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Analyse des données observationnelles du SUBARU

CHAPITRE 6. TRAITEMENT DES DONNÉES DU SUBARU TÉLESCOPE : APPLICATIONS

A.3 Loi de Titius-Bode

Depuis l’antiquité, on a cherché à formuler des lois géométriques expliquant les mouvements des planètes et les distances entre elles. En 1596, dans son livre Mysterium Cosmographi-cum, Kepler explique pourquoi le système solaire contient exactement six planètes (connues à l’époque) et justifie encore une fois géométriquement les valeurs des distances au Soleil. Cette formulation géométrique est en profonde contradiction avec les données observationnelles. Elle est toutefois retenue pour sa beauté mathématique.

Plus d’un siècle plus tard Christian Frieherr von Wolf (1679-1754) présage donc ce qui devien-dra par la suite la loi de Titius-Bode :

If one gives the distance from the Earth to the Sun in 10 units, then the distance to Mercury from the Sun is 4 units, that of Venus 7, that of Mars 15 , that of Jupiter 52 and that of Saturn 100. [Nieto,1972]

En 1764, Johannn Titius (1729-1796), mathématicien, physicien et astronome allemand qui re-marquera lui aussi cette distribution particulière des planètes dans le système solaire, glissera sa formulation [Nieto,1972], [King-Hele,1973] dans la traduction allemande de “Contemplation de la Nature” de Charles Bonnet en 1764 (plus précisément première partie, chapitre 4, entre les paragraphes 7 et 8 de la version originale).

En 1772, Johann Elert Bode (1747-1826) tombe sur la formulation de Titius de cette loi, la re-transcrit dans la seconde édition de son livre (Anleitung zur Kenntniss des gestirnten Himmels) sans citer de source ni même accorder de crédit à Titius pour cette formulation (du moins dans la première édition de ces écrits) [Nieto, 1972], avant de reconnaître en 1784 qu’il avait pris connaissance des écrits de Titius [Cunningham,2001].

Dans la troisième édition de son livre parue en 1777, il écrira : “From the law discovered by Kepler, that the ratio of the periods of revolution of the two planets behaves like the ratio of the cubes of their distances from the Sun, it can be calculated that this main planet between Mars and Jupiter must complete its revolution around the Sun in 4 ½years” [Nieto,1972].

ANNEXE A. DISTANCES ENTRE PLANÈTES : DES SPHÈRES HARMONIQUES DE PTOLÉMÉE À LA LOI DE TITIUS-BODE.

forme de l’équation :

an= 4 + 3.2n−1 (A.1)

anest la position (distance moyenne au Soleil) de la niemeplanète. La distance Terre-Soleil était normaliséeà 10.

Aujourd’hui elle est connue de tous sous la forme suivante [Murray and Dermott,1999] :

an= 0.4 + 0.3.2n−1 (A.2)

Elle gagnera en crédibilité à la découverte d’Uranus, le 13 mars 1781, par William Herschel (1738-1822), puis à la découverte du premier astéroïde Cérès, le 1er janvier 1801 (par Guiseppe Piazzi (1746-1826)) [Nieto,1972], [Cunningham,2001].

On remarquera par la suite que cette loi se révélera fausse pour Mercure. De même, la dé-couverte de Neptune le 23 septembre 1846 sera un nouveau test que cette loi ne passera pas. Même si Leverrier et Adams ont supposé la validité de cette loi. Prédisant respectivement une distance de 37,25 au et 36,15 au, en 1847, Sears Cook Walkers (1805-1853) qui reprend des observations antérieures de Neptune (observation de Lalande), prédit un positionnement pour Neptune à 30,25 au. Ce qui sera un échec de plus pour la dite loi de Titius-Bode.

Plusieurs études s’en suivront tout au long du XIXe et du XXe siècle pour apporter des mo-difications à cette loi de Titius-Bode, que l’on considérera désormais comme une première loi pour prédire les distances moyennes des planètes à leur étoile.

If there is truth in the Law, the original form should be thought more likely to be a good first guess, but certainly not necessarily the best guess to which to refer theories ! (Nieto,1972, p. 29)

Parmis toutes ces contributions, on citera celle de Wurm, Ludwig Wilhelm Gilbert (1769-1824) ou encore celle de James Challis (1803-1882). Tous essaieront d’appliquer une loi de type Titius-Bode aux systèmes de satellites et aux anneaux des planètes géantes4.

Peu de temps après la découverte de Neptune (1846), Daniel Kirkwood s’intéressera lui aussi au problème. Il posera une nouvelle formulation de la loi qui sera source de controverses pendant quelques années [Nieto,1972]. Je ne m’attarderai pas sur cette formulation. Cependant, je ferai remarquer, une fois de plus, que c’est cette recherche d’harmonies dans le système solaire, qui le mènera à remarquer ce que nous connaissons aujourd’hui sous le nom de lacunes de Kirkwood5, dans la ceinture principale d’astéroïdes.

A.3.1 Formulation de Balgg-Richardson

Parmi les contributions les plus importantes à l’évolution de cette loi datant du début du siècle dernier, on en notera deux introduites de manière indépendantes ; en 1913 celle de

Mademoi-4Plusieurs des astronomes, mathématiciens, physiciens qui se seront intéressés au problème croiront être des précurseurs dans le domaine [Nieto,1972].

5Lacunes qui apparaissent dans les diagrammes de représentations comme des demi-grands axes des astéroïdes de la ceinture principale. Ces lacunes correspondent à des commensurabilités entre les moyens mouvements des astéroïdes et le moyen mouvement de Jupiter.

ANNEXE A. DISTANCES ENTRE PLANÈTES : DES SPHÈRES HARMONIQUES DE PTOLÉMÉE À LA LOI DE TITIUS-BODE. selle Mary Adela Blagg (1858-1944) et, en 1945, celle de Richardson, D. E. Tous deux s’inté-resseront au logarithme des distances des planètes au Soleil, en fonction de l’indice n (indice de la planète). En reprenant les mêmes notations que pour la formulation précédente (Eq.A.2) :

an= A(1.7275)n[B + f (α + nβ)] (A.3)

Le facteur 1,7275 s’avèra être après plusieurs tests, celui qui fournit un meilleur ajustement aux données observationnelles. A, B, α et β sont des constantes caractéristiques de chaque système (système Soleil+planètes, système de Jupiter, système de Saturne et système d’Uranus). La fonction f est 2π périodique. Cette formulation fournira des résultats plus satisfaisants que les formulations précédentes, cependant elle échouera pour les petits objets tel que Mimas, le satellite de Saturne.

Toutes ces formulations d’une loi de distances planétaires, de celle de Titius-Bode (Eq. A.2) à celle de Blagg-Richardson (Eq. A.3), sont purement empiriques et aucune justification du problème physique ou mathématique n’est introduite.

Aujourd’hui encore, la question de l’existence d’une loi traduisant la physique des systèmes et donnant ainsi les distances entre planètes reste un problème qui passionne physiciens, mathé-maticiens et astronomes [Nottale,1996], [Nottale et al.,2000], [Laskar,2000].

Avec Jacky Cresson6, nous nous sommes demandé si une telle ’loi’ (à supposer qu’elle existe) est une loi de la nature. Nous avons suivi la même démarche que [Cresson, 2005], à savoir les questions suivantes :

- Qu’est ce qu’une loi de la nature ?

- Ou comment conférer, à une loi existante, le status de loi de la nature ? ou comment en construire une ?

Après moult réflexions et lectures, nous en avons conclu que deux conditions sont nécessaires pour attribuer ce statut à une loi : l’universalité et l’atemporalité.

Il y a quelques années de cela, J. Cresson et Christophe Biernacki7 s’étaient déjà posés la question de l’existence d’une loi de la nature de type Titius-Bode.

Nous abordons donc cette question dans notre article (en cours de rédaction)8, en adoptant le principe de moindre action stochastique présenté dans [Cresson, 2011]. Afin de contraindre notre système et pour la formulation de l’expression algébrique de la loi, nous utilisons les données de la mission Kepler pour les systèmes d’exo-planètes.

6Mathématicien, Professeur à l’Université de Pau, actuellement à Munich, également chercheur associé à l’Ob-servatoire de Paris, dont j’ai suivi les cours en Master 2.

7Professeur de Mathématiques. Statisticien à l’Université de Lille.

ANNEXE B

A

NNEXE

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I

NVARIABLE

A&A 543, A133 (2012) DOI:10.1051/0004-6361/201219011 c ESO 2012

Astronomy

&

Astrophysics