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CHAPITRE III - La thérapie protéique : vectorisation de protéines membranaires grâce aux

4. Les protéoliposomes : obtention, caractérisation et applications

4.2. Liposomes utilisés

Les liposomes sont des structures vésiculaires sphériques possédant un diamètre allant de 30 nanomètres à quelques micromètres. Ils sont constitués de lipides amphiphiles (à la fois hydrophile et hydrophobe) et bicaténaires (deux chaînes hydrocarbonées et une tête polaire). Grâce à leur

capacité à encapsuler des solutions aqueuses et des composés hydrophiles ou lipophiles, ils sont parmi les plus anciens systèmes de transport de molécules utilisés. De plus, ils sont biocompatibles, biodégradables et présentent une faible toxicité. Ils ont été utilisés comme système modèle de membranes pour étudier les membranes cellulaires, dans les technologies de microfluidique, pour la production de nanogels, en cosmétique et en alimentaire, pour l’imagerie, comme outil de vectorisation de médicaments en pharmacologie et cancérologie, de matériel génétique pour la thérapie génique (ADN, ARN, siRNA, miRNA…), d’agents actifs en ingénierie tissulaire, et pour la médecine régénérative (Laouini et al., 2012; Monteiro et al., 2014).

Les propriétés des liposomes varient considérablement en fonction de leur composition en lipides, leur taille, leur méthode de préparation ou leur fonctionnalisation. Nous détaillerons donc brièvement ces quatre points.

4.2.1. La composition lipidique

Les phospholipides sont les composants majeurs de la membrane plasmique grâce à leur propriété amphiphile. Ainsi, parmi les phospholipides naturels, la phosphatidylcholine (PC) et la phosphatidyléthanolamine (PE) sont les plus souvent utilisées pour former les liposomes (Figure 18). Mais ces lipides naturels sont moins stables que les synthétiques qui sont formés par modification des phospholipides naturels, par exemple le 1,2-dioleoyl-sn-glycero-3-phosphocholine (DOPC) et le 1,2-dioleoyl-sn-glycero-3-phosphoéthanolamine (DOPE) (Figure 18). Comme dans la membrane plasmique, la fluidité et la mobilité des lipides au sein de la bicouche conditionnent les propriétés des liposomes. L’addition de cholestérol (Figure 18), un stéroïde hydrophobe point de départ de la synthèse de nombreuses hormones et jouant un rôle important dans la membrane plasmique, va modifier les propriétés de la bicouche lipidique en augmentant la densité de la zone hydrophobe ce qui aura pour conséquence une diminution de la fluidité et de la perméabilité à l’eau des liposomes et donc une plus grande résistance (Vemuri and Rhodes, 1995). Ainsi, des liposomes composés de phospholipides et cholestérol sont dits « conventionnels ». L’ajout de lipides chargés négativement (comme la PC ou la PE) permet d’éviter l’agrégation voire la fusion des liposomes. De plus, les membranes cellulaires étant chargées négativement, l’activité de nombreuses protéines membranaires va également dépendre de la présence de charges négatives à la surface des liposomes (Rigaud and Lévy, 2003).

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Figure 18. Les principaux lipides utilisés dans la composition des liposomes conventionnels.

4.2.2. La classification des liposomes

Les liposomes sont classés selon leur taille mais également selon le nombre de bicouches lipidiques (aussi appelé lamellarité) (Figure 19).

Figure 19. La classification des liposomes selon leur taille et leur lamellarité. Liposomes unilamellaires (ULV, unilamellar vesicle) petits (SUV, small unilamellar vesicle), gros (LUV, large unilamellar vesicle) ou géants (GUV, giant unilamellar vesicle) ; liposomes oligolamellaires (OLV, oligolamellar vesicle) ; liposomes multilamellaires (MLV, multilamellar vesicle) ; liposomes multivésiculaires (MVV, multivesicular vesicle). D’après (Laouini et al., 2012).

La taille des liposomes va conditionner leur stabilité ainsi que leur vitesse d’élimination de la circulation sanguine. Ainsi, leur stabilité est maximale entre 80 et 200 nm, et des liposomes de taille inférieure à 70 nm et supérieure à 300 nm vont être plus rapidement éliminés que des liposomes de taille d’environ 150-200 nm, avec une accumulation dans le foie pour les plus petits et dans la rate pour les plus gros (Litzinger et al., 1994).

Les liposomes peuvent également être classés selon leur composition et leur application in vivo. En dehors des liposomes conventionnels, il existe également des liposomes à longue durée de

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circulation, des immunoliposomes, des liposomes chargés (cationiques ou anioniques) ou fluorescents (lipides fluorescents) et des liposomes sensibles au pH (Figure 20).

Figure 20. La classification des liposomes selon leur composition et leur application. (a) Liposomes conventionnels, (b) liposomes à longue durée de circulation ou furtifs, (c) immunoliposomes et (d) liposomes fluorescents ou chargés. D’après (Monteiro et al., 2014).

Liposomes conventionnels

Comme décrit précédemment, les liposomes conventionnels sont constitués de phospholipides (chargés ou non) et de cholestérol. Ils sont très couramment utilisés pour la vectorisation de médicaments. Cependant, ils sont généralement très rapidement éliminés de la circulation sanguine par les macrophages du foie et de la rate.

Liposomes à longue durée de circulation

Pour pallier à la courte durée de circulation sanguine des liposomes conventionnels, des modifications ont été apportées afin d’augmenter leur demi-vie. Ainsi, la liaison covalente de polymères hydrophiles synthétiques tels que le polyéthylène glycol (PEG) à la surface des liposomes change les propriétés de surface et leur confère notamment une certaine hydrophilie qui améliore leur pharmacocinétique in vivo. Les liposomes constitués de phospholipides, cholestérol et PEG sont appelés « sterically stabilized liposomes » ou « furtifs » ou liposomes PEGylés (Figure 20). Cette surface PEGylée formerait une barrière stérique empêchant l’adsorption de protéines notamment plasmatiques comme les osponines à la surface des liposomes et empêcherait leur phagocytose par les cellules du système réticulo-endothélial (Woodle, 1998). Il semblerait cependant que l’administration répétée de liposomes PEGylés conduise à leur élimination rapide du sang par un phénomène de « clairance accélérée » [accelerated blood clearance (ABC)] due à une réponse immunogène avec apparition d’anticorps anti-PEG et conduisant à l’apparition d’effets indésirables pouvant être très graves (Wang et al., 2007). Ainsi, des polysaccharides naturels comme l’héparine, le chitosan, le dextran ou d’autres polymères naturels ou synthétiques se sont révélés intéressants pour remplacer le PEG (Knop et al., 2010).

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Immunoliposomes

Des anticorps entiers ou des fragments d’anticorps spécifiques d’une cible antigénique peuvent être utilisés pour fonctionnaliser les liposomes avec comme objectif l’interaction des liposomes avec des antigènes ou des récepteurs de surface surexprimés sur la cellule cible. Les anticorps sont fixés directement au niveau de la bicouche lipidique ou à l’extrémité de la chaîne de PEG (Figure 20). Ces liposomes ainsi modifiés ont été appelés « ligand-targeted liposomes » ou immunoliposomes (Moles et al., 2015).

4.2.3. Les techniques de préparation des liposomes

De nombreuses méthodes de préparation des liposomes ont été développées, mais les trois principales techniques utilisées sont : l'hydratation d'un film phospholipidique, l’évaporation en phase inverse ou par injection de solvant (Laouini et al., 2012; Monteiro et al., 2014).

Ces techniques de préparation des liposomes produisent généralement des LUV ou des MLV. Et la plupart d’entre elles aboutissent à l’obtention de liposomes de taille hétérogène. Des méthodes physiques telles que l’extrudation ou la sonication permettent ensuite d’homogénéiser la taille. Les liposomes utilisés pour la formation des protéoliposomes sont classiquement des LUV mais leur taille est souvent hétérogène malgré les méthodes pour homogénéiser et il reste parfois des vésicules multilamellaires résiduelles (Katzen et al., 2009).