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Pour induire une réduction des émissions de CO2, et également une réduction de la consommation des

carburants fossiles, les projets de véhicules hybrides doivent, au final, concerner le véhicule particulier de grande diffusion à usage polyvalent (usages urbain, périurbain, routier et autoroutier), la voiture de « monsieur ou madame Tout-le-monde », qui l’utilise pour aller au travail, pour aller faire ses courses à la périphérie des grandes villes et qui la prend pour partir en vacances.

L’utilisateur ou plutôt les utilisateurs-types ont des emplois de leurs véhicules et des budgets que les constructeurs mettent en évidence (élicitent) à travers des études de marché. Ces études permettent de définir d’une part des modèles d’usage des véhicules et de définir les exigences applicables à un véhicule hybride.

7.2.1. Modèles d’usage

Nous désignons par modèles d’usage des configurations définies des grands cycles d’utilisation par rapport auxquels les constructeurs automobiles évaluent les performances de leurs véhicules en matière de performance, de consommation, de pollution etc. Ces évaluations peuvent être officielles ou au contraire privées.

Le plus familier de ces cycles est probablement « le cycle 93/116/CE » du nom de la Directive Européenne [CE-93/116] qui le spécifie et par rapport à laquelle les constructeurs européens qualifient la performance consommation des véhicules qu’ils mettent en circulation. Toutefois, le cycle 93/116/CE n’est pas représentatif des multiples usages qui peuvent être fait d’un véhicule particulier. On comprend donc, qu’à côté de la 93/116/CE, de très nombreux cycles d’utilisation aient vu le jour dans différents pays.

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Il serait évidemment illusoire de vouloir procéder à un recensement (mais aussi de peu d’intérêt) de ces cycles à travers le monde, aussi nous contenterons nous d’en présenter un, développé par l’Agence US pour la Protection de l’Environnement (EPA). Il s’agit du Federal Test Procedure, qui représente une succession de trois cycles (un cycle moteur froid, un cycle intermédiaire et un cycle moteur chaud).

D’autres cycles auraient pu être évoqués comme le New York City Cycle (NYCC) qui reflète un trafic à basse vitesse avec de nombreux arrêts et redémarrages (stop-and-go traffic conditions) ou encore le US06 qui reflète un trafic avec des accélérations vives.

La vitesse est exprimée en miles par heure. Chacun de ces cycles traduit des conditions particulières d’utilisation d’un véhicule (un environnement et un style de conduite). Dans ces conditions, un modèle d’usage est un « cocktail » particulier d’un ensemble de cycles.

Figure 7.5. Cycle FTP (Federal Test Procedure).

7.2.2. Exigences opérationnelles pour un véhicule hybride

Dès lors le noyau dur de la spécification opérationnelle d’un véhicule hybride se présente, selon nous, comme un système d’exigences incluant deux groupes d’exigences :

- Exigences générales du segment de marché auquel appartient le véhicule hybride - Exigences spécifiques liées à l’hybridation.

Nous rappelons que nous avons défini une exigence comme une prescription de la forme « Condition => val(P) = D » i.e. « si la Condition est réalisée alors les valeurs de P devront être dans le domaine D » (6.1.2, La synthèse des exigences).

Par exemple, l’exigence Cycle = NYCC = > Conso ≤ 100g appliquée à un véhicule hybride donné signifie sur « sur le cycle New York City Cycle, la consommation de ce véhicule ne devra pas excéder 100 g de CO2 ».

120 Propositions pour la définition et la mise en place de processus d'ingénierie de systèmes

7.2.2.1. Exigences générales pour un véhicule hybride

Si la motorisation d’un véhicule particulier est une caractéristique (on pourrait dire fonction automobile) importante de ce dernier, elle ne peut cependant pas être pris comme le tout, un véhicule particulier assure bien d’autres fonctions.

La segmentation du marché des véhicules particuliers est en Europe une donnée assez stable [SUB 99]. Ainsi la « society of Motor Manufacturers and Traders » (SMMT) utilise une segmentation en neuf segments de marché 42 : #A segment-mini # B segment-small #C segment-lower-medium #D segment-upper-medium #E segment-executive # F segment-luxury #G segment-sports #H segment-dual-purpose #I segment-multi-purpose vehicle

Tableau 7.1. Segmentation du marché des véhicules particuliers

Chaque segment regroupe des véhicules, produits et vendus par les différents constructeurs et présentant des caractéristiques relativement homogènes (la longueur du véhicule, par exemple) et comparables. Chaque segment s’adresse également à un secteur de clients ayant des comportements [ANU 99], des attentes et des moyens relativement homogènes et comparables.

Les professionnels supposent qu’un consommateur comparera et hésitera entre deux véhicules du même segment. Les constructeurs sont très attentifs au placement (par rapport à la concurrence) de leurs véhicules dans le segment dans lequel ils se situent. Ainsi, en France, portent-ils une attention toute particulière au segment M1 correspondant du « #C segment-lower-medium » anglo saxon, qui est le segment de référence en France puisqu’il représente ici près de 38 % des immatriculations.

Evidemment cette catégorisation en segments, qui est à la fois une catégorisation opérationnelle et économique, manipulée par les constructeurs et les administrations, n’est pas figée une fois pour toutes, elle évolue dans le temps en fonction d’une part des innovations proposées par les constructeurs, comme l’installation dans le paysage des monospaces et des modifications des attentes des consommateurs comme la forte demande concernant les 4x4 (SUV).

Dès lors, si un constructeur envisage de commercialiser un véhicule hybride dans un segment donné « S », les performances de ce véhicule concernant ses propriétés devront être dans la cible des véhicules du segment « S ». Ainsi, par exemple, le comportement routier, la stabilité, l’habitabilité, le confort, la vie à bord, l’autonomie, l’ergonomie du poste de conduite, la disponibilité d’un hybride du segment « S » devra donc être dans la cible de ce segment.

Dans ce contexte, l’interface de commande du véhicule devra être équivalent à celui d’un véhicule conventionnel équipé d’une boîte automatique (pédales de frein et d’accélérateur, levier de boîte PRND), tandis que l’interface de visualisation présentera des spécificités liées à l’hybridation.

On peut même inclure dans ce groupe d’exigences, les performances de dynamique longitudinale, à savoir l’efficacité des freinages, le brio des accélérations, la continuité du couple transmis lors des changements de démultiplications alors même que ces prestations sont très directement allouées à la chaîne de traction.

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Nous utilisons en France une segmentation légérement différente (A, B, M1, M2, M3, H) mais assez comparable.

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7.2.2.2. Exigences spécifiques liées à l’hybridation

Les exigences spécifiques liées à l’hybridation vont, quant à elles, concerner les émissions de CO2, la

consommation de carburant et les coûts.

- En ce qui concerne les émissions de CO2 et la consommation de carburant, on attend d’un

véhicule hybride qu’il fasse la différence par rapport aux véhicules conventionnels du même segment, c’est là sa justification socio-économique.

Cette exigence peut sommairement être formalisée par une séquence d’exigences de la forme « Cycle

= ‘cyclei’ => Consommation (HEV) ≤ xi g CO2 » c’est-à-dire « sur un cycle ‘cyclei’, la consommation du véhicule hybride par devra être supérieure à x g CO2 » où ‘cyclei’ appartient à une famille définie de

cycles d’utilisation.

L’agrégation de ces exigences entraîne la formulation implicite d’une exigence conséquence de la forme « Durée = Année Fiscale & Usage = ‘u’ => Consommation-annuelle (HEV) = X g CO2 » où ‘u’

est une agrégation particulière de cycles d’utilisation représentatifs de l’usage fait du véhicule. - Dans le même temps, le bilan économique doit être acceptable pour l’acquéreur potentiel.

Cette dernière exigence peut s’exprimer de la manière suivante : « Amortissement & Usage = ‘u’ => TOC (HEV) –TOC (VRef) ≤ A », c’est-à-dire « sur une période d’amortissement (5 ans par exemple), et pour une utilisation déterminée, le surcoût de possession du véhicule hybride par rapport au coût du véhicule conventionnel de référence devra être inférieur au montant A (positif ou négatif) ».

Ainsi l’exigence « Amortissement => TOC (HEV) –TOC (VRef) ≤ A » peut être dérivée en trois sous exigences :

L’élaboration de ces exigences fait (ou devrait faire) l’objet d’un processus de décisions justifiées (Requirement Rationale) similaire à celui que nous avons exposé dans la section 6.2.5, et dont les arguments (6.2.5.2.3) sont notamment fondés sur des études de marché, par exemple l’étude déjà citée [EPRI 00] ].

Le système que forme les exigences opérationnelles fait ensuite l’objet d’un processus de dérivation (6.1.2.4, Relations entre exigences) et d’allocation (6.1.2.5, Relations entre exigences et objets cibles) parallèle du processus de conception du système.

Ainsi l’exigence « Amortissement => TOC (HEV) –TOC (VRef) ≤ A » peut être dérivée en trois sous exigences :

- « Cout-Acquisition (HEV) – Cout-Acquisition (VRef) ≤ Ai »

- « Durée = Année Fiscale & Usage = ‘u’ =>

Cout-Moyen-Opération (HEV) – Cout-Moyen-Opération (VRef) ≤ Ao »

- « Durée = Année Fiscale & Usage = ‘u’ =>

Cout-Moyen-Maintenance (HEV) – Cout-Moyen-Maintenance (VRef) ≤ Am »

Ces trois exigences dérivées qui résultent de l’allocation de l’exigence mère à trois phases du cycle de vie du HEV (acquisition, opération, maintenance) devront alors respecter la relation suivante :

A A Ai +Amortissement*(Ao+ m)=

.

On notera que la seconde exigence c’est-à-dire « Durée = Année Fiscale & Usage = ‘u’ => Cout-

Moyen-Opération (HEV) – Cout-Moyen-Opération (VRef) ≤ Ao » est en relation avec l’exigence implicite

que nous avions formulée précédemment « Durée = Année Fiscale & Usage = ‘u’ => Consommation-

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Ces deux exigences peuvent être compatibles, elles peuvent inversement être contradictoires (6.1.2, La synthèse des exigences).

La mise en évidence des relations existantes entre exigences montre que nous avons bien affaire à un système abstrait (5.1.3, Systèmes conceptuels) d’exigences et non à une simple liste d’exigences indépendantes.