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La ligne de contact mobile

Dans le document Écoulements de surface et érosion (Page 35-38)

1.1 Interaction entre ´ecoulement et s´ediments

1.1.2 Diff´erentes approximations, diff´erents ph´enom`enes

1.1.2.3 La ligne de contact mobile

1.1.2.3.1 Ligne de contact et film de Landau-Levich-Derjaguin Pour la premi`ere fois `a notre connaissance, Daerr et coll. (2003) signalent la formation de chevrons d’´erosion lorsqu’une plaque recouverte d’un mat´eriau granulaire est extraite d’un bain statique d’eau, `a inclinaison et vitesse constantes (voir le sch´ema de la figure 4.4). Les descriptions et photographies de ces auteurs nous semblent tout-`a-fait en accord avec les r´esultats de la th´eorie introduite au § 1.1.2.1.3. Pourtant, la remarquable rectitude des fronts qui constituent la trame de ce motif (voir la figure 2 de Daerr et coll. (2003), et la figure 1.4 de la pr´esente ´etude) ´evoque les lignes caract´eristiques d’une onde transverse de gravit´e dans un ´ecoulement uniforme. En particulier, on pourrait interpr´eter les chevrons d’´erosion comme la marque d’une instabilit´e transverse de la ligne de contact mobile.

L’intersection entre la surface d’un liquide et celle d’un solide `a demi immerg´e dans ce liquide est appel´ee ligne de contact. Lorsque ce solide se meut suffisamment lentement, cette intersection atteint une position stationnaire (dans le r´ef´erentiel du liquide) : c’est la ligne de contact mobile (voir les exp´eriences de Blake et Ru-schak (1979)). Ce ph´enom`ene met en d´efaut la formulation classique des ´equations de Navier-Stokes, dont les conditions aux bords classiques stipulent que la vitesse du fluide vaut celle du solide immerg´e `a la surface de ce dernier, ce qui contredit la d´efinition de la ligne de contact mobile (Huh et Scriven, 1971). Au del`a d’une vitesse critique finie, le solide entraˆıne dans son ´emersion un mince film de liquide. Ce film porte les noms de Landau, Levich et Derjaguin (ci-apr`es LLD), qui furent les pre-miers `a l’´etudier pour affiner la technique de d´eposition des pellicules photosensibles (Landau et Levich, 1942; Derjaguin, 1943).

L’´etude de la disparition de la ligne de contact au profit d’un film LLD n´ecessite l’introduction d’un m´ecanisme microscopique capable de r´egulariser les ´equations de l’´ecoulement `a la ligne de contact. La m´ethode la plus courante consiste `a autoriser un glissement du fluide sur la surface solide, proportionnel `a la contrainte normale :

´ecoulement (de l’ordre de 1000) permet de penser que les conditions de surface libre affectent peu la couche limite au sein de laquelle naissent les rides.

1.1. Interaction entre ´ecoulement et s´ediments 35

il s’agit de la loi de glissement de Navier (Eggers, 2004a), qui s’´ecrit

u − U = λN∂u

∂n, (1.9)

o`u u et U d´esignent respectivement les vitesse tangentielles du liquide et du solide ;

λN est la longueur de glissement et n la coordonn´ee normale `a l’interface. Eggers (2004a) d´emontre analytiquement que les ´equations ainsi pos´ees n’admettent de solution avec ligne de contact mobile que pour des vitesses de retrait inf´erieures `a une valeur critique. Notons que cette r´egularisation des ´equations n’est que partielle, car le champ de pression correspondant `a cette th´eorie diverge au voisinage de la ligne de contact (voir l’appendice 4.2.7.2).

1.1.2.3.2 R´egularisation par la porosit´e et comportement des solutions Dans sa revue, de Gennes (1985) ´evoque, sans l’´etudier plus avant, le probl`eme de la ligne de contact mobile sur un solide poreux comme une situation naturellement r´eguli`ere. En effet, le fluide pouvant s’´ecouler dans les pores du solide, la vitesse moyenne de l’´ecoulement n’a plus de raison de s’annuler `a l’interface. Mieux, comme cela est ´etabli au § 4.2.2, ces nouvelles conditions d’interface r´egularisent totalement les ´equations de l’´ecoulement. La longueur caract´eristique de glissement est alors proche de la taille des pores. Dans une certaine mesure, ces conditions s’appliquent aux exp´eriences de Daerr et coll. (2003) : si l’on n´eglige le mouvement des grains, on peut assimiler la couche granulaire `a un mat´eriau poreux rigide. Ainsi r´egulari-s´ee, l’´equation diff´erentielle ordinaire d’ordre trois (4.58), qui r´egit l’´ecoulement `a proximit´e de la ligne de contact, peut ˆetre r´esolue num´eriquement (voir le § 4.2.3).

La valeur de l’angle de contact, form´e entre la surface du liquide et celle du solide, peut varier selon les caract´eristiques des mat´eriaux impliqu´es, et selon la vitesse de la ligne de contact — comme l’indique la loi de Tanner (de Gennes, 1985; Eggers et Stone, 2004). Eggers (2004a) a d´emontr´e, en utilisant une loi de glissement de Navier classique, qu’il n’existe plus de ligne de contact si l’angle de contact est nul. Au contraire, une ligne de contact peut exister sur un solide poreux pour un angle de contact nul, tant que la vitesse reste suffisamment faible (voir `a nouveau le § 4.2.3). Au-del`a d’une vitesse critique, la ligne de contact disparaˆıt. Le comportement des solutions de l’´equation (4.58) dans l’espace des phases traduit topologiquement ce comportement : lorsque la vitesse de la ligne de contact d´epasse sa valeur critique, l’axe associ´e aux conditions aux limites ne traverse plus la vari´et´e stable contenant ces solutions (voir le § 4.2.4). Le raccordement asymptotique pr´esent´e au § 4.2.5 permet d’approcher le comportement de la vitesse critique en fonction de l’inclinaison de la plaque poreuse.

Lorsqu’un film LLD recouvre le solide, il entraˆıne a priori du fluide hors du bain. Dans la th´eorie classique de Landau et Levich (1942) et de Derjaguin (1943), les pa-ram`etres de l’exp´erience fixent la valeur de ce flux en r´egime permanent. L’analyse de la dimension des vari´et´es contenant les solutions de l’´equation (4.58) au voisinage de la ligne de contact, et loin du solide, ´etablit l’existence d’un autre type de so-lutions, dont le flux n’est pas fix´e en r´egime permanent. Ces solutions `a flux libre,

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qui existent ind´ependamment de la condition de glissement, n’ont pas ´et´e observ´ees exp´erimentalement `a notre connaissance.

Les r´esultats du § 4.2.5, appliqu´es `a l’exp´erience de Daerr et coll. (2003) (voir le diagramme de la figure 4.13), indiquent qu’un film LLD est toujours entraˆın´e par la couche granulaire dans les conditions de formation de chevrons d’´erosion. La ligne de contact mobile ne semble donc pas ˆetre `a l’origine des chevrons d’´erosion, quoique sa disparition puisse ´eventuellement expliquer une transition entre les diff´erents types de motifs d’´erosion signal´es par Daerr et coll. (2003).

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