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1. Etat de l’art

1.3 Impact du dioxyde de carbone sur la physiologie de S. cerevisiae

1.3.2 Effet inhibiteur du dioxyde de carbone

1.3.2.2 Métabolisme oxydo-fermentaire

Le dioxyde de carbone impacte la croissance de S. cerevisiae en métabolisme oxydo-fermentaire

(Figure 6 A). Le taux de croissance est ainsi diminué de 85 % lorsque la concentration en CO2

dissous augmente de 0.06 à 14.19 mM (Campelo and Belo, 2004) mais diminue de 26 % seulement pour une augmentation de la concentration en CO2 dissous de 0.01 à 23.63 mM (Nagahisa et al., 2005).

Le rendement en biomasse est aussi affecté en cas d’enrichissement CO2 et diminue de 20 % lors

d’une culture discontinue alimentée lorsque la concentration en CO2 dissous augmente de 0.05 à

14.37 mM (Belo et al., 2003). De même une réduction du rendement en biomasse de 32 % et 43 % est observée en conditions aérobie et micro-aérobie respectivement lorsque la concentration

en CO2 dissous augmente de 1.30 mM à 5.76 mM dans une culture continue (Kuriyama et al.,

1993). Pour ces travaux le rendement est calculé uniquement par rapport à la consommation de glucose, cette source de carbone étant très majoritaire par rapport à l’extrait de levure et à la peptone (Kuriyama et al., 1993). Il est intéressant de noter que l’effet du CO2 augmente avec la vitesse spécifique de consommation de l’oxygène (qO2 = 100 µmol.g-1.h-1 en aérobie et 35 µmol.g -1.h-1 en micro-aérobie). Une diminution de 10% du rendement en biomasse est également observée en culture continue conduite avec une limitation dans l’apport d’azote lorsque la

concentration en CO2 dissous augmente de 0.46 à 21.70 mM, sans que la vitesse spécifique de

consommation d’oxygène soit significativement affectée (Aguilera et al., 2005b). La viabilité cellulaire est peu affectée par une concentration en CO2 dissous de 1.42 mM (Belo et al., 2003)

mais diminue de 25% pour une concentration en CO2 dissous de 14.189 mM (Campelo and Belo,

60 Le CO2 impacte aussi la formation de co-produits (Figure 19 B). Une augmentation du

rendement de production d’éthanol de +7-8% est noté lorsque la concentration en CO2 dissous

augmente de 1.30 mM à 5.76 mM dans une culture continue tant en condition aérobie que micro-aérobie (Kuriyama et al., 1993).Parallèlement il est observé une diminution du rendement de production de glycérol dans les deux conditions de l’ordre de 50%. De même, une augmentation de la vitesse spécifique de production d’éthanol de + 22% est observée en culture continue aérobie limitée en azote lorsque la concentration en CO2 dissous passe de 0.46 à 21.70 mM (Aguilera et al., 2005b). L’augmentation de la concentration en CO2 dissous augmente donc la production d’éthanol en métabolisme oxydo-fermentaire et donc la production et/ou consommation d’énergie.

La capacité fermentaire est définie comme la vitesse maximale de production d’éthanol en conditions anaérobie à partir d’un échantillon de culture réalisée en mode oxydatif. Une diminution de 20% de la capacité fermentaire est rapportée pour une concentration en CO2 dissous de 25.45 mM (non observé pour les concentrations inférieures) en culture fed-batch (Chen and Gutmanis, 1976) mais aucune variation significative n’est signalée en culture continue

pour une concentration en CO2 dissous maximale de 22.30 mM (Aguilera et al., 2005b).

Il est également intéressant de noter qu’une augmentation de la concentration en CO2 dissous de 0.46 à 21.70 mM en culture continue limitée en azote provoque une augmentation de la vitesse spécifique de production du succinate (de 0.04 à 0.08 mmol.gX.h-1) bien qu’aucune explication ne soit provoquée par les auteurs (Aguilera et al., 2005b). L’enrichissement en CO2 ne provoque cependant pas d’augmentation de la production de succinate en culture discontinue (Otero Romero, 2009).

Des modifications de la composition en acides gras de la membrane plasmique ont été rapportées lors d’un enrichissement CO2 réalisé sur une culture de S. cerevisiae en mode oxydo-fermentaire (Castelli et al., 1969). Les auteurs montrent qu’un enrichissement en CO2 de 5.87 à 17.62 mM et ions hydrogénocarbonates provoque une augmentation de la quantité totale de lipides dans la membrane, de la quantité totale d’acides gras dans la membrane et du degré général d’insaturation de ces acides gras. Les conclusions des auteurs doivent toutefois être considérées avec prudence dans la mesure où ils ne considèrent pas l’existence des équilibres dynamiques entre le CO2 et les

ions hydrogénocarbonates, ceux-ci rendant impossible l’augmentation de la concentration en CO2

à pH constant sans augmenter de fait la concentration en carbonates. De plus les concentrations en ions hydrogénocarbonates semblent sous-estimées d’un facteur deux. Les travaux de Kuriyama ne montrent pas de changement de composition en acides gras de la membrane

61 plasmique pour chacune des conditions (aérobie et micro-aérobie) sur une gamme de concentration 1.30-5.76 mM. En revanche le degré d’insaturation des acides gras de la membrane est deux fois plus faible en conditions micro-aérobies qu’en conditions aérobie.

En métabolisme oxydo-fermentaire le rendement en biomasse pourrait être affecté pour des

concentrations en CO2 dissous de l’ordre 3-7 mM. Les diminutions maximales rapportées sont de

l’ordre de 20% pour des concentrations en CO2 dissous modérées (< 30 mM). Le taux de croissance semble plus affecté par ces concentrations (de -40 à 80%). La production d’éthanol semble augmenter et celle de glycérol diminuer.

Figure 6. A : Impact du dioxyde de carbone sur le rendement en biomasse (symboles pleins) ou le taux de croissance

(symboles vides) de S. cerevisiae en métabolisme oxydo-fermentaire. Kuriyama, 1993 : culture continue limitée en glucose (C) ou par l’apport d’oxygène (O, micro-aérobie), rendement en biomasse. Belo, 2003 : culture discontinue alimentée, concentration maximale en biomasse. Nagahisa, 2005 : culture discontinue, taux de croissance. Campelo, 2004 : fed-batch, taux de croissance. Aguilera, 2004 : culture cotinue limitée en N, rendement en biomasse. B : Impact du dioxyde de carbone sur la production d’éthanol (symboles pleins) ou de glycérol (symboles vides) de S. cerevisiae en métabolisme oxydo-fermentaire. Kuriyama, 1993 : culture continue limitée en glucose (C, aérobie) ou par l’apport d’oxygène (O, micro-aérobie), rendement en éthanol et en glycérol. Belo, 2003 : culture discontinue alimentée, concentration maximale en éthanol.

1.3.2.3 Métabolisme oxydatif

Dans la littérature seules trois études ont été consacrées à l’impact du dioxyde de carbone sur la levure en métabolisme oxydatif (Aguilera et al., 2005b; Chen and Gutmanis, 1976; Krook et al., 2004). L’impact du dioxyde de carbone sur la croissance de la levure en métabolisme oxydatif est important (Figure 7 B). Une diminution de 24% du rendement en biomasse est ainsi observée lors d’une culture continue limitée en carbone lorsque la concentration en CO2 dissous augmente

62 de 0.22 à 22.30 mM (Aguilera et al., 2005b). Cette diminution est couplée à une augmentation de 74% de la vitesse spécifique de consommation d’oxygène et de 28% de la vitesse spécifique de consommation de glucose. De même une diminution du rendement en biomasse est observée lors d’une culture discontinue alimentée lorsque la concentration en CO2 dissous est supérieure à 13.5 mM et atteint 54% pour une concentration de 25.45 mM (Chen and Gutmanis, 1976). L’évolution des vitesses de respiration n’est cependant pas mentionnée dans cette étude. Enfin, la

réponse de la levure à un incrément de concentration en CO2 dissous de 0.3 mM a été étudiée en

culture continue limitée en carbone (Krook et al., 2004; Mashego, 2005a). L’augmentation de la concentration en CO2 dissous provoque une augmentation transitoire de 75% des vitesses de respiration liée à une mobilisation des sucres de réserve glycogène et tréhalose. Ces travaux

montrent donc que de fortes concentrations en CO2 dissous provoquent une augmentation de la

production et /ou de la consommation d’énergie par S.cererivisae.

Les travaux réalisés en culture continue sur l’impact du dioxyde de carbone sur S. cerevisiae en métabolisme oxydatif (Aguilera et al., 2005b; Krook et al., 2004; Mashego, 2005a) sont remarquables car i) la levure est mise en œuvre dans des conditions maîtrisées et en utilisant un milieu synthétique ii) les vitesses de respiration brutes et spécifiques sont calculées et présentées iii) les bilans de matière sont vérifiés en régime permanent (Krook et al., 2004; Mashego, 2005a) ou abordés (Aguilera et al., 2005b). Il faut cependant remarquer que les bilans de matière lors du régime transitoire suivant l’échelon de CO2 ne sont pas présentés (Krook et al., 2004; Mashego, 2005a) et que les vitesses spécifiques de respiration sont particulièrement bruitées (Aguilera et al., 2005b).

Il est également intéressant de noter qu’une augmentation de la concentration en CO2 dissous de 0.22 à 22.30 mM en culture continue provoque une augmentation de la vitesse spécifique de production du succinate (de 0.00 à 0.13 mmol.gX.h-1) bien qu’aucune explication ne soit proposée par les auteurs (Aguilera et al., 2005b). Un phénomène similaire était observé en culture continue aérobie limitée en azote dans la même étude (chapitre 1.3.2.2).

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Figure 7. Impact du dioxyde de carbone sur le rendement en biomasse de S. cerevisiae en métabolisme oxydatif. Chen

et Gutmanis, 1976 : culture discontinue alimentée. Aguilera, 2004: culture continue limitée en carbone.