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ciment et béton

5.3.2 Entre lubrification et contacts directs

Ce résultat est valable lorsque les contacts granulaires ne sont pas très importants. Si des particules sphériques d’une suspension sont très proches, soit à de faibles distances h intergranulaires [2.4], un effort normal répulsif dissipateur d’énergie peut s’écrire comme la force de squeezing s’exprimant par :

Fsqueezing≈η0d3γ˙/h (2.7)

avecη0, la viscosité de la suspension et d, le diamètre des particules.

Lorsque la suspension est à l’arrêtη0γ˙=τ0, avecτ0le seuil de la pâte de ciment. Dans les matériaux cimentaires, l’effort normal qui tend à rapprocher deux particules est de l’ordre du poids d’une particule soit de l’ordre deρgd3(Roussel, 2007 b). Pour que des contacts directs aient lieu, c’est-à-dire que l’effort normal répulsif de squeezing ait lieu, il faut que :

τ0d3/h ≥ρgd3 (2.8)

Ainsi pour une masse volumique ρ des particules de 2500 kg/m3 et une distance h entre granulats dans un béton autoplaçant qui est de l’ordre de 1 mm, le seuil τ0 de la pâte de ciment doit être inférieur à 25 Pa pour que les frictions et les contacts directs soient limités. Ce qui est le cas des pâtes ayant des dosages en superplastifiants supérieurs à 0,4%. De plus, les fractions volumiques granulaires de 56 et 61% sont inférieurs à la fraction volumique de transition trouvée dans l’étude rhéologique précédente, ce qui laisse entendre que les interactions hydrodynamiques sont prédominantes.

Pour un dosage de 0,4%, le superplastifiant se situe à la limite de sa gamme d’uti-lisation. Il n’est donc pas suffisant pour fluidifier la pâte et le béton. Les dissipations visqueuses sont alors très grandes au niveau de la pâte de ciment, et se traduisent par des dissipations encore plus élevées au niveau du béton. L’ajout des granulats engendrent en effet des contacts frictionnels plus importants. De plus, une éventuelle adsorption d’une partie du superplastifiant par les granulats reste possible même si elle est faible (Maruya

et al., 2006) piégeant ainsi l’eau et le superplastifiant rendus ainsi moins disponibles à la

rhéologie.

5.4 En conclusion

Il existe une corrélation directe entre le seuil de la pâte de ciment et le seuil du béton, uniquement dans le cas où le béton reste un matériau homogène et où les interactions granulaires sont dominées par des interactions hydrodynamiques. Les résultats pour deux fractions volumiques granulaires différentes, montrent la validité de la loi phénoménolo-gique reliant le seuil réduit (rapport entre le seuil du béton et le seuil de la pâte de ciment) au rapport de la fraction volumique granulaire sur la concentration de “packing”. Pour des bétons relativement homogènes et stables, le seuil réduit est une fonction croissante

de la fraction volumique granulaire à concentration de “packing” identique. Cette étude valide l’existence des interactions hydrodynamiques qui ont lieu dans les bétons fluides pour des fractions volumiques granulaires faibles telles que 56 et 61%, inférieures à la fraction volumique de transition.

L’importance de l’adjuvantation sur le régime d’écoulement du béton est aussi mise en évidence. Si la teneur en superplastifiant est suffisante pour bien défloculer les parti-cules de ciment et fluidifier le fluide porteur, les interactions hydrodynamiques dominent l’écoulement. Si la teneur en superplastifiant n’est pas suffisante pour fluidifier le fluide porteur, les interactions de frictions peuvent dominer l’écoulement du mélange.

6 Influence de la substitution des fillers minéraux au

ci-ment

Un calcul avec le logiciel “René-LCPC” donne une estimation de la compacité totale du squelette granulaire des bétons, pour un empilement sec et une fraction volumique granulaire de 62,2% (cf. Tableau 2.4 pour la formulation de ce béton) et dont une partie du ciment a été remplacée par 19% d’un filler minéral donné. Les compacités propres introduites dans le calcul sont estimées d’après une approche physique. Elles sont prises égales à 0,65 pour des particules sphériques comme dans le cas de la cendre volante et de la fumée de silice et de 0,4 pour des particules de formes concassées comme dans le cas du ciment, de la craie et des fillers calcaires et silico-calcaires. Après entrée de la distribution granulaire et de la compacité propre "B" telle que définie ici, la compacité calculée par le logiciel se fait sur un échantillon de fine donné en milieu infini avec un indice de compaction de 136 000 (2.6). Les courbes granulométriques sont données en Annexe [A]. Il est vrai qu’une approximation expérimentale de la compacité propre des fillers serait plus exacte. Celle-ci peut être effectuée sur coulis et consiste à ajouter de l’eau à une masse de filler donnée jusqu’à ce que le mélange passe de l’état de boulettes à l’état de pâte homogène.

Fines ciment craie fumée de

silice cendre volante filler calcaire filler silico-caclaire 70µ Compacité propre "B" 0,4 0,4 0,65 0,65 0,4 0,4 Compacité calculée de l’empilement 0,6131 0,5647 0,7693 0,8502 0,6582 0,496

TABLE 2.6 : Compacités propres calculées sous le logiciel “René-LCPC”.

Le remplacement par 19% en masse représente le pourcentage massique de ciment en excès par rapport au béton de référence du viaduc de Millau. La Figure 2.13 montre que le remplacement par de la fumée de silice donne la meilleure compacité, ensuite vient la cendre volante puis la craie. Le logiciel “René-LCPC” ne prenant en considération que la distribution granulaire et la compacité propre (dépendante d’un facteur de forme)

0.78 0.8 0.82 0.84 0.86 0.88 0.9 0.92 0.94 0.96 cendres volantes fumée de silice filler silicocalcaire

filler calcaire ciment seul craie φ = 62,2% substitution au ciment de 19% de fillers,

calcul sous René LCPC

Fr a ct ion v olu miq ue gr an ulai re maxim ale φmax

FIGURE 2.13 : Compacité des mélanges de bétons pour des remplacements du ciment

par 19% de fillers minéraux à distributions granulaires données.

des constituants du mélange, nous pouvons dire que la finesse de la fumée de silice et de la craie sont à l’origine d’une meilleure compacité. Dans le cas de la cendre volante dont la taille moyenne est proche de celle du ciment, l’amélioration de la compacité du mélange provient de sa sphéricité. La fumée de silice est aussi sphérique. La craie, de finesse supérieure à la cendre volante mais de forme concassée, sa compacité propre est plus faible, et la compacité du mélange est moins élevée en sa présence par rapport à celle de la cendre volante.

Par contre, le remplacement du ciment par des fillers calcaires ne modifie pas la com-pacité du mélange et celui avec les fillers silico-calcaires la diminue faiblement. Les fillers calcaires et silico-calcaires ont, comme le ciment, des formes concassées, leur compacité propre est donc faible. De plus, la distribution de taille de ces fillers est proche de celle du ciment. Tous ces facteurs expliquent pourquoi le remplacement du ciment par ces deux fillers ne modifie pas beaucoup la compacité du mélange.

La distribution granulaire des fillers, proche de celle du ciment, leur permet de remplir les vides inter-granulaires non comblés par le ciment (cas de la fumée de silice et de la craie) ou de remplacer une partie du ciment ou de contribuer à la continuité du réseau granulaire entre le ciment et les sables (cas du filler calcaire, du filler silico-calcaire et de la cendre volante).

6.1 En conclusion

Le remplacement du ciment en excès par rapport au béton de référence par des fillers minéraux de forme et de taille quasi-identique à celle du ciment donne une rhéologie identique à celle du béton de Millau pour un φG+S donné. Les fillers calcaires, silico-calcaires et cendres volantes donnent une compacité équivalente avec une demande en

eau moindre. A compacité identique, la diminution du rapport E/C possible grâce à une

demande en eau moindre des fillers par rapport au ciment est favorable à une éventuelle augmentation de la résistance mécanique. La fumée de silice se détache des autres fillers par une compacité et une demande en eau supérieures.

7 Conclusions

L’évolution de la rhéologie du béton en fonction des variations de différents para-mètres de formulation conduit aux résultats suivants : D’un point de vue rhéologique, la formulation pouvant être retenue serait celle prenant en considération l’influence des différents paramètres :

– une fraction volumique granulaire de 62,2% permettrait d’acquérir une fluidité suf-fisante du béton,

– un rapport G/S de 1 donnerait un béton légèrement moins fluide mais plus stable.

Pour compenser la perte de fluidité, il est possible d’envisager une augmentation de la teneur en superplastifiant, soit à 1,7% par rapport à la masse de ciment,

– et pour limiter les fortes chaleurs d’hydratation, une substitution de filler au ciment, égale au pourcentage excédentaire de ciment (19%) par rapport au BHP de réfé-rence, serait effectuée.

Deux formulations peuvent être retenues au Tableau 2.7.

Formulation

de Millau retenue n˚1 retenue n˚2

Caractéristiques

φ 69% 62% 62%

G/S 1,37 1,37 1

substitution sans 19% de filler-ciment 19% de filler-ciment Composants 6/14C 711 640 539 4/6C 362 326 274 0/4C 468 422 458 0/2R 312 281 305 Ciment 420 420 420 Eau efficace 140,9 172,1 172,1 Optima 175 5,88 7,18 7,18 Filler 0 93 93

Impact de la formulation sur les