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LES PRINCIPES

Dans le document INTRODUCTION AU DROIT PRIVE (Page 193-200)

L’APPLICATION DE LA LOI DANS LE TEMPS

I.- LES PRINCIPES

Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

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I.- LES PRINCIPES

116.- Le domaine

Il s’agit en premier lieu de déterminer si toutes les normes générales reçoivent uniformément les mêmes règles d’application dans le temps ou si, au contraire, il y a lieu d’opérer des distinctions par catégories. La réponse est nuancée.

Pour les normes de valeur législative, il n’y a en principe pas lieu de faire de différences. L’origine de la norme n’a pas d’incidence sur le droit transitoire qui lui est applicable. Que la norme soit issue d’une loi soit votée par le Parlement, d’une ordonnance ou d’une loi référendaire, les principes ne varient pas et s’il y a des variantes, elles tiennent éventuellement à leur contenu, mais une fois encore, pas à leur provenance.

Pour les normes de valeur supralégislative, il faut distinguer entre les textes qui énoncent des principes et ceux qui édictent des règles.

- Les premiers sont les grandes déclarations de droits, la Déclaration de 1789, le Préambule de 1946, la Conv. EDH, et les principes qu’elles consacrent sont censés valoir depuis toujours dès lors que ceux-ci tous plus ou moins liés à notre conception de la dignité de la personne humaine. Ainsi qu’il a été dit, l’impératif de dignité fait figure d’invariant de l’idéal de justice sur lequel s’appuie notre droit positif (v. supra n° 21). Il n’y a pas lieu de s’interroger sur son application dans le temps dès lors qu’il a l’éternité pour lui. En pratique, au demeurant, la question se pose assez peu dès lors que ces textes, même à ne considérer que la date de leur élévation au rang de norme supralégislative, sont maintenant assez anciens et que les situations auxquelles il y a lieu de les appliquer leur sont pour la plupart postérieures dans le temps.

- Les seconds sont essentiellement issus du droit de l’Union européenne riche en Règlements et Directives qui portent les uns et les autres plus de règles que de principes. En principe, il faut considérer qu’il revient en priorité au droit de l’Union européenne de fixer le régime d’application dans le temps des règles constituant le droit dérivé. Avec deux observations : si le texte européen ne prévoit rien, il est permis d’appliquer les principes du droit français ; il y a du reste une convergence des solutions entre droit national et droit de l’Union européenne, notamment sur la non-rétroactivité de la loi nouvelle.

Pour les normes générales infralégislatives, essentiellement les actes réglementaires de l’Administration, les nuances à apporter peuvent tenir à l’ordre juridictionnel qui en fait application. Si la norme a vocation à être appliquée à des personnes privées par une juridiction de l’ordre judiciaire, les principes de son application dans le temps sont les mêmes que si elle était issue d’une loi. En effet, ces principes sont très largement issus de la jurisprudence de la Cour de cassation et cette dernière ne fait pas de différence entre les lois et les règlements. Si la norme administrative est appliquée à une personne publique par une juridiction de l’ordre administratif, il faudra alors puiser dans la jurisprudence du Conseil d’Etat afin de trouver la solution de droit transitoire. Cela s’apprend en étudiant le droit administratif. Pour autant, là comme ailleurs, il y a des convergences et la jurisprudence administrative consacre « le principe en vertu duquel les règlements ne disposent que pour l'avenir » (CE 25 juin 1948, Société du journal l’ « Aurore »). C’est un

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193 « principe général du droit », au sens du droit administratif, ce qui signifie que dans la hiérarchie des normes, il s’insère entre la loi et le règlement ; on dit aussi, mais ce n’est pas d’une élégance extrême que le « PGD » a une valeur à « supradécrétale » et infralégislative.

Pour les normes de la société civile, il faut bien reconnaître que la Doctrine se pose rarement la question et qu’en fait on ne sait pas trop. La coutume est censée venir du fond des âges et la question n’a pas vraiment de pertinence. Elle reste incontournable pour les normes issues de l’activité professionnelle, par exemple, les conventions collectives en droit social. Il y a lieu de retenir qu’elles ne peuvent a minima échapper au principe de non rétroactivité de la règle nouvelle, qui a rang de principe général du droit, et qu’en tout état de cause, appliquées par des juridictions de l’ordre judiciaire (ce peut être le cas pour une convention collective), le droit transitoire est celui qui découle de la jurisprudence de la Cour de cassation. Il en va alors de ces normes comme de celles issues des lois et des règlements. Le terme de « loi » sera désormais utilisé pour désigner uniformément toutes les normes générales soumises aux principes issus de cette jurisprudence. 117. Le contenu ; les dispositions transitoires.

Il est de plus fréquent que les lois nouvelles comportent des dispositions transitoires. Intuitivement, chacun comprend de quoi il s’agit. La loi prévoit un ou deux articles pour organiser la transition entre le régime ancien et le nouveau qu’elle instaure. Il reste que l’expression est ambiguë car ce type de dispositions peut avoir deux objets qu’il faut bien distinguer. a.- Tout d’abord, les dispositions transitoires peuvent fixer la date d’entrée en vigueur de la loi nouvelle, ce qui permet alors d’échapper à la règle supplétive de l’article 1er du code civil qui prévoit l’entrée en vigueur au lendemain de la publication de la loi au Journal Officiel. Par exemple, l’article 16 de la loi n° 2018-287 du 20 avril 2018 ratifiant l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations dispose que « la présente loi entre en vigueur le 1er octobre 2018 ». Il faut ici bien retenir que cette « disposition transitoire » ne règle pas un problème de « droit transitoire » ou d’application de la loi dans le temps. En effet, si elle fixe la date d’entrée en vigueur de la loi nouvelle, elle ne règle pas la question de son application aux situations en cours, notamment aux contrats conclus avant cette date et qui continuent de s’exécuter après. Or, c’est bien cette question qui est à proprement parler celle de l’application de la loi dans le temps.

b.- Il arrive ensuite et aussi que les dispositions transitoires soient plus ambitieuses et règlent authentiquement cette question. Par exemple, l’article 9 de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrat dispose d’abord que « les dispositions de la présente ordonnance entreront en vigueur le 1er octobre 2016 », ce en quoi elle se contente de fixer sa date d’entrée en vigueur, pour ensuite ajouter que « les contrats conclus avant cette date demeurent soumis à la loi ancienne », ce qui constitue une authentique disposition de droit transitoire dès lors qu’il est ainsi énoncé que les contrats encore en cours au jour de la date d’entrée en vigueur restent soumis aux règles anciennes.

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194 L’expression « dispositions transitoires » peut donc renvoyer à deux types de règles qu’il y a lieu de ne pas confondre, celles qui se contentent de fixer la date d’entrée en vigueur de la loi nouvelle et celles qui déterminent l’application de celle-ci dans le temps aux situations juridiques en cours. Pour éviter la confusion, mieux vaut désigner ces dernières comme des « dispositions de droit transitoire ». Elles seules règlent la question de l’application de la loi dans le temps.

Lorsqu’il existe des dispositions de droit transitoire, donc, celles-ci s’appliquent en priorité. Ce n’est qu’à défaut, qu’il y a lieu de suivre les principes issus de la loi et de la jurisprudence. 118.- Le contenu ; le principe de non-rétroactivité de la loi nouvelle

Le principe est connu et sa signification connue (v. supra n° 40). Les effets de droit découlant de l’application de la règle ancienne ne peuvent être empêchés ou anéantis dès lors que les conditions de celle-ci s’étaient toutes réalisées avant la date d’entrée en vigueur de la loi nouvelle. Par exemple, si un contrat a été valablement conclu au regard des règles applicables lors de sa formation, la loi nouvelle qui modifie les conditions de validité du contrat ne peut avoir pour effet d’invalider rétroactivement celui-ci. Le contrat valablement conclu continue de tenir lieu de loi à ceux qui l’ont fait, même après l’entrée en vigueur de la loi nouvelle.

En droit civil, le principe de non-rétroactivité de la loi nouvelle n’a qu’une valeur législative de sorte que le législateur peut prévoir des dérogations. Il est trois techniques possibles : * La première consiste à introduire une disposition de droit transitoire dans la loi nouvelle aux fins de préciser que celle-ci est expressément rétroactive. Par exemple, la loi du 5 juillet 1985 relative aux accidents de la circulation, dont l’objet principal était d’en simplifier l’indemnisation et de mettre un terme à un contentieux de masse, aussi coûteux qu’inutile, contenait un article 47, ainsi rédigé : « les dispositions des articles 1er à 6 s'appliqueront dès la publication de la présente loi, même aux accidents ayant donné lieu à une action en justice introduite avant cette publication, y compris aux affaires pendantes devant la Cour de cassation. Elles s'appliqueront également aux accidents survenus dans les trois années précédant cette publication et n'ayant pas donné lieu à l'introduction d'une instance »

La loi du 5 juillet 1985 posait un certain nombre de règles ayant pour condition la survenance d’un accident de la circulation. En disposant que celles-ci s’appliqueraient à des accidents survenus avant son entrée en vigueur, qu’ils aient ou non donné lieu à une action en justice, la loi nouvelle les a ainsi rendues rétroactives. La rétroactivité s’expliquait par les motifs même de la réforme. Il s’agissait de réussir une mesure d’économie procédurale, au bénéfice des justiciables et de l’institution judiciaire. Or, par principe, une mesure d’économie est d’autant plus efficace qu’elle est à effet immédiat. D’où son application immédiate par les tribunaux et conséquemment son application rétroactive à des accidents survenus antérieurement à son entrée en vigueur.

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195 * La seconde passe le recours à des lois interprétatives. En pareille hypothèse, le législateur intervient parce qu’à la suite de l’entrée en vigueur d’une loi, la jurisprudence ou la doctrine se partagent entre deux interprétations. Le législateur tranche et retient une nouvelle rédaction de la règle significative de l’interprétation consacrée. Comme pour la jurisprudence lorsqu’elle interprète un texte préexistant, la loi interprétative s’incorpore au texte interprété et elle est censée être en vigueur depuis la même date que ce dernier. La loi interprétative est donc susceptible de s’appliquer à des faits antérieurs à sa date de publication et à ce titre, elle a une portée rétroactive. Le législateur ne doit pas instrumentaliser cette technique. La Cour de cassation juge ainsi qu’« une loi ne peut être considérée comme interprétative qu'autant qu'elle se borne à reconnaître, sans rien innover, un droit préexistant qu'une définition imparfaite a rendu susceptible de controverses » (V. Cass. Civ. 3ème 27 février 2002, Pourvoi n°00-17.902, Publié au bulletin) ; elle relève d’ailleurs et ensuite dans cette espèce l’ « abondant contentieux » suscité par la dispositions interprétées. Si le caractère interprétatif de la loi nouvelle n’est pas avéré, il faut considérer que celle-ci pose une nouvelle règle dont l’application interviendra dans le respect du principe de non-rétroactivité.

* La troisième technique est celle des lois de validation. Ce sont des lois expressément rétroactives dont l’objet est de déclarer certaines pratiques ou certains actes passés conformes à l’état du droit positif. L’affaire dite du tableau d’amortissement est toujours donnée en exemple, A juste titre du reste. L’article L. 312-8 du code de la consommation, dans sa rédaction issue d’une loi du 13 juillet 1979, prévoyait que les offres de crédit immobilier, adressées à des consommateurs, comprennent un « échéancier des amortissements ». Un consensus de place s’était formé autour de l’idée que cette expression requérait des prêteurs qu’ils indiquent dans l’offre de crédit, le montant de chaque échéance de remboursement, sa périodicité, le nombre des échéances ou la durée du prêt. La Cour de cassation s’est montrée plus exigeante et a retenu « que l'échéancier des amortissements, joint à l'offre préalable, doit préciser, pour chaque échéance, la part de l'amortissement du capital par rapport à celle couvrant les intérêts, et que le non-respect de ces dispositions d'ordre public est sanctionné non seulement par la déchéance du droit aux intérêts pour le prêteur, mais encore par la nullité du contrat de prêt » (Cass. civ. 1ère 20 juillet 1994, Pourvoi n° 92-19.187, Bull. civ. n° 262 ; v. déjà, mais moins net, Cass. civ. 1ère 16 mars 1994, Bull. civ. I n° 100). Les banques recevaient bien mal cette interprétation dès lors que cette dernière avait mécaniquement pour effet de rendre non conformes l’intégralité des crédits immobiliers dispensés aux particuliers. Le coût de la non-conformité était au demeurant élevé dès lors que celle-ci se traduisait par la perte du droit aux intérêts, donc la gratuité du crédit. Une loi n° 96-314 du 12 avril 1996 réglait la difficulté par une loi de validation des offres de crédit distribuées avant le 31 décembre 1994. Son article 87.I était ainsi rédigé :

« les offres de prêts (…) émises avant le 31 décembre 1994 sont réputées régulières au regard des dispositions relatives à l'échéancier des amortissements prévues par le 2o de l'article L. 312-8 du même code, dès lors qu'elles ont indiqué le montant des échéances de remboursement du prêt, leur périodicité, leur nombre ou la durée du prêt, ainsi que, le cas échéant, les modalités de leur variations »

Le législateur a de manière rétroactive déclaré conforme à l’état du droit positif l’ensemble des offres émises avant telle date, en l’espèce le 31 décembre 1994. Il n’est de meilleure illustration d’une loi de validation.

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196 Si l’affaire du tableau d’amortissement a tant fait parler d’elle, c’est en raison des suites qu’elle a connues. On comprenait que la loi de validation, intervenue à propos de l’ensemble des crédits immobiliers accordés aux particuliers, servait les intérêts des banques et qu’elle constituait un sérieux démenti législatif de l’interprétation jurisprudentielle (même si la loi de 96 a intégré celle-ci pour l’avenir dans le code de la consommation, mais c’est un autre sujet). Politiquement, l’affaire était sensible si bien que, sans grande surprise, la loi a été déférée au Conseil constitutionnel, appelé à se prononcer précisément sur la constitutionnalité du dispositif de validation. Par une décision du 9 avril 1996 (96-375 DC), le Conseil a retenu la constitutionnalité de la loi de validation et en relevant notamment « qu'en déclarant régulières les offres de prêts ayant méconnu les dispositions relatives à l'échéancier des amortissements prévues par le 2° de l'article L. 312-8 du code de la consommation, le législateur a entendu éviter un développement des contentieux d'une ampleur telle qu'il aurait entraîné des risques considérables pour l'équilibre financier du système bancaire dans son ensemble et, partant, pour l'activité économique générale ». Mais certains juges du fond ont également rechigné à faire application de cette loi de validation et pour en éluder les termes, ont considéré qu’elle était contraire à la Conv. EDH. D’où une jurisprudence de la Cour de cassation à cet égard, dont l’arrêt rendu le 29 avril 2003 est caractéristique (Pourvoi n°00-20.062, Publié au bulletin) :

« Vu l'article 6,1 , de la Convention Européenne des droits de l'homme, ensemble l'article 87-1 de la loi du 12 avril 1996 ;

Attendu que, statuant dans un litige afférent à un prêt immobilier consenti le 14 avril 1988 par la société anonyme Le Comptoir des Entrepreneurs (présentement société Entenial) aux époux X..., lesquels soutenaient que l'offre de prêt était irrégulière en ce qui concernait les indications portées sur le tableau d'amortissement qui leur avait été remis, l'arrêt attaqué a refusé de faire application de l'article 87-1 de la loi du 12 avril 1996 réputant régulières, sous réserve des décisions passées en force de chose jugée et sous certaines conditions, les offres de crédit émises avant le 31 décembre 1994 ; qu'au soutien de cette décision, la cour d'appel a énoncé que l'application de ce texte, aux instances en cours porte atteinte aux principes de l'égalité des droits et à l'exigence du procès équitable prévus par l'article 6 de la Convention Européenne des droits de l'homme en ce qu'elle modifie une donnée fondamentale du litige au détriment d'une des parties ;

Attendu, cependant, qu'obéit à d'impérieux motifs d'ordre général l'intervention du législateur destinée, par l'adoption de la loi du 12 avril 1996, à aménager les effets d'une jurisprudence de nature à compromettre la pérennité des activités bancaires dans le domaine du crédit immobilier ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés, le premier, par fausse application, et le second, par refus d'application ».

Pour autant, l’affaire est remontée jusqu’à la Cour EDH et cette dernière n’a pas été du même avis que la Cour de cassation et le Conseil constitutionnel réunis. Dans un dossier Lecarpentier c./ France (CEDH. 14 février 2006, Req n° 67847/01), elle sanctionne en ces termes l’Etat français pour avoir validé rétroactivement des offres de crédit établies en contrariété avec les termes d’une interprétation jurisprudentielle :

« 43. La Cour estime que, grâce à une connaissance directe de leur société et de ses besoins, les autorités nationales se trouvent en principe mieux placées que le juge

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44. De plus, la notion d’« utilité publique » est ample par nature. En particulier, la décision d’adopter des lois portant privation de propriété implique d’ordinaire l’examen de questions politiques, économiques et sociales. Estimant normal que le législateur dispose d’une grande latitude pour mener une politique économique et sociale, la Cour respecte la manière dont il conçoit les impératifs de l’« utilité publique », sauf si son jugement se révèle manifestement dépourvu de base raisonnable (Pressos Compania Naviera S.A. et autres, précité, § 37 ; Broniowski c. Pologne [GC], n° 31443/96, § 149, CEDH 2004-V).

45. En l’espèce, le Gouvernement affirme que l’article 87 de la loi du 12 avril 1996 procède d’un motif d’intérêt général : sauvegarder l’équilibre financier du système bancaire, afin de ne pas mettre en péril l’activité économique en général.

46. S’agissant de la décision du Conseil constitutionnel, la Cour rappelle qu’elle ne saurait suffire à établir la conformité de l’article 87 de la loi du 12 avril 1996 avec les dispositions de la Convention (Zielinski et Pradal et Gonzalez et autres c. France, arrêt du 28 octobre 1999, CEDH 1999-VII, § 59). Elle note toutefois que le Conseil constitutionnel, s’inspirant de la jurisprudence de la Cour, exige désormais un intérêt général « suffisant » (cf. notamment sa décision no 2004-509 DC du 13 janvier 2005). 47. La Cour rappelle également qu’en principe un motif financier ne permet pas à lui seul de justifier une telle intervention législative (voir, notamment, Zielinski et Pradal

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