Chapitre III : Résolution du problème inverse
3) Localisation des mesures
La conception du système de mesures nécessite encore de choisir les emplacements r
kdes M capteurs mono-axes. En raison des décroissances très rapides des champs magnétiques
avec l'éloignement des sources, nous avons fait en sorte de placer les capteurs le plus près
S
MCS
MDJ
MCJ
MDB
Champs magnétiques
perturbateurs
V
Bruit capteur et
chaîne de mesure
Capteur
0
Gain
2
/
Ratio Ratio 4
possible des bords de la pile. Ce paragraphe s'intéresse à la localisation des mesures sur ce
contour.
Pour commencer, il est intéressant d'observer les emplacements où les capteurs sont les
plus sensibles aux variations de courant. Pour réaliser cela, on utilise un réseau de capteurs
quelconque et on regarde quels sont les capteurs dont la variance est la plus grande. Nous
supposons que la variance du courant est de la forme suivante :
J
MD
J.Id
var
2Eq III-51
Où Id est la matrice identité. Alors, la matrice de variance-covariance des champs
magnétiques différentiels est de la forme suivante :
T MD MD J MDS S
B .
var
2Eq III-52
Fig. 81 : Contour de la zone active de la pile et variance normalisée des différents capteurs.
La variance est normalisée par la variance maximale obtenue.
La figure (Fig. 81) illustre la variance de chaque capteur. Nous voyons que les capteurs
situés au milieu de chaque rangée sont beaucoup plus sensibles que les capteurs situés sur les
coins de la pile. Cela s'explique par le fait que les capteurs sur les coins sont en moyenne plus
éloignés des sources que les autres capteurs. Ce résultat nous pousse donc à placer en priorité
les capteurs au milieu des rangées afin d'augmenter la sensibilité du système, c'est-à-dire
l'amplitude des premières valeurs singulières de la matrice S
MD. Néanmoins, si nous plaçons
tous les capteurs aux mêmes endroits, les lignes de la matrice S
MDtendent à devenir parallèles.
Ce phénomène diminue l'amplitude des dernières valeurs singulières. Afin d'illustrer ces deux
tendances, la figure (Fig. 82) présente deux réseaux particuliers de 24 capteurs. Sur le premier
réseau, les capteurs sont espacés régulièrement de manière à éviter le parallélisme des
équations du système matriciel. Sur le deuxième réseau, tous les capteurs ont été concentrés
aux endroits où l'information sur les sources est la plus riche.
Fig. 82 : Illustration de deux réseaux particuliers de 24 capteurs. A gauche, les capteurs sont
espacés régulièrement. A droite, les capteurs sont concentrés sur les zones les plus proches
des sources.
Fig. 83 : Comparaison des spectres des réseaux de capteurs présentés sur la figure (Fig. 82).
La figure (Fig. 83) illustre le spectre de ces deux réseaux de capteurs. Lorsque les
capteurs sont concentrés au plus près des sources, la sensibilité du système est accrue pour les
premières valeurs singulières. Avec un tel réseau, nous pouvons caractériser avec une très
bonne précision la densité de courant à l'aide de quatre paramètres. Avec le réseau de capteurs
espacés régulièrement, la précision est inférieure pour les premiers paramètres. Néanmoins, le
Six capteurs
superposés
nombre de paramètres estimés est beaucoup plus grand. Cet exemple illustre le fait qu'il est
difficile de relever simultanément l'ensemble des valeurs singulières d'un spectre. Le choix
d'un réseau de capteurs est un compromis à faire entre la qualité (gain) et la quantité (bande
passante) d'informations reconstruites.
Au final, nous avons définis l'emplacement de nos capteurs de manière quelque peu
arbitraire et avons priviligié la quantité d'information reconstruite (bande passante). Le réseau
de capteurs ainsi conçu est illustré sur la figure (Fig. 84). En raison des précédents
développements, les capteurs ont été légèrement resserrés au niveau des emplacements les
plus sensibles aux courants.
Fig. 84 : Contour de la zone active de la pile (en noir) et réseau de capteur utilisé pour le
stack GESI.
Remarque sur l'optimisation du réseau de capteurs
Nous venons de voir qu'il est difficile de relever simultanément toutes les valeurs
singulières d'un spectre. L'optimisation d'un réseau de capteurs est donc un problème
d'optimisation multi-objectifs. Un tel problème peut éventuellement être transformé en un
problème mono-objectif en pondérant ces différents objectifs. Le choix des coefficients de
pondération définit le compromis que l'on fait entre la qualité et la quantité d'informations
reconstruites.
Les choix les plus simples consistent probablement à maximiser la somme ou le
produit
ggdes valeurs singulières. Nous avons ici utilisé comme critère la somme des dix-neuf
premières valeurs singulières. Bien qu'une étude plus approfondie eue été nécessaire, nous
présentons sur la figure (Fig. 85) un réseau de capteur vers lequel un algorithme génétique a
convergé à plusieurs reprises. Nous voyons que celui-ci tend à resserrer les mesures au centre
des rangées.
Fig. 85 : Réseau de capteurs optimisé en maximisant la somme des dix-neuf premières valeurs
singulières.
Perspectives sur le rejet des perturbations magnétiques extérieures
L'un des inconvénients de notre système de diagnostic est sa sensibilité aux
perturbations extérieures (objets aimantés, dispositifs électriques…). Par perturbations, nous
entendons les sources de champs que nous n'essayons pas d'estimer. Pour le moment, ces
sources n'ont pas été prises en compte dans nos modèles. Il serait pourtant judicieux de les y
insérer de la manière suivante :
Ext Ext MD MD MC MC
J S J S J
S
B Eq III-53
gg
Utiliser le produit des valeurs singulières revient à utiliser le critère de D-optimalité. Le nom de ce
critère provient du fait qu'il consiste à maximiser le déterminant de la matrice de variance-covariance
des mesures. Ce critère est très populaire pour la construction de plans d'expériences optimaux. Il a
aussi été employé pour optimiser le positionnement de capteurs dans différentes applications [Begot
et al., 2002], [Di Rienzo & Zhang, 2010].
Où J
extest le vecteur contenant les paramètres caractérisant ces sources de
perturbations, et où S
extest le sous-modèle traduisant leurs impacts sur le réseau de capteurs.
Un tel sous-modèle nécessite de disposer d'une base de description de ces sources de
perturbations. Des modèles de sources compactes telles que les harmoniques circulaires ont
déjà été utilisées pour modéliser ces perturbations [Di Rienzo & Zhang, 2010]. Les résultats
montrent un rejet efficace de celles-ci et des erreurs de reconstruction beaucoup plus faibles.
Afin d'améliorer notre outil de diagnostic, il serait intéressant dans le cadre de futurs travaux
de reproduire cette approche
hh. Il devrait aussi être possible d'aller plus loin et d'utiliser des
harmoniques sphériques (3D) plutôt que circulaires (2D). Il serait aussi intéressant de prendre
en compte ces perturbations dès la conception du réseau de capteur. Pour orienter et placer les
magnétomètres, nous avons précédemment utilisé deux types de critères : minimiser la
sensibilité S
MCde mode commun et maximiser la sensibilité S
MDdes modes différentiels. Il
serait donc nécessaire de définir un troisième critère pour rejeter au maximum les
perturbations extérieures.
C - Bilan sur les améliorations apportées à l'outil de diagnostic
Nous avons définis dans cette section une nouvelle base de description des défauts à
l'intérieur de la pile. Cette base ne prend en compte que les défauts les plus faciles à détecter,
à savoir les défauts 2D. L'approche proposée ici permet de modéliser leurs champs
magnétiques à l'aide de la loi de Biot et Savart 3D. Cela limite les erreurs de modélisation par
rapport aux approches entièrement 2D. Notons néanmoins que la loi de Biot et Savart 2D
demeure extrêmement utile pour réaliser des pré-dimensionnements rapides du réseau de
capteurs. Le modèle 3D intervient uniquement pour le calcul précis du modèle direct réduit
servant à l'inversion des mesures.
Les inconnues du problème d'inversion demeurent 2D. Cela limite grandement le
nombre d'inconnues et donc le nombre de mesures magnétiques nécessaires. Nous avons aussi
hh
Pour discriminer les perturbations extérieures, le nombre de mesures doit être supérieur au nombre
des coefficients à estimer. Dans le cadre de notre application, cela peut sembler problématique car
nous avons jusqu'à présent toujours travaillé avec des problèmes sous-déterminés. Mais les précédents
résultats ont montré que seule une quinzaine de paramètres étaient réellement accessibles. Or nous
avons à notre disposition une trentaine de mesures. Nous avons donc probablement de la marge pour
diminuer le nombre d'inconnues lors de la construction du problème et pour insérer à la place les
inconnues caractérisant les perturbations magnétiques.
montré que l'erreur de reconstruction diminue relativement peu avec le nombre de mesures.
Nous avons alors conçu notre système de manière à privilégier la vitesse d'acquisition de la
signature magnétique. Les capteurs sont fixés autour du stack (Fig. 86) et la vitesse du
système est désormais limitée par la fréquence de coupure des capteurs (800 Hz). Pour
comparaison, le système développé par Hauer et al prend plus de quinze minutes à scanner le
champ magnétique. Cette rapidité d'acquisition offre une plus grande marge de manœuvre
pour l'étude des piles à combustible. De plus, la pile à combustible n'a ainsi plus le temps de
voir son état de fonctionnement changer entre le début du scan et la fin de celui-ci.
Fig. 86 : Pile à combustible et capteurs fixés autour de celle-ci.
Nous avons aussi proposé une solution innovante pour éviter aux magnétomètres
d'avoir à supporter le champ magnétique de mode commun de plusieurs centaines de µT. Pour
réaliser cela, nous avons utilisé des capteurs mono-axes orientés perpendiculairement au
champ magnétique de mode commun. Le réseau de capteur ainsi conçu est donc insensible à
ce champ magnétique. Il n'est sensible qu'aux modes différentiels, c'est-à-dire aux défauts de
fonctionnement survenant dans la pile. La sensibilité du système est largement accrue malgré
la perte d'information induite par la mesure d'une seule composante.
Enfin et à titre de perspective, nous avons montré qu'en choisissant judicieusement les
emplacements des capteurs autour de la pile, il est possible d'améliorer encore la sensibilité du
système.
I
Capteurs
x
y
z
IV - Conclusion sur le problème inverse
Ce chapitre nous aura permis de concevoir un modèle inverse qui estime les courants
circulant dans une pile à combustible à l'aide de sa signature magnétique. Les problématiques
liées à ce type de modèle inverse sont nombreuses. Nous avons vu qu'une partie de
l'information portée par les courants est au mieux filtrée, au pire tronquée. Malgré cela, nous
avons montré l'intérêt d'un système de diagnostic basé sur la mesure des champs magnétiques.
Bien que toute l'information ne soit pas accessible via le champ magnétique, il est possible
d'obtenir à partir de celui-ci une information qui demeure tout à fait pertinente sur le
fonctionnement interne de la pile. En raison de la présence de bruit, l'extraction de cette
information nécessite néanmoins l'emploi d'une technique de régularisation stabilisant le
système.
La qualité et la quantité de l'information recueillie dépendent de la sensibilité du
système (amplitude des valeurs singulières) et du niveau de bruit. Nous avons alors proposé
quelques solutions permettant d'améliorer le rapport signal sur bruit du système. Nous avons
conçu notre réseau de capteurs de telle sorte que celui-ci soit insensible au champ magnétique
très intense du mode commun. Le système de mesure n'est alors sensible qu'aux défauts de
fonctionnement, ce qui permet d'utiliser des capteurs de gamme réduite et plus précis. Enfin,
le nombre réduit d'inconnues a permis de limiter le nombre de mesures. Chaque mesure est
réalisée par un capteur dédié qui est fixé sur la pile à combustible. L'acquisition de la
signature est instantanée, ce qui devrait permettre l'étude de nombreux phénomènes
transitoires à l'intérieur du stack.
Chapitre IV : Validation expérimentale de
Dans le document
Diagnostic non invasif de piles à combustible par mesure du champ magnétique proche
(Page 176-184)