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L’introduction d’une étape supplémentaire de dérivation pour améliorer la sensibilité de la méthode de dosage va également constituer un point clef critique, où les paramètres tels que rendement de la réaction, élimination des réactions parasites, reproductibilité, facilité de mise en œuvre vont être cruciaux pour la mise en place d’une méthode simple et efficace. Aussi un nombre impressionnant de travaux sont publiés chaque année décrivant l’amélioration d’une méthode existante ou une nouvelle méthode, plus directe, plus propre ou

permettant d’atteindre des limites de détection plus faibles. Les méthodes

chromatographiques (GC, HPLC) sont généralement utilisées pour la séparation de ces dérivés (Stalikas et Konidari, 2001).

Dans cette partie bibliographique, nous nous focaliserons sur les méthodes utilisant la HPLC, plus facilement compatibles pour des échantillons aqueux, qui permettent des dérivations pré- ou post-colonnes directement dans les échantillons aqueux, automatisables et qui ont donc un plus grand essor à l’heure actuelle. Pour plus d’informations sur les méthodes utilisant la CPG, cf. la revue de Stalikas et Konidari (2001).

II.2.1 Dérivations post-colonne

Le protocole préconisé par l’EPA (Méthode 547, 1990), basé sur la méthode développée par Moye et al. (1983), consiste en une approche post-colonne de dérivation par l’o-phtalaldéhyde (Figure 52) en présence de 2-mercaptoéthanol (OPA-ME) après oxydation du glyphosate en glycine, et après séparation sur colonne échangeuse de cations.

O O

Figure 52 : Structure de l’o-phtalaldéhyde

Les limites de détection reportées pour l’analyse de ce dérivé fluorophore du glyphosate sont de 6 µg/L dans les eaux de boisson et de 9 µg/L dans les eaux de surface (Mallat et Barcelo, 1998). Cette faible sensibilité peut être expliquée par le fait que les échantillons naturels sont injectés directement sans étape d’extraction ou de concentration préalable. De plus, les sels présents dans l’échantillon risquent d’endommager la colonne échangeuse de cations. Mallat et Barcelo (1998) ont amélioré cette méthode en mettant en place des étapes de lavage et de pré-concentration de l’échantillon par extractions en phase solide (SPE) avec passages successifs sur une cartouche polymérique (LiChrolut EN), puis

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104 sur une cartouche échangeuse d’anions (OH-, Amberlite) avant analyse. Le protocole de dérivation a également été légèrement modifié en utilisant de la N,N-diméthyl-2- mercaptoéthylamine à la place du mercaptoéthanol. Ces auteurs obtiennent ainsi des limites de détection de l’ordre de 2 et 4 µg/L pour le glyphosate et l’AMPA respectivement. Patsias et al. (2001) ont automatisé cette méthode en mettant en ligne l’extraction en phase solide sur colonne échangeuse d’anions, la chromatographie par échange de cations suivie de la dérivation post-colonne par OPA-ME et la détection par fluorescence (SPE-LC-FD). Après optimisation des différentes étapes, les limites de détection atteintes sont de 0,02 µg/L pour le glyphosate et de 0,1 µ g/L pour l’AMPA (le pourcentage de récupération pour le métabolite notamment lors de l’étape de SPE, restant faible).

Un autre procédé post-colonne de dosage indirect du glyphosate a été décrit (Lovdahl et Pietrzyk, 1992). La 3,5,7,2’,4’-pentahydroxyflavone (morine) forme avec les ions Al3+ (et d’autres ions métalliques) des complexes fluorescents. Cette méthode est utilisée pour déterminer la concentration en ions Al3+dans des eaux naturelles. En présence d’ions phosphate, l’émission de fluorescence diminue linéairement avec la quantité de phosphates présents dans l’échantillon. L’utilisation de ce réactif peut donc permettre de corréler l’intensité de la fluorescence à la quantité de glyphosate présent. Les limites de détection pour le glyphosate et l’AMPA, séparés sur colonne échangeuse d’anions, sont de 14 et 40 ng/L respectivement.

II.2.2 Dérivations pré-colonne

Les protocoles pré-colonne décrits sont essentiellement basés sur la dérivation avec le chloroformate de 9-fluorénylméthyle (Fmoc-Cl). Connu comme un bon groupement protecteur des amines, il réagit aussi bien avec les amines primaires que secondaires. La réaction de dérivation doit se dérouler en milieu basique (Figure 53).

ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE –Méthodes de dosage de la sulcotrione et de la mésotrione ou du glyphosate P NH COOH OH O HO + Borate O O N HOOC P -O O -O + HCl Glyphosate - Fmoc Glyphosate Fmoc-Cl O O Cl

Figure 53 : Réaction de dérivation du glyphosate par le groupement Fmoc-Cl

L’inconvénient majeur de cette méthode de dérivation est la forte réactivité du Fmoc- Cl avec l’eau, qui conduit à la formation de Fmoc-OH. Il faut donc mettre le réactif en large excès pour obtenir un bon rendement de dérivation. Mais le Fmoc-OH formé en grande quantité va donner un pic très large au début du chromatogramme qui peut interférer ou même complètement occulter le signal du dérivé du glyphosate ou du dérivé du AMBA selon les conditions chromatographiques. Des étapes d’extraction par un solvant organique ont été incluses dans le protocole pour éliminer les impuretés organiques du milieu, mais aussi l’excès de réactif. Cependant le Fmoc-OH n’est pas éliminé par cette technique. Les premiers essais ont été réalisés en utilisant une détection UV ou par fluorescence (Glass, 1983, Sancho et al., 1996), la limite de détection décrite étant de 0,4 µg/L pour le glyphosate.

De nombreux travaux ont donc porté d’une part, sur l’optimisation du protocole de dérivation et d’autre part, sur des améliorations de séparation du pic parasite de Fmoc-OH et des composés d’intérêt, tout ceci afin d’améliorer la détection et la quantification du glyphosate et du AMPA. Des études systématiques de chaque point du procédé de dérivation ont été réalisées (Le Fur et al., 2000 ; Le Bot et al., 2002 ; Nedelkoska et Low, 2004): rapport molaire échantillon/Fmoc-Cl ; concentration des différents réactifs ; temps de réaction ; choix du solvant d’extraction ; stabilité du complexe… Il a fallu également mettre en place des étapes préliminaires de traitement des échantillons naturels afin d’éliminer les possibles interférences des constituants du milieu sur la dérivation : élimination des ions divalents

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106 (Cu2+, Ca2+, Mg2+) par addition d’EDTA (Le Fur et al., 2000) ; contrôle de la force ionique du milieu par piégeage des ions sur SPE (Le Bot et al., 2002), … L’optimisation de la méthode d’analyse afin de séparer le pic du dérivé AMPA de celui du Fmoc-OH a également été réalisée en comparant divers types de phases stationnaires : colonne C18 classique, colonne amino greffée sur silice (Le Bot et al., 2002) ou polymérique (Nedelkoska et Low, 2004). Dans les meilleures conditions de dérivation et de séparation (colonne amino), les limites de détection obtenues sont de 0,025 µg/L et de 0,05 µg/L pour le glyphosate et l’AMPA respectivement (Le Bot et al., 2002). Toutefois il subsiste un problème lié à la durée de vie de la colonne analytique, qui ne supporte pas plus de 150-200 injections (problème de pH trop alcalin pour la phase ; réaction possible du Fmoc-Cl en excès avec les groupements amino de la phase ; saturation par Fmoc-OH…).

Une autre approche a été développée par Hidalgo et al. (2004) et Nedelkoska et Low (2004) : la LC-LC-détecteur à fluorescence. Les auteurs utilisent deux colonnes analytiques placées en série : la première (colonne C18 ou amino) permet de séparer le Fmoc-OH des dérivés glyphosate et AMPA ; la seconde colonne analytique (colonne amino) permet de séparer les dérivés formés d’intérêt. Nedelkoska et Low (2004) ont même placé une vanne entre les deux colonnes permettant d’éliminer le Fmoc-OH séparé sur la première colonne et de protéger ainsi la deuxième colonne (Figure 54).

Figure 54 : Montage en série de deux colonnes analytiques (C1 et C2) séparées par une vanne. C1 sépare le Fmoc-OH qui est dirigé vers la poubelle et le reste de la fraction de l’échantillon à analyser est envoyé vers

C2 (d’après Nedelkoska et Low, 2004).

Ce système permet d’injecter un volume plus important (2 mL) et d’espérer une meilleure quantification par fluorescence. Les auteurs ont également testé un procédé de pré-

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concentration des échantillons naturels faisant appel à une cartouche SPE échangeuse d’anions. Cette nouvelle méthode permet d’obtenir des limites de quantification en glyphosate de 0,1 µg/L pour un échantillon non concentré, et de 0,02 µg/L pour un échantillon concentré.

Une autre stratégie pour essayer d’améliorer la sensibilité de la méthode de dosage est de travailler avec un détecteur plus spécifique et plus performant comme la spectrométrie de masse. Vreeken et al. (1998) ont développé une méthode SPE/LC-ESI-MS/MS en ligne qui permet d’identifier et quantifier le glyphosate et l’AMPA dans différents échantillons d’eau, sur la base du temps de rétention et du rapport constant de trois ions sélectionnés pour chaque composé. La dérivation a lieu directement dans l’échantillon aqueux avant pré-concentration sur cartouche SPE, séparation sur une colonne C18 et analyse par MS/MS en mode négatif. Les limites de détection sont de 0,03 µg/L pour le glyphosate et l’AMPA. Lee et al. (2002) ont obtenu une meilleure reproductibilité en travaillant en LC/MS simple quadripôle, mais en utilisant un standard marqué du glyphosate (2-13C, 15N) comme référence interne, minimisant ainsi les variations liées à la dérivation et aux effets de matrice. Ibanez et al. (2005, 2006) ont optimisé les paramètres MS/MS travaillant cette fois-ci en mode positif, deux fois plus sensible que le mode négatif, toujours en présence d’un étalon interne marqué (glyphosate 1,2-13C, 15N). Ces auteurs ont également basé leur quantification sur la transition la plus sélective pour chaque composé afin d’éviter les interférences avec d’autres ions. Après optimisation de la méthode de préparation des échantillons (mise en place d’une première étape d’acidification), ils ont pu ainsi atteindre une limite de détection de 5 ng/L et une limite de quantification de 50 ng/L pour le glyphosate et l’AMPA dans des échantillons d’eaux naturelles issues de différentes sources.

Le dosage de pesticides dans des échantillons de boues d’épuration est particulièrement difficile à réaliser du fait de la complexité de ces milieux. Une approche originale a été récemment décrite mettant en jeu une réaction de dérivation in situ par le Fmoc-Cl après fixation des analytes sur un support solide adéquat (résine échangeuse d’anions SAX). Après mise au point des conditions de dérivation (pH de la résine, temps de réaction, volume et concentration de la solution du réactif, conditions d’élution) et d’analyse par LC/ESI-MS/MS en mode positif, les auteurs ont pu atteindre des limites de détection de 20 et 30 µ g/L et des limites de quantification de 35 et 50 µ g/L pour le glyphosate et l’AMPA respectivement, dans des boues d’épuration (Ghanem et al., 2007).

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108 Il faut noter que d’autres agents de dérivation ont été testés comme le 1-fluoro-2,4- dinitrobenzène (Lundgren, 1986), le chlorure de l’acide p-toluènesulphonique (Khrolenko et Wieczorek, 2005) ou le 4-chloro-7-nitrobenzofurazane (Colin et al., 2000 ; Duran Meras et al., 2005). Ils réagissent avec le groupement amine du glyphosate et de l’AMPA en milieu basique et les dérivés formés sont détectés par fluorescence (Figure 55). Cependant, les limites de détection obtenues sont toujours bien supérieures aux normes européennes en matière de potabilité. Cl NO2 N O N 4-Chloro-7-nitrobenzofurazane (NBD-Cl) O2N NO2 F 1-Fluoro-2,4-dinitrobenzène S O O Cl

Chlorure d'acide p-toluènesulphonique

Figure 55 : Structures de réactifs de dérivation du glyphosate

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