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Épisode 4 : L’après première année de formation

3. Linda

Linda est titulaire d’un Bachelor d’une haute école. Avant de rentrer à l’Université, elle travaillait dans une institution d’État, en Suisse. À la suite d’une dégradation de son climat professionnel, elle fait un burn-out. Elle se rend auprès de sa famille, à l’étranger, pour un mariage. Les échanges avec ses proches confirment sa décision de démissionner de son emploi. Elle saisit alors cette opportunité pour assouvir un rêve de longue date : reprendre ses études. La reprise d’études universitaire se fait dix ans après son Bachelor.

Elle hésite entre plusieurs Master. Après avoir considéré diverses formations, elle se positionne finalement sur la formation des adultes. Elle lance ainsi la procédure d’inscription. Une de ses amies a déjà fait le MAFA il y a quelques années, sans valider le mémoire, est une source de soutien moral pour elle dans les moments de doutes et lui donne des conseils pour appréhender sa postulation au MAFA (lettre de motivation). Linda fait régulièrement appel à elle, lorsqu’elle a des questions d’organisation par rapport aux études et à sa vie professionnelle mais également dans les moments où elle sent qu’elle pourrait décrocher.

Linda commence sa formation en Septembre 2017. Au début de sa reprise, elle vient de quitter son emploi et est donc au chômage. Elle vit sur ses économies, avant de trouver un poste dans sa branche à 80%, dans les premiers mois de sa reprise. Linda planifie ses journées de travail en fonction des cours du MAFA. Souvent, elle suit les cours tout en travaillant dans la même journée. Elle ne choisit parfois pas ses cours en fonction de ses préférences. Elle est obligée de faire des choix stratégiques en fonction des horaires et des jours de cours afin de pouvoir concilier vie professionnelle et vie estudiantine. Elle sacrifie également beaucoup de sa vie sociale pour mener de front ces différentes vies sans que l’une ne soit affectée par l’autre.

Elle éprouve des difficultés lorsque surgissent des changements d’horaires ou de planification des cours du MAFA, car elle doit renégocier avec son employeur ses heures d’absence et de présence.

Son employeur est très conciliant, flexible, ce qui est une source de réconfort pour Linda.

Au commencement, elle rencontre des difficultés à créer des liens avec ses camarades universitaires car ses horaires de travail ne lui permettent pas de lier connaissance avec les autres étudiants (après les cours, elle doit retourner au travail).

Sa mère et son fiancé sont très présents dans sa reprise. Elle avait des loisirs avant le MAFA mais doit y renoncer par manque de temps.

Linda prévoit la fin de ses études MAFA en Septembre 2021. Elle a des appréhensions pour le stage professionnel, car elle ne sait pas comment elle va pouvoir valider ce module tout en travaillant.

La trace significative choisie par Linda pour son entretien est une succession d’évènements survenus dans le cadre de son ancien emploi. Elle mentionne ainsi que la dégradation de son environnement professionnel ayant nui à sa santé, l’a poussée à considérer une reprise universitaire. Cette dernière a ensuite été validée lors d’échanges avec sa famille, habitant à l’étranger. Ces échanges représentent pour elle une « révélation » (Linda, 29).

Épisode 1 : Avant l’entrée en formation.

Linda ne se sent plus aussi stimulée dans son emploi. La situation se dégrade de jour en jour et commence à affecter sa santé. Au cours d’un évènement familial, Linda prend du recul et décide de démissionner. Cela fait des années qu’elle veut reprendre ses études. Elle a grandi en gardant à l’esprit que la polyvalence est un atout et qu’elle finirait par diversifier ses connaissances et ses diplômes.

« Cela faisait plusieurs années que je réfléchissais à l'idée de reprendre une formation.

Parce que, j'ai toujours aimé l'idée d'avoir plusieurs casquettes, en tout cas chez les autres.

J'ai toujours été très impressionnée de voir leurs aptitudes à avoir fait plusieurs diplômes ou avoir plusieurs métiers, plusieurs cordes à leurs arcs. Donc, depuis toute jeune, je savais que je voulais aussi avoir plusieurs cordes à mon arc. » (Linda, 10-14)

Elle est donc décidée. Reste à déterminer quelle formation entreprendre. Linda fait de nombreuses recherches et consulte différentes personnes avant d’affirmer son choix : le Master Sciences de l’éducation de l’Université de Genève. La principale considération qui lui permet d’orienter son choix sur la formation proposée par l’Université de Genève est financière. En effet, le coût de la reprise en Master est largement inférieur aux autres formations qu’elle considère.

La décision est maintenant prise. Cependant Linda est vite submergée par un flot d’émotions contradictoires. Entre enthousiasme et appréhensions. Elle réalise un rêve d’enfant en reprenant ses études mais a peur de ne pas être acceptée en Master. Elle appréhende également la reprise, ainsi que l’après formation. Le Master ouvre en effet des portes à des postes à responsabilités, qui même s’ils lui semblent accessibles, entraînent une légère appréhension.

Dès sa décision, Linda est soutenue par sa mère et son fiancé, qui encouragent sa démarche. Elle trouve vite de l’aide auprès d’une amie, qui par chance a déjà suivi le Master et qui l’accompagne dans ses démarches d’inscription et lui donne des conseils afin d’anticiper au mieux son retour aux études.

« Alors, j'avais une amie qui avait fait, en fait, le Master FA, donc elle, elle m'a suivie un peu dans mon processus d'inscription. […] Et une fois, que j'ai vraiment été admise, […]

elle m'avait pas mal aussi « cassé » certaines de mes appréhensions quand même, et puis préparer à certaines choses, que j'allais vivre durant le Master. » (Linda, 112-117)

Épisode 2 : L’entrée en formation

Linda est finalement acceptée en Master, malgré ses craintes. Cela marque la concrétisation d’un rêve de longue date.

« Ah, ça a été une pluie d'émotions, car tout d’un coup, j’étais « oh là là ! » c'est vraiment réel. Parce que j'admets, ce que je n’ai pas dit, c'est que j'avais peur qu'on me refuse quand même. » (Linda 73-75).

Elle retourne ainsi sur les bancs universitaires, soutenue par le chômage qui lui permet de reprendre ses études, tout du moins pour un temps. Elle appréhende cette reprise en douceur en commençant par le certificat complémentaire. Elle ressent vite une pression d’ordre financière et se remet à chercher un emploi. Elle rencontre quelques difficultés à joindre les contraintes universitaires en termes de présence et le retour à l’emploi. Elle finit cependant par trouver un poste plus tard, qui lui permet de concilier étude, stabilité financière et vie professionnelle.

Épisode 3 : La première année de reprise.

Cet épisode se pense en en deux temps. Tout d’abord il relate la première année de reprise de Linda, qui correspond à son certificat complémentaire soutenu par l’aide financière du chômage. Mais il relate également la première année de Master, marquée par le retour à l’emploi de Linda.

Le parcours universitaire de Linda est marqué par des baisses de confiance et de stress intense, notamment en période d’examens. Avec le retour à l’emploi, Linda a des difficultés à créer des liens avec ses camarades universitaires. Elle arrive souvent in-extremis en cours et doit partir quelques fois avant la fin, afin de rejoindre son poste de travail. Elle peut ainsi difficilement participer aux réunions proposées par les autres étudiants, les cafés, les apéros, les repas de midi. Elle ressent alors ce besoin de se rapprocher d’eux et trouve cette possibilité lors du premier séminaire européen auquel elle assiste à Fribourg. Elle trouve en ses camarades un espace de partage. Elle peut ainsi « râler » et laisser sortir son mécontentement par rapport à la formation, ce qui la soulage.

Linda rencontre des périodes difficiles dans son parcours. Elle mentionne que les doutes et les remises en question de ses capacités sont inhérentes à l’université et qu’elle n’avait jamais ressenti cela dans son activité professionnelle. Elle est très entourée dans son parcours, et davantage encore lors de ces périodes délicates. Son fiancé lui offre une aide considérable à la maison, il prend en charge les tâches qu’elle avait l’habitude de faire et se montre très attentionné avec elle. A chaque fois que Linda doit rendre un travail universitaire, elle appelle sa maman, qui l’a toujours soutenue. Sa mère a ainsi la charge de permettre à Linda de rester concentrée sur sa tâche et de ne pas se distraire.

« C'est un peu le gardien de prison, du coup, mais c'est voilà, je lui dis est-ce que tu ne veux pas venir, au pire tu regardes la télé, tu lis des magazines, mais tu es là pour être un garde-fou, mais pour être sûr que je ne fasse pas autre chose, pour être sûr que je n'ai pas envie d'aller cuisiner, d'aller voir chaque 2 minutes. Voilà, sa présence m’aide vraiment beaucoup. » (Linda, 224-228).

Elle relit également ses dossiers, notamment pour l’orthographe qui semble être un sujet sensible pour Linda, qui souffre de dyslexie.

Linda sacrifie beaucoup de sa vie sociale mais garde le contact avec ses amis qui lui tendent la main dès qu’ils peuvent afin de l’aider à trouver des terrains pour ses travaux universitaires.

« J'ai une amie qui est venue m'aider à retranscrire des entretiens, on s’est séparer des bouts, j'ai des amis qui lorsque, je devais trouver des terrains d'observations, ont essayé de regarder, même si ce n’était pas possible. » (Linda, 652-654)

Elle s’appuie également sur son amie qui l’accompagne dès son inscription et qui représente une réelle source d’informations précieuses pour elle, de conseils et même l’encourage à persévérer lorsque Linda tend à décrocher ou à mettre en doutes ses capacités à réussir.

Lorsque Linda se rend compte qu’elle doit retrouver un travail, elle candidate à un poste dans son domaine. Elle rencontre alors son futur employeur pour la première fois. Ce dernier est conquis par le profil de Linda et désire réellement lui offrir le poste. Cependant, les réunions d’équipes ont lieu le mardi, et Linda suit des cours ce jour-là. Les employés de l’organisation mettent alors leur veto à sa candidature. L’employeur est alors contraint de ne pas engager Linda, mais lui signifie qu’il est très déçu et qu’il garde précieusement son dossier, pour des remplacements.

Quelques temps plus tard, une employée tombe enceinte et l’employeur rappelle Linda. Il lui offre un 60 %, comme souhaité au départ. Cependant, il s’agit d’une entreprise privée et les salaires offerts sont considérablement différents de ceux qu’elle recevait dans son ancien travail. Elle fait ses comptes et réalise qu’un 60 % ne suffit pas à lui permettre de subvenir à ses besoins. Elle négocie alors un 80 % réparti sur moins de 4 jours.

Chaque semestre elle informe le service RH de ses nouvelles disponibilités et du décompte de ses heures. Par soucis de transparence elle transmet également ces informations à ses collègues de travail.

Linda mentionne la difficulté de cette perpétuelle réorganisation, qu’elle doit faire chaque semestre.

Elle fait alors références aux promesses non tenues de l’Université. Promesses à propos desquelles son amie l’avait mise en garde.

« L'université avait fait quelques promesses qu’ils n’ont pas tenues, ce qui a eu comme conséquence, que par moment, j'ai dû quand même aller retourner (sic) vers mon employeur et les RH, pour leur dire, écoutez, il y a quand même un petit freestyle, donc là, il y a un cours qui se rajoute qui n'était pas forcément prévu ou que je n'avais pas compris comme ça. » (Linda, 400-403)

Épisode 4 : L’après première année de formation.

Cet épisode montre l’avancement de Linda, ses préoccupations quant à la fin de son processus de formation.

Linda est très soucieuse de la suite de sa formation, du point de vue de l’organisation de ses vies plurielles. Elle a réussi à trouver un employeur conciliant qui lui offre la possibilité de modifier son planning de travail à chaque nouveau semestre, en fonction des contraintes universitaires. Elle s’inquiète néanmoins quant à la suite de sa formation, et plus spécifiquement elle craint que son employeur atteigne ses limites en termes d’accompagnement et de flexibilité. Elle redoute notamment la période qu’elle devra consacrer à son stage professionnel et qui la contraindra à diminuer son pourcentage d’activité à 60 %, alors qu’elle avait négocié ces 20 % supplémentaires en entrant dans l’entreprise.

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