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2. L ES PROCEDES DE SEPARATION MEMBRANAIRE

2.6 Mécanisme de transport

En supposant que la partie supérieure de la membrane est composée de pores de formes cylindriques et de tailles identiques, le flux d’eau pure Jw à travers la membrane suit la loi de Poiseuille appliquée à un milieu poreux :

𝐉𝐰 = 𝛑 .𝐫𝟖 .𝛈 .𝐞𝟒 .𝐍𝐩

𝒎 . PTM Eq 1.4

avec

- r le rayon des pores (m),

- Np le nombre de pores par unité de surface (pores/m²), - η la viscosité dynamique du fluide (Pa.s) ,

- em l’épaisseur apparente de la membrane (m).

Cette loi conduit à une proportionnalité directe entre le flux d’eau pure et la pression transmembranaire appliquée et une proportionnalité inverse à la viscosité du fluide. La loi de Darcy propose également ce lien :

𝐉𝐰 = 𝐋𝐩 . 𝐏𝐓𝐌 = 𝛈 .𝑹𝐏𝐓𝐌

𝒎 Eq 1.5

avec Rm la résistance hydraulique de la membrane (m-1), paramètre constant en supposant que les propriétés physiques de la membrane ne varient pas.

Lorsque la solution en alimentation présente des substances retenues par la membrane, le flux convectif à travers la membrane, appelé flux de perméation (Jv) sera d’une valeur plus faible que celui obtenu pour une filtration d’eau pure, Jw (Figure 1. 8 a)). Une baisse du flux de perméation est très souvent observée lors de la filtration d’une solution à PTM fixée. En microfiltration et ultrafiltration, cette baisse peut être importante, menant à un changement des propriétés de la membrane. Cette baisse provient de deux phénomènes bien connus dans le domaine de la filtration : la polarisation de concentration et le colmatage. Dans la littérature, un grand nombre d’études sont dédiées à la compréhension des mécanismes les gouvernant (Elimelech and Bhattacharjee, 1998), (Bacchin et al., 2002).

Figure 1. 8 : Comparaison du flux de perméation J eau ultra-pure et en solution réelle a) courbe de flux de perméation obtenu en fonction du temps de filtration pour une PTM imposée, b) courbe de flux de perméation obtenu en fonction de la PTM imposée (Viguié-Simon, 1999).

Un grand nombre d’études montre également que la valeur de Jv varie en fonction de la valeur de la PTM. La valeur de PTM appliquée, pour laquelle le flux limite Jlim est atteint (Figure 1. 8 b)), dépend des conditions d’opération du procédé et des caractéristiques de la solution et de la membrane utilisées. Il existe une notion de flux critique, défini comme étant la valeur de flux en-dessous de laquelle le colmatage de la membrane se forme. Le flux limite est alors décrit comme étant la valeur de flux maximal atteint à partir de l’obtention du flux critique, après un certain temps de filtration (Howell, 1995), (Gesan-Guiziou et al., 1999).

Gésan-Guiziou et al. (1999) par exemple caractérisent l’évolution du flux de perméation lors de la microfiltration de lait écrémé, en fonction de différentes PTM (Gésan-Guiziou et al., 1999). Leurs résultats montrent l’existence d’un flux limite à partir d’une certaine valeur de PTM, au-delà de laquelle le flux de perméation ne varie plus. Quelques années plus tard, des résultats concernant la filtration d’une suspension de billes de latex confortent ces observations (Gesan-Guiziou et al., 2002).

2.6.1 Modèle théorique de film et couche de polarisation de concentration

Lorsqu’une suspension ou une solution est filtrée, les particules ou les solutés retenus vont s’accumuler à la surface de la membrane sous l’effet du flux convectif à travers la membrane, entrainant ainsi une hausse de la concentration (Cm) à sa surface, devenant supérieure à la concentration initiale de la suspension ou de la solution. Ce gradient de concentration engendre une diffusion depuis la membrane vers le reste de la solution en filtration (1ère loi de Fick) (Figure 1. 9). Ce phénomène, appelé polarisation de concentration, se met en place rapidement dès le début du procédé de filtration et induit la baisse du flux de perméation. Après un certain temps de filtration, un régime stationnaire peut être atteint. Le

flux convectif du soluté en écoulement vers la membrane est compensé par le flux du soluté à travers la membrane et par le flux rétro-diffusif vers le reste de la suspension/solution en écoulement (Mendret, 2007).

Figure 1. 9 : profils de concentration lors de la formation de la polarisation de concentration en régime stationnaire.

L’équilibre concernant la solution lors du procédé peut donc s’exprimer de la façon suivante :

𝐉 . 𝐂(𝐳) − 𝐃 .𝐝𝐂𝐝𝐳 = 𝐉 . 𝐂𝐩 Eq 1.6

- z est la distance au-dessus de la membrane (m),

- C(z) la concentration de la solution dans la couche limite (kg.m-3), - D le coefficient de diffusion de la solution (m².s-1),

- Cp la concentration de la solution dans le perméat (kg.m-3).

Cette relation est appelée « le modèle du film », et représente le modèle le plus simple et le plus employé, ayant été proposé depuis les années 1960 (Michaels and Bixler, 1968).

En régime stationnaire, l’épaisseur de la couche limite de polarisation est 𝛿(𝑚), et avec les conditions limites suivantes :

z = 0 → C(z) = Cm

Le modèle peut être exprimé de la façon suivante :

𝐉𝐯 = 𝐃𝛅 . 𝐥𝐧 (𝐂𝐦−𝐂𝐩𝐂𝐛−𝐂𝐩) = 𝐌 . 𝐥𝐧 (𝐂𝐦−𝐂𝐩𝐂𝐛−𝐂𝐩) Eq 1.7

Avec M = D/ 𝛿, désignant le coefficient de transfert de masse (m.s-1

). En rétention totale, l’expression peut être simplifiée de la sorte :

𝐉𝐯 = 𝐌 . 𝐥𝐧 (𝐂𝐦

𝐂𝐛) Eq 1.8

2.6.2 Modèle du gel

Un modèle basé sur celui du film expliqué précédemment, a été proposé par Blatt et

al. (1970) pour expliquer l’existence d’un flux limite lors de la filtration (Blatt et al., 1970).

Ce modèle se base sur le fait que l’accumulation de matière à la membrane durant le procédé peut atteindre une certaine concentration (Cg, kg.m-3), menant à la formation d’une couche sous forme de gel. L’augmentation de la PTM va donc conduire à une augmentation de la taille de cette couche, le flux de perméation ayant atteint sa valeur maximum pour les conditions expérimentales appliquées. Cette couche réduit donc la perméabilité à la membrane, et de ce fait modifie la sélectivité. De plus, ce phénomène peut être irréversible et conduit souvent au phénomène de colmatage de la membrane. L’équation Eq 1.8 peut alors s’exprimer ainsi :

𝐉𝐯 = 𝐌 . 𝐥𝐧 (𝐂𝐛𝐂𝐠) Eq 1.9

Ce modèle stipule que la suspension/solution est entièrement retenue par la membrane et que la concentration à sa surface est constante. Selon Mulder (2000), la couche concentrée sous forme de gel dépend de la forme, de la taille et de la structure chimique de la suspension et des particules qu’elle contient, mais est indépendante de la concentration de la suspension initiale (Mulder, 2000).

2.6.3 Modèle de pression osmotique

Un modèle de pression osmotique a également été développé, et se base sur le fait qu’une pression osmotique est générée par les particules retenues et la faible masse moléculaire des composants passant à travers la membrane. Pour des concentrations élevées, comme celles à l’intérieur de la couche de polarisation de concentration sous certaines conditions expérimentales, la pression osmotique ne peut être négligée (Elimelech and

Bhattacharjee, 1998). Le modèle se base sur la loi de Darcy et le flux à travers la membrane est obtenu par la soustraction de la pression transmembranaire et de la différence de pression osmotique de part et d’autre de la membrane, ΔΠ (Pa) :

𝐉𝐯 = 𝐏𝐓𝐌− 𝚫𝚷𝛈 .𝐑𝐦 = 𝐏𝐓𝐌𝐞𝐟𝐟

𝛈 .𝐑𝐦 Eq 1.10

avec PTMeff la pression transmembranaire efficace (Pa).