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Benjamin S. Blanchard et Wolter J. Fabrycky sont d’éminentes personnalités de l’INCOSE. Leurs travaux sur le « Systems Engineering » y font autorité.

Dans Systems Engineering and Analysis [BLA 98], ceux-ci présentent une vue beaucoup plus large des systèmes que celle proposée par l’INCOSE puisque celle-ci couvre non seulement les systèmes artificiels (abstraits et concrets) mais aussi les systèmes naturels. Pour Blanchard & Fabrycky, un système est caractérisé par :

- Ses composants,

- Ses attributs qui sont les propriétés ou les manifestations discernables de ses composants, - Ses relations qui lient entre eux composants et attributs.

Blanchard & Fabrycky rappellent la formule selon laquelle « a system is more than the sum43 of its components parts ».

Les composants d’un système coopèrent en fonction d’une finalité (objectif ou but commun) qui doit être précisément définie. Les actions finalisées qu’un système réalise sont appelées fonctions du système. Ces fonctions se réalisent au moyen d’altérations (transformations) de matière, d’énergie et d’information. Ce qui permet à Blanchard et Fabrycky d’introduire une distinction intéressante entre des composants structuraux, des composants opérants et des composants flux parmi les composants d’un système.

Ainsi pour un moteur à combustion interne, la culasse appartient à la catégorie des composants structuraux, l’équipage mobile à celle des composants opérants et la charge combustible à celle des composants flux.

Blanchard & Fabrycky introduisent ensuite les notions de système et de sous-système comme des notions relatives, un système peut être un sous-système d’un système englobant et être lui-même composé de sous systèmes.

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Les auteurs, invoquant cette formule très populaire, omettent cependant de nous préciser ce que pourrait bien être la « somme » de parties, comme la « somme » d’un moteur et d’une boîte de transmission.

150 Propositions pour la définition et la mise en place de processus d'ingénierie de systèmes

La référence à un environnement ne vient qu’ensuite pour distinguer les systèmes clos des systèmes ouverts caractérisés par des échanges de matière, d’énergie ou d’information avec leur environnement soit en entrée ou inputs ou en sortie du système ou outputs.

Blanchard & Fabrycky proposent une taxinomie intéressante des systèmes existants en proposant la décomposition suivante :

- Systèmes naturels - Systèmes artificiels

- Systèmes artificiels abstraits ou conceptuels - Systèmes artificiels concrets ou physiques

- Systèmes statiques

- Systèmes dynamiques

Ainsi Blanchard & Fabrycky adoptent une position réaliste, c’est-à-dire que, pour eux des systèmes comme les systèmes naturels ou les systèmes artificiels concrets existent indépendamment d’observateurs humains qui peuvent les connaître ou les ignorer.

On peut noter qu’ils introduisent la notion d’entropie d’un système, comme son degré de désorganisation, sans réellement formaliser sa définition ni en tirer un parti ultérieurement dans l’ouvrage. Il s’agit donc plus d’une référence culturelle qu’un concept clé. De même la notion de

complexité n’est pas abordée.

Dans ce travail, B. Blanchard et W.Fabrycky citent quatre référents principaux : - Norbert Wiener [WIE 48],

- Ludwig von Bertalanffy [BER 73], - Kenneth Boulding [BOU 56] et

- Vladimir Hubka [HUB 88].

Du premier (N Wiener), ils rappellent les travaux sur le contrôle, la régulation et sur l’homéostasie au sein de divers procédés, qui ont bien évidemment une place centrale aux yeux de ceux qui produisent des systèmes concrets artificiels. Cette maîtrise permet la conception et la production de systèmes correctement contrôlés et qui produisent de manière prévisible des effets recherchés.

De L. von Bertalanffy, B. Blanchard et W.Fabrycky rappellent le dessein d’une théorie du système général, capable de dégager des principes valables pour tous les systèmes et indépendants de la nature substantielle des systèmes concrets considérés.

Du troisième (K. Boulding), ils présentent la taxonomie des systèmes en neuf niveaux :

- Les frameworks ou structures statiques comprenant la géographie et l’anatomie de l’univers, - Les clockworks ou systèmes dynamiques simples,

- Les systèmes cybernétiques capables de traiter, de transmettre et d’interpréter de l’information, - Les structures conservatives (self-maintaining structure) comme les cellules ou organismes

vivants, - Les végétaux,

- Les animaux capables de mobilité, d’un comportement finalisé et d’une attention (awarness) de soi,

- Les humains dotés d’une conscience de soi et d’une capacité à produire, assimiler et interpréter des symboles,

- Les organisations sociales au niveau desquelles se situent les systèmes de valeurs, le contenu et le sens des messages, la mémoire, l’art et les émotions complexes.

Annexes 151

- Les inconnaissables sur lesquels nous pouvons faire des hypothèses sans pouvoir leur apporter de réponses.

Enfin B. Blanchard et W.Fabrycky soulignent les emprunts qu’ils font à la théorie des systèmes technologiques des quatrièmes (Hubka & Eder), sans toutefois préciser la nature de ces emprunts. En particulier, ils ne reprennent pas à leur compte la notion de sorties secondaires (secondary outputs) que Hubka et Eder introduisent, en précisant que ces sorties secondaires sont, la plupart du temps, des sorties indésirables du système technologique.

Avant de poursuivre, il nous parait intéressant de présenter ici44, ce que L Von Bertalanffy [BER 73], pages 73-77) soutient à propos d’un concept clé : le concept de finalité. Il souligne que ce terme a plusieurs significations dont les deux suivantes :

- une première signification peut concerner tous les systèmes (naturels et artificiels) dont l’évolution peut être décrite par des lois (lawful systems). Ces lois d’évolution, en particulier lorsqu’elles sont ramenées à des équations différentielles, peuvent être présentées de deux manières symétriques et équivalentes : une expression de l’évolution à partir de conditions

initiales, c’est la forme causale de la loi de comportement ou inversement une expression de l’évolution vers des conditions finales, c’est la forme finale de la loi de comportement45. On connaît de multiples exemples de cette expression finale des lois d’évolution : le principe de Maupertuis en mécanique, celui de Le Chatelier en chimie physique, la règle de Lenz en électricité,… Il y a équivalence entre ces deux formes, et dans ce cas, parler de finalité d’un système n’est rien d’autre qu’évoquer la destination vers laquelle la loi d’évolution du système le dirige. Von Bertalanffy souligne le caractère trompeur de la forme finale des lois d’évolution en raison des contaminations possibles par la seconde signification du terme finalité,

- une seconde signification de finalité suppose la présence d’une puissance créatrice, un deus ex-

machina capable d’assigner de l’extérieur un but au système. Il est clair que cette signification de

finalité concerne directement systèmes artificiels. Elle peut également concerner l’ensemble des systèmes naturels dans une conception religieuse du monde46.