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Mécanismes d'action des IglV dans les maladies auto-immunes

1.3 Les immunoglobulines pour injection intraveineuse (IglV) 1 Méthode de production

1.3.4 Mécanismes d'action des IglV dans les maladies auto-immunes

1.3.4.1 Mécanismes FcyR dépendants

De par la nature même des FcyR , il est logique de penser qu'ils peuvent être en partie impliqués dans l'effet anti-inflammatoire des IglV. Des travaux ont suggéré que les IgPV peuvent bloquer ces récepteurs, prévenant l'activation des macrophages61 et des

neutrophiles . De plus, il est démontré que les IgPV peuvent réduire l'expression des récepteurs activateurs FcyRI, FcyRIIa, FcyRIII et FcyRPV63"65 dans certains modèles d'auto-

immunité, ainsi qu'augmenter l'expression du récepteur inhibiteur FcyRIIb sur les macrophages66 et les lymphocytes B67. Dans un modèle d'ITP murin, la liaison des IgPV au

FcyRIII sur les cellules dendritiques induirait l'augmentation de l'expression du FcyRIIb et cette augmentation serait due à la liaison des IgPV au récepteur SIGN-R169 par la fraction

sialylée des IglV. L'implication du FcyRIIb dans l'effet thérapeutique des IglV dans le modèle murin d'ITP demeure controversée66'70. D'un autre côté, la liaison des IgPV au

FcyRIII indurait une dégranulation non productive des cellules NK en absence de cellules cibles, ce qui entraînerait une réduction des fonctions de ces cellules ce qui limiterait ainsi leur capacité à causer du dommage à l'organisme71. D'autre part, chez les femmes aux

élevé de cellules NK, le traitement aux IgPV permettrait une grossesse normale et serait accompagné par une diminution du nombre de cellules NK dans le sang périphérique72.

Enfin, chez les patients souffrant du syndrome de Kawasaki, le traitement aux IglV entraînerait une augmentation de l'activité des cellules NK dans le sang périphérique73.

Chez les macrophages et les monocytes, le traitement aux IglV inhiberait l'activation du facteur de transcription NF-kappaB74 ainsi que l'activation de ces cellules

(mesuré par le niveau d'expression de CXCL9, CXCL10 et d'IRF-1) en les rendant réfractaires à l'activation par l'interféron-y en diminuant, de manière dépendante du FcyRIII75, l'expression d'une sous-unité du récepteur de cette cytokine.

D'autres modèles ont mis en évidence l'implication du récepteur Fc néonatal (FcRn) dans l'effet des IglV. Le FcRn est un récepteur qui lie les IgG et les protège du catabolisme en les empêchant d'être dirigés vers les endosomes acides et en les retournant dans la circulation sanguine. C'est grâce à cette activité du FcRn que la demi-vie des IgG en circulation est très supérieure à celle des autres protéines plasmatiques76. L'injection

d'IgPV entraîne une forte augmentation de la concentration en IgG dans le sang, ainsi les IgPV viendraient saturer le FcRn, ce qui augmenterait le catabolisme de tous les IgG, y compris celui des autoanticorps pathologiques77.

1.3.4.2 Mécanismes FcyR indépendants

1.3.4.2.1 Implication des anticorps anti-idiotypiques

La présence d'anti-idiotypes dans les IglV leur permettrait aussi d'agir sur les lymphocytes B par l'intermédiaire de leur BCR. Ce mécanisme sera discuté plus en détail dans la section portant sur l'effet des IglV sur l'immunité adaptative. De plus, selon certaines études, les anti-idiotypes pourraient neutraliser les anticorps pathologiques causant la maladie78'79. Ainsi, dans un modèle murin de lupus érythémateux, l'injection de

la fraction des IglV reconnaissant la partie variable d'anti-ADN provenant de patients souffrant de lupus est capable de prévenir l'apparition des symptômes chez les souris où la maladie est induite80. Cependant, l'implication des anti-idiotypes dans l'induction des effets

anti-inflammatoires des IglV semble varier selon les modèles. En effet, selon une autre étude, l'implication des anti-idiotypes dans l'effet bénéfique des IglV dans un modèle

murin d'ITP serait à exclure puisque l'activité biologique des IgPV a été atribuée entièrement à leur partie Fc81.

Les IglV contiennent aussi des anticorps capables d'interagir avec d'autres protéines présentes en circulation que les IgG ainsi qu'avec des structures présentes à la surface des cellules. Les conséquences de ces interactions sont expliquées plus en détail dans les sections portant sur l'effet des IglV sur les cellules de l'immunité innée et adaptative.

1.3.4.2.2 Effet des IglV sur l'immunité innée

Dans des maladies auto-immunes où il y a accumulation de dépôts de complexes immuns, notamment dans l'arthrite rhumatoïde, le système du complément peut être activé et participer à la destruction des tissus. Il a été démontré que les IglV peuvent neutraliser certaines composantes du complément . Ainsi de façon générale, les IglV n'empêcheraient pas l'activation du système du complément mais limiteraient les dommages causés par ces composantes et la cascade d'activation s'ensuivant83.

Les IglV ont aussi des effets sur l'ensemble des cellules constituant le système immunitaire inné. Dans un premier temps, la présence d'anticorps reconnaissant le CD40 dans les IglV induirait la maturation des cellules dendritiques84. Les IglV affecteraient

aussi le profil des cytokines sécrétées par les cellules dendritiques, diminuant leur capacité à sécréter la cytokine proinflammatoire IL-12 et augmentant leur sécrétion d'IL-10, qui a une activité anti-inflammatoire85. Certaines études ont montré que les IglV modulent

l'expression de molécules de costimulation et du CMH de classe II à la surface des cellules dendritiques86. Par contre, une autre étude semble indiquer que ce n'est pas le cas87. Les

résultats inverses de modulation de l'expression du CMH de classe II obtenus par Bayry et al. et Aubin et al. peuvent s'expliquer par un temps d'incubation des cellules en présence d'IglV différent (respectivement cinq jours et un jour). Ainsi, des conditions expérimentales différentes pourraient influencer notre interprétation des mécanismes d'action des IglV.

Les IglV pourraient aussi induire la mort des neutrophiles et des éosinophiles humains par la présence d'anticorps dirigés contre les Siglec 8 et 9, des lectines liant les

acides sialiques88'89. Ces observations pourraient expliquer la baisse du nombre de

neutrophiles qui est parfois observée chez des patients à la suite d'un traitement aux IglV90.

1.3.4.2.3 Effet des IglV sur l'immunité adaptative

Les effets bénéfiques des IglV durent régulièrement plus longtemps que la demi-vie des IgG qui sont injectées. Une étude clinique a démontré chez des patients atteints d'ITP que le traitement aux IgPV était accompagné d'une baisse du niveau d'autoanticorps pathologiques91. Cette baisse était visible sur plusieurs mois et ne peut donc pas être

expliquée simplement par une augmentation du catabolisme des autoanticorps, ce qui suggère que les IglV modifient des éléments de la réponse immunitaire adaptative. Une baisse du niveau d'autoanticorps dirigés contre les desmoglines 1 et 3 a aussi été observée chez des patients souffrant de pemphigus deux semaines après un traitement aux IglV alors que le niveau de quatre anticorps non pathologiques était augmenté92. Ces observations

viennent renforcer l'idée que les effets des IglV se font sentir préférentiellement sur les cellules autoréactives.

Les IglV contiennent des anticorps dirigés contre diverses structures qui leur permettent d'interagir aussi avec les lymphocytes T et B (BCR, TCR, CD4, CMH de classe I et II, FAS, CD5, etc.)85. Il a été rapporté que les IglV inhibent les fonctions des

lymphocytes T activés par des agents mitogènes, comme la phytohémagglutinine (PHA)93.

Cependant, des résultats de notre laboratoire ont mis en évidence qu'il s'agirait plutôt d'une neutralisation de la PHA par les IgPV et non d'un effet direct sur les lymphocytes T (Lauriane Padet, Héma-Québec, Québec, communication personnelle). La présence d'anti- FAS (CD95) dans les IgPV a été impliquée dans l'induction de la mort par apoptose des lymphocytes in vitro94.

Un effet des IglV de plus en plus étudié est l'induction de l'augmentation du nombre de lymphocytes T régulateurs ainsi que l'accroissement de leurs fonctions (sécrétion d'IL-10 et de TGF-P). Ces effets ont été démontrés dans un modèle murin expérimental d'encéphalomyélite auto-immune95. De plus, lorsque les souris ont été

sur le développement de la pathologie. Ces résultats ont été confirmés en partie chez l'humain, où les IglV induisent in vitro une augmentation du TGF-P, de l'IL-10 et de FoxP3 chez les lymphocytes T CD4 purifiés . Une étude clinique a aussi mis en évidence une augmentation du nombre de T régulateurs chez des patients traités aux IglV49.

Cependant, cette étude n'était pas réalisée dans un contexte d'auto-immunité, ce qui ne nous permet pas de conclure sur l'induction de cette augmentation des T régulateurs par les IglV dans le traitement de l'auto-immunité. Cependant, une autre étude a démontré que lors d'un épisode de Guillain Barré, le nombre de lymphocytes T régulateurs en circulation chez les patients est diminué et qu'il retourne à la normale après un traitement aux IglV97. De

façon intéressante, une étude a montré que les IglV se lient plus fortement aux cellules T régulatrices qu'aux cellules T effectrices95, ce qui renforcit l'idée que les principaux effets

que les IglV exercent sur les lymphocytes T seraient dus à leur action sur la population de lymphocytes T régulateurs. D'ailleurs, le rôle des lymphocytes T régulateurs dans le contrôle de l'inflammation cadre bien avec les effets anti-inflammatoires des IglV.

Plusieurs effets des IglV sur les lymphocytes B ont été rapportés : diminution de la prolifération, augmentation de la sécrétion d'IgG98 et diminution de la sécrétion d'IgE99.

Pour ce qui est de la diminution de la sécrétion d'IgE, le mécanisme d'action des IglV serait indépendant du FcyRIIb1 . Le principal mécanisme d'action des IglV sur les

lymphocytes B impliquerait la présence d'anticorps anti-idiotypiques qui interagissent avec le BCR101 et conduirait à une modulation de leur activité. C'est en fait l'hypothèse avancée

par le groupe de la Dre Sonia Néron (Héma-Québec, Québec, Canada) qui a mis en évidence que les IglV induisent une augmentation de la phosphorylation des kinases ERK 1 et 2 spécifiquement chez les lymphocytes B IgG+102. Cette interaction entre les anti-

idiotypes présents dans les IglV et le BCR pourrait induire des signaux qui, en bout de ligne, modifient de manière significative le répertoire de lymphocytes B. De plus, le groupe de la Dre Sonia Néron a mis en évidence que l'induction de la phosphorylation d'ERKl-2 avait lieu sans l'implication du FcyRIIb. Par contre, il semblerait que l'exposition, à la fois in vivo et in vitro, des lymphocytes B murins aux IglV mène à une augmentation de l'expression du FcyRIIb à la surface de ces cellules67. Mis ensemble, ces résultats suggèrent

que les signaux induits chez les lymphocytes B par les IglV ne nécessitent pas la présence du FcyRIIb mais induiraient son expression. En plus d'une action potentielle directe sur les

lymphocytes B, les IglV pourraient aussi agir indirectement sur les lymphocytes B en neutralisant des cytokines importantes pour leur développement comme BAFF et A P R E J (a

proliferation-inducing ligand) . D en résulterait une compétition entre tous les lymphocytes B pour ces cytokines qui éliminerait (de façon non sélective) les lymphocytes B autoréactifs, puisque ceux-ci dépendent de façon plus importante de ces cytokines pour leur survie104. Des niveaux plus élevés de BAFF ont aussi été observés chez des patients

souffrant de maladies auto-immunes comparativement aux niveaux retrouvés chez des personnes saines, ce qui contribuerait à la production d'autoanticorps105. Les femmes ayant

des problèmes d'avortements récurrents spontanés présentent une baisse du nombre de lymphocytes B en circulation à la suite du traitement aux IglV, ce qui illustre les effets in vivo du traitement aux IglV sur les lymphocytes B106.

Les lymphocytes B jouent un rôle très important dans le développement des maladies auto-immunes, à la fois par la sécrétion d'anticorps pathologiques et leur capacité à agir en tant que CPA107'108. De plus, un effet immunomodulateur direct des IglV sur les

lymphocytes B autoréactifs expliquerait très bien la baisse du niveau d'autoanticorps observée à la suite du traitement aux IglV. Ainsi, le présent projet de recherche vise à mieux comprendre les mécanismes d'action des IglV sur les lymphocytes B humains normaux. L'hypothèse de départ est que les IglV agissent sur les lymphocytes B par plusieurs récepteurs de surface ayant la capacité de transmettre un signal, dont le BCR mais aussi par d'autres récepteurs encore non identifiés.

Le premier objectif de l'étude est donc d'obtenir une vue d'ensemble des protéines avec lesquelles les IglV interagissent chez les lymphocytes B humains. Pour ce faire, une approche d'immunoprecipitation, mettant en présence des IgPV et des lymphocytes B a été mise au point. Par la suite, les protéines avec lesquelles les IgPV interagissent ont été identifiées par spectrométrie de masse. Le second objectif du présent projet est de confirmer in vitro l'implication des cibles identifiées dans l'effet des IgPV sur les lymphocytes B au niveau de leur prolifération et de leur sécrétion d'anticorps. Selon la nature des protéines identifiées, les conséquences de l'interaction des IgPV avec ces protéines pourront être évaluées, ce qui pourrait mener à la description de nouveaux effets des IglV sur les lymphocytes B. Toujours selon la nature même des cibles identifiées, plusieurs approches pourront être envisagées, comme l'utilisation de cellules B déficientes pour l'expression des protéines identifiées afin de confirmer l'implication des cibles identifiées sur les effets des IglV ou encore d'anticorps monoclonaux ciblant ces protéines.

La poursuite des objectifs du présent projet contribuera à mieux comprendre les mécanismes d'action des IglV sur les lymphocytes B et possiblement sur l'ensemble du système immunitaire, permettant ainsi de contribuer aux connaissances qui seront nécessaires pour le développement d'un produit substitut aux IgPV.

2 Internalisation spontanée des IglV et interaction avec

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