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Le 14C étant le principal radionucléide à vie longue en terme de niveau d’activité dans les dé-chets de graphite (entre 104 et 105 Bq/g), son comportement en lixiviation fait l’objet de plusieurs études au plan international depuis les premiers essais dans les années 1980.

Les études menées sur les graphites anglais [White 1984, McDermott 2011], américains [Gray 1988], français [Gray 1989], espagnols [de la Huebra 1994] et japonais [Takahashi 1999] ont montré un taux de relâchement de 14C systématiquement inférieur à 1 % sur la durée des essais (> 150 jours). La figure 2-30 présente les taux de relâchement de plusieurs radionucléides en fonction de la durée de l’essai de lixiviation [White 1984]. Cette étude a été réalisée sur un échantillon de graphite de type Magnox, avec de l’eau déminéralisée à 25 °C et 1 bar de pression.

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Figure 2-30 : Taux de relâchement de plusieurs radionucléides lors d’un essai de lixiviation sur un

échantillon de graphite de type Magnox (eau déminéralisée, 25 °C, 1 bar) [White 1984]

Les essais de lixiviation sur des graphites français ont été menés sur des échantillons prove-nant des réacteurs G1, G2, SLA2 et Bugey 1 au travers de plusieurs campagnes d’expériences. Ces

essais se poursuivent encore aujourd’hui. La plupart d’entre eux montrent que le 14C est très

faible-ment relâché avec généralefaible-ment des taux de relâchefaible-ment inférieurs aux limites de détection. Les li-mites de détections étant les mêmes pour tous les essais, les taux de relâchement calculés en fin d’expériences dépendent de la quantité de graphite introduit et de son activité initiale.

L’interprétation phénoménologique du relâchement du 14C des déchets de graphite reste

limi-tée du fait de la faible quantité de données exploitables en raison du très faible relâchement (très lar-gement < 1 % dans la majorité des cas). Les courbes de relâchement en phase gaz ou aqueuse en fonc-tion du temps montrent tout de même deux cinétiques de relâchement. La première phase de relâche-ment est très rapide et la seconde phase concerne un relâcherelâche-ment à plus long terme sur les séquences d’accumulation les plus longues. Ces comportements différents pourraient correspondre à des fractions de 14C différentes dans leur origine et leur localisation. La fraction résiduelle de 14C localisée en sur-face du graphite serait rapidement relâchée, tandis que la fraction relâchée à plus long terme provien-drait du 14C localisé dans la structure. Les résultats actuels des travaux réalisés sur le comportement du

14C en lixiviation sont donc cohérents avec les connaissances acquises sur l’origine et la localisation du 14C dans les graphites UNGG.

D’autre part, la spéciation, c’est-à-dire la forme chimique, du 14C constitue un autre point

d’étude majeur puisqu’elle conditionne sa mobilité en stockage et par conséquent le niveau de dose à l’exutoire. Bien que les formes inorganiques du 14C (14CO2, 14CO32-, H14CO3-) sont aisément piégées par précipitation sous forme de calcite au sein des matériaux cimentaires utilisés en stockage (colis,

ouvrages), certaines formes organiques et d’autres formes inorganiques comme le 14CO peuvent être

plus mobiles. A l’heure actuelle, peu d’études se sont intéressées à la spéciation du 14C relâché. Plu-sieurs d’entre elles [Baston 2006, Handy 2006, Marshall 2011, Baston 2012] montrent, en milieu

alca-lin, un relâchement faible du 14C en phase gazeuse sous forme d’espèces organiques (comme le CH4)

ou de 14CO. Un récent rapport étudie également le relâchement en solution [Marshall 2011]. Après 431

jours d’essais, il indique qu’environ 0,005 % du 14C est relâché en phase gazeuse principalement sous

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solution, environ 0,1 % de l’inventaire en 14C est relâché. Après acidification de la solution de lixivia-tion, les carbonates sont éliminés. Il reste alors environ 30 % de l’activité en 14C dans la solution qui pourrait se trouver sous forme d’espèces organiques.

Pour vérifier ces observations dans les graphites français, des essais de lixiviation ont été

me-nés dans des conditions favorisant l’étude du comportement du 14C et de sa spéciation [Vendé 2012].

Ils ont été réalisés sur des échantillons de graphite provenant des réacteurs G2 et SLA2 réduits sous forme de poudre afin d’augmenter la surface spécifique. Ces échantillons ont été placés sous agitation permanente, à un pH régulé à 13 afin d’être représentatif des conditions attendues en stockage, et en l’absence de calcium pour éviter les problèmes de précipitation. Le lixiviat été renouvelé partiellement dans le but d’accumuler le 14C en solution et faciliter sa détection. Enfin, les essais ont été réalisés sous gaz neutre pour éviter la carbonatation. Les résultats sont présentés en figure 2-31 pour le réacteur SLA2.

Figure 2-31 : Fraction d’activité en 14C relâchée et spéciation associée (solution/gaz, orga-nique/inorganique) en fonction du temps pour des échantillons provenant du réacteur SLA2 [Andra 2015]

La durée des essais dépassant 500 jours n’a toutefois pas permis d’atteindre une stabilisation du relâchement. Compte-tenu du protocole expérimental utilisé, les taux de relâchement mesurés sont majorants par rapport à ce qui serait obtenu dans des conditions plus représentatives du stockage (gra-phite massif entre autres). Cependant, le relâchement de la quasi-totalité du 14C lixivié en solution (> 95 %) est en accord avec les précédentes études. Le relâchement en phase gaz est toujours très faible (< 0,1 % voire 0,01 %). Il se fait sous forme organique et 14CO. En phase liquide, le 14C relâché est majoritairement sous forme inorganique (carbonates) avec une proportion potentiellement significative d’espèces organiques.

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2.5 | Comportement du graphite et du

14

C sous l’effet de l’oxydation en vue