• Aucun résultat trouvé

Les principaux mécanismes économiques en jeu

Dans le document Impact sectoriel des allègements de charge (Page 103-109)

La TVA Sociale : quels effets économiques d’après les modèles ?

N. B : seuls les effets macro-économiques sont simulés par les modèles.

1 Les principaux mécanismes économiques en jeu

Dans le cas de la TVA sociale (réduction des cotisations des employeurs compensée par une hausse de TVA) :

• la réduction des cotisations sociales patronales diminue le coût du travail, ce qui est favorable à l’emploi et se traduit à court terme par une substitution de travail au capital ; à plus long terme, l’augmentation de la demande de travail entraîne une hausse des salaires qui limite l’augmentation de l’emploi ;

• les prix des produits fabriqués en France sont influencés par deux effets contraires : la baisse du coût du travail permet une baisse des prix hors taxes, dont l’ampleur dépend des décisions des entreprises en fonction, notamment, de l’intensité de la concurrence à laquelle elles sont soumises ; en sens contraire, l’augmentation de la TVA renchérit les prix TTC. La résultante des deux effets dépend de l’ampleur de la baisse des prix HT, qui peut compenser en tout ou partie la hausse de la TVA. L’impact global sur les prix intérieurs est donc incertain, d’autant plus que les deux

effets précédents peuvent se produire dans des délais différents. Sur les produits importés, la hausse de la TVA se répercute intégralement en hausse du prix TTC, sauf si les importateurs baissent leurs marges. Il y a donc nécessairement une hausse du niveau général des prix, qui résulte de la hausse mécanique des prix TTC des produits importés et, dans une proportion qui dépend du comportement des entreprises, de la hausse des prix TTC des produits intérieurs.

• Sur le marché intérieur, les ménages subissent une perte de pouvoir d’achat du fait de la hausse des prix. L’augmentation des prix entraîne une revalorisation d’une partie des prestations sociales et des salaires (notamment le SMIC), qui rétablit le pouvoir d’achat des ménages, mais accroît les dépenses publiques et augmente le coût du travail. Une spirale inflationniste prix- salaires peut s’enclencher, éventuellement jusqu’à annuler la réduction initiale du coût du travail.

• En ce qui concerne les échanges extérieurs, la compétitivité est améliorée par la baisse des prix HT des produits fabriqués en France et par la hausse des prix TTC des produits importés. L’effet est d’autant plus fort que la baisse des cotisations sociales est en grande partie répercutée dans les prix HT.

L’ampleur et la chronologie de tous ces effets influence notablement les résultats. La TVA sociale est conçue initialement comme une mesure neutre pour les finances publiques, puisque l’augmentation de TVA doit compenser exactement la réduction des cotisations sociales. L’équilibre des finances publiques est donc garanti ex-ante, c’est-à-dire en supposant inchangés les comportements des acteurs, et sans tenir compte des effets de bouclage, notamment des règles d’indexation du SMIC ou des prestations sociales. Mais les conséquences de la mesure ex-post peuvent être telles qu’elles conduisent à un déséquilibre des finances publiques. Si les effets positifs - et notamment les créations d’emplois - l’emportent, la mesure peut être favorable aux finances publiques et en définitive dégager de nouvelles ressources. En revanche, si la mesure, par exemple sous l’effet d’une forte inflation, ne permet la création que d’un nombre limité d’emplois et accroît les dépenses publiques via les revalorisations des prestations sociales indexées sur les prix, alors il en résulterait un manque à gagner pour les finances publiques. Ceci appellerait une hausse des prélèvements obligatoires qui viendrait à son tour limiter les effets sur l’emploi et la compétitivité.

Une augmentation de la CSG, en contrepartie de la baisse des cotisations sociales, ferait porter le nouveau prélèvement sur les revenus et non pas sur la consommation. Comme dans le cas de la TVA, la baisse des cotisations des employeurs doit entraîner une baisse des prix HT des produits intérieurs ; comme le nouveau prélèvement pèse sur les salaires nets et n’a pas ex ante d’impact sur les prix, la substitution peut être déflationniste. La mesure risque d’entraîner toutefois une perte de pouvoir d’achat des ménages puisque, comme avec la TVA, une partie de la baisse des prix HT bénéficie aux consommateurs étrangers, alors que le nouveau prélèvement pèse en totalité sur les ménages français. Une hausse de CSG peut donc entraîner des revendications salariales à la hausse. Elle reste toutefois moins inflationniste qu’une hausse de TVA. Si la réduction des cotisations sociales porte sur les cotisations salariales, il n’y a pas de baisse du coût du travail, donc pas d’effet de substitution du travail au capital, ni de gain de compétitivité. La baisse des cotisations salariales accroît le salaire net. En sens inverse, les prélèvements sont augmentés, soit sur la consommation, soit sur l’ensemble des revenus. Il n’y a pas globalement de perte de pouvoir d’achat. La hausse de la TVA entraîne mécaniquement une hausse des prix puisque les prix HT n’ont pas été diminués, ce qui peut enclencher une spirale inflationniste. La hausse de CSG n’est en revanche pas inflationniste, mais elle pénalise les ménages qui ne bénéficient pas la hausse des salaires nets, notamment les bénéficiaires des revenus du remplacement.

D’autres conséquences économiques de la mesure devraient être examinées.

C'est le cas par exemple de la réaction de la banque centrale à l'inflation. Ce point n'a sans doute qu'une importance relative dans la mesure où l'inflation constatée en France, qui résulte des effets de compétitivité, doit normalement s'accompagner d'une baisse des prix dans les pays étrangers, puisque les prix HT des produits exportés sont réduits. De ce fait, l'effet inflationniste global au sein de la zone euro devrait rester modéré, et ne pas entraîner de réaction de la BCE.

Un autre point à examiner est celui de l'impact différencié de la mesure, soit entre les secteurs de production, soit entre les ménages. L'exercice est compliqué, souvent au-delà de la portée des modèles. Il conviendrait néanmoins de s'assurer que les effets négatifs de la mesure ne se concentrent pas sur un nombre restreint de secteurs ou de ménages « perdants ».

Tableau 18 : Synthèse des effets des quatre options de substitution

Effets mécaniques Enchaînements possibles

Coût du travail Prix Pouvoir d’achat des ménages Cotisations patronales / TVA baisse Hausse (a minima sur les importati ons)

Baisse Les mécanismes d’indexation poussent les salaires et les prestations sociales à la hausse, ce qui relève le pouvoir d’achat mais atténue la baisse du coût du travail et dégrade le solde public

Cotisations patronales / CSG baisse Baisse (sur les produits fabriqués en France) Baisse (les revenus nets de CSG diminuent, les prix des produits importés ne changent pas)

Il y a moins d’inflation qu’avec la TVA, donc moins de revalorisations automatiques. La perte de pouvoir d’achat, plus durable, peut maintenir un impact sur l’emploi plus fort à moyen-long terme. Cotisations salariales / TVA neutre Hausse (répercus sion de la hausse de TVA) Globalement neutre – légèrement favorable aux salariés

Risque de spirale inflationniste

Cotisations salariales /

CSG

neutre Neutre Globalement neutre – légèrement favorable aux

salariés

Effets sur l’emploi

La baisse du coût du travail est favorable à l’emploi par deux mécanismes : directement, en augmentant la demande de travail ; indirectement, en améliorant la compétitivité et donc en augmentant la demande de biens.

En sens inverse, la hausse des prix abaisse le pouvoir d’achat des ménages et réduit leur consommation, et par les mécanismes d’indexation entraîne des hausses de salaires et des prestations sociales, qui relèvent le pouvoir d’achat des ménages mais alourdissent le coût du travail et les dépenses publiques.

Les raisonnements précédents valent à court-moyen terme. A long terme, une modification des prélèvements a peu d’effets au niveau macro-économique, les prélèvements étant en définitive équivalents (ce qui n’exclut pas un impact micro-économique). Toutefois, une modification du profil de cotisations qui accentuerait le ciblage des exonérations sur les salariés peu qualifiés pourrait avoir un impact durable sur l’emploi.

Les simulations ont examiné différentes variantes possibles de la mesure. Parmi les différentes options possibles, plusieurs questions importantes se posent relativement à la réduction des cotisations sociales.

• La baisse des cotisations sociales peut prendre différentes formes. Elle peut être uniforme sur l’ensemble des niveaux de salaires, mais elle peut aussi être ciblée sur les bas salaires, dans la poursuite des allégements de cotisations sociales en vigueur actuellement. Les conséquences sur l’emploi, telles qu’elles ressortent des simulations, apparaissent très sensibles au ciblage de la baisse des cotisations : dans les simulations de la DGTPE par exemple, une baisse de cotisations sociales de l’ordre de 2 points induit moins de 50 000 emplois si elle est uniforme, et plus de 300 000 emplois si elle prolonge le ciblage des allégements actuels.

• Indépendamment de son ciblage, l’amplitude de la substitution influence naturellement l’amplitude des effets sur l’économie. Les modèles utilisés pour les simulations, qui reposent sur des mécanismes linéaires, conduisent à une relation directement proportionnelle entre l’amplitude de la baisse des cotisations et ses effets sur l’économie. Le choix de l’amplitude de la substitution soulève une question : quelles sont les marges de réduction des cotisations sociales ? Actuellement, le taux global des cotisations patronales est d’environ 45 %, dont 30 % pour les cotisations de sécurité sociale. Les allégements, qui ne portent que sur les cotisations de sécurité sociale, représentent 26 points 20 de cotisations au niveau du SMIC. Il ne reste donc qu’environ 4 points de cotisations de sécurité sociale, et seulement 2 si l’on exclut les cotisations à la branche AT-MP qui varient d’une entreprise à l’autre. Dans ces conditions, une baisse des cotisations sociales, surtout si elle est ciblée sur les bas salaires, dépasserait les cotisations de sécurité sociale restant au niveau du SMIC. Elle supposerait donc de créer, directement ou indirectement, des cotisations de sécurité sociale négatives sur les bas salaires. Il faut noter que la prolongation du ciblage actuel des allégements peut conduire à augmenter sensiblement le taux maximum d’exonération, au niveau du SMIC : dans les simulations de la DGTPE, une baisse des cotisations de 9 Md€, soit l’équivalent de 2 points de cotisations, suppose en conservant le point de sortie actuel à 1,6 SMIC de porter le taux maximum d’exonération (au niveau du SMIC) à 40 %.

20 depuis le 1er juillet 2007, ce taux a été porté à 28,1 % dans les entreprises de moins de 20

• Enfin, une question à examiner est celle du champ de la baisse des cotisations sociales, qui peut concerner tous les salariés, seulement ceux du secteur privé, les non-salariés (pour lesquels il n’y a pas de distinction entre cotisations salariales et patronales). Enfin, il faut rappeler que les modèles utilisent un certain nombre de paramètres, auxquels les résultats sont sensibles. On peut citer par exemple

- l’élasticité des exportations et des importations à leurs prix ;

- la répercussion dans les prix HT de la baisse des cotisations sociales patronales (ou hausse des marges des entreprises) ; - les effets sur les prestations sociales et sur les salaires des règles

d’indexation sur les prix ;

- les délais d’intervention de ces mécanismes qui, en raison de leur déphasage, produisent des effets différents à court terme et long terme.

Il y a donc inévitablement une part d’incertitude dans les résultats des simulations, néanmoins les différentes variantes proposées permettent d’avoir une idée de la sensibilité des résultats aux valeurs des principaux paramètres.

Dans le document Impact sectoriel des allègements de charge (Page 103-109)