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Figure 1.1 – Exemples de rééducation manuelle du membre supérieur

Plusieurs méthodes visant à rééduquer la fonction motrice du membre supérieur ont été développées. La plupart s’appuient sur des concepts tels que la neuroplasticité*, l’ap-prentissage (et réapl’ap-prentissage) moteur, la dimension cognitive du mouvement, etc. Elles sont essentiellement issues de deux approches fondamentalement différentes : l’approche restauratrice qui consiste à stimuler cognitivement le patient au travers de la réalisation d’activités fonctionnelles, et l’approche compensatoire qui consiste à éduquer le patient et son entourage, lui proposer des aides externes ainsi que l’aider à aménager son envi-ronnement. Ces deux approches ne s’excluent pas l’une l’autre. Parmi les méthodes de rééducation manuelles (exemples visibles sur la figure 1.1), on retrouve [Haute Autorité de Santé, 2012] :

— La rééducation manuelle individuelle qui fait référence à l’application des tech-niques classiques de mobilisations passives et actives réalisées par un thérapeute en tête à tête avec le patient ;

— L’activité physique et les programmes d’exercices gymniques qui consistent en un entraînement organisé pour améliorer la condition physique, en particulier pour corriger ou prévenir le déconditionnement cardio-respiratoire et améliorer la force et l’endurance musculaires ;

— Le renforcement musculaire qui intègre l’ensemble des techniques mises en œuvre pour augmenter la force musculaire. L’objectif visé est l’amélioration de la

trophicité*et de la performance musculaires, et non de la commande neuromotrice ; — La rééducation intensive qui consiste à réaliser une activité ciblée de rééducation avec un nombre élevé de répétitions, ou dans des conditions qui en augmentent la charge en comparaison avec l’intensité habituellement proposée ;

— Différentes approches neurophysiologiques qui correspondent à des programmes de rééducation neurodéveloppementale, de neurofacilitationproprioceptive*et d’in-tégration sensorimotrices ayant pour objectif de restaurer la fonction motrice, no-tamment : le concept Bobath, la méthode Brunnström, la méthode Kabat et la méthode de Rood. Ces différentes méthodes s’appuient sur le principe d’inhibition (de laspasticité), de la facilitation (du contrôle volontaire) ainsi que la restauration des réactions posturales ;

— L’apprentissage moteur qui consiste à utiliser les mêmes voies d’apprentissage que celles utilisées habituellement pour des personnes saines. Le thérapeute évalue pour chaque tâche les difficultés d’exécution et entraîne le sujet à la tâche de manière spécifique ;

— La rééducation par mouvements bilatéraux simultanés qui a pour but de solliciter la motricité du membre hémiparétique avec le membre controlatéral sain par le biais de mouvements, symétriques ou non, réalisés bilatéralement ;

— L’imagerie mentale motrice qui consiste soit à évoquer et répéter mentalement une expérience motrice déjà vécue dans le passé, soit à évoquer l’image anticipatrice d’une action nouvelle, dans le but d’obtenir la réalisation ou la mémorisation d’un mouvement donné ;

— La rééducation basée sur la thérapie miroir qui consiste à installer un miroir vertical, séparant les deux membres supérieurs afin que le membre parétique soit caché par le reflet du bras valide. Le patient peut alors bouger son membre sain et l’illusion visuelle permet de faire travailler le membre parétique ;

— La contrainte induite (constraint-induced movement therapy : CIMT ) qui consiste à limiter ou empêcher l’activité du membre supérieur sain afin de susciter l’activité du membre atteint par la répétition intensive de tâches spécifiques et/ou fonction-nelles.

Figure 1.2 – Exemples de rééducation instrumentée du membre supérieur (biofeedback, stimulation électrique fonctionnelle, robotique)

Les 15 dernières années ont vu l’émergence d’approches rééducatives innovantes permet-tant d’intensifier la rééducation du membre supérieur dont quelques exemples sont visibles sur la figure1.2. La majorité des nouvelles techniques font intervenir des dispositifs tech-nologiques dans le but soit de stimuler directement certaines zones cérébrales corticales ou le système neuromusculaire « périphérique », soit de réaliser une interface entre le pa-tient et des systèmes informatiques. Parmi ces méthodes de rééducation instrumentées, on retrouve :

— Le biofeedback ou « rétroaction biologique » utilise des appareils de contrôle (comme l’électrocardiogramme (ECG), l’électromyogramme (EMG) et l’électroen-céphalogramme (EEG)) qui détectent et matérialisent (par des représentations vi-suelles ou sonores) un processus physiologique dans le but de rendre immédiatement disponible (temps réel), pour l’individu, une information sur son fonctionnement. Le sujet peut ainsi agir en conséquence directement sur l’objet de la mesure ; — L’électrothérapie sous deux formes :

— L’électrostimulation qui correspond à des stimulations électriques appli-quées à des fins thérapeutiques sur les muscles (points moteurs, corps charnus ou tronc nerveux) au moyen d’électrodes, suivant une fréquence, une forme, une durée d’impulsion et une intensité déterminées ;

— La Stimulation Électrique Fonctionnelle (SEF) est l’application continue d’un courant électrique sur la peau, au niveau d’un point précis en regard d’un nerf ou d’un muscle, pour obtenir une contraction ;

— La rééducation assistée par robotique qui consiste à réaliser des mouvements contraints par un système électromécanique, couplé ou non à un environnement graphique. En fonction de la sophistication du robot, le mouvement peut être libre, totalement guidé ou juste assisté ;

— La réalité virtuelle qui consiste en la création informatique d’un environnement simulé avec lequel le sujet peut interagir par différents moyens : toucher, vision, mouvements. Appliquée au domaine de la rééducation, l’interface de communication sollicite des actions motrices ciblées selon des objectifs personnalisés.

Il existe également la rééducation dite récréationnelle ou occupationnelle qui consiste à occuper le patient à travers des activités qui nécéssitent l’utilisation du membre parétique comme des jeux (de cartes, du bingo, du puissance 4, des puzzles, . . .), du bricolage ou de la cuisine (même si ces dernières peuvent être assimilées à de la réadaptation). Elle per-met de répondre en partie au problème de démotivation en visant le divertissement avant tout, mais le niveau d’intensité est particulièrement limité (voire absent). Ces méthodes récréationnelles deviennent aussi possibles en autonomie grâce à la commercialisation de jeux et d’interfaces de capture de mouvement comme la console Wii (©Nintendo), la ca-méra Kinect (©Microsoft) et Playstation Eye (©Sony). Ces dispositifs numériques ne sont pas considérés comme rééducatifs à proprement parler car ils ont été conçus pour divertir un publique de personnes saines et ne sont donc pas spécifiques aux problématiques des patients atteints d’AVC.

Le défi de la rééducation du membre supérieur a donné lieu à de nombreuses études cli-niques dont la plupart ont démontré les bénéfices de ces nouveaux programmes, qu’ils soient utilisés seuls ou en addition des rééducations conventionnelles [Langhorne et al.,

2009]. Indépendamment de la méthode employée, le type d’approche à suivre en fonction des différents cas d’AVC reste inconnu. S’il est admis que l’efficacité de la rééducation dépend fortement de la précocité de sa mise en œuvre, la manière de procéder ne fait absolument pas l’objet d’un consensus. Certains auteurs défendent une approche plutôt passive et de prévention, expliquant qu’il n’est pas souhaitable de demander trop d’efforts alors que le patient est encore très affaibli par l’AVC. Cependant, la tendance actuelle est plutôt d’encourager une rééducation active dès la phase initiale, car la réorganisation cé-rébrale survient très rapidement impliquant la nécessité de prévenir l’effet nocif de la non-utilisation. L’intensité de la rééducation quotidienne est également un facteur important de récupération, sans que soient déterminées pour autant les posologies journalières de rééducation efficace.Pollock et al. [2014] ont montré l’absence de preuve de haute qualité de la supériorité d’un type d’intervention quel qu’il soit. Il est recommandé de combiner les différentes approches et il est aussi important de noter que certaines méthodes sont déconseillées dans certaines situations, comme la rééducation par contrainte induite du membre supérieur à la phase aiguë, car elle peut avoir un effet délétère [Haute Autorité de Santé,2012]. Enfin, ces méthodes sont dans l’absolu applicables à domicile, cependant, le coût des soins pratiqués par un thérapeute à domicile ou la nécessité d’être apte à la pratiquer en autonomie rendent la pratique difficile. De plus, si la télé-rééducation (super-vision en temps réel à distance via une caméra) permet cette pratique, elle n’en résout pas moins les problématiques liées à la restriction budgétaire qui implique une diminution des temps de prise en charge pour la rééducation utilisant les moyens humains. Néanmoins, les nouvelles méthodes instrumentées permettent d’envisager leur mise en place dans le cadre de l’auto-rééducation à domicile.