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La lithiase urinaire chez l’enfant

B. Lithiase métabolique :

Les causes métaboliques existent dans plus de 50% si elles sont recherchées de façon méthodique, ce qui doit faire oublier la notion erronée de leur rareté [75]. La connaissance du type de calcul est primordiale pour adapter le bilan biologique sans le rendre exagérément coûteux. L’analyse physique du calcul par une méthode non chimique mais physique comme la spectrophotométrie infrarouge (SPIR) est simple et précise [73]. (Tableau I).

Tableau I: CLASSIFICATION MORPHOLOGIQUE DES CALCULS selon Daudon [73]

Type Sous-Type Composition Principales causes I Ia, Ib, Ic, Id Whewellite Hyperoxallurie

II IIa IIb IIc weddellite weddellite+whewellite weddellite hypercalciurie hypercalciurie + hyperoxalurie

hypercalciurie + anomalie anatomique

III IIIa,IIIb IIIc IIId acides uriques urates alcalins urates d’ammonium

hyperuricurie, urines acides hyperuricurie + urines alcalines infection urinaire IV IVa IVb IVc IVd carbapatite carbapatite +- struvite struvite+carbapatite brushite

hypercalciurie, infection urinaire infection urinaire, hyperparathyroïdie infection urinaire

hypercalciurie, hyperparathyroidie primaire, diabète phosphaté, …

V Va Vb cystine cystine + carbapatite cystinurie-lysinurie congénitale cystinurie-lysinurie + phosphore VI VIa VIb Vic protéines

protéines + comp. inf.+ protéines+ whewellite

pyélonéphrite chronique origine protéique + autre cause dialyse, insuffisance rénale terminale

1) Hypercalciurie :

Le terme de lithiase calcique est réservé aux calculs de phosphate et d’oxalate de calcium liés à une hypercalciurie. Cette dernière est retrouvée dans 33,8 % des cas chez l’enfant. Elle est définie par une excrétion quotidienne supérieure à 4 mg/kg ou 0,1 mmol/kg. Elle peut être classée selon qu’existe ou non une hypercalcémie associée. (Fig.23)

+ Avec hypercalcémie :

La découverte d’une hypercalcémie vraie nécessite le dosage du calcium ionisé en cas de doute et de la parathormone (PTH) 1-84 intacte, qui confirme ou non l’hyperparathyroïdie primaire. Il s’agit le plus souvent d’un adénome primaire, plus rarement d’une hyperplasie parathyroïdienne diffuse. Les rares hyperparathyroïdies primaires néonatales du prématuré sont à l’origine de calculs intrarénaux, témoignant d’une maladie active avec hypercalciurie majorée par l’utilisation de furosémide sur des reins encore Immatures [76, 77, 78].

On peut en rapprocher certaines causes classiques, bien que devenues rares, plus spécifiques à l’enfant [75] :

 l’intoxication à la vitamine D, surtout si elle s’accompagne de l’absorption d’alcalins responsable d’une excrétion rénale du calcium avec hypercalciurie et calcifications des tissus mous et néphrocalcinose

 la corticothérapie à dose élevée de certaines affections tumorales et du purpura rhumatoïde, où l’association avec l’immobilisation est responsable de pyélites ou d’urétérites calcifiantes, ayant pu être traitée par LEC ou URS en fonction de l’âge

 la sarcoïdose, où le granulome produit de la 1,25 dihydoxycholécalciférol avec hyperabsorption intestinale du calcium et hyperexcrétion rénale du calcium, majorant le risque de calculs en fait assez rares chez l’enfant

 l’hyperthyroïdie, stimulant la résorption du calcium

 l’hypothyroïdie, dont les mécanismes lithogènes chez l’enfant ont été évoqués mais restent mal connus.

Les calculs sont en général constitués d’oxalate de calcium (44,7 %) sans que soit souvent faite la distinction entre mono- ou di hydrate, de phosphate de calcium ou apatite (23,6 %) [79].

+ Sans hypercalcémie :

L’acidose tubulaire distale ou acidose d’Albright, secondaire à un trouble de l’acidification urinaire, est une maladie à transmission autosomique récessive révélée chez le nourrisson par une déshydratation avec arrêt de croissance : l’acidose métabolique hyperchlorémique empêche la synthèse rénale du citrate, avec comme conséquence une hypocitraturie responsable d’une plus grande facilité de nucléation de l’oxalate de calcium et du phosphate de calcium qui n’est plus inhibée par le citrate. Il a été montré que l’hypercalciurie et l’hypocitraturie multipliaient par 2 le risque de récidive lithiasique [80]. Cependant, il y a des réserves sur le rôle lithogène de l’hypocitraturie chez l’enfant, sachant que l’excrétion du citrate augmente normalement avec l’âge.

+ Hypercalciurie idiopathique :

Son incidence est variable (de 10 à 40 %) selon le degré des recherches étiologiques. Elle est retenue si toutes les explorations correctement faites par une équipe entraînée à la lithiase infantile ont été négatives. Elle est retrouvée chez plus de 3,8% des enfants normaux sans lithiase décelable mais chez qui est survenue une hématurie inexpliquée ; le risque lithogène y serait plus important avec apparition d’un calcul dans les années suivantes [81]. Le rôle d’une composante génétique sera de plus en plus important à prendre en considération; en effet, il est souvent noté un caractère familial à l’hypercalciurie dite idiopathique ; l’exemple de la néphrolithiase liée à l’X, ou syndrome de Dent, est en fait rare chez l’enfant [82].

2) Hyperoxalurie

+ Hyperoxalurie primaire (Fig.24) :

l’hyperoxalurie de type I correspond à un déficit enzymatique hépatique héréditaire en alanine glyoxylate aminotransférase (AGT). Son évolution est gravissime si elle est méconnue, aboutissant à la néphrocalcinose et à l’insuffisance rénale avec récidive de calculs d’oxalate de calcium monohydraté de type whewellite. Dans ce type de calcul, le dosage de la D-glycolaturie sera constamment élevé, de même que l’oxalurie (> 100 mg/1,73 m2 /24 h). La preuve sera faite par la mesure de l’activité enzymatique de l’AGT sur une biopsie hépatique en laboratoire spécialisé [83, 84].

L’hyperoxalurie de type 2 est plus rare que la précédente ; elle est due à un déficit enzymatique leucocytaire et hépatique en D-glycérate déshydrogénase avec déficience d’activité de la glyoxylate réductase (GR). La L-glycératurie est

élevée. L’évolution de la maladie est moins sévère que celle du type I. La preuve sera faite par la biopsie hépatique par la mesure de l’activité de la GR [85].

La prescription de vitamine B6 peut diminuer la synthèse d’oxalate par le foie, et l’alcalinisation par le citrate (malheureusement rarement bien toléré par les enfants) permet d’augmenter la solubilité de l’oxalate de calcium permettant de tenter de prévenir la néphrocalcinose.

+ Hyperoxalurie secondaire ou « acquise »

Est possible chez l’enfant dans certaines situations comme: les maladies inflammatoires du grêle, les résections importantes du grêle iléal, les dérivations jéjuno-iléales, les maladies intestinales responsables d’une stéatorrhée, la mucoviscidose.

+ L’hyperoxalurie idiopathique

Sa cause la plus fréquente chez l’enfant est l’excès de prise de chocolat et sûrement plus rarement celle d’épinards, voire de rhubarbe. Un antécédent familial n’est pas rare, faisant invoquer une prédisposition génétique sur l’absorption intestinale ou l’excrétion urinaire de l’oxalate [86].

3) Cystinurie :

Elle représente 5% des lithiases de l’enfant. Il s’agit d’une maladie héréditaire autosomique récessive due à des mutations de trois allèles, soit isolées, soit associées, permettant de différencier trois types de cystinurie : I, II, III. Les homozygotes de type I sont les plus exposés au risque de récidive.

L’anomalie entraîne un défaut de transport tubulaire de cystine et d’acides aminés dibasiques (ornithine, lysine, arginine), aboutissant à leur élimination excessive dans les urines sous forme peu soluble.

La plus faible solubilité de la cystine dans les urines à pH normal est responsable de la précipitation de cristaux et de la formation de calculs récidivants dès l’enfance. L’analyse SPIR de tout calcul de l’enfant et l’étude de la cristallurie des urines devraient permettre le diagnostic précoce. Le diagnostic repose sur le dosage de la cystinurie libre et sur la chromatographie urinaire des acides aminés dibasiques. [87, 88].

4) Lithiase purique :

Le rein de l’enfant conserve temporairement une immaturité responsable d’une acidose tubulaire et une excrétion élevée de l’acide urique qui va en diminuant. Il y a un risque de précipitation de calculs d’acide urique dans la petite enfance, ce d’autant qu’existent des diarrhées et des urines souvent concentrées. (Fig. 25 et 26).

Les lithiases puriques héréditaires sont rares [89] :

 le syndrome de Lesch-Nyhan est une cause héréditaire liée à l’X : il est dû à un déficit enzymatique en hypoxanthine guanine phosphoribosyl transférase (HGPRT), responsable de calculs d’acide urique s’il n’y a pas de traitement préventif hypo-uricémiant par l’allopurinol : ce traitement doit être surveillé pour ne pas exposer au risque de calcul de xanthine comme cela a été décrit chez un enfant de 12 ans [90] .

 La lithiase de 2-8 dihydroxyadénine (2-8-DHA): affection très rare, elle est due à un déficit enzymatique en adénine phosphoribosyltransférase (APRT). Le calcul de 2-8-DHA est radiotransparent est ne doit pas être confondu avec de l’acide urique car une alcalinisation ne permet pas sa dissolution [91]. Très peu soluble, son traitement ne relève que de l’allopurinol.

 La lithiase xanthinique est secondaire à un déficit homozygote en xanthine déshydrogénase se traduisant par une hypo-uricémie et une hypo-uricurie ; elle peut aussi théoriquement être favorisée par des traitements trop prolongés en inhibiteurs de la xanthine oxydase. Son traitement ne répond qu’à une alcalinisation des urines et un régime pauvre en purines.

 La néphropathie hyperuricémique familiale juvénile a été décrite chez des jumeaux de familles atteintes de la maladie à transmission autosomique dominante. La prise en charge précoce par l’allopurinol, quand la créatininémie est encore normale, a permis de réduire la morbidité de l’affection, dont l’évolution se fait inéluctablement vers l’insuffisance rénale et la transplantation rénale [92].

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