant sur le défunt. A ce stade il n'est bien entendu pas possible non plus de comprendre le recrutement de l'effectif inhumé même si on suppose la présence d'individus au statut social "privilégié" par rapport au lot commun (traitement de l'architecture de la tombe, localisation particulière…)

2.5.2 Objectifs de l’étude paléo-anthropologique

L'opération de fouille concernera l'intégralité de l'espace funéraire à l'exception du cloître, non affecté par les travaux. La fouille et l'étude d'un corpus, a priori proche de l'exhaustivité, de 400 à 500 sépultures d'individus inhumés sur un laps de temps assez court (5 à 6 siècles) offrent un certain nombre de perspectives.

Il s'agit en premier lieu de comprendre le recrutement de la population inhumée et la dynamique de ce recrutement :

- quelle est la part de population laïque et à quelle époque voit-on apparaître les premières sépultures de laïcs,

- peut-on caractériser la population bénéficiant d'un traitement sépulcral privilégié, - le prieuré disposant d'une infirmerie, peut-on identifier un lieu dévolu aux sépultures des personnes qui y étaient soignées,

- un certain nombre de caveaux ont été repérés dans l'église : le recrutement des individus inhumés dans ces caveaux est-il spécifique? Peut-on établir des liens de parenté entre les individus inhumés dans un même caveau ?

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Pour répondre à tous ces questionnements (non exhaustifs) sur le recrutement, un certains nombre d'outils et de méthodes seront mis en œuvre :

- analyse stratigraphique et spatiale de l'espace sépulcrale (base de données et SIG) - établissement d'une typologie des pratiques funéraires au sens large (architecture de la tombe, traitement du corps, dépôts et offrandes)

- compilation et analyse des données biologiques des individus au sein d'une base de données ad hoc.

Plus spécifiquement, en ce qui concerne les pratiques funéraires, il s'agira d'en retracer l'évolution (date d'apparition des premiers contenants cloués…) afin d'enrichir les typologies déjà existantes (Lorans et al. 1996). Ce domaine des pratiques funéraires est également l'occasion d'aborder des questionnements anciens avec des méthodes renouvelées. Ainsi l'étude des sépultures habillées et/ou en linceul pourra être réalisée en lien avec les travaux d'une doctorante de l'université de Tours, Delphine Henri, qui travaille sur ces questions. Outre la possibilité (faible compte tenu du contexte sédimentaire) de trouver des tissus conservés, cet aspect des pratiques peut être perçu grâce à l'analyse des fragments de tissus fossilisés dans les gangues de corrosions d'objets métalliques découverts dans les tombes.

La fouille sera également l'occasion de préciser la dynamique de l'évolution de l'espace funéraire perçue à l'occasion du diagnostic de 2006.

On tentera également d'établir le profil démographique de la population inhumée (par période, par secteur, par zone de recrutement spécifique…). S’agissant d’un monastère, on vérifiera jusqu’à quel point le recrutement du cimetière était réservé ou ouvert (présence de femmes et d’enfants) et on en précisera la chronologie.

Enfin, si un secteur dédié à l'inhumation d'une population de malades soignés à l'infirmerie est décelé, une analyse paléo-pathologique sera mise en œuvre. A cet effet des contacts préliminaires ont été pris avec Dominique Castex (CNRS, Université de Bordeaux I).

2.6 Études paléo-environnementales

Ce volet n’est pas prioritaire, dans la mesure où le contexte n’est pas particulièrement favorable à la conservation des restes organiques, ossements mis à part. Aucun milieu humide n’a été détecté au diagnostic, ni ensemble clos de type latrine. Naturellement, si de tels ensembles devaient être trouvés en fouille, ils feraient l’objet de protocoles de prélèvements à fins d’analyses paléo-environnementales.

La principale problématique en matière de paléo-environnement est celle qui a trait à la dynamique sédimentaire des lieux. Saint-Cosme était au Moyen-Age une île récemment rattachée à la rive. L’équipe de la Zone Atelier Loire du CNRS est intéressée à réalisée une série de carottages sur un transect nord-sud, afin de préciser cette dynamique fluviale.

2.7 Enregistrement des données

L’ensemble des observations et relevés sera enregistré selon la même méthodologie et dans les mêmes bases de données et SIG que les autres opérations menées par le SADIL. Une « base de fouille » sera aménagée sur place et pourvue de quatre ordinateurs qui permettront d’avancer l’enregistrement, les inventaires et la topographie en temps réel.

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Les relevés seront réalisés au tachéomètre laser et, pour certaines structures, par photographies redressées.

Les sépultures seront relevées précisément par le biais de photographies verticales (avec prises de vues de détails notamment en cours de démontage) et lorsque ce sera pertinent par des dessins (1/10 ou 1/20). L'ensemble des documents graphiques seront géo- référençables dans le système d'information géographique. Les données relatives à la taphonomie et aux pratiques funéraires seront enregistrées par une équipe de 3 anthropologues directement sur le terrain. Les données biologiques et biométriques des individus seront enregistrées lors de la post-fouille.

Dans le document La Riche, Prieuré Saint-Cosme (Page 39-44)