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I.1 Les lymphocytes T

I.1.3 Les lymphocytes T γδ

I.1.3.5 Lymphocytes T γδ et cancer

Les lymphocytes T-γδ, malgré leur nombre minoritaire, sont impliqués dans l’immunité anti-tumorale. Le premier argument concernant cette fonction fut la réactivité de ces cellules vis-à-vis de cibles tumorales, in vitro [99]. Ensuite, plusieurs études ont fourni l’évidence de lymphocytes T-γδ infiltrant les tumeurs, en particulier d’origine épithéliale. Ainsi, A. Choudhary et ses collaborateurs ont isolé des lymphocytes T-Vγ3Vδ1 à partir de 3 tumeurs rénales consécutives d’un même patient et ont démontré leur potentiel cytotoxique [100]. De même, les travaux de H. Kobayashi et ses collègues ont mis en évidence une proportion élevée de cellules T-γδ parmi les TILs de certains patients atteints de carcinome rénal et une augmentation de la proportion des lymphocytes T-Vγ9Vδ2 dans le sang périphérique de ces mêmes patients [101]. Chez l’homme, des clones de lymphocytes T-γδ ont aussi pu être isolés des tissus de tumeurs colorectales primaires ou métastatiques, tumeurs pulmonaires, mélanomes et des ganglions sentinelles de mélanomes [102-105]. Enfin, dans des xénogreffes de lignées murines de tumeurs prostatiques, les lymphocytes T-γδ murins amplifiés ex vivo, marqués à la GFP puis injectés en intraveineux, ont pu être localisés par microscopie à fluorescence dans la tumeur [106]. Concernant les lymphomes B, bien que les lymphocytes T-γδ soient cytotoxiques envers ces cibles, ces tumeurs ne semblent pas être préférentiellement infiltrées par ces cellules. Cependant, le nombre de lymphocytes T-γδ dans le sang de certains patients est augmenté [107].

Afin de démontrer le rôle des lymphocytes T-γδ dans l’immunité protective anti- tumorale, des souris TCRγ-/- ont été utilisées. Lors de l’exposition de ces souris à des agents carcinogènes ou l’inoculation de cellules de lignée de carcinome, la tumorigenèse s’est révélée augmentée [108]. De plus, des souris invalidées pour le gène de la β2-microglobuline et de la perforine (β2mKOperforineKO) ont une incidence accrue de lymphome B spontanés, par rapport aux souris KO pour la perforine seule, à celles KO pour la β2-microglobuline seule ou aux WT qui n’ont pas développé de tumeur. En inoculant les cellules de tumeurs primaires issues des souris

β2mKOperforineKO aux souris perforineKO, les auteurs ont observé la croissance des tumeurs, contrairement à l’inoculation dans des souris WT ou déficientes pour TRAIL, TNF, FasL et l’INF-γ. Pour déterminer les sous-populations importantes dans la surveillance anti-tumorale, les auteurs ont injecté les cellules issues des tumeurs primaires de souris β2mKOperforineKO à différentes souris déficientes. Seules les souris RAG1-/- ne possédant pas de lymphocytes T et les souris sans cellules NK et T-γδ permettaient l’apparition de tumeurs [109]. Ces données indiquent l’importance des lymphocytes T-γδ dans le rejet des tumeurs, médié par la perforine.

De récentes études ont démontré le potentiel cytotoxique de clones T-γδ Vδ2neg isolés de patients infectés par le CMV, envers des lignées de cellules épithéliales intestinales tumorales. Cette réactivité requiert l’engagement du TCR mais est indépendante des molécules de CMH de classe I ou de NKG2D [110]. Cette même équipe a récemment démontré le potentiel thérapeutique de ces lymphocytes T-γδ, in vivo. En effet, la co-injection sous-cutanée de clones de lymphocytes T-Vδ2neg avec des lignées tumorales coliques retarde la croissance tumorale dans des souris Rag-/-γc-/-. De plus, la lignée tumorale humaine HT-29 sécrète la chimiokine MIP-1δ capable d’attirer les clones de cellules T-Vδ2neg par liaison au récepteur CCR3 des lymphocytes T-γδ. Ainsi, des injections intra-péritonéales répétées de ces mêmes clones améliorent l’inhibition de croissance tumorale ; effet non observé en présence d’un anti-CCR3 [111]. Dans cette étude, les lignées de cellules T-Vδ2+ issues de donneurs sains étaient moins réactives que les clones de lymphocytes T-Vδ2neg vis-à-vis de la lignée tumorale colique HT-29. Ce n’est pas le cas de toutes les lignées tumorales épithéliales coliques ou autres [112]. En effet, la reconnaissance spécifique des cibles tumorales par les différentes sous-

populations de lymphocytes T-γδ varie en fonction de l’épithélium, mais aussi du type de carcinome. On retrouve également ces variations au niveau des hémopathies [113].

Parmi les lymphocytes T-γδ, la sous-population périphérique majoritaire, T-Vγ9Vδ2, correspond à une population facilement amplifiable par les PAgs et l’IL-2, in vitro et in vivo. La première étude démontrant l’expansion des lymphocytes T-γδ in vivo fut une étude pilote : 5 patients sur 9 atteints de lymphome non Hodgkinien ou de myélome multiple ayant des lymphocytes T-Vγ9Vδ2 répondeurs in vitro, ont présenté une activation et une prolifération de leurs cellules T-Vγ9Vδ2 in vivo par le PAM et l’IL-2. 33% des patients traités ont obtenu une rémission partielle et 2 patients ont obtenu une stabilisation de leur maladie, indiquant l’implication des lymphocytes T-Vγ9Vδ2 dans l’effet anti-tumoral [114]. Deux autres études ont ensuite été initiées avec l’acide zolédronique. L’une, in vitro, permet de distinguer deux populations de patients atteints de myélome multiple : une population répondeuse au zoledronate + IL-2 montrant une amplification des lymphocytes T-Vγ9Vδ2 avec un phénotype mémoire majoritaire et une population non-répondeuse avec des lymphocytes T-Vγ9Vδ2 peu prolifératifs et de phénotype TEMRA (différentiation terminale) majoritaire. Ces deux sous- types de populations ont cependant la capacité d’inhiber la croissance des cellules de myélome immortalisées ou primaires de façon contact-dépendant. L’autre étude a été réalisée avec 9 patients atteints de cancer du sein et prostatique. Après 3 mois, le pourcentage in vivo des lymphocytes T-Vγ9Vδ2 effecteurs (CD27-CD45RA-) des patients traités a augmenté, pendant que les pourcentages des lymphocytes T-Vγ9Vδ2 naïfs et mémoires ont diminué. Les lymphocytes T-γδ effecteurs amplifiés in vivo avaient aussi une capacité proliférative diminuée et une production d’IFN-γ augmentée sous activation par l’IPP en culture. Ces résultats suggèrent donc une capacité des lymphocytes T-γδ de patients atteints de différents cancers à être répondeurs à la stimulation des ABP in vivo et démontrent ainsi le potentiel immunothérapeutique des cellules T-γδ chez l’homme [81, 115]. De plus, ces données sont supportées par des études

in vitro démontrant une amélioration significative de la cytotoxicité directe des lymphocytes