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I. Bibliographie

I.4. c.iv Interaction avec les dislocations

Lors de l’irradiation, les défauts créés dans le combustible peuvent avoir un effet sur la nucléation et le grossissement des bulles. Nous avons déjà abordé le rôle possible des pointes de fission ou des précipités métalliques en tant que sites préférentiels possibles de nucléation. Les dislocations peuvent également interagir avec les bulles et avoir un impact sur leur grossissement.

Dans la littérature des observations de réseaux de dislocations ont surtout été rapportées dans le dioxyde d’uranium irradié. Whapham et Sheldon ont étudié l’évolution des défauts et des bulles de gaz de fission sous irradiation et en température dans leurs rapport et articles publiés en 1965 [Whapham & Sheldon 1965], [Whapham & Sheldon 1965b]. Des disques massifs de diamètre 2,3 mm et d’épaisseur 130 µm ont été irradiés entre 1019

et 2,2.1025 fissions.m-3 (équivalent à 4.10-5 ppm et 0,01 % at. GF/at. UO2) à une température comprise entre 50 et 100°C. Ils ont ensuite été amincis par électropolissage. De petits défauts de diamètre 2,5 nm ont été mis en évidence à partir d’une dose de 4,3.1021

fissions.m-3 à une densité de 1022 m-3. Ces défauts grossissent sous irradiation jusqu’à former des boucles de dislocations de diamètre 5-40 nm à une densité de 2.1022 m-3 à la dose 3,6.1023 fissions.m-3. Ces boucles de dislocations grossissent ensuite sous irradiation jusqu’à former un réseau enchevêtré à la dose 1,1.1024 fissions.m-3. A la dose la plus élevée, 2,2.1025 fissions.m-3, les dislocations présentent une densité de 2.1013 m-2.

Figure I-23 : Evolution des défauts dans des disques d’UO2 irradiés [Whapham & Sheldon 1965]

Un échantillon irradié à 1,6.1026 fissions.m-3 a ensuite été recuit 1 h à 1100°C et 1500°C. Après recuit à 1100°C, l’échantillon présente en plus du réseau de dislocations une population de boucles de dislocation de diamètre 50 nm. Après recuit à 1500°C, cette population a disparu laissant un réseau très dense de dislocations. Les défauts évoluent donc non seulement sous l’effet de l’irradiation mais aussi sous l’effet de la température. Selon les auteurs, ces réseaux de dislocations se forment et grossissent sous irradiation par évaporation de petites boucles traversées par les fragments de fission. De plus, l’accumulation de lacunes dans le matériau empêche la formation de nouvelles petites boucles.

Whapham et Sheldon ont étudié l’évolution des bulles de gaz de fission sous l’effet de la température lors de recuits post irradiation. Des disques massifs de diamètre 2,3 mm et d’épaisseur 130 µm ont été irradiés à 2,2.1025

fissions.m-3 (équivalent à 0,01 % at. GF/at. UO2) à une température comprise entre 50 et 100°C. Ils ont ensuite été recuits durant 1 h sous vide pour les températures inférieures à 1500°C et sous argon pour les températures supérieures puis amincis par électropolissage. Après recuit à 1100°C, des bulles de gaz de fission sont observées de diamètre 2,5-5 nm entre les dislocations et 7,5 nm sur les dislocations. Après recuit à 1300°C, les bulles situées dans le volume ont grossi, leur diamètre a atteint 5 nm. Après recuit à 1500°C, elles sont passées à 10 nm tandis que les bulles situées sur les dislocations font entre 10 et 30 nm. Les plus grosses bulles sont situées sur les nœuds

des dislocations. Selon les auteurs, les bulles grossissent en température par capture d’atomes de gaz diffusants. Après recuit à 1800°C, des zones dénudées de bulles sont visibles aux joints de grains. Les bulles situées dans le volume font 10 nm au maximum sauf quelques rares bulles plus grosses. Les auteurs supposent que ces bulles étaient initialement situées sur des dislocations ayant disparu par recombinaison. Après recuit à 2000°C, il n’y a plus de bulles visibles dans l’échantillon. Les auteurs observent un grossissement différent entre bulles situées dans le volume et bulles situées sur les dislocations. Ces dernières grossissent plus rapidement par apport d’atomes et de lacunes accéléré.

Plusieurs exemples d’observations par MET de grosses bulles situées préférentiellement sur des dislocations ont été rapportées dans le dioxyde d’uranium irradié [Cornell 1971], [Baker 1977], [Sonoda et al. 2002].

Dans l’étude de Cornell, le combustible a été irradié à 4,6.1026

fissions.m-3 à 1065°C (0,19 % at. GF/at. UO2) et recuit à 1400°C pendant 2 h. L’observation de grosses bulles sur les dislocations (Figure I-24) n’est pas réellement expliquée.

Figure I-24 : Image MET d’UO2 irradié (0,19 % at. GF/at. UO2) et recuit à 1400°C durant 2 h, observation de grosses bulles sur les dislocations [Cornell 1971]

Sonoda et al. ont caractérisé du combustible irradié à 55 GWj.tU-1 (0,55 % at. GF/at. UO2) à 450°C. Ils ont également observé des dislocations organisées en réseau sur lesquelles les bulles sont rassemblées.

Figure I-25 : Image MET d’UO2 irradié (0,55 % at. GF/at. UO2), observation de grosses bulles sur les dislocations [Sonoda et al. 2002]

Selon Sonoda et al., les dislocations accumulées au cours de l’irradiation seraient des pièges pour les défauts et pour les produits de fission. L’organisation des dislocations sous forme de réseau augmenterait leur stabilité et constituerait un sous-joint de grain décoré par des bulles et précipités de produits de fission. Un mouvement des lacunes et des produits de fission à l’intérieur de ce sous-joint serait possible, entraînant un grossissement des bulles.

Certaines études de la littérature portant sur le grossissement des bulles de gaz de fission sous l’effet de la température ont montré des tailles de bulles différentes entre volume et dislocations. L’origine de cette différence n’est pas clairement identifiée. Un élément qui permettrait de répondre à certaines interrogations est l’évolution de la pression dans les bulles. En effet, si le volume occupé par la bulle reste constant, une capture d’atomes et/ou un relargage de lacunes ont pour conséquence une diminution de la distance entre atomes de gaz et ainsi une augmentation de pression. A l’inverse, un relargage d’atomes et/ou une capture de lacunes ont pour conséquence une augmentation de la distance entre atomes de gaz et ainsi une diminution de pression. Si le nombre d’atomes dans la bulle reste constant, la pression peut également diminuer par augmentation de volume. Des études portant sur l’état d’équilibre et la détermination de la pression sont décrites dans le paragraphe suivant.