• Aucun résultat trouvé

Les processus dynamo dans les objets astrophysiques

2.3 Les dynamos expérimentales et naturelles

2.3.2 Les processus dynamo dans les objets astrophysiques

Nous avons récapitulé précédemment les processus physiques qui étaient susceptibles d’être respon- sables de la dynamo solaire et donc du maintien du champ magnétique dans notre étoile. De nombreux modèles sont donc envisagés, même si le favori aujourd’hui est le modèle de type transport de flux qui inclut la présence de la circulation méridienne comme processus d’advection du flux magnétique entre les différentes zones sources de champ. Ce type de modèle est toutefois sujet à controverses comme nous le verrons et le modèle de dynamo d’interface n’est donc pas pour l’instant complètement abandonné, d’autant plus que l’effet α susceptible d’agir dans la zone convective reste encore très mal connu. Ainsi, il est important de s’intéresser aux processus physiques qui agissent dans d’autres objets astrophysiques pour mieux appréhender ce qu’il peut se passer dans notre étoile.

Et les autres étoiles ?

Comme nous l’avons vu, le projet H&K du Mt Wilson (Baliunas et Soon 1995) a permis d’étudier l’activité magnétique de plus de 110 étoiles du type spectral K à F. Cette étude a révélé qu’environ 40% de ces étoiles possédaient une activité magnétique cyclique dont la moitié avec une période du cycle bien définie. Il est donc naturel d’envisager la possibilité d’une dynamo dans ce type d’objets exhibant

2.3 Les dynamos expérimentales et naturelles 35

une activité magnétique aussi régulière. La bonne corrélation entre rotation et activité obtenue par Noyes et al. (1984); Durney (1985); Baliunas et al. (1996); Saar et Brandenburg (1999) renforce alors plutôt l’idée d’une dynamo d’interface dans ces étoiles. D’autre part, la diminution de la période du cycle magnétique avec l’augmentation de la vitesse de rotation ne semble pas être satisfaite par des modèles de transport de flux si l’on considère les récents résultats des modèles 3D (Brown et al. 2007) selon lesquels la vitesse de la circulation méridienne décroît avec le taux de rotation. Ainsi, il semblerait plutôt que les processus dynamo en suivant la séquence principale des étoiles de types solaires (F et G) aux étoiles peu massives (M) soient de type αΩ avec ou sans circulation méridienne puis de type α2dans les étoiles moins massives complètement convectives puis de type turbulente (aux petites échelles, avec une activité irrégulière).

Les étoiles massives (de type O, B et A) possèdent elles un coeur convectif et une enveloppe radiative. Cette différence fondamentale de structure comparée aux étoiles de types solaires implique également des processus de maintien du champ magnétique différents. Comme nous l’avons vu, très peu d’étoiles de ce type apparaissent actives magnétiquement. Il est pourtant envisageable qu’un effet dynamo existe dans le coeur convectif de ces étoiles. La raison pour laquelle ce champ n’est pas observé serait alors la difficulté qu’il aurait à traverser la zone stable qui le sépare de la surface (MacGregor et Cassinelli 2003; Brun et al. 2005). Ainsi, actuellement, l’explication la plus probable du magnétisme observé dans certaines de ces étoiles est plutôt l’existence d’un champ fossile dans l’enveloppe radiative, même si certains évoquent la possibilité d’un effet dynamo dans cette enveloppe (Spruit 2002). Les résultats de cet article et particulièrement la boucle dynamo invoquée ont toutefois récemment été remis en question par Zahn et al. (2007).

Enfin, nous avons vu que les étoiles dégénérées de type étoiles à neutrons possédaient des champs magnétiques très intenses, atteignant quelques 1013G en moyenne. En général, il est plutôt admis que ce champ magnétique résulterait de la seule compression du champ dans l’étoile ayant formé l’étoile à neutrons. Toutefois, durant la phase proto-étoile à neutrons (phase de naissance de l’étoile à neutrons), la luminosité des neutrinos a pu être tellement intense et l’opacité tellement élevée que l’étoile a pu devenir convective. Même si cette phase ne dure qu’environ 20 s, cela représente tout de même 104temps de retournement convectif du fait de l’intensité gigantesque de la gravité. Cette période d’instabilité convective serait donc suffisante pour détruire le champ primordial et le régénérer par effet dynamo (Thompson et Duncan 1993; Bonanno et al. 2003). C’est peut-être donc bien un champ dynamo que nous observons dans ce type d’étoile, qui aurait été créé en quelques secondes...

Dans les planètes et en particulier sur Terre

Certaines planètes du système solaire et en particulier la Terre possèdent également un champ ma- gnétique plus ou moins intense dont l’origine est très souvent attribuée à un processus dynamo. En effet, les enregistrements paleomagnétiques indiquent que le champ magnétique terrestre existe depuis plus de 3 milliards d’années et qu’il s’est renversé plusieurs fois avec une fréquence d’en moyenne 1 fois tous les 200 000 ans, indiquant ainsi l’existence d’une dynamo au sein de son coeur liquide de fer. Ce coeur liquide est convectif du fait des forts gradients de température et de composition chimique, ce qui est comme on l’a vu un des ingrédients fondamentaux de l’étirement et de la torsion des lignes de champ donnant lieu à un effet dynamo.

La nécessité est alors apparue de construire un modèle dynamique complet permettant de démontrer qu’une dynamo était capable de produire un champ magnétique d’une intensité comparable aux observa- tions, possédant une structure dipolaire dominante avec un axe pratiquement aligné avec l’axe de rotation de la Terre, possédant une structure de champ non-dipolaire variant sur des temps caractéristiques de l’ordre de 100 à 1000 ans et se renversant occasionnellement. De manière à répondre à toutes ces ques- tions, Glatzmaier et Roberts (1996) ont développé un modèle simulant l’interaction entre la convection

36 Magnétohydrodynamique et processus dynamo

F. 2.8 – Structure du champ magnétique terrestre en 3D simulé grâce au modèle de geodynamo de Glatzmaier et Roberts. Les lignes de champ dirigées vers l’intérieur sont représentées en bleu et vers l’extérieur en jaune. L’axe de rotation terrestre est vertical et passe par le centre. Les lignes de champ sont tracées jusqu’à 2 rayons terrestres. Tiré de http ://es.ucsc.edu/ glatz/geodynamo.html.

et le champ magnétique dans un coeur liquide de fer entourant un coeur solide (comme au sein de la Terre) en essayant dans la mesure du possible de conserver les dimensions, le taux de rotation, le flux de chaleur et les propriétés des matériaux du coeur terrestre. Ces calculs avec un code MHD spectral ont permis d’obtenir le type de résultats représentés sur la figure 2.8. Il est à noter dans cette simulation qu’il existe une transition à l’interface coeur-manteau entre un champ intense et complexe dans le coeur fluide convectif où l’effet dynamo a lieu et un champ beaucoup plus régulier et à la structure potentielle au-delà du coeur.

Cette simulation a permis d’obtenir pour la première fois des renversements du dipole magnétique et des propriétés intéressantes des intensités respectives des différents mulitpôles durant les phases de renversement. Aujourd’hui encore, la dynamo est l’effet privilégié pour expliquer le champ magnétique terrestre mais de grands progrès restent à être accomplis pour comprendre théoriquement son véritable fonctionnement.

Les disques d’accrétion

Les disques d’accrétion, formés de matière orbitant autour d’un objet central sur lequel elle chute du fait de la dissipation d’énergie par viscosité, sont également un lieu privilégié pour l’existence d’un effet dynamo. En effet, dans ces objets, l’effet dynamo serait le moyen de maintenir le champ magné- tique nécessaire au déclenchement de l’instabilité magneto-rotationelle ou MRI (Balbus et Hawley 1991, 1998) , probablement la principale responsable de la turbulence dans ces disques. L’existence d’instabi- lités purement hydrodynamiques expliquant cette turbulence a également été envisagée (Richard et Zahn 1999; Dubrulle et al. 2005). La MRI semblerait toutefois être la plus efficace et la plus compatible avec le transport de moment cinétique observé dans les disques d’accrétion.

2.3 Les dynamos expérimentales et naturelles 37

Si la MRI peut être considérée comme responsable d’un effet dynamo dans les disques (Brandenburg et al. 1995), elle représente un mécanisme très différent de ceux dont il a été question précédemment. En effet, l’action de la force de Lorentz est essentielle dans ce cas pour maintenir à la fois la turbulence et le champ magnétique et donc un modèle de dynamo cinématique (où la rétroaction de la force de Lorentz est négligée) ne peut s’appliquer à ce système particulier qu’est le disque d’accrétion. La MRI est le processus le plus naturel pour maintenir la turbulence dans les disques. Son couplage avec l’effet dynamo fait de ce système un système auto-excité capable de maintenir un champ magnétique à grande et à petite échelle et où la turbulence apparaît naturellement.

Les dynamos galactiques

Enfin, les galaxies sont également des objets magnétiques qui exhibent en moyenne, pour les galaxies spirales, des champs grande échelle de l’ordre de quelques 10−6G. Certaines observations montreraient éventuellement que ce champ magnétique serait également du à un effet dynamo en leur sein (voir Shu- kurov (2000, 2004)).

Tout d’abord, l’observation de la configuration du champ magnétique montre qu’il existe à la fois une composante poloidale et une composante toroidale du champ avec un rapport des 2 (ou pitch angle) non négligeable. Cette observation indique qu’il existe des mécanismes de régénération des 2 composantes du champ. Nous savons que la rotation différentielle agit pour régénérer du champ toroidal à partir de champ poloidal et cette rotation différentielle existe dans les galaxies spirales mais pour obtenir une com- posante poloidale de l’ordre de ce qui est observé, un mécanisme de type effet α est vraisemblablement nécessaire.

D’autre part, la symétrie du champ observé est facilement reproduite par un modèle de dynamo galactique. L’analyse de la rotation Faraday des sources galactiques montre que les composantes hori- zontales du champ ont une parité paire. Les simulations de dynamo galactique montrent effectivement que le champ radial et toroidal sont de manière prédominante symétrique par rapport à l’équateur galac- tique. Sans invoquer l’effet dynamo, il est beaucoup plus compliqué de concevoir l’obtention de telles configurations de champ, encore une fois le processus dynamo parait donc extrêmement satisfaisant.

Le champ magnétique dans les disques galactiques atteint pratiquement l’énergie d’équipartition avec la turbulence interstellaire. Cette caractéristique indique que le champ est d’une certaine manière couplée aux mouvements turbulents. Toutefois, des modèles ne faisant pas appel à un effet dynamo (i.e. avec un champ primordial) seraient également en mesure de reproduire des intensités de champ identique. Cet argument est donc peut-être moins décisif que les précédents mais mérite tout de même d’être évoqué.

Toutefois, même si l’effet dynamo semble capable d’expliquer la formation de champ magnétique grande échelle dans les galaxies, de nombreuses interrogations demeurent concernant par exemple l’effet de la conservation de l’hélicité magnétique, la difficulté de générer des champs organisés à l’échelle de la galaxie ou l’interaction avec les champs magnétiques à petite échelle. Le sujet de la dynamo galactique demeure donc encore un sujet de recherche très actif et est loin d’avoir dévoilé tous ses mystères.

39

Deuxième partie

Modélisation 2D de la dynamo solaire

globale

41

Chapitre 3

La dynamo champ moyen

Sommaire

3.1 L’équation d’induction moyennée . . . 41