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Parmi les 101 345 participants ayant reçu le questionnaire d’alimentation intuitive

précédemment validé en français, 53 353 l’ont complété entre décembre 2013 et juin 2014.

Parmi eux, 1150 femmes enceintes et 10 667 participants n’ayant pas complété au moins six

enregistrements alimentaires valides au cours de leur suivi ont été exclus. Ainsi, un total de

41 536 participants, 31 955 femmes et 9581 hommes, ont été inclus dans cette analyse.

3.1.2 Mesures

Sélection des groupes d’aliments

Les groupes d’aliments ont été sélectionnés et adaptés principalement sur la base des

recommandations du Programme National Nutrition Santé (PNNS) (Hercberg, Chat-Yung, &

Chauliac, 2008). Sept groupes ont été définis :

- Fruits et légumes

- Féculents : pommes de terre, pâtes, riz, pain et légumineuses

- Féculents complets spécifiquement : pâtes complètes, riz complet, pain complet et

légumineuses.

- Produits laitiers : lait, fromage, yaourts

14

Cette section a fait l’objet d’une publication à soumettre prochainement : Camilleri GM, Méjean C, Bellisle F,

Andreeva VA, Kesse-Guyot E, Hercberg S, Péneau S. Eating in response to hunger and satiety signals and low

preoccupation with food are differently associated with food intake.

111

- Viande/poisson/œuf

- Produits gras et sucrés : gâteaux, biscuits, pâtisseries, produits chocolatés, glaces et

confiseries

- Fast-food/pizzas/tartes

- Produits apéritifs (dont les fruits oléagineux salés)

- Fruits secs et oléagineux nature

Évaluation du grignotage

En avril 2014, les participants ont été invités à compléter un questionnaire sur les conditions

de leur repas. Concernant le grignotage, les questions suivantes ont été posées :

- A quelle fréquence grignotez-vous, dans la journée (jusqu’au coucher) ?

Les réponses étaient notées sur une échelle à 7 points allant de « 6 fois ou plus par

jour, tous les jours » à « jamais ».

- Vous arrive-t-il de grignoter sans avoir faim en dehors des repas?

Les réponses étaient notées sur une échelle à 6 points allant de « Toujours, je ne

ressens jamais cette sensation » à « jamais »

3.1.3 Analyses statistiques

Les scores des sous-échelles « raisons physiques » et « signaux » n’étaient pas normalement

distribués, et c’était encore le cas même après avoir transformé les variables selon différentes

méthodes classiques (logarithme, inverse, racine carré, carré ou box-cox). De plus, il n’existe

pas de considérations cliniques sur les variations de ces scores. Les individus ont donc été

répartis en quatre groupes suivant les quartiles de distribution des scores des trois

sous-échelles « raisons physiques », « signaux » et « permission », spécifiques à chaque sexe.

Selon l’allure de la distribution, nous avons considéré dans les analyses soit les apports

moyens dans l’ensemble de l’échantillon, soit les pourcentages de consommateurs vs.

non-consommateurs. Les associations des quartiles de scores avec les apports énergétiques et la

consommation de chaque groupe d’aliment ont été testées à l’aide de modèles d’analyse de

covariance pour les variables quantitatives et de modèles de régression logistique pour les

variables qualitatives. Les moyennes ou les pourcentages ajustés par quartiles de scores ont

été calculés. Les modèles étaient ajustés sur l’âge, le niveau d’éducation, le statut tabagique,

l’activité physique, les apports énergétiques (alcool exclus) et la saison.

112

Des variables à trois catégories correspondant à la fréquence de grignotage (< 1 fois/semaine,

≥ 1 fois/semaine, ≥ 1 fois/jour) et au grignotage en dehors des repas sans avoir faim (jamais,

rarement/parfois, souvent/toujours), ont été créées. Les associations entre les quartiles de

scores des sous-échelles d’alimentation intuitive et les variables relatives au grignotage ont

été testées à l’aide de modèles de régression logistique multinomiale (ou polytomique) ajustés

sur l’âge, le niveau d’éducation, le statut tabagique et l’activité physique.

Les interactions entre le sexe et les apports en un certain nombre de groupes d’aliments étant

significatives, toutes les analyses ont été stratifiées sur le sexe.

Les tests de tendance linéaire ont été réalisés en utilisant le score ordinal des quartiles des

trois sous-échelles.

La très grande puissance statistique conférée par la taille de l’échantillon a produit des

résultats significatifs pour la plupart des groupes d’aliments. Par conséquent, nous avons

seulement décrit les résultats significatifs pour lesquels une différence de moyenne ou de

pourcentage du groupe d’aliment concerné entre le quartile 1 et le quartile 4 était ≥ 5%,

représentant une différence nutritionnelle qui pourrait potentiellement avoir des conséquences

sur la santé à long terme. Ce seuil n’a pas été appliqué pour les apports énergétiques pour

lesquels nous avons raisonné sur les différences absolues plutôt que relatives car on sait plus

facilement quantifier une augmentation de calories en lien avec la santé dans la littérature

(Fallah-Fini et al., 2014).

3.2 Résultats

Les trois sous-échelles n’étaient pas uniformément associées aux apports énergétiques et aux

différents groupes d’aliments. Par conséquent, les trois sous-échelles ont été considérées

indépendamment et un score global unique n’a pas pu être utilisé.

3.2.1 Sous-échelles de l’alimentation intuitive (IES-2) et apports énergétiques

Des scores plus élevés aux sous-échelles « raisons physiques » et « signaux » étaient

linéairement associés à des apports énergétiques plus faibles chez les femmes (Tableau 12).

Chez les hommes, un score plus élevé de « raisons physiques » était associé à des apports

légèrement plus élevés mais la probabilité de tendance linéaire était faiblement significative.

A l’inverse, le score de « permission » était positivement et linéairement associé aux apports

énergétiques à la fois chez les hommes et chez les femmes.

113

3.2.2 Sous-échelles de l’alimentation intuitive (IES-2) et consommation des

différents groupes d’aliments

Les associations avec les différents groupes d’aliments variaient également de façon

importante entre les sous-échelles. Le score de « raisons physiques » était inversement associé

à la consommation de produits gras et sucrés. Chez les femmes, les apports en produits laitiers

et en viande/poisson/œuf diminuaient pour des scores plus élevés à la sous-échelle « raisons

physiques » tandis que le pourcentage de consommateurs de fruits secs et oléagineux

augmentait.

Les personnes présentant un score plus élevé à la sous-échelle « signaux » avaient une

consommation plus faible de produits laitiers et de viande/poisson/œuf. Les femmes avec des

scores plus élevés à la sous-échelle « signaux » avaient une consommation plus élevée de

produits complets et étaient plus souvent des consommatrices de fruits secs et oléagineux.

Enfin, des scores plus élevés sur la sous-échelle « permission » étaient associés à des apports

plus faibles en fruits et légumes ainsi qu’en produits complets chez les hommes et chez les

femmes. Le score de « permission » était également positivement associé à la consommation

de produits gras et sucrés, mais dans une moindre mesure, ainsi qu’au pourcentage de

consommateurs de fast-food/pizza/tartes et de produits apéritifs. Les apports en produits

laitiers et en viande/poisson/œuf diminuaient pour des scores de « permission » plus élevés

chez les femmes spécifiquement tandis que le pourcentage de consommateurs de fruits secs et

oléagineux et la consommation de féculents diminuaient chez les hommes spécifiquement.

3.2.3 Sous-échelles de l’alimentation intuitive (IES-2) et grignotage

Les scores des sous-échelles « raisons physiques », « signaux » et « permission » étaient tous

les trois inversement associés à la fréquence de grignotage et à la tendance à grignoter en

dehors des repas sans avoir faim chez les hommes et chez les femmes, à l’exception d’une

association non-significative entre le score « signaux » et la fréquence de grignotage chez les

hommes ainsi qu’entre le score « permission » et la tendance à grignoter en dehors des repas

sans avoir faim également chez les hommes (Tableau 13).

114

Tableau 12 : Apports énergétiques et consommation des différents groupes d’aliments selon les quartiles de scores des

sous-échelles de l’alimentation intuitive (IES-2) chez les hommes et chez les femmes

Femmes Hommes

Q1 Q2 Q3 Q4

P de

tendance

1

Q4-Q1

(%) Q1 Q2 Q3 Q4

P de

tendance

1

Q4-Q1

(%)

Raisons physiques

Energie (kcal/j)

2

1727,5 ± 4,3 1703,4 ± 4,4 1692,9 ± 4,2 1689,0 ± 4,4 <0,0001 -2 2126,9 ± 10,0 2127,5 ± 10,0 2149,0 ± 10,3 2147,2 ± 10,0 0,03 1

Fruits et légumes (g/j) 361,1 ± 2,1 357,8 ± 2,1 353,3 ± 2,1 355,7 ± 2,2 0,009 -2 400,8 ± 4,5 385,6 ± 4,5 390,6 ± 4,6 394,3 ± 4,5 0,41 -2

Féculents (g/j)

3

324,2 ± 1,3 325,8 ± 1,4 326,8 ± 1,3 328,1 ± 1,4 0,02 1 431,0 ± 3,2 435,9 ± 3,2 434,9 ± 3,3 437,1 ± 3,2 0,15 1

Produits complets (g/j)

4

76,1 ± 0,8 76,2 ± 0,8 76,7 ± 0,8 79,2 ± 0,8 0,002 4 95,7 ± 2,0 96,6 ± 2,0 96,6 ± 2,1 94,8 ± 2,0 0,72 -1

Produits laitiers (g/j)

5

260,3 ± 1,8 243,2 ± 1,9 239,3 ± 1,8 236,5 ± 1,9 <0,0001 -10 252,6 ± 3,6 252,2 ± 3,6 254,6 ± 3,7 255,1 ± 3,6 0,47 1

Viande/poisson/œuf (g/j) 209,1 ± 0,9 202,1 ± 1,0 199,0 ± 0,9 196,1 ± 1,0 <0,0001 -7 251,7 ± 2,0 247,6 ± 2,0 247,0 ± 2,0 249,7 ± 2,0 0,42 -1

Produits gras et sucrés (g/j)

6

142,6 ± 0,8 135,6 ± 0,8 130,2 ± 0,8 124,4 ± 0,8 <0,0001 -15 152,9 ± 1,8 146,7 ± 1,8 144,9 ± 1,8 138,0 ± 1,8 <0,0001 -11

Fast-food/pizzas/tartes (%)

7

83,0 83,8 85,0 83,6 0,06 1 81,5 82,7 81,5 80,4 0,17 -1

Produits apéritifs (%)

7,8

69,3 71,6 73,1 72,1 <0,0001 4 72,3 71,5 73,0 73,6 0,18 2

Fruits secs et oléagineux (%)

7

67,5 70,7 72,2 73,3 <0,0001 8 67,4 69,5 69,5 69,7 0,09 3

Signaux

Energie (kcal/j)

2

1724,1 ± 4,2 1701,4 ± 4,2 1694,8 ± 4,4 1689,2 ± 4,4 <0,0001 -2 2145,7 ± 10,3 2140,0 ± 9,8 2134,1 ± 10,4 2130,5 ± 9,8 0,18 -1

Fruits et légumes (g/j) 368,3 ± 2,0 356,3 ± 2,1 349,7 ± 2,2 354,3 ± 2,2 <0,0001 -4 407,1 ± 4,6 390,2 ± 4,3 392,7 ± 4,6 389,9 ± 4,4 0,005 -4

Féculents (g/j)

3

325,2 ± 1,3 324,9 ± 1,3 324,3 ± 1,4 330,7 ± 1,4 0,003 2 436,0 ± 3,3 428,2 ± 3,1 440,1 ± 3,4 435,6 ± 3,2 0,37 0

Produits complets (g/j)

4

75,5 ± 0,8 75,0 ± 0,8 76,5 ± 0,9 81,7 ± 0,9 <0,0001 8 98,2 ± 2,1 90,5 ± 2,0 97,6 ± 2,1 98,0 ± 2,0 0,32 0

Produits laitiers (g/j)

5

264,8 ± 1,8 245,6 ± 1,8 239,7 ± 1,9 225,6 ± 1,9 <0,0001 -17 268,4 ± 3,7 256,6 ± 3,5 247,1 ± 3,8 243,1 ± 3,6 <0,0001 -10

Viande/poisson/œuf (g/j) 210,5 ± 0,9 205,2 ± 0,9 197,9 ± 1,0 190,6 ± 1,0 <0,0001 -10 255,3 ± 2,0 254,4 ± 1,9 247,1 ± 2,1 239,9 ± 2,0 <0,0001 -6

Produits gras et sucrés (g/j)

6

135,9 ± 0,8 133,6 ± 0,8 132,4 ± 0,8 130,7 ± 0,8 <0,0001 -4 147,5 ± 1,8 147,7 ± 1,7 145,1 ± 1,9 142,7 ± 1,8 0,01 -3

Fast-food/pizzas/tartes (%)

7

82,8 84,1 85,3 83,4 0,05 1 81,1 82,2 82,2 80,6 0,62 -1

Produits apéritifs (%)

7,8

70,4 72,0 72,7 71,1 0,18 1 71,4 73,4 72,9 72,4 0,57 1

Fruits secs et oléagineux (%)

7

68,5 70,0 71,6 74,1 <0,0001 7 68,5 67,8 70,4 69,5 0,15 1

115

Tableau 12 : suite

Femmes Hommes

Q1 Q2 Q3 Q4

P de

tendance

1

Q4-Q1

(%) Q1 Q2 Q3 Q4

P de

tendance

1

Q4-Q1

(%)

Permission

Energie (kcal/j)

2

1642,7 ± 4,7 1689,5 ± 3,9 1723,7 ± 4,5 1752,4 ± 4,3 <0,0001 6 2093,1 ± 9,9 2117,0 ± 10,6 2149,2 ± 9,3 2192,5 ± 10,7 <0,0001 5

Fruits et légumes (g/j) 407,5 ± 2,2 366,2 ± 1,9 346,2 ± 2,2 317,9 ± 2,1 <0,0001 -28 444,6 ± 4,4 406,8 ± 4,6 380,6 ± 4,1 345,2 ± 4,7 <0,0001 -29

Féculents (g/j)

3

333,3 ± 1,5 328,4 ± 1,2 324,7 ± 1,4 319,2 ± 1,4 <0,0001 -4 451,0 ± 3,2 437,6 ± 3,4 428,1 ± 3,0 422,5 ± 3,4 <0,0001 -7

Produits complets (g/j)

4

89,5 ± 0,9 78,6 ± 0,8 74,2 ± 0,9 67,7 ± 0,8 <0,0001 -32 112,6 ± 2,0 101,1 ± 2,1 91,2 ± 1,9 78,2 ± 2,1 <0,0001 -44

Produits laitiers (g/j)

5

263,3 ± 2,0 248,2 ± 1,7 238,7 ± 2,0 232,0 ± 1,9 <0,0001 -13 258,6 ± 3,6 257,6 ± 3,8 250,5 ± 3,4 248,3 ± 3,9 0,007 -4

Viande/poisson/œuf (g/j) 208,6 ± 1,0 203,4 ± 0,9 199,8 ± 1,0 195,6 ± 0,9 <0,0001 -7 251,3 ± 2,0 247,6 ± 2,1 246,7 ± 1,9 251,5 ± 2,1 0,73 0

Produits gras et sucrés (g/j)

6

129,6 ± 0,9 132,7 ± 0,8 134,1 ± 0,9 136,3 ± 0,8 <0,0001 5 140,4 ± 1,8 146,1 ± 1,9 147,4 ± 1,7 149,0 ± 1,9 <0,0001 6

Fast-food/pizzas/tartes (%)

7

79,1 83,3 85,7 86,6 <0,0001 9 78,0 81,5 83,2 83,1 <0,0001 6

Produits apéritifs (%)

7,8

67,2 71,2 73,2 73,8 <0,0001 9 69,4 72,3 73,7 74,8 <0,0001 7

Fruits secs et oléagineux (%)

7

72,0 71,3 71,1 69,2 <0,0001 -4 70,8 70,0 69,3 65,5 0,0002 -8

Moyennes ± erreurs types ou % ajustés sur l’âge, le niveau d’éducation, le statut tabagique, l’activité physique, les apports énergétiques (excluant l’alcool) et

la saison. Les résultats en gras indiquent une différence d’apports entre les individus dans le Q1 et le Q4 ≥ 5%.

1

Test de tendance linéaire en utilisant le score ordinal des quartiles

2

Excluant l’alcool

3

Ce groupe comprend les pommes de terre, pâtes, riz, pain et légumineuses

4

Ce groupe comprend les variétés complètes de féculents les pâtes complètes, riz complet, pain complet et légumineuses

5

Ce groupe comprend le lait, le fromage et les yaourts

6

Ce groupe comprend les gâteaux, biscuits, pâtisseries, produits chocolatés, glaces et confiseries

7

Pourcentage de consommateurs

8

116

Tableau 13 : Associations entre les sous-échelles d’alimentation intuitive (IES-2) et le grignotage chez les hommes et chez les

femmes

Femmes Hommes

Q1 Q2 Q3 Q4 Q1 Q2 Q3 Q4

OR (IC 95%) OR (IC 95%) OR (IC 95%) P de

tendance

1

OR (IC 95%) OR (IC 95%) OR (IC 95%)

P de

tendance1

Raisons physiques

Référence = grignotage < 1 fois/semaine

Grignotage ≥ 1

fois/semaine Ref 0,62 (0,56-0,67) 0,38 (0,35-0,41) 0,18 (0,17-0,20) <0,0001 Ref 0,52 (0,46-0,60) 0,33 (0,28-0,37) 0,18 (0,15-0,20) <0,0001

Grignotage ≥ 1 fois/jour Ref 0,38 (0,34-0,42) 0,18 (0,16-0,20) 0,08 (0,07-0,09) <0,0001 Ref 0,33 (0,28-0,39) 0,21 (0,17-0,25) 0,11 (0,09-0,13) <0,0001

Référence = Jamais de

grignotage entre les repas sans

avoir faim

Rarement/Parfois Ref 0,63 (0,57-0,69) 0,39 (0,36-0,43) 0,17 (0,15-0,18) <0,0001 Ref 0,63 (0,55-0,73) 0,40 (0,35-0,46) 0,25 (0,22-0,28) <0,0001

Souvent/Toujours Ref 0,18 (0,16-0,21) 0,06 (0,05-0,07) 0,03 (0,02-0,03) <0,0001 Ref 0,24 (0,17-0,32) 0,13 (0,09-0,19) 0,14 (0,11-0,19) <0,0001

Signaux

Référence = grignotage < 1

fois/semaine

Grignotage ≥ 1

fois/semaine Ref 1,01 (0,94-1,09) 0,93 (0,86-1,00) 0,74 (0,69-0,80) <0,0001 Ref 1,07 (0,94-1,21) 1,08 (0,94-1,23) 1,03 (0,90-1,17) 0,73

Grignotage ≥ 1 fois/jour Ref 0,75 (0,68-0,82) 0,66 (0,60-0,72) 0,55 (0,50-0,60) <0,0001 Ref 0,96 (0,80-1,14) 0,84 (0,70-1,02) 0,96 (0,80-1,14) 0,41

Référence = Jamais de

grignotage entre les repas sans

avoir faim

Rarement/Parfois Ref 0,91 (0,84-0,98) 0,76 (0,70-0,82) 0,43 (0,40-0,46) <0,0001 Ref 1,03 (0,91-1,17) 0,93 (0,81-1,05) 0,73 (0,64-0,82) <0,0001

117

Tableau 13 : suite

Femmes Hommes

Q1 Q2 Q3 Q4 Q1 Q2 Q3 Q4

OR (IC 95%) OR (IC 95%) OR (IC 95%) P de

tendance

1

OR (IC 95%) OR (IC 95%) OR (IC 95%)

P de

tendance1

Permission

Référence = grignotage < 1

fois/semaine

Grignotage ≥ 1

fois/semaine Ref 1,12 (1,04-1,21) 1,04 (0,96-1,13) 0,96 (0,89-1,04) 0,0487 Ref 0,96 (0,84-1,09) 0,94 (0,83-1,06) 0,80 (0,70-0,92) 0,0028

Grignotage ≥ 1 fois/jour Ref 1,04 (0,95-1,14) 0,92 (0,83-1,01) 0,89 (0,81-0,98) 0,0014 Ref 0,75 (0,63-0,90) 0,77 (0,65-0,90) 0,65 (0,54-0,78) <0,0001

Référence = Jamais de grignotage

entre les repas sans avoir faim

Rarement/Parfois Ref 1,22 (1,14-1,32) 1,13 (1,04-1,22) 0,88 (0,81-0,95) <0,0001 Ref 1,18 (1,04-1,35) 0,99 (0,88-1,11) 0,86 (0,75-0,97) 0,0053

Souvent/Toujours Ref 1,05 (0,92-1,19) 0,89 (0,77-1,03) 0,65 (0,56-0,75) <0,0001 Ref 0,87 (0,63-1,21) 0,83 (0,62-1,11) 0,82 (0,60-1,13) 0,1848

OR (IC 95%) estimés par un modèle de régression logistique multinomial (polytomique) modélisant le statut pondéral comme une variable dépendante à trois

catégories et la catégorie pas de surpoids (IMC<25 kg/m²) comme référence. Les modèles étaient ajustés sur l’âge, le niveau d’éducation, le statut tabagique et

l’activité physique. Cette analyse a été réalisée sur un sous-échantillon de 30 080 participants (29 113 femmes et 8967 hommes) qui ont complété le

questionnaire sur les conditions des repas.

1

118

3.3 Discussion

La dimension « manger pour des raisons physiques plutôt qu’émotionnelles » était

inversement associée à la consommation de produits gras et sucrés chez les hommes et chez

les femmes. Ces aliments sont très palatables et sont souvent consommés comme snacks

(Bellisle, 2014; Berteus, Torgerson, Sjostrom, & Lindroos, 2005), même sans avoir faim

(Cornell et al., 1989; Fisher & Birch, 2002). Ils sont aussi connus pour être réconfortants

(Gibson, 2012) et vont être consommés préférentiellement par les individus prédisposés à une

consommation déclenchée par une détresse émotionnelle ou un stress. Par définition, la

dimension « raisons physiques » est négativement associée à l’alimentation liée aux émotions.

Une corrélation négative forte entre ces caractéristiques a ainsi été mise en évidence dans un

sous-échantillon de participants de l’étude Nutrinet-Santé lors de la validation du

questionnaire d’alimentation intuitive (Partie III section 2). De plus, nous avons également

montré dans la partie II que l’alimentation liée aux émotions est positivement associée à la

consommation d’aliments de snacking riches en énergie, et en particulier d’aliments gras et

sucrés en accord avec les résultats obtenus ici. Dans cette précédente étude, l’association entre

alimentation liée aux émotions et consommation de ces aliments était plus forte chez les

femmes que chez les hommes. Toujours en accord avec cette précédente étude, nous avons

montré que des scores élevés de « raisons physiques » était également associés à des apports

énergétiques plus faibles chez les femmes. De plus, dans notre étude, le score de « raisons

physiques » était inversement associé à la fréquence de grignotage et à la tendance à grignoter

en dehors des repas sans avoir faim. Le fait de ne pas manger en réponse aux émotions

négatives pourrait par conséquent diminuer le grignotage, et en particulier en l’absence de

faim. Des études contrôlées en laboratoire ont montré que manger un snack sans avoir faim ne

réduisait pas l’apport énergétique au repas suivant et pourrait ainsi perturber la balance

énergétique (Marmonier, Chapelot, & Louis-Sylvestre, 1999; Marmonier, Chapelot, Fantino,

& Louis-Sylvestre, 2002).

Un score plus élevé à la sous-échelle « recourir à ses signaux de faim et de satiété » était

associé à des apports énergétiques plus faibles chez les femmes. Dans la littérature, une

meilleure sensibilité à la satiété a été associée à des apports énergétiques plus faibles chez les

enfants (Carnell & Wardle, 2007) alors qu’il n’existe pas de données comparables chez les

adultes. Observation intéressante, les personnes avec des scores plus élevés pour la

sous-échelle « signaux » consommaient moins de produits laitiers et de viande/poisson/œuf. Les

119

mêmes résultats ont été observés pour la dimension « raisons physiques » mais dans une

moindre mesure et chez les femmes seulement. Les femmes spécifiquement, vont plutôt avoir

tendance à sélectionner des aliments sources de protéines végétales tels que les produits

céréaliers complets et les fruits oléagineux. Par exemple, en France, comme dans de

nombreux pays développés, la consommation en viande est importante (Afssa, 2009) et une

proportion importante des individus, en particulier des hommes, excède la ration

recommandée (InVS, 2007). Dans l’ensemble, les hommes, et d’autant plus les femmes, qui

suivent leurs signaux de faim et de satiété seraient plus susceptibles d’adapter leurs choix

alimentaires à leurs besoins. La dimension « signaux » était également inversement associée à

la tendance au grignotage en dehors des repas sans avoir faim chez les hommes et les femmes

et à la fréquence de grignotage uniquement chez les femmes.

La dimension « permission » est supposée refléter la disposition d’un individu à manger

lorsqu’il a faim sans suivre de règles extérieures et sans aliments interdits (Tylka & Kroon

Van Diest, 2013). Les hommes et les femmes présentant des scores élevés de « permission »

avaient des apports énergétiques plus élevés et un régime alimentaire dans l’ensemble moins

bon pour la santé, mangeant préférentiellement des aliments gras et sucrés ou des

fast-food/pizzas/tartes et nettement moins de fruits et légumes et d’aliments complets. Par contre,

les individus avec des scores plus élevés de « permission » grignotaient moins. Ces résultats

ne sont pas en accord avec les hypothèses formulées par l’alimentation intuitive suggérant que

ce comportement est associé à une meilleure alimentation. Il n’existe pas de données

comparables dans la littérature mais ces résultats peuvent être mis en parallèle de ceux

concernant la restriction alimentaire. La restriction se réfère à un effort conscient des

individus pour restreindre leurs apports dans un but de gestion de poids tandis que la

dimension « permission » encourage l’absence de règles alimentaires et de restrictions. A

juste titre, ces deux concepts étaient fortement négativement corrélés dans l’étude de

validation (Partie III Section 2). En accord avec nos résultats, plusieurs chercheurs ont

rapporté que les personnes fortement restreintes évitaient les aliments gras et sélectionnaient

plutôt des aliments considérés comme sains tels que les fruits et les légumes (de Castro, 1995;

de Lauzon et al., 2004; Tuschl et al., 1990) et avaient des apports énergétiques plus faibles

(Anschutz et al., 2009; Lluch et al., 2000). Bien que la restriction puisse sembler avoir un

impact positif à court terme, sur le long terme, elle peut conduire à une diminution de la

sensibilité aux signaux physiologiques de faim et de satiété et à des cycles de

restriction-désinhibition (Herman & Mack, 1975). De plus, de façon surprenante, des scores plus élevés

120

de « permission » ont été associés à un IMC plus faible dans la littérature (Madden et al.,

2012; Tylka, 2006; Tylka & Kroon Van Diest, 2013) et dans l’étude NutriNet-Santé (Partie III

Section 4). Cependant, seules des études transversales sont disponibles dans la littérature

(Madden et al., 2012; Tylka, 2006; Tylka & Kroon Van Diest, 2013).

Une interprétation possible de nos résultats suggère une causalité inverse. Les individus ayant

un métabolisme dépensant plus d’énergie seraient moins à risque de prendre du poids et

pourraient se permettre de manger de façon inconditionnelle, et par conséquent auraient un

score élevé sur la sous-échelle de « permission » tout en ayant un régime moins bon pour la

santé. Si une fois de plus on établit un parallèle avec les résultats observés pour la restriction

cognitive, une étude a montré que les mangeurs restreints dépensaient moins d’énergie que les

non-restreints, reflétant de moindres besoins en énergie certainement dus à un faible

métabolisme basal ou une faible thermogénèse alimentaire (Tuschl, Platte, Laessle, Stichler,

& Pirke, 1990).

Des limites méthodologiques pourraient aussi expliquer cette incohérence apparente dans nos

résultats. Tout d’abord, il est probable que les méthodes usuelles de mesure des apports dans

les études épidémiologiques ne permettent pas de tenir compte des variations d’une période à

l’autre correspondant aux cycles de restriction-désinhibition. Une autre limite méthodologique

correspond au fait qu’on ne peut pas exclure le fait que les personnes présentant une forte

restriction cognitive, qui par conséquent devraient avoir des scores faibles de « permission »,

sont davantage sujettes à une sous-déclaration importante (Asbeck et al., 2002) en

comparaison à des personnes avec des scores élevés de « permission ». Plus particulièrement,

ces personnes sont aussi sûrement davantage sujettes à l’auto-jugement, ce qui pourrait

entraîner un risque d’omission consciente ou inconsciente de certains aliments en particulier

et une sous-estimation des portions d’aliments gras et sucrés et, à l’inverse, une surestimation

des aliments considérés comme sains. Enfin, la sous-échelle « permission » nécessite

peut-être d’peut-être affinée. En effet, elle n’inclut que quatre items dans la version française et était la

sous-échelle la plus fragile à l’issue de l’étude de validation. De plus, elle a été modifiée entre

l’IES-T, l’IES-2 et la version française (Partie III Section 2).

Enfin, il est aussi possible que dans un environnement d’abondance, avec des aliments riches

en énergie facilement accessibles et très palatables, un certain niveau de contrôle soit

nécessaire pour manger plus sainement (Hollmann et al., 2012). Tout au moins, la

« permission » ne devrait pas aller sans une bienveillance vis-à-vis du corps. Par conséquent,

121

l’ajout de cette notion de bienveillance vis-à-vis des besoins du corps à la dimension

« permission » semble nécessaire afin qu’elle puisse mesurer une attitude positive. Dans sa

forme actuelle, elle semble plutôt mesurer une attitude désinvolte vis-à-vis de l’alimentation.

Cependant, nos résultats ne remettent pas en question l’effet bénéfique de la « permission »

chez les personnes obèses et/ou présentant des troubles du comportement alimentaire. Chez

ces personnes particulièrement préoccupées par la nourriture, cette « permission » pourrait

être une première étape nécessaire avant d’être capable d’écouter leurs signaux

physiologiques.

122

4 Alimentation intuitive et statut pondéral15

L’objectif de cette étude est d’évaluer les associations entre l’alimentation intuitive, ses

dimensions, et le statut pondéral. L’effet modificateur du sexe a également été testé.

4.1 Méthodes

4.1.1 Population

Parmi les 101 345 participants ayant reçu le questionnaire d’alimentation intuitive

précédemment validé en français, 53 353 l’ont complété entre décembre 2013 et juin 2014.

1150 femmes enceintes et 40 participants avec des données manquantes pour le poids et/ou la

taille ont été exclus. Ainsi, un total de 40 389 femmes et 11 774 hommes ont été inclus dans

cette analyse.

4.1.2 Analyses statistiques

Les individus ont été répartis en quatre groupes suivant les quartiles de distribution des scores

d’alimentation intuitive et de ses trois sous-échelles, spécifiques à chaque sexe (Tableau 14).

Tableau 14Quartiles de scores d’alimentation intuitive

Sexe Scores Médiane Q1 Q2 Q3 Q4

Hommes Alimentation intuitive 3,56 1,11-3,17 3,17-3,56 3,56-3,89 3,89-5,00

Raisons physiques 4,00 1,00-3,38 3,38-4,00 4,00-4,63 4,63-5,00

Signaux 3,17 1,00-2,67 2,67-3,17 3,17-3,83 3,83-5,00

Permission 3,25 1,00-2,50 2,50-3,25 3,25-3,75 3,75-5,00

Femmes Alimentation intuitive 3,28 1,00-2,78 2,78-3,28 3,28-3,72 3,72-5,00

Raisons physiques 3,38 1,00-2,63 2,63-3,38 3,38-4,13 4,13-5,00

Signaux 3,33 1,00-2,67 2,67-3,33 3,33-3,83 3,83-5,00

Permission 3,00 1,00-2,50 2,50-3,00 3,00-3,75 3,75-5,00

Les individus appartenant aux quatre groupes définis selon les quartiles de distribution du

score d’alimentation intuitive ont été comparés à l’aide d’analyses de la variance et de tests de

15

Cette section a fait l’objet d’une publication (en révision) : Camilleri GM, Méjean C, Bellisle F, Andreeva