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Lire et écrire le “Journal”

Ce sont les lecteurs eux-mêmes qui éprouvent le besoin de donner des détails sur l’acte de lecture du Journal, dans les lettres qui lui sont adressées. Une fois les lettres publiées, ces détails appartiennent au texte du quotidien, qui s’offre tous les jours à la lecture par son public, tout en renvoyant l’image de ce même public dans l’acte de lire. Où, quand est comment les abonnés s’adonnent-ils à la lecture du Journal de Paris ? Quels sont les comportements et les habitudes de lecture relevés par les abonnés ?

D’aucuns se déclarent des lecteurs fidèles, à savoir, ils lisent la feuille de Paris “exactement”537 et

“assidûment”538. Un abonné doué d’une sensibilité particulière avoue s’être “sévèrement interdit” dans les lectures assidues du Journal la rubrique “Nécrologie ”, “le seul article que parmi tant de

dissolutions naturelles et communes, nous annonce la mort toujours inattendue de ces personnages rares et privilégiés qui devraient être immortels”539 Il prétend être si fidèle à sa lecture sélective du

Journal, que ce n’est que par “un hasard malheureux”540 que son regard distrait l’amène à s’arrêter

sur les disparitions des “immortels”.

Présence indispensable sur la table de petit déjeuner des salons parisiens aisés, le Journal est lu quotidiennement, comme signe d’appartenance à une modernité galopante. Rappelons la lecture matinale du Journal de l’Anglaise Sara Goudar, dont le logement donne sur le jardin du Palais Royal, en compagnie de son petit-déjeuner à l’anglaise et de son voleur de chat, Cartouche, grand amateur de périodiques tartinés de beurre541. “La C de B”, elle aussi abonnée et lectrice assidue de

la feuille de Paris, raconte, en revanche, une de ses lectures matinales de la feuille, accomplie par un de ses parents, ancien mousquetaire, dans les aboiements assourdissants de Zéphirette, sa chienne, particulièrement irritée par le ton des articles du correspondant sur les arts visuels542. Peut-on

conclure qu’il y a, chez les lectrices du Journal, la conviction que le règne animal est impliqué dans l’acte de lecture du quotidien avec la même passion, sinon plus, que ses souscripteurs ?

La lecture journalière du quotidien peut aussi advenir dans un cadre plus sobre, telle la maison d’un abonné père de famille, épris d’histoire et d’instruction, qui transforme ses petits déjeuners en

537“(…) je vous dirai tout franchement que je lis très exactement votre Journal’”, Ibidem, 14 août 1780; “Spectacles” ; “Je lis exactement votre Journal, Messieurs, je trouve en général du tact et du goût dans les jugements que vous portez”, Ibidem, 11 mai 1785, “Variété”.

538 “Une Dame très aimable, qui lit assidûment le Journal de Paris, a vu dans votre feuille du 19 janvier dernier, une Lettre de M l’Abbé de SL sur la Palingénésie”, Ibidem, 30 juillet 1781, “Variété”.

539 Ibidem, 28 avril 1779, “Aux Auteurs du Journal”.

540 Ibidem.

541 Ibidem, 10 mars 1782, “”Variété”.

assemblées familiales de lecture critique. La lecture du Journal n’est plus une coquetterie, un acte mondain, une mise au courant distraite et superficielle, mais une occupation extrêmement sérieuse et systématique, qui réunit et implique activement tous les membres de la famille, indépendamment de leur âge. Qui plus est, l’abonné tient à mentionner que la lecture du Journal n’est pas isolée, elle s’inscrit dans une familiarité de longue date avec la lecture comme moyen principal d’instruction, cultivée d’abord de manière individuelle, transformée en rituel et perfectionnée au sein de la famille :

J’aime la lecture, et les occupations de mon état me permettent heureusement de me livrer à mon goût. De tous les genres de sciences, celui de l’histoire a obtenu ma préférence. Dans ma jeunesse j’ai beaucoup lu ; mais le peu de mémoire que la nature m’a départi, me laissait le désespoir de paraître et d’être en effet moins instruit que beaucoup d’autres qui s’étaient moins appliqués que moi.(…)

Tous les matins ma belle-mère, ma femme, mes enfants et moi, nous nous rassemblons au déjeuner. Là après la lecture de votre Journal, ma fille aînée, à qui j’ai confié le département de la bibliothèque, ouvre notre répertoire historique et nous lit le trait historique dont la date se rapporte à celle du jour. Chacun fait ensuite ses réflexions. On se rappelle l’anecdote de la veille, on compare, mes enfants m’interrogent ; leurs questions me mettent à portée de juger de la justesse de leur esprit, et je m’aperçois avec plaisir qu’ils s’éclairent en s’amusant, et que leur raison se forme sans aucun effort de mon côté ni du leur543.

La lecture du Journal est décrite comme acte pur d’instruction et s’inscrit dans un méticuleux travail de stimulation du raisonnement. Pas de place, dans ce tableau de lecture concentrée, faite de réflexion, de comparaisons et d’interrogations, pour les objets matériels qui composent les petits-déjeuners des salons frivoles, ni de réactions bruyantes et inopportunes de quadrupèdes gâtés. La famille choisit le moment du petit-déjeuner pour se réunir dans une espèce de cabinet de travail, chaque membre a des tâches précises, il existe un “département de la bibliothèque”, et même un “répertoire historique” organisé par jours. Le père est le centre de la conversation, c’est vers lui que convergent les interrogations des enfants, même s’ils sont parfaitement capables de s’éclairer les demandes par la force de leur propre esprit. A en croire l’abonné, il n’y a pas d’effort dans l’exercice journalier de lecture et de réflexion de sa laborieuse famille, au contraire, ils travaillent et collaborent avec plaisir. Il souligne aussi que c’est la lecture du Journal de Paris qui ouvre tous les matins les travaux de réflexion, ce qui revient à dire qu’il y a de quoi nourrir journellement son esprit. Cet exercice matinal de l’esprit par la lecture semble rappeler la conviction d’un autre abonné du Journal, pour lequel, le matin, “jeunesse de la journée”, est le moment le plus opportun pour ce genre d’activité, puisque le seul où l’âme possède une disponibilité et une pureté

authentiques, que les soucis et les nombreux rôles endossés au cours de la journée ne cessent de corrompre544.

A la lecture systématique et quotidienne du Journal de qui est habitué à l’avoir sous les yeux au réveil, s’oppose une lecture rétrospective, par plusieurs numéros à la fois, des lecteurs qui, pour différentes raisons, s’éloignent pendant un certain temps de leur foyer. C’est le cas de “L’Habitant de Carouges” qui précise : “Un voyage assez long que mes affaires m’ont obligé de faire m’a privé

de la lecture de votre Journal pendant quelque temps”545. L’interruption de la lecture journalière n’est pas pour autant un obstacle à une lecture passionnée des numéros accumulés pendant son absence, car, raconte le lecteur, “A mon arrivée, j’ai demandé mes feuilles. Ma femme me les a

données en souriant, et je les ai parcourues avec empressement”546 Bien que rétrospective, la

lecture du Journal par “L’Habitant de Carouges” est avide et impatiente, en témoigne le sourire discret de complicité et de compréhension de sa femme et la familiarité affectueuse qu’il semble avoir avec “ses feuilles”.

Le Journal est lu rétrospectivement surtout par des abonnés parisiens de retour d’un séjour à la campagne. L’éloignement de la métropole est souvent compris comme une plongée dans un temps uniforme, si bien qu’au retour, la lecture avide des numéros manqués sert de retour au rythme mouvementé de la vie urbaine, à son temps plein, scandé par les débats et les querelles, les inventions et les découvertes du monde scientifique et artistique, les anecdotes, les récits extraordinaires et les disparitions de personnages célèbres. Il n’est donc pas étonnant que le lecteur qui revient en France au bout d’une absence de huit ans passe son temps dans le cabinet d’un souscripteur du Journal de Paris, à fouiller dans les périodiques547. Lire le Journal, au bout d’une absence physique de la capitale, a le sens d’une récupération du temps perdu, et d’une réadaptation à une réalité géographique et à une temporalité différentes. “En arrivant hier soir de la campagne,

je vis, Messieurs, dans votre Journal du 17 de ce mois, que M Azema, Maître Apothicaire, expose en vente le Cabinet d’Histoire naturelle de feu M Geoffroi, son Prédécesseur (…)”548, observe un lecteur. Un adepte acharné des corps de baleines profite, en revanche, de son retour à la vie parisienne pour défendre ces derniers des critiques des journalistes : “J’arrive de la campagne.

Pour me remettre au courant, je viens de parcourir votre Journal depuis le premier d’août jusque aujourd’hui, et j’ai été fort scandalisé de la manière dont vous parlez des corps de baleine”549. Si la

544 Ibidem, 13 décembre 1785, “Variété”.

545 Ibidem, 14 avril 1785, “Bienfaisance”.

546 Ibidem.

547 Ibidem, 28 juin 1785, “Médecine”.

548 Ibidem, 29 août 1777, “Lettre Aux Auteurs du Journal”.

lettre est publiée le 23 septembre et que le lecteur parcourt les numéros du Journal depuis le 1er août, on compte plus d’un mois d’arriérés, dont la lecture aussi assidue ou fugitive qu’elle soit, correspond à la “mise au courant” des mutations de la vie dans la capitale.

Toutefois, la lecture des numéros qui couvrent des périodes d’absence de Paris n’est pas toujours exhaustive. Parfois, elle vise uniquement le numéro et l’article qui intéressent directement le lecteur, comme c’est le cas de “Messier, Mécanicien du Roi” qui explique : “A mon retour de la

campagne, on m’a fait lire le n°174 de votre Journal”, numéro qui ne lui est pas indifférent,

puisqu’on y mentionne l’invention d’une machine dont il se considère l’auteur depuis 1733550.

Pendant que certains lecteurs foncent simplement sur les numéros du Journal parus dans leur absence de la capitale, pour se mettre au courant des dernières nouvelles, d’autres s’adonnent également à la mise en ordre des feuilles de leur collection du quotidien. Tel est l’aveu du lecteur qui signe “Ut supra”, dont les gestes révèlent, outre un lecteur assidu du Journal, un collectionneur passionné de ses numéros :

Après un séjour de trois semaines en une Campagne assez éloignée de Paris, pour y être sans intérêt sur les prix des œufs, du beurre, du foin, de la paille, et de l’avoine, ainsi que sur les représentations diurnes et nocturnes de nos grands et petits théâtres ; j’ai pourtant voulu à mon retour mettre en ordre l’importante collection de vos follicules (car je suis de votre grande confrérie). Par hasard, ou par quelque attraction sympathique mes yeux se sont fixés sur votre numéro 229551.

Les lecteurs marquent dans leur correspondance au Journal soit leurs habitudes de lecture, que des comportements de lecture passagers. Ainsi, “Ut Supra” avoue ne lire le quotidien “que par

collection”552, sans spécifier la nature des “circonstances particulières” qui l’y poussent. Un prêtre

qui répond au projet promu par le quotidien pour la construction d’un nouvel Hôtel-Dieu, affirme, ne pas profiter autant qu’il le désirerait de la lecture du Journal, et avoue : “ce n’est que par

occasion que j’en ai vu les dernières feuilles”553. Le premier lecteur pratique un type de lecture

continue, mais pareille à la lecture d’un ouvrage non périodique, le second fait, en revanche, une lecture discontinue, incomplète et occasionnelle du quotidien, suscitée peut-être par les échos parlés des nouvelles éclatantes du Journal. Ces exemples nous amènent à distinguer un lectorat enclin à la lecture en général, fidèle à celle du Journal, jour après jour ou par collection, et un lectorat occasionnel, qui ne pratique pas beaucoup la lecture, et qui feuillette les pages ou les numéros du

Journal en résonance directe avec ses intérêts et ses sensibilités du moment, sous l’influence des

550 Ibidem, 4 octobre 1777, “Aux Auteurs du Journal”.

551 Ibidem, 16 septembre 1779, “Aux Auteurs du Journal”.

552 Ibidem, 24 janvier 1779, “Aux Auteurs du Journal”.

échos propagés par l’opinion publique. Ce dernier exemple est illustré également par “L’Avocat Fr. Ph. Magnon” qui déclare, en toute franchise :

Je ne lis guère que ce que je suis obligé de lire, et ce n’est pas le Journal de Paris ; mais assez d’autres le lisent, et un de mes amis, qui l’a lu pour moi, m’a apporté hier la Feuille du 21 de ce mois, où vous rapportez un passage peu honorable à la mémoire de mon bisaïeul Jean Magnon554.

Bien qu’il ne s’inscrive pas parmi les lecteurs fidèles et enthousiastes du Journal, et que la lecture ne lui importe que pour satisfaire à ses nécessités, l’avocat avoue être entouré d’amis qui le lisent et qui lui font parvenir ce qui nourrit son intérêt personnel. La diffusion et le succès de la feuille de Paris sont tels, que même ceux qui ne le lisent pas sont soumis à une espèce de lecture passive, faite de récits qui circulent dans les cercles qu’ils fréquentent et de lectures occasionnelles, induites par leur entourage. Les deux modes de lecture du Journal se trouvent résumés, de manière comique, dans une lettre relatant le conflit d’un couple parisien dont la femme est éprise de théâtre, et donc des chroniques théâtrales du Journal de Paris, et dont le mari exaspéré consent à devenir souscripteur de la feuille, pourvu qu’il ne soit pas obligé de le lire :

Je suis un bon Parisien, par conséquent un bon mari. Envoyez-moi, s’il vous plaît, votre Journal. Pour moi, je ne lis que mes Lettres et le menu de mon dîner, je vous avoue bonnement que j’avais cru pouvoir m’en passer ; mais on m’assure que non, et je veux bien le payer, pourvu que je ne sois pas obligé de le lire (…)555.

Même ceux qui lisent peu ou nullement ont le moyen ou l’occasion d’avoir accès au contenu du

Journal, et finalement de s’y adresser directement. “Pierre Marchant”, qui a sauvé plusieurs

personnes de la noyade, déjà présent par le récit de sa bravoure dans les pages du Journal, s’y adresse pour dénoncer un imposteur qui a pris son nom dans un article précédemment publié par le quotidien. Il admet d’emblée que sa lecture du Journal se fait par intermédiation : “Je ne lis votre

Journal, je ne sais pas même lire comme il faut ; mais celui du 14 de ce mois m’a été lu en ce qui me concerne”556.

Le malade grave, le vieillard chargé d’années, dont la vue est irrémédiablement affaiblie, et même le non voyant lisent ou se font lire le Journal de Paris. “Sigault, Docteur Régulier de la Faculté de Médecine de Paris” ne peut se passer du quotidien durant sa maladie : “Je n’ai pas cessé pendant la

maladie grave qui vient de m’accabler de me faire lire chaque jour votre Journal”557. Le correspondant signant “Bradel père” prétend avoir une âge qui ne lui permet plus de lire les

554 Ibidem, 3 mai 1787, “Variété”.

555 Ibidem, 22 janvier 1778, “Lettre aux Auteurs du Journal”.

556 Ibidem, 20 septembre 1778, “Aux Auteurs du Journal.”

périodiques, en raison de leurs caractères minuscules. Malgré cet inconvénient, il apprend que son nom figure dans le Journal à travers la lecture de l’article respectif, par un détracteur de celui-ci :

J’ai 91 ans : je lis peu : mon but est de conserver et ma vue et d’éviter l’usage des lunettes. La cinquième partie des Journaux, Gazettes, feuilles périodiques, etc. suffirait pour me faire perdre la vue. L’énumération seule des intitulés a quelquefois rempli ma journée, quoique je me lève toujours avec le soleil. Je suis environné de détracteurs de votre Journal, qui après avoir bien épanché leur bile contre vous et vos

Souscripteurs, finissent par ne pouvoir se passer de le lire. L’un d’eux vint hier me régaler d’une lettre insérée dans le n°140, fort à son goût, disait-il, parce qu’il y est question de projets d’agrandissement pour les salles de spectacles (….)558.

Il y a, dans ce genre d’interventions épistolaires, un plaisir de badinage et d’ironie récurent dans la feuille de Paris. Ce qui charme et amuse le lecteur de cette lettre est la compassion pour un pauvre vieillard plaisant, incapable de lire les gazettes, Journal de Paris y compris, qui y a accès à travers un détracteur du quotidien, et qui finit même par se transformer en correspondant de la feuille. Il est certain que les lecteurs du Journal de Paris saisissent l’ironie et comprennent qu’il s’agit d’une lettre fictive, mettant en scène deux personnages significatifs : le lecteur jovial, mais incapable de lire la feuille et le détracteur râleur, toujours prêt à attaquer le Journal, mais qui ne saurait se passer de sa lecture, l’infirmité de l’un servant de béquille à l’handicap de l’autre. Ne peut-on pas y déceler une vision empreinte d’ironie du lectorat et de l’idée de lecture du Journal de Paris, une espèce de miroir déformant que le quotidien offre plaisamment à son public ?

Si la vue est le sens nécessaire à l’acte de lecture, le témoignage d’un non voyant qui apprend à lire le Journal est un évènement qui relève du sensationnel, et qui illustre, à la fois, le caractère indispensable de la lecture du quotidien :

J’ai donc enfin le bonheur de lire chaque matin un extrait de votre Journal. Ce n’est pas sur l’imprimé, bien entendu, car il faudrait être sorcier ; mais voici par quel moyen, doublement utile, je me procure cet avantage. Un jeune garçon, muni de bons yeux, qui ne connaît encore que sa Croix de Jésus, et qui brûle d’envie d’en savoir davantage, me nomme, l’une après l’autre, les lettres qui composent votre feuille, ayant soin de m’avertir des intervalles qui séparent les mots. Je les répète sur ma planche, à l’aide de mes caractères mobiles. Je lis ensuite ; et ma lecture sert de leçon à celui même qui me l’a dictée559.

Dans ce cas, la lecture du Journal est le fruit d’une collaboration de deux sujets qui trouvent le moyen de combler leurs imperfections par leurs habiletés non interchangeables : l’aveugle se fait aider par un garçon qui ne sait pas lire à traduire des bribes de texte du quotidien dans son alphabet et la lecture qui en résulte par le premier, sert de leçon pour le second. Tous deux sont mus par un

558 Ibidem, 28 mai 1777, “Lettre aux Auteurs du Journal”.

irrésistible désir de savoir freiné par leurs limites respectives : l’aveugle est impatient de se mettre au courant de la marche d’un monde qu’il ne voit pas, le garçon, dont l’expérience réduite de lecture se limite à un texte religieux, la Croix de Jésus, s’efforce également de sortir de son ignorance. Dans les deux cas, la voie qui porte au-delà de l’obscurité passe par la lecture du Journal

de Paris.

Un thème récurrent concernant la réception du Journal est la lecture de ce dernier dans la province. Pour l’habitant de province, occasionnel ou permanent, la possibilité de lecture du Journal de Paris correspond presque à une confirmation d’existence physique de l’endroit en question, à une reconnaissance géographique d’un point que les cartes de l’imaginaire n’ont pas encore localisé. Un lecteur écrit au quotidien qu’il habite “depuis deux jours un coin de terre où votre Feuille, qui va