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2.3 Méthodes globales

2.3.3 Méthodes de screening

2.3.3.2 Méthode de Morris

La méthode de Morris [8] est une méthode permettant de savoir si un paramètre a un effet négligeable, linéaire, non-linéaire et/ou en interaction avec d’autre(s) paramètre(s).

Cette méthode calcule les effets élémentaires associés à chaque paramètre d’entrée pour un modèle contenant k paramètres indépendants Xi, i = 1, ..., k, qui évoluent dans un hypercube

unitaire Ω, de dimension k discrétisé en p niveaux différents. En pratique, les valeurs de Ω sont ajustées afin de correspondre aux valeurs réelles parcourues par les paramètres d’entrée grâce à la transformation intégrale de probabilité [9].

L’effet élémentaire du ième paramètre sur la sortie F est défini par :

di(X) = F (X1, X2, ..., Xi−1, Xi+ ∆, ...Xk) − F (X1, X2, ..., Xk)

, (2.7)

où ∆ est une valeur de l’ensemble {p−11 ,p−12 ..., 1 −p−11 }, X = (X1, ..., Xk) est une valeur de Ω

telle que le point modifié (X + ei∆) est toujours dans Ω quel que soit i = 1, ..., k, et ei est un vecteur contenant la valeur 1 à sa ième composante et des zéros sinon.

Le calcul de ces différents effets élémentaires est effectué avec plusieurs X de Ω pour obtenir une distribution finie des effets élémentaires pour chaque paramètre appelée Fi. Chaque Fi est

composé de pk−1[p − ∆(p − 1)] éléments. Les indicateurs de sensibilité proposés par Morris sont des estimations de la moyenne et de l’écart-type de ces Fi.

Afin de calculer les effets élémentaires de chaque paramètre, on commence par créer une trajectoire. Les différentes étapes de la création de cette trajectoire sont [10] :

– Un vecteur initial X∗ dont les composantes sont des valeurs de l’ensemble

{0,p−11 ,p−12 , ..., 1} est généré aléatoirement. Ce vecteur initial sert uniquement pour l’ini-

tialisation de la trajectoire.

– Le premier point de la trajectoire, X(1), est obtenu en augmentant une ou plusieurs des composantes de Xpar ∆ de manière à ce que X(1) soit toujours dans Ω.Les composantes modifiées sont choisies arbitrairement.

– Le deuxième point, X(2) est également généré grâce au vecteur X∗ avec la propriété, en plus de faire partie de Ω, d’être différent de X(1) sur sa ième composante uniquement de plus ou moins ∆. i est choisi arbitrairement dans {1, ..., k}.

– Le troisième point, toujours généré par X, a pour propriété d’être différent de X(2) seulement sur sa jème composante avec i , j. j est choisi arbitrairement.

– Les points suivants sont générés de la même manière jusqu’à ce que toutes les composantes aient été modifiées.

Les trajectoires générées sont ainsi composées de (k+1) vecteurs ayant la propriété que deux vecteurs consécutifs ne différent que d’une seule composante et de plus que chaque composante

i de X∗ ait été modifiée exactement une fois, ce qui permet de calculer un effet élémentaire

par paramètre et par trajectoire. Par exemple, on peut voir le tracé de trois trajectoires pour un espace de conception à trois paramètres et à quatre niveaux sur la figure 2.6. Le nombre de trajectoires est défini par l’utilisateur ainsi que le nombre de niveaux qui définit les valeurs pouvant être prises par chacun des paramètres.

Les effets élémentaires calculés sont donc pour deux vecteurs consécutifs X(l) et X(l+1) :

di(X(l)) = [F (X

(l+1)) − F (X(l))]

∆ (2.8)

si la ième composante de X(l) a été augmentée de ∆ ou

di(X(l)) = [F (X

(l)) − F (X(l+1))]

∆ (2.9)

si la ième composante a été diminuée de ∆.

Figure 2.6: Exemples de trajectoires pour trois paramètres

Les indicateurs de sensibilité proposés par Morris pour le paramètre Xisont les estimations de la moyenne (µ) et de l’écart-type (σ) des Fi. La moyenne évalue l’influence générale du paramètre sur la réponse d’intérêt tandis que l’écart-type permet de voir si l’effet est plutôt linéaire ou non ou s’il existe des effects de couplages entre les paramètres. En effet une forte valeur de l’écart-type indique que le point de calcul influe grandement l’effet élémentaire tandis qu’une faible valeur de σ implique que les valeurs prises par di(X) sont quasiment indépendantes

de la valeur des autres paramètres.

On estime la moyenne et l’écart-type des Fi en utilisant les différentes trajectoires r per-

mettant de calculer les effets élémentaires. Ainsi si d(r)i est l’effet élémentaire du paramètre i calculé lors de la re trajectoire, on aura pour un nombre R de trajectoires :

µi= R X r=1 d(r)i R (2.10) σi= v u u t R X r=1 (d(r)i − µi)2 R − 1 (2.11)

L’utilisation de µ peut poser problème au cas où l’effet élémentaire change de signe (cas de modèles non-monotones ou lorsqu’il y a des effets d’interaction), c’est pourquoi Campolongo et

al. [11] ont proposé d’utiliser l’estimateur µ∗ qui représente la moyenne de la valeur absolue de

di. L’utilisation de µ∗ est préférable pour classer les paramètres selon leur sensibilité.

Morris estime qu’une bonne valeur pour ∆ est ∆ = 2(p−1)p . Puisque p et ∆ sont liés, il faut choisir le nombre de niveaux p, et le nombre de trajectoires r. Il s’agit ici d’un problème ouvert : en effet si r est trop petit, il se peut que les paramètres ne parcourent pas suffisamment l’espace de conception si p est élevé, mais des valeurs trop grandes pour p et r augmentent notablement le temps de calcul. Le nombre d’évaluations du modèle dépendra du nombre de trajectoires r et de paramètres d’entrée k mais pas du nombre de niveaux choisis, celui-ci permettant d’affiner les effets élémentaires pouvant être calculés. Ce nombre d’évaluation vaut : C = r.(k + 1) puisque qu’il y a k + 1 vecteurs par trajectoire.

Lorsque les indicateurs sont évalués, on peut les représenter dans un plan (µ, σ), (figure 2.7), ce qui permet la classification des paramètres : un effet négligeable (a) (µ et σ faibles), linéaire (b) (µ élevé et σ faible) ou non linéaire et/ou en interaction avec d’autre(s) paramètre(s) (c) (µ et σ élevés).

Figure 2.7: plan (µ, σ)

La figure 2.8 présente les résultats obtenus avec la méthode de Morris avec 50 trajectoires et 20 niveau pour l’écart sur la valeur de la quatrième fréquence propre. On peut observer que pour cette réponse d’intérêt les paramètres les plus influents sont le module d’Young de la troisième zone et la masse volumique de la quatrième zone.

La méthode de Morris permet également de faire un classement des paramètres en fonction de leur influence sur toutes les réponses sélectionnées. Le classement prend en compte seulement la moyenne des effets élémentaires µ∗. La figure 2.9 présente le classement des paramètres prenant en compte toutes les réponses du système sur laquelle les paramètres les plus influents sont à nouveau le module d’Young de la troisième zone et la masse volumique de la quatrième zone.

Dans le cas où on a un µet un σ élevés, la méthode de Morris ne permet pas de faire la distinction entre un effet de couplage entre plusieurs paramètres ou un effet non-linéaire,

Figure 2.8: Représentation de l’influence en moyenne et en écart-type des paramètres d’entrée sur la quatrième fréquence propre du GARTEUR estimée par la méthode de Morris

Figure 2.9: Classement des paramètres selon leur influence par la méthode de Morris

pour déterminer la nature de l’effet il faut mener une autre analyse plus précise. Cette méthode est très utile lorsqu’il y a un grand nombre de paramètres puisqu’elle permet d’identifier assez rapidement lesquels sont les plus influents et ainsi de fixer des valeurs pour les autres para- mètres afin de mener une méthode plus coûteuse mais avec moins de paramètres pour estimer l’importance des paramètres les plus influents sur les fonctions d’intérêt.

Afin de vérifier l’influence du nombre de trajectoire sur les résultats obtenus, la figure 2.10 présente les mêmes résultats que les figures 2.8 et 2.9 mais avec 25 trajectoires à la place des 50 utilisées précédemment. Les conclusions générales quant aux paramètres les plus influents ne sont pas différentes mais on peut observer que les influences sont légèrement différentes. Ainsi lors de l’utilisation de la méthode de Morris, le nombre de trajectoires doit être choisi soigneusement.

Figure 2.10: Résultats de la méthode de Morris avec 25 trajectoires