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2.3 Méthodes de correction de l’effet Čerenkov

2.3.2 Méthode de décomposition spectrale

La méthode spectrale a été proposée par Fontbonne et al. en 2002 et a été décrite explicitement par Frelin et al. en 2005 [62, 63]. Cette méthode consiste à exploiter la différence marquée entre le spectre d’émission d’un scintillateur et le spectre du rayonne- ment Čerenkov pour découpler ces deux signaux et obtenir une mesure proportionnelle à la quantité de scintillation produite par le scintillateur. Nous présentons dans ce qui suit une description détaillée de cette méthode puisque celle-ci sera utilisée tout au long de ce travail. Notons que cette méthode fut, à l’origine, proposée pour un dosimètre composé d’une fibre scintillante couplée à une fibre optique.

Puisque l’effet d’étouffement des scintillateurs plastiques peut être négligé aux éner- gies mégavoltages, le nombre de photons de scintillation collectés dans la fibre optique par unité de longueur d’onde est proportionnel à la dose déposée, D, à la position du

scintillateur et peut être exprimé comme suit :

Ls(λ) = ks· D · S(λ), (2.3)

où S(λ) est le spectre d’émission normalisé du scintillateur, λ est la longueur d’onde et ks est une constante. D’autre part, l’intensité collectée, C, du rayonnement Čerenkov

produit dans la fibre optique dépend de nombreux paramètres inconnus tels que la longueur de fibre optique irradiée, la direction d’incidence du faisceau, la dose déposée, etc. Puisque le spectre d’émission du rayonnement Čerenkov varie comme l’inverse de la longueur d’onde au carré, le nombre de photons collectés dans la fibre optique par unité de longueur d’onde peut être exprimé comme :

LC(λ) =

C

λ2. (2.4)

Une fois émis, les photons sont guidés dans la fibre optique jusqu’à la sortie. En sup- posant que la scintillation et le rayonnement Čerenkov sont produits suffisamment près l’un de l’autre pour que leurs parcours optiques soient identiques, la luminosité totale émanant de la fibre optique, L(λ), peut alors être exprimée comme la somme des deux spectres d’émission pondérée par l’atténuation spectrale de la fibre optique, A(λ) :

L(λ) = [Ls(λ) + LC(λ)] · A(λ). (2.5)

La méthode spectrale consiste à mesurer la lumière émise par le dosimètre dans deux bandes spectrales différentes (i = 1, 2). L’une des deux bandes spectrales doit être centrée sur le spectre d’émission du scintillateur tandis que l’autre bande spectrale doit être centrée sur un domaine de longueur d’onde où l’intensité du rayonnement Čerenkov est élevée et où l’intensité de la scintillation est faible. L’intensité lumineuse mesurée dans la bande spectrale i peut être exprimée comme :

Ti =

Z ∞

0

L(λ) · Fi(λ) · dλ, (2.6)

où Fi(λ) représente principalement le spectre de transmission du filtre optique défi-

nissant la bande spectrale i. Ce terme prend cependant aussi en compte l’efficacité quantique du photodétecteur ainsi que la transmission de la lentille, etc.. En combinant les équations 2.3, 2.4 et2.5 avec l’équation 2.6, on obtient :

Ti = Z ∞ 0  ks· D · S(λ) + C λ2  · A(λ) · Fi(λ) · dλ. (2.7)

En considérant les deux bandes spectrales, l’équation2.7 peut être réexprimée sous la forme matricielle comme suit :

T1 T2 ! = K D 1 K1C KD 2 K2C ! · D C ! , (2.8) 38

où les éléments de la matrice sont des constantes. Finalement, en inversant la matrice dans l’équation 2.8, la dose déposée à la position du scintillateur peut être exprimée comme : D =  KC 2 KD 1 · K2C− K2D· K1C  · T1−  KC 1 KD 1 · K2C − K2D· K1C  · T2. (2.9)

De façon plus concise, l’équation 2.9 peut être réécrite comme

D = a · T1+ b · T2, (2.10)

où a et b sont les deux coefficients d’étalonnage du dosimètre. Détermination des coefficients d’étalonnage

Les deux coefficients d’étalonnage du dosimètre peuvent être déterminés en effectuant deux mesures pour lesquelles les doses déposées à la position du scintillateur sont connues. En utilisant l’équation 2.10, on obtient alors :

a b ! = T α 1 T2α T1β T2β !−1 Dα Dβ ! , (2.11) où α et β représentent les deux événements d’étalonnage. Fontbonne et al. et Frelin et al. ont recommandé d’effectuer les deux mesures suivantes pour déterminer les coefficients d’étalonnage :

1. Irradier le dosimètre avec un champ de radiation de faible taille (ex. 10 × 10 cm2) de façon à limiter la quantité de rayonnement Čerenkov produit.

2. Irradier le dosimètre avec un champ de radiation de grande taille (ex. 40 × 40 cm2) avec une longueur importante (ex. 1.5 m) de fibre optique enroulée à l’intérieur du champ de radiation de façon à maximiser la production de rayonnement Čerenkov. Formalisme hyperspectral

Archambault et al. ont étendu le formalisme mathématique de la méthode spectrale à une version hyperspectrale [64]. Cette approche considère le cas général où la luminosité d’un détecteur est constituée d’une superposition linéaire de N sources lumineuses, chacune étant caractérisée par un spectre d’émission normalisé, Sn(λ), et un nombre

total de photons émis, xn, qui dépend des conditions d’irradiation. En considérant un

spectrales distinctes, le signal mesuré, ml, associé à la région spectrale l peut être

exprimé comme :

m=Rx , (2.12) où m et x sont respectivement des vecteurs de dimension L et N , et où R est une matrice de dimension L × N . Les éléments de la matrice R s’expriment sous la forme suivante :

rl,n =

Z ∞

0

Wl(λ) · Sn(λ) · dλ, 1 ≤ l ≤ L, 1 ≤ n ≤ N, (2.13)

où Wl(λ) est la fonction de filtration définissant la région spectrale l. Puisqu’il est

raisonnable d’assumer que le nombre de photons émis par un scintillateur plastique est directement proportionnel à la dose absorbée, l’objectif de cette méthode est de résoudre l’équation linéaire 2.12 pour déterminer les composantes du vecteur x . Ceci peut, entre autre, être réalisé en exploitant la notion de pseudo-inverse gauche d’une matrice :

x=(RTR)−1RTm . (2.14) La matrice R doit être connue pour solutionner l’équation2.14. Une stratégie possible consiste à stimuler individuellement chaque source lumineuse afin de déterminer les différents spectres lumineux intégrés de l’équation2.13 [65].

L’élaboration de l’approche hyperspectrale a des implications importantes. Tout d’abord, elle permet de démontrer la faisabilité de détecteurs à scintillateurs plastiques multi-points, c’est-à-dire des détecteurs formés de plusieurs éléments de fibres scin- tillantes couplés à une même fibre optique. Archambault et al. ont montré, à partir de simulations, qu’un système composé de six sources spectrales peut être résolu avec des incertitudes meilleures que 1 % malgré la présence d’incertitudes aléatoires typiques associées au processus d’étalonnage et aux mesures brutes [64]. Therriault-Proulx et al. ont, par la suite, développé un détecteur multi-points composé de quatres sources spectrales, c’est-à-dire trois fibres scintillantes : BCF-10, BCF-12 et BCF-60, et le rayon- nement Čerenkov [65]. Le flux lumineux du détecteur a été décomposé spectralement à l’aide d’un spectrographe couplé à une caméra CCD. Le détecteur a été utilisé pour mesurer un rendement en profondeur et des profils de champs ouverts et d’un champ modulé à l’aide d’un filtre en coin de 45◦ pour un faisceau de photons d’énergie 6 MV. Les doses mesurées ont été comparées à celles obtenues à l’aide d’une chambre d’ionisation CC04 et les résultats ont révélé une différence relative moyenne égale ou inférieure à 2.3 ± 1.1 %. Deuxièmement, l’étude de Archambault et al. a permis de 40

mettre en évidence l’existence d’une corrélation entre le conditionnement de la ma- trice de mesure M , c’est-à-dire l’expansion du vecteur m au cas où plusieurs mesures ont été effectuées, et les incertitudes des coefficients d’étalonnage déterminés. Ainsi, en investiguant différentes configurations d’irradiation, il est possible de déterminer les configurations optimales permettant de maximiser la robustesse des coefficients d’éta- lonnage. De plus, il fût montré que le formalisme hyperspectral permet de déterminer les caractéristiques optimales des fonctions de transmission des régions spectrales en effectuant une analyse des composantes principales de la matrice de mesure M .