• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 2 : SYNTHÈSE BIBLIOGRAPHIQUE - ASPECT THÉORIQUE

2.2 Changement d’échelle et prise de moyenne volumique

2.2.2 La méthode de prise de moyenne volumique

La méthode de prise de moyenne volumique (e.g.: Whitaker, 1999) repose sur l’utilisation d’un opérateur de prise de moyenne sur un volume convenablement choisi du milieu considéré à l’échelle microscopique. L’application de cet opérateur aux équations gouvernant le phénomène considéré à l’échelle microscopique, associée à l’utilisation de différents théorèmes régissant les relations entre l’opérateur de prise de moyenne volumique et les opérateurs classiquement utilisés en physique (gradient spatial, divergence, dérivée temporelle) permet d’arriver à l’expression générale des équations de conservation à l’échelle d’observation considérée. Ces équations macroscopiques ainsi développées sont in. fine exprimées en terme des moyennes spatiales (ou d’ensemble) des processus eux mêmes Les paramètres associés à ces équations macroscopiques sont calculés par la résolution de problèmes de fermeture établis à l’échelle microscopique et définis sur le volume de prise de moyenne ou V.E.R (Volume Elémentaire Représentative), en pratique sur une cellule unitaire représentative des propriétés du milieu à l’échelle microscopique. Ces instruments mathématiques sont présentés ci dessous, ainsi que les contraintes à satisfaire pour que leur utilisation soit pertinente.

a) L’opérateur de prise de moyenne volumique

Les définitions mathématiques rigoureuses de l’opérateur de prise de moyenne volumique et des théorèmes de composition qui lui sont associés peuvent, par exemple, être trouvées dans Whitaker (1999) ou Quintard (1993). Ici on introduira ces notions en les développant pour notre cas d’application : le transport de soluté biologiquement actif en milieu poreux incluant une phase biofilm. On peut voir sur la Figure 7 les échelles considérées dans ce travail, ainsi que les longueurs caractéristiques qui leurs sont associées, dans le cas où l’on a des hétérogénéités à grandes échelles telles que des failles.

Figure 7 : Echelle du pore et du biofilm : longueurs caractéristiques et contraintes de séparation des échelles

À l’échelle du pore (échelle microscopique), le milieu est constitué de trois phases, considérées comme continues mais distinctes dans l’espace : la phase fluide (phase γ ), la phase biofilm (phase

ω

) et la phase solide (phase κ). À l’échelle de Darcy (échelle macroscopique), on considère que ces trois phases sont des continua interconnectés et définis en tous points de l’espace. On considère le transport d’un soluté A dans ce milieu triphasique : on note cAγ (resp. cAω) la concentration à l’échelle microscopique dans la phase fluide (resp. dans la phase biofilm). La concentration en soluté n’est pas définie dans la phase solide. L’application de l’opérateur de prise de moyenne volumique, noté , à ces deux grandeurs

microscopiques sur un volume V convenablement choisi permet de définir les concentrations globales à l’échelle macroscopique :

1 A A V c c dV V γ γ =

γ (1) 1 A A V c c dV V γ ω =

ω (2)

Ici Vγ (resp. Vω) représente le volume de phase fluide (resp. de phase biofilm) contenu dans le volume de prise de moyenne V . Pour que cAγ et cAω soient effectivement des grandeurs significatives des concentrations en soluté A dans chaque phase à l’échelle de Darcy, il faut que la longueur caractéristique du volume de prise de moyenne V , à savoir son rayon R, respecte la contrainte de séparation des échelles (Whitaker, 1999), qui peut être exprimée de la manière suivante :

, , k

lγ lω l ≪R≪L (3)

En d’autres termes, la longueur caractéristique du volume V doit être très grande devant les longueurs caractéristiques des hétérogénéités à l’échelle microscopique et très petite devant la longueur caractéristique des hétérogénéités à l’échelle macroscopique. Cette condition est illustrée en Figure 7. C’est la loi d’échelle (scaling. law) qui permet le filtrage des informations pertinentes à l’échelles de Darcy à partir de la masse d’informations disponibles à l’échelle du pore (e.g.: Wood, 2009). Si cette condition est respectée, les grandeurs cAγ et

A

c ω sont appelées les concentrations moyennes globales des phases fluide et biofilm.

b) Théorèmes de prise de moyenne volumique

Afin de pouvoir appliquer l’opérateur de prise de moyenne volumique aux équations de transport de l’échelle microscopique, il reste à définir les lois de composition entre cet opérateur et les différents opérateurs différentiels classiques : gradient, divergence et dérivée

temporelle. On utilise pour cela trois théorèmes dont la validité est assujettie au respect de la contrainte de séparation des échelles. Ils sont rappelés brièvement ici, dans le contexte de notre problème.

Théorème de prise de moyenne spatiale scalaire (Howes and Whitaker, 1985 ; Gray et.al.,

1993) : On considère la composition de l’opérateur gradient d’une fonction scalaire (par exemple la concentration microscopique dans la phase fluide cAγ) par l’opérateur de prise de moyenne volumique. 1 1 A A A A A A c c c dA c dA V V γω γκ γ γ γ γω γ γκ ∇ = ∇ +

n +

n (4)

où Aγi, (i=ω κ, )désignent les interfaces fluide biofilm et fluide solide respectivement, et

, ( , )

i i

γ =ω κ

n désignent les normales aux interfaces fluide biofilm et fluide solide

respectivement, orientant la surface du domaine fluide vers l’extérieur.

Théorème de prise de moyenne spatiale vectorielle (ibid.) : Ce théorème permet d’inverser l’opérateur divergence d’une fonction vectorielle (par exemple le produit du champ de vitesse microscopique défini dans la phase fluide vγ et du champ de concentration microscopique dans cette même phase) avec l’opérateur de prise de moyenne volumique. Cette relation peut s’exprimer sous la forme :

( )

1

( )

1

( )

. A A A . A . A A c c c dA c dA V V γω γκ γ γ γ γ γ γ γ γ ∇ v = ∇. v +

v nγω +

v nγκ (5)

Théorème général de transport (Whitaker, 1981) : on considère la composition de l’opérateur dérivée temporelle d’une fonction scalaire (par exemple la concentration microscopique dans la phase fluide cAγ) avec l’opérateur de prise de moyenne volumique :

1 1 A A c c γγ

∫ ∫

Ici les vγi, (i=ω κ, ) représentent les vitesses de déplacement des interfaces fluide biofilm et fluide solide respectivement. Comme l’on ne considère pas de dissolution de la phase solide, ni de phénomène de précipitation, et que la croissance du biofilm est un phénomène supposé très lent par rapport aux phénomènes de transports étudiés (voir le chapitre 1 et le paragraphe 2.4 pour plus de détails sur les hypothèses associées au problème considéré), on a

κ = ω =

γ γ

v v 0. On peut alors simplifier le théorème précédent de la manière suivante et on obtient : A A c c t t γ γ ∂ ∂ = ∂ ∂ (7)

c) Procédure générale d’établissement des équations macroscopiques

En appliquant l’opérateur de prise de moyenne volumique aux équations de transport à l’échelle du pore, et en appliquant les théorèmes de moyenne présentés ci dessus, on obtient la formulation générale des équations régissant les moyennes globales des concentrations dans le milieu, équations qui sont définies à l’échelle de Darcy. Néanmoins ces équations ne sont pas fermées au sens où elles font encore intervenir les champs de concentrations microscopiques. La procédure aboutissant à ce système d’équations macroscopiques ouvert est présentée dans la partie suivante de ce chapitre.

Afin d’identifier les contributions respectives des grandeurs macroscopiques et des grandeurs microscopiques, il est intéressant d’utiliser une décomposition des champs microscopiques considérés comme des sommes de leurs valeurs moyennées et d’un terme de déviation autour de ces moyennes. Tout d’abord,, il est nécessaire de définir la notion de grandeur moyenne intrinsèque,i.e.: la valeur moyenne réelle de la variable considérée dans la

phase où elle est définie. En considérant les fractions volumiques de fluide εγ et de biofilm ω ε , données par V V γ γ ε = (8) V V ω ω ε = (9)

Les concentrations moyennes intrinsèques cAγ γ et cAω ωpeuvent être définies sous la forme 1 A A A V c c c dV V γ γ γ γ γ γ γ ε = =

(10) 1 A A A V c c c dV V ω ω ω ω ω ω ω

ε

= =

(11)

Ces concentrations moyennes intrinsèques sont utilisées dans la décomposition des champs de concentrations microscopiques, nommée décomposition de Gray (Gray et. al., 1993) sous la forme d’une somme de leur moyenne et d’une déviation:

A A A

c γ = c γ γ +cɶ γ (12)

A A A

c ω = c ω ω +cɶ ω (13) On appelle champ de déviation des concentrations dans la phase fluide (resp. biofilm) le champ cɶAγ (resp. cɶAω), qui est défini à l’échelle microscopique. On peut définir de manière similaire une décomposition de Gray du champ de vitesse microscopique :

γ γ = γγ

v v v (14)

En introduisant ces décompositions dans les équations moyennées précédemment obtenues, on arrive à un système d’équations régissant les grandeurs moyennes intrinsèques et dont les

qu’à relier ces termes de déviations (qui sont des termes microscopiques) à des termes sources macroscopiques. Pour ce faire, on soustrait les équations macroscopiques aux équations microscopiques de manière à obtenir les équations régissant ces champs de déviations. De ces équations de déviations, on tire alors l’expression des problèmes de fermeture, qui, résolus sur le volume de prise de moyenne ou sur une cellule unitaire représentative des propriétés du milieu poreux à l’échelle du pore, permettent de calculer les paramètres des équations macroscopiques de transport. Il reste à définir une notion importante qui concerne les problèmes de changement d’échelle lorsque des hétérogénéités apparaissent : la notion. d’équilibreou denon.équilibre.de.masse.local. En pratique, l’hypothèse d’équilibre de masse local revient à supposer que les concentrations moyennes intrinsèques propres à chaque phase ( cAγ γ et cAω ω) sont pratiquement similaires et qu’une seule et même concentration macroscopique (et donc une seule équation de transport) permet de caractériser le milieu. À l’opposé, si cette hypothèse n’est pas vérifiée, ces deux concentrations moyennes, bien que couplées, sont distinctes et deux équations macroscopiques interdépendantes sont généralement requises. Dans notre cas, la présence éventuelle de gradients de concentration à l’interface fluide biofilm due aux processus de réaction et de diffusion peut conduire à des conditions de non équilibre. Nous montrerons toutefois par la suite que sous certaines hypothèses simplificatrices (limitation de la réaction par la cinétique ou le transfert de masse), ces deux équations peuvent être simplifiées. À ce stade de l’analyse et en fonction des hypothèses émises (équilibre local ou non, limitation éventuelle), nous obtenons l’expression du modèle macroscopique final de transport bioréactif qui gouverne notre problème. Nous reviendrons plus en détails sur le développement de ces modèles d’équilibre ou de non équilibre local dans les chapitres suivants. Notons simplement que l’essentiel du travail théorique effectué pour le développement des modèles de transport par changement d’échelle présentés ci après, consiste en l’établissement des équations de transport macroscopiques et

des problèmes de fermeture associés, tandis que l’essentiel de l’effort numérique a porté sur la résolution des problèmes de fermeture.

2.3 Modèle à l’échelle du pore et équation de transport ouverte à l’échelle de