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I.3. Les ergols ioniques verts

I.3.2. Les oxydants ioniques

Les différentes études menées sur la substitution possible d’autres composés énergétiques à l’hydrazine ont amené à s’intéresser particulièrement aux oxydants ioniques azotés qui répondent aux critères cités au paragraphe I.2.1.

Tableau I-2 : principales caractéristiques physico-chimiques de HAN, ADN, HNF et AN.

Sigle HAN ADN HNF AN

Formule NH3OHNO3 NH4N(NO2)2 N2H5C(NO2)3 NH4NO3

CAS-RN 13465-08-2 10456-78-6 149-74-7 6484-52-2

Masse molaire (g mol-1) 96,04 124,05 183,08 80,04

Densité (g cm-3) 1,84 (20 °C) 1,81 (20 °C) 1,87 (25 °C) 1,72 (20 °C)

Solubilité dans l’eau à 20 °C (%) 95 78,10 52,88 65,16

Température de fusion (°C) 44,5-48 92 124 169,6

Température d’ébullition (°C) 145 135 135 210 °C à 11

mmHg

Forme cristalline monoclinique monoclinique monoclinique Selon la T°

∆∆∆∆formationH° (kJ mol -1 ) -366,5 ; -398,7 -128 -71 ; -72 -365,6 ∆∆∆∆combustionH° (kJ mol -1 ) - - -1066, -1086 - ∆∆∆∆solvatationH° (kJ mol -1 ) - - 50,04 - Balance Oxygène (%) 33,31 25,79 13,11 19,19

I.3.2.1.

Nitrate d’hydroxylammonium HAN

Plusieurs monergols ont été étudiés pour des applications en propulsion. Cependant, peu ont trouvé une suite. L’hydrazine est le monergol le plus utilisé, il a trouvé des applications dans beaucoup de domaines tels que les propulseurs de contrôle d'attitude, générateur de gaz, etc. En revanche, sa toxicité et son danger d’inflammation présentent des inconvénients majeurs, ce qui limite son utilisation. HAN était parmi les premiers monergols choisis, il offre plusieurs avantages très attractifs : il a une densité élevée (1,50 g cm-3 pour une solution à 80 % en masse), un point de congélation négatif, des performances énergétiques importantes et il est non toxique.

Le nitrate d’hydroxylammonium a été développé par l’armée américaine au début des années 80 pour l’utilisation comme composant de LGP (Liquid Gun Propellant). Depuis, plusieurs organismes se sont intéressés à l’utilisation du HAN, notamment dans des applications spatiales comme générateur de gaz ou comme oxydant dans le cas des biergols.

a- Méthodes de Préparation

La préparation du nitrate d’hydroxylammonium a fait l’objet de nombreuses études qui ont été brevetées. Plusieurs méthodes de préparation ont été étudiées. Il a été préparé en solution aqueuse par électrolyse de l’acide nitrique [53], par échange ionique [54] ou par réduction catalytique du monoxyde d’azote (NO) [55] ou de nitrates (NO3-) [56] par l’hydrogène (H2) en milieu acide

avec une grande pureté, par la neutralisation d’une solution aqueuse d’hydroxylamine (NH2OH)

avec une solution diluée d’acide nitrique (HNO3, équation (7)). Les solutions diluées de HAN ainsi

préparées ont été concentrées par évaporation de l’eau sous pression.

) 6 ( 2 H+(aq) + NO3-(aq) + 3 H2(g)  NH 3OH+(aq) + 2 H2O(l)

) 7 ( NH2OH(aq) + HNO3(aq)  NH 3OH

+

(aq) + NO3 -

(aq)

HAN a été aussi préparé à l’état solide par K. L. Wagaman [58] par neutralisation d’une solution alcoolique (méthylique ou éthylique) d’hydroxylamine avec une solution très concentrée de l’acide nitrique (entre 70 % et 90 %). L’équipe de Kondrikov [59] a préparé HAN solide par réaction entre le nitrate de baryum et le sulfate d’hydroxylammonium en solution aqueuse (équation (8)). La solution de HAN est ensuite concentrée par évaporation de l’eau suivie par une congélation à -10 °C, les cristaux sont ensuite séchés sur P2O5.

) 8 ( (NH3OH+)2SO42- + Ba(NO3)2 2 NH3OH+NO3- + BaSO4

b- Propriétés et caractéristiques physico-chimiques

Le nitrate d’hydroxylammonium est un composé ionique très énergétique, c’est le sel très oxydant de l’acide nitrique et l’hydroxylamine. Il est très soluble dans l’eau (jusqu’à 95 % à 20 °C), cette forte solubilité est due aux interactions importantes entre les molécules d’eau et les ions constituant HAN (forte solvatation). C’est un composé non toxique, non cancérigène, qui ne présente aucun risque d’auto inflammation. Il a une faible tension de vapeur, une densité élevée et un faible point de congélation. Sa stabilité est assurée par des liaisons hydrogène entre les deux espèces constituant HAN ; soit en forme ionique entre les anions NO3- et les cations NH3OH+ [60, 61] (Figure I-2-a),

soit en forme moléculaire entre l’hydroxylamine et l’acide nitrique [62, 63] (Figure I-2-b). Dans ce dernier cas, la configuration la plus stable du HAN est quand l’oxygène et l’hydrogène de l’hydroxylamine forment des liaisons hydrogène avec les sites de l’acide nitrique.

H N H O H H O N O O H N H O O N O O H H O N O O H

Figure I-2 : liaisons hydrogène présentes dans HAN ; (a) : forme ionique, (b) : forme moléculaire [62, 63]

Rheingold et al. [60] ont déterminé la structure cristalline de HAN en 1986. Ils ont montré que

paramètres suivants : a = 4,816 Å, b = 6,800 Å, β = 99,35°, V = 346,7 Å3, Z = 4. La densité du solide est de 1,841, tandis que celle du liquide est 1,68.

Afin de déterminer la densité de mélanges HAN-eau, plusieurs équations ont été proposées, leurs applications dépendent du domaine de concentration du mélange HAN-eau [64].

c- Décomposition thermique

La décomposition et le comportement thermique de mélanges HAN-eau et HAN solide ont été soigneusement étudiés par différents groupes. HAN est un composé instable thermiquement, il peut se décomposer auto-catalytiquement à des températures élevées. Afin de comprendre les mécanismes de la décomposition thermique et de l’évolution du mélange HAN-eau au moment du stockage, plusieurs études ont été effectuées. La majorité de ces études ont été réalisées sous pression et avec des vitesses de chauffage assez élevées. les produits de décomposition ont été analysés par spectroscopie infrarouge [51, 65-67] ou Raman [68, 69]. En revanche, le diazote et le dioxygène restent indétectables par spectroscopie infrarouge, aussi les bilans matières ne sont pas établis. Plusieurs réactions de décomposition thermique de mélanges HAN-eau ont été proposées : (équations (9)-(14)) ) 9 ( [59, 69] 4 NH3OHNO3 3,2 N 2O + 7,2 H2O + 1,6 HNO3 + 0,4 O2 ) 10 ( [51, 68] 2 NH3OHNO32 NO 2 + 4 H2O + N2 ) 11 ( [51, 68, 69] 4 NH3OHNO3 3 N 2O + 7 H2O + 2 HNO3 ) 12 ( [51] 45 NH3OHNO3 20 N2O + 10 N2 + 26 HNO3 + 2 NO2 + NH4NO3 ) 13 ( [70] NH3OHNO3 0,6 N2 + 1,6 H2O + 0,8 HNO3 ) 14 ( [70] 3 NH3OHNO3 N 2 +N2O + 5 H2O + 2 HNO3

Seul Cronin [51] (équation (12)) a fait apparaître le nitrate d’ammonium parmi les produits de décomposition thermique du HAN. D’après ces réactions (équations (9), (11)-(14)), l’acide nitrique est omniprésent dans les produits de décomposition de mélanges HAN-eau. En revanche, l’étude menée par R. Sasse [71] ne montre aucune détection de NH4+ et de HNO3, et que le mélange HAN-

eau se décompose selon la réaction suivante : (équation (15))

) 15 ( 3 NH3OHNO3 2 N 2O + 6 H2O + N2 + 2 O2

La décomposition thermique du mélange HAN-eau commence par l’évaporation de l’eau, suivie par une apparition rapide est simultanée de l’acide nitrique (HNO3), du monoxyde d’azote (NO) et du

travaux montrent que le mélange HAN-eau se décompose en plusieurs étapes. La première étape de la décomposition de ce mélange est un transfert très rapide de proton de NH3OH+ vers NO3- pour

former de l’hydroxylamine et de l’acide nitrique (équation (16)). L’eau présente dans le mélange joue un rôle majeur dans la décomposition du HAN, elle influe sur la vitesse de décomposition et sur le délai d’amorçage du mélange HAN-eau [65, 74].

) 16 ( NH3OH+(aq) + NO3-(aq)  NH 2OH(g) + HNO3(g)

Après le transfert du proton, plusieurs réactions mécanistiques prennent place. Elles mettent en évidence la formation d’entités chimiques instables très réactives.

Les études menées par Lee et al. et Kim et al. [66, 73, 74] ont montré que l’acide nitrique formé selon la réaction (16) va se décomposer rapidement en ions nitronium (NO2+) et hydroxyle (OH-,

équation (17)). En effet, ces ions sont très réactifs, ils réagissent rapidement avec l’hydroxylamine afin de former d’autres intermédiaires instables tels que, HNO et HONO (équations (18) et (19)). En outre, d’autres équipes [59, 67] ont supposé que la décomposition thermique de mélanges HAN- eau démarre par une oxydation compétitive du HAN (ou l’hydroxylamine) par HNO3 et HNO2

(équations (20)-(22)). ) 17 ( HNO3 NO2+ + OH- ) 18 ( NH2OH + NO2+ H 2NO+ + HONO ) 19 ( H2NO+ + OH- HNO + H2O ) 20 ( NH2OH + HNO3 HNO + HNO2 + H2O

) 21 ( NH2OH + 2 HNO33 HNO2 + H2O

L’étape de formation de HNO et de HONO est nécessaire pour le développement de la réaction de décomposition thermique du HAN. De plus, la formation des espèces gazeuses est due à la combinaison de ces deux réactifs entre eux et avec les produits de départ (NH2OH et HNO3).

Formation de N2O ) 22 ( NH2OH + HONO  N 2O + H2O ) 23 ( 2 HNO  N 2O + H2O ) 24 ( HNO + HAN  N 2O + H2O + HNO3

Il faut noter que la quantité de N2O produite à partir de la réaction (23) reste minoritaire par rapport

Formation de NO ) 25 ( 3 HONO  2 NO + HNO3 + H2O ) 26 ( HONO + HNO  2 NO + H2O ) 27 ( 2 HONO  NO + NO2 + H2O Formation de NO2 ) 28 ( HONO + HNO3 2 NO2 + H2O (27) ( 2 HONO  NO + NO2 + H2O Formation de N2 ) 29 ( NH2OH (ou NH3OH+) + HNO  N 2 + 2 H2O ) 30 ( HNO + HAN  N 2 + 2 H2O + HNO3

d- Stabilité thermique, stabilité de stockage et compatibilité

La pureté des solutions HAN-eau est un facteur très important. Elle permet d’assurer une stabilité thermique et une longue durée de stockage de ces mélanges. Parallèlement, plusieurs études [75-79] ont été effectuées afin de chercher des matériaux adéquats pour stocker ce type de produit et d’éviter d’autres accidents liés à ces problèmes.[80]

La stabilité thermique et la stabilité du stockage du mélange HAN-eau sont potentiellement sensibles à la présence des contaminants, particulièrement les cations des métaux de transition. Ces impuretés sont cédées par la surface des matériaux (incompatibles) en contact avec le mélange HAN-eau. Parmi les cations potentiels qui peuvent catalyser la décomposition du HAN figurent Fe3+, Cu2+, Ni2+ voire Cr3+ et Ag+.

Le fer est l’impureté la plus virulente en présence du HAN car le cation Fe3+ se réduit en Fe2+. Ce dernier va s’oxyder rapidement en présence de HNO3 pour donner Fe3+. Par conséquent, le fer a

donc une action électrocatalytique sur HAN (équations (31)-(33)).

) 31 ( 2 NH3OH+(aq) + 4 Fe3+(aq)  4 Fe 2+(aq)+ N2O(g) + H+(aq) + H2O(l)

) 32 ( 2 NO3-(aq)+ 8 Fe2+(aq) + 10 H+(aq)  8 Fe 3+(aq)+ N2O(g) + 5 H2O(l)

L’équation bilan de ces deux réactions est la suivante :

) 33 ( 4 NH3OH+(aq) + 2 NO3-(aq)  3 N 2O(g) + 2 H+(aq) + 7 H2O(l)

(11) 4 HAN(aq)  3 N 2O(g) + 2 HNO3(aq) + 7 H2O(l)

Les travaux menés par E. W. Schmidt [79] sur l’étude de compatibilité de certains matériaux avec le nitrate d’hydroxylammonium ont montré que le HAN est complètement incompatible avec l’Aeroshell 17 (présence de molybdène), l’argent MG-120 et certains alliages de l’aluminium Al- 6061. De plus, l’incompatibilité de HAN avec certains lubrifiants, tels que Aeroshell 14, 10W-30 motor Oil et Valvoline SAE 50W. Cette incompatibilité est due au caractère très oxydant du HAN envers les chaînes carbonées et les antioxydants présents dans ces lubrifiants (formation de dioxyde de carbone). En revanche, aucune réaction n’a été observée avec le titane (Ti-6Al-4V) et les inox de la série 300.

Des stabilisateurs ont été proposés afin de complexer les ions métalliques, principalement le fer. L’acide aminophosphonique, des sels de pyridine, Na-2-hydroxypyridine (NaHPNO) et aussi d’autres stabilisateurs nommés Dequest à base de phosphonates sont les plus étudiés [81].

e- Décomposition catalytique

Dans le but d’augmenter les performances énergétiques des ergols à base de HAN et d’assurer une décomposition complète de l’ergol utilisé, la mise en place d’un catalyseur capable de diminuer la température d’amorçage et d’augmenter la vitesse de la décomposition de ces ergols a préoccupé plusieurs chercheurs.

D’après le paragraphe I.3.2.1-d-, HAN se décompose exothermiquement en présence d’impuretés métalliques d’une manière incontrôlable. Ces contaminants jouent le rôle de catalyseurs homogènes, mais ce type de catalyseurs est indésirable industriellement. Dans cette optique, d’autres types de catalyseurs ont été développés (catalyseurs hétérogènes), permettant de contrôler la décomposition des ergols à base de HAN (système on-off).

Schmidt et Gavin [82] ont déposé le premier brevet concernant la décomposition catalytique des propergols à base de HAN en 1996. Ils ont utilisé des catalyseurs du groupe de la mine du platine (32 % d’iridium, 10 % de platine et 12 % de ruthénium) ou des métaux de transition, supportés sur de l’alumine ou du tantale (pas de résultats concernant les catalyseurs à base de métaux de transition dans cette référence).

La décomposition des propergols produit un dégagement de gaz à très haute température qui ont un caractère très oxydant. Ces conséquences peuvent réduire l’activité catalytique, ce qui rend le choix du catalyseur plus délicat. En effet, le catalyseur doit être stable thermiquement, chimiquement (ni frittage, ni changement de phase autant pour la phase active que pour le support) et capable de

Les travaux réalisés sur la décomposition des propergols à base de HAN en présence des catalyseurs commerciaux tels que Shell 405 (32 % Ir/Al2O3), LCH-207 (32 % Ir/Al2O3), LCH-210

(10 % Pt/Al2O3) et LCH-251 (12 % Ru/Al2O3) [82, 83] ont montré que ces derniers subissent une

détérioration causée par l’environnement très oxydant et la température très élevée des gaz formés. Ainsi, ces derniers conduisent à une perte de la surface spécifique du catalyseur (transformation de phase de l’alumine) et une perte en activité du métal (oxydation et frittage du métal). Le développement des catalyseurs (supports) capables de résister à des températures élevées (> 1300 °C) est un véritable défi. Depuis, de nombreux travaux ont été effectués sur l’étude de la stabilité des catalyseurs (stabilité thermique et activation à faible température).

L’utilisation de supports autres que l’alumine (oxyde, céramique, …), ou le changement de la forme chimique de l’alumine par un dopant étaient les principales voies de recherche afin d’augmenter la résistance thermique du support [84-88]. R. Eloirdi [85] a étudié la décomposition de propergols à base de HAN sur des catalyseurs à base d’éléments du groupe de platine (Pt, Pd et Rh). Ces métaux ont été imprégnés sur des alumines dopées. Eloirdi a trouvé que les alumines dopées au lanthane, au praséodyme, au baryum et au silicium présentent une grande stabilité thermique (> 1200 °C), mais avec une surface spécifique relativement faible. Par ailleurs, les travaux de A. F. Popa [86] ont porté sur l’étude la stabilité thermique des catalyseurs à base de platine supportés par des alumines dopés. Il a étudié des alumines sous forme de xérogels et d’aérogels et a trouvé que ces derniers présentent une surface spécifique élevée (120 m2 g-1 pour les aérogels, 60 m2 g-1 pour les xérogels) ainsi qu’une meilleure dispersion métallique.

I.3.2.2.

Dinitramide d’ammonium (ADN)

a- Préparation

Le dinitramide d’ammonium (ADN, NH4+ N(NO2)2-) a été découvert au début des années 70 par les

soviétiques lors d’un programme secret. Il a été développé principalement pour l’utilisation en propulsion solide. En outre, à la fin des années 80, les américains ont inventé d’autres dérivés de ce composé (sels de dinitramide). Par ailleurs, Hamel et Olson sont les premiers à avoir inventé des composés organiques avec la fonction dinitramide (R-N(NO2)2).

La préparation de l’ADN est généralement effectuée par neutralisation de l’acide dinitramidique (HN(NO2)2) par de l’ammoniac (équation (34)). La préparation de cet acide a beaucoup inspiré les

chercheurs.

) 34 ( HN(NO2)2 + NH3 NH 4+ N(NO2)2-

Bottaro et al. ont proposé de préparer l’ADN par une nitration directe du carbamate d’ammonium [89] (équation (35)) ou du nitramide [90] (équation (36)), suivie de la neutralisation.

) 35 ( NH4NH2CO2 + NO2BF4 HN(NO 2)2 + NH4+BF4- + CO2 ) 36 ( NH2NO2 + NO2BF4 HN(NO 2)2 + HBF4

D’autres chercheurs ont proposé de préparer l’ADN par plusieurs étapes de nitration d’un alkylcarbamate, suivie par une réaction avec l’ammoniac [91, 92] (équations (37) et (38)), alors que d’autres ont proposé sa préparation à partir de la nitration de l’urée [93] (équations (39)-(42)).

) 37 ( NH2CO2R  (NO 2)2NCO2R ) 38 ( (NO2)2NCO2R + NH3 (excès)  (NO2)2N- NH4+ + NH2CO2R

) 39 ( NH2CONH2 + HNO3 NH2CONH2.HNO3

) 40 ( NH2CONH2.HNO3 + H2SO4 NO 2NHCONH2

) 41 ( NO2NHCONH2 + NO2BF4 (NO 2)2NCONH2 + HBF4

) 42 ( (NO2)2NCONH2 + 2 NH3 NH 4+ N(NO2)2- + NH2CONH2

Actuellement, le processus de fabrication de l’ADN est principalement développé par les suédois. En effet, sa préparation s’effectue par une nitration directe de l’aminosulfonate de potassium par de l’acide nitrique en présence d’acide sulfurique [94] (équation (43)). L’ADN est actuellement commercialisé par la compagnie EURENCO Bofors AB.

) 43 ( NH2SO3K + HNO3/H2SO4 NH 4N(NO2)2 + KHSO4 + H2O

b- Propriétés et caractéristiques physico-chimiques

Le dinitramide d’ammonium (ADN) est un sel ionique très énergétique, sa formule chimique est représentée Figure I-3. L’anion dinitramide (N(NO2)2-) présente une stabilité très élevée due à une

délocalisation de la charge négative sur l’intégralité de l’anion. En outre, l’ADN présente de fortes liaisons hydrogène entre les atomes d’hydrogène du cation ammonium et les atomes d’oxygène de l’anion dinitramide [95]. N N N O O O O

-

N H H H H +

Le dinitramide d’ammonium est un solide blanc (cristaux), très hygroscopique, stable à température ambiante, très soluble dans l’eau (~ 70 % en masse à 0 °C), non toxique et il a une masse volumique assez élevée (1,81 g cm-3). Par ailleurs, l’ADN solide existe sous deux formes polymorphiques : α- ADN (pression < 2·104 atm) et β-ADN (pression > 2·104 atm) [96], cette transition de phase conduit à un changement de la structure cristalline de l’ADN, du monoclinique (Tableau I-3) vers le triclinique [95].

Tableau I-3 : structure cristalline du αααα-ADN.

Z ββββ Groupe a / Å b / Å c / Å Référence

4 101,2 P21/c 7,081 12,001 5,660 [97]

La densité, la solubilité, la température de fusion ainsi que l’enthalpie de formation de l’ADN solide sont présentées dans le Tableau I-2.

c- Décomposition thermique

La décomposition thermique de l’ADN a été minutieusement étudiée [33, 98-103]. Elle démarre généralement après la fusion complète du dinitramide d’ammonium à 92 °C [98]. Les résultats de ces études ont montré que les produits qui ont été détectés par spectroscopie infrarouge (FTIR) ou par spectrométrie de masse lors de la décomposition de l’ADN sont : NH3, N2O, NO2, NO, HNO3,

N2, O2, H2O, NH4NO3 et HNO2.

Les études qui ont été menées sur la décomposition thermique de l’ADN ont montré que cette dernière s’effectue en plusieurs étapes. Elle dépend fortement des conditions expérimentales (température et pression). Russell et al. [96] et Mishra et al. [104] ont défini deux types de régimes de décomposition :

i) pour des températures faibles (en dessous de 130 °C pour Russell et entre 55 et 100 °C pour Mishra), l’ADN se décompose lentement en nitrate d’ammonium NH4NO3 et en oxyde nitreux N2O,

cette décomposition peut être initiée par :

- Une sublimation de l’ADN en NH3 et HN(NO2)2, suivie par une recombinaison entre NH3

et HNO3 [33, 100, 104, 105] (équations (44)-(46)). ) 44 ( NH4N(NO2)2 NH 3 + HN(NO2)2 ) 45 ( HN(NO2)2 HNO3 + N2O ) 46 ( NH3 + HNO3 NH 4NO3

- Une dissociation ionique en NH4+ et N(NO2)2-, suivie d’une conversion de l’anion

N(NO2)2- en N2O et NO3-. Par ailleurs, les ions NH4+ et NO3- se recombinent afin de former

NH4NO3, ce dernier va ensuite se décomposer [98, 101, 102].

) 47 ( NH4N(NO2)2 NH 4+ + N(NO2)2- ) 48 ( N(NO2)2 -     NO3 - + N2O ) 49 ( NH4+ + NO3- NH 4NO3

ii) à haute température, l’ADN se décompose rapidement en dioxyde d’azote NO2 et en

mononitramide d’ammonium NH4NNO2. La formation de NO2 est expliquée par une rupture de la

liaison N-N de l’anion nitramide [101, 105].

) 50 ( NH4N(NO2)2 NH 3 + HN(NO2)2 ) 51 ( HN(NO2)2 HNNO2 + NO2 ) 52 ( NH3 + HNNO2 NH4NNO2

Enfin, parmi les réactions bilans de la décomposition thermique de l’ADN, les équations (53)-(55) ont été proposées. ) 53 ( [102] NH4N(NO2)2 0,44 N 2 + 0,65 NO2 + 0,46 NH4NO3 + 0,22 NH4N(NO2)2 ) 54 ( [106] NH4N(NO2)2 0,2 N 2 + 0,85 NH4NO3 + 0,95N2O + 0,3 H2O + 0,1 O2 ) 55 ( [101] 12 NH4N(NO2)2 3 NH3 + 6 N2 + 2 NH4NO3 + 10 N2O + 6 NO2 + 15 H2O + 2 NO + HNO3

d- Stabilité thermique, stabilité de stockage et compatibilité

L’étude de l’utilisation des stabilisants pour l’ADN solide ou en solution a été basée sur l’étape d’initiation de la décomposition d’ADN. En effet, cette étape consiste en un transfert de proton, formant par la suite une base et un acide libres (équation (44)). De plus, la décomposition de l’ADN est autocatalysée par l’acide nitrique formé à partir d’un réarrangement de l’acide dinitramidique (HDN, équation (45)). Afin de remédier à cela, la stabilisation de l’ADN par des bases fortes de Lewis a été étudiée. Ces dernières doivent être capables de piéger HNO3 et HDN formés.

Dans cette optique, plusieurs types de stabilisants ont été proposés. Parmi ceux-ci figurent l’urotropine ou hexaméthylène tétramine. Cette dernière est ajoutée à hauteur de 0,1 à 0,6 % en masse d’ADN et a été proposée par Manelis et al. [107]. Alors que Mishra et al. [104] ont trouvé que la super base nommée Verkade’s (perhydro-1,3,5-triazine-2,4,6-trione) est la plus convenable pour stabiliser ADN. En effet, cette base offre un bon contrôle de la décomposition de l’ADN. De plus, d’autres composés aromatiques hétérocycliques ont été proposés comme stabilisants tels que :

pyridine, pyrazine, triazipine, quinoline, pyrimidopyridine, … Ils ont été brevetés par Ciaramitaro et al. [108].

e- Décomposition catalytique

L’utilisation d’un catalyseur pour améliorer les performances énergétiques et assurer un allumage rapide des propergols à base d’ADN a été étudiée récemment. Korobeinichev et al. [109] ont utilisé l’oxyde du cuivre (CuO) comme catalyseur pour la décomposition du mélange ADN/polycaprolactone, alors que Grönland et al. [110] ont étudié différents catalyseurs mono- et bimétalliques à base de Pt, Ru, Pd, Ir, Rh, Mn, Pt/Rh et Ir/Rh supportés sur des aluminates du lanthane. De plus, des nanotubes de carbone supportés sur l’oxyde ferrique (Fe2O3) ont été

récemment étudiés par Li et al. [111]

I.3.2.3.

Nitroformiate d’hydrazinium (HNF)

a- Préparation

Le procédé de préparation du nitroformiate d’hydrazinium (HNF) a été décrit dans plusieurs brevets [112-114]. Le HNF est principalement préparé par addition d’hydrazine (N2H4) sur le

trinitrométhane ou nitroforme (HC(NO2)3, équation (56)), en présence d’un solvant organique, ou

de l’eau. Le précipité est ensuite récupéré, soit par essorage, soit par évaporation, puis recristallisé afin d’obtenir un composé de grande pureté et de taille des cristaux contrôlée.

) 56 ( N2H4 + HC(NO2)3 N 2H5+ C(NO2)3-

Actuellement, la compagnie Aerospace Propulsion Products (APP, Pays-Bas) est, à notre connaissance, la seule à commercialiser HNF, avec une production annuelle de 300 kg.

b- Propriétés et caractéristiques physico-chimiques

Le nitroformiate d’hydrazinium est un solide de couleur jaune-orangé, il est le sel très oxydant de l’hydrazine (N2H4) et du nitroforme (HC(NO2)3, Figure I-4). Il est faiblement hygroscopique, peu

soluble dans l’eau et a une densité très élevée (Tableau I-2). Les propriétés du HNF sont très sensibles à la pureté du produit préparé, cette dernière jouant un rôle très important dans la stabilité du HNF. En outre, la taille des cristaux de HNF a aussi une influence sur sa sensibilité.

C N N N O O O O O O N H H N H H H - - - - + + + +

Figure I-4 : structure moléculaire de HNF

c- Décomposition thermique

Les études de la décomposition thermique du HNF solide se sont généralement appuyées sur l’analyse thermique différentielle et thermogravimétrique (ATD-ATG), et/ou par l’analyse enthalpique différentielle (DSC). Ces études ont montré que le nitroformiate d’hydrazinium se décompose pendant la fusion à 129 °C [115, 116] ; il se décompose rapidement et exothermiquement en deux étapes (mais la courbe d’ATD montre un seul pic exothermique). Les équipes de Brill et de Williams [117, 118] ont été intéressées particulièrement par l’étude de l’évolution des produits de la décomposition thermique en fonction de la température du chauffage. Ils ont chauffé du HNF solide à l’aide d’un ruban en platine ou en argent (aucun effet catalytique n’ayant été préalablement observé). Les produits de la décomposition ont été suivis par T-Jump /

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