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III. Diffusion

III.6. c. Mécanismes de diffusion proposés

Nous avons essayé de proposer un mécanisme pour la diffusion du xénon dans le volume grâce au couplage des résultats expérimentaux décrits ci-dessus avec ceux de la modélisation à l’échelle atomique. En ce qui concerne le krypton, les données concernant les sites préférentiels d’incorporation indiquent une incorporation préférentielle dans la lacune uranium par contre l’énergie de diffusion n’a pas été évaluée.

Diffusion du xénon

Ainsi que nous l’avons décrit dans le paragraphe I.2.b.v, Andersson et al. [Andersson et al. 2011] obtiennent une énergie d’activation pour la diffusion du xénon comprise entre 5,43 et 6,04 eV dans l’UO2 stoechiométrique. Cette énergie paraît assez éloignée des 3,1 eV que nous avons obtenus expérimentalement (voir paragraphe III.5.d) et la différence non compatible avec la précision des calculs effectués.

Si nous supposons que dans nos conditions d’implantation une quantité suffisante de lacunes uranium est présente dans nos échantillons, nous pouvons considérer en poursuivant le raisonnement d’Andersson et al. que l’expression de l’énergie d’activation à la diffusion du xénon ne fait plus intervenir l’énergie de formation de la lacune uranium. Cette énergie d’activation devient alors comprise entre 2,74 et 3,03 eV, ce qui est très proche de la valeur mesurée de 3,1 eV. De plus, la diminution de l'énergie d'activation calculée en régime surstoechiométrique est cohérente avec les observations expérimentales obtenues en surface de nos échantillons. Cet accord est encourageant et pourrait indiquer que le mécanisme considéré par Andersson et al. de diffusion assistée par l’agrégation d’une lacune uranium supplémentaire au site d’incorporation du xénon, le défaut de schottky, est le mécanisme principal de diffusion.

III.7. Conclusion

Dans ce chapitre, nous nous sommes intéressés à la diffusion thermique du xénon et du krypton dans le dioxyde d’uranium. Pour cela, des disques massifs ont été implantés en surface avec des ions xénon et krypton à l’état de traces. Des mesures du gaz relâché, entre 1150 et 1350°C, par spectrométrie de masse ont permis d’obtenir les isothermes de relâchement. Le relâchement présente deux phases : une phase de relâchement rapide dit de « bouffée » et une phase de relâchement lent. Une modélisation des isothermes a été effectuée sur la base d’une loi de Fick à deux coefficients de diffusion dits « de surface » et « de volume ».

La comparaison des coefficients de diffusion de surface avec ceux de la littérature montre que le régime de bouffée observé peut être attribué à une légère oxydation de surface de nos échantillons. Cette oxydation n’a pas été caractérisée dans ce travail mais des résultats antérieurs obtenus en XANES [Martin et al. 2004] sur le même type d’échantillons confirment ce phénomène.

Cette étude a permis d’établir les lois d’Arrhenius régissant le phénomène de diffusion du xénon et du krypton dans le dioxyde d’uranium :

Xénon :        kT D 2,0.10 11exp 3,1 Krypton :    D 6,7.10 17exp 1,4

Contrairement au krypton pour lequel il n’existe pas de données fiables à notre connaissance, la littérature sur le xénon est foisonnante et donne des résultats très dispersés. L’énergie d’activation de la diffusion du xénon trouvée dans notre étude est de l’ordre de 3 eV. Cette valeur est en accord avec celle déduite des études de la littérature sélectionnées selon trois critères (la stoechiométrie, la concentration de gaz et la mesure de la surface spécifique) fixés par Carlot et al.

La confrontation de nos résultats avec ceux issus de calculs de structure électronique nous oriente vers un mécanisme de diffusion du xénon assisté par la diffusion de la lacune uranium. La diminution de l’énergie d’activation observée dans notre étude avec l’augmentation de la stoechiométrie tend à confirmer ce mécanisme.

La comparaison des valeurs de coefficients de diffusion du xénon avec ceux de cette sélection montre que la concentration de gaz est un facteur important pour la diffusion du gaz. En effet, nous avons déterminé des coefficients de diffusion plus faibles que ceux sélectionnés afin de décrire le phénomène de diffusion intrinsèque du xénon. Dans nos expériences, nous avons implanté nos échantillons à la plus basse fluence réalisable soit 1012 at.cm-2 (Xe) et 5.1011 at.cm-2 (Kr). Bien que ces dernières soient très faibles, nous avons mis en évidence par MET des bulles dans l’échantillon implanté en krypton et recuit à 1400°C pendant 4 h. Un phénomène de piégeage intervient donc dans nos expériences. Ce phénomène est d’autant plus visible pour l’échantillon implanté en krypton à forte fluence (7.1015

at.cm-2). En effet le coefficient de diffusion apparent sans considérer de fraction de gaz piégé est un ordre de grandeur en dessous de celui déterminé dans l’échantillon implanté à l’état de traces. L’utilisation de ce coefficient de diffusion dans un modèle faisant intervenir une fraction de gaz piégée nous a permis d’évaluer cette dernière à 85 % dans l’échantillon implanté à forte fluence. Bien que nous ayons peu de données, l’évolution des coefficients de diffusion en fonction de la concentration de gaz sur matériau implanté semble montrer une saturation pour une concentration en gaz plus importante que sur combustibles irradiés. Si cette saturation du coefficient de diffusion est liée à une saturation de la quantité de pièges, il est raisonnable de penser que cette dernière sera plus élévée dans un combustible irradié. Le chapitre suivant portant sur les mécanismes de nucléation permettra d’étayer cette conclusion.

Références

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Quatrième Chapitre