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I- Intérêt scientifique de l‟étude des COV anthropiques

1.2 Sources de COV

1.3.1 Les mécanismes chimiques

1.3.1-1 Les produits d’oxydation dans l’atmosphère

La capacité oxydante de l‟atmosphère est définie par les concentrations des différents agents oxydants, tels que le radical hydroxyle OHet le radical NO3 ou encore O3 (par ozonolyse).

(a) Formation des radicaux hydroxyles

Le radical hydroxyle OHconstitue le principal oxydant de l‟atmosphère. La formation de

ce radical peut avoir plusieurs origines, la plus commune reposant sur la photolyse de l‟ozone. Le radical OH se forme à partir de l‟ozone (R1.1) et de la vapeur d‟eau (R1.2) (Ehhalt, 1994) sous l‟action du rayonnement solaire (hν) :

O3 + hν (λ ≤ 310 nm) → O2 + O (1D) (R1.1) O (1D) + H2O → 2 OH (R1.2)

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Une autre source importante de formation de radicaux hydroxyles résulte de la photolyse des

aldéhydes, qui sont à la fois des composés primaires (notamment issus des gaz d‟échappements

automobiles) et des produits secondaires de dégradation d‟un grand nombre de COV. Le schéma réactionnel est le suivant :

R-CHO + hν → R + HCO(R1.3)

HCO+ O2 → CO + HO2(R1.4)

HO2 + NO → OH + NO2 (R1.5)

La troisième source de radicaux OH provient de la photodissociation de l‟acide nitreux

HONO à une longueur d‟onde inférieure à 400 nm.

HONO + hν (λ < 400 nm) → OH + NO (R1.6)

Finalement, les concentrations en radicaux hydroxyles OH dépendent d‟un certain nombre de paramètres (teneurs en ozone, en aldéhydes, en acides nitreux ; vapeur d‟eau ; intensité lumineuse). Elles présentent ainsi une grande variabilité spatiale et temporelle. Les radicaux OH sont maintenus à des concentrations diurnes globaux de l‟ordre de 1.106

molécules.cm-3 dans la troposphère (Spivakovsky et al., 2000).

(b) Formation des radicaux nitrates

La formation du radical NO3 s‟établit à partir de réactions entre NO (issu de sources anthropiques et/ou naturelles) et O3 (R1.7, R1.8) :

NO + O3 → NO2 + O2 (R1.7) NO2 + O3 → NO3 + O2 (R1.8)

Le jour, la durée de vie du NO3 ne dépasse pas quelques secondes (~ 5 secondes). La nuit, NO3 peut atteindre des concentrations de l‟ordre de plusieurs centaines de pptv (Platt and Heintz, 1994) et devenir une importante voie de dégradation des COV.

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1.3.1-2 Les mécanismes d’oxydation des COV

La diversité des espèces gazeuses ainsi que les produits d‟oxydation suscitent la formation de composés secondaires très différents. En effet, un oxydant (OH, NO3 ou O3) et un COV seront sujets à diverses étapes réactionnelles qui aboutiront à la formation de maintes espèces secondaires. Ces dernières peuvent se trouver en phase gazeuse ou en phase particulaire (Aït-Helal, 2013). Les processus d‟oxydation d‟un COV précurseur d‟espèces secondaires sont illustrés en Figure 5.

L‟oxydation d‟un COV commence par sa réaction avec un oxydant (OH

, NO3 ou O3) en vue de former un radical peroxyle RO2. Ces radicaux formés vont alors suivre deux voies réactionnelles différentes. Ils auront la possibilité d‟interagir (1) soit avec NO, NO3 et RO2 pour former des radicaux alkoxyles (RO), (2) soit avec HO2, NO, RO2 pour former des espèces organiques oxygénées dites de première génération. Dans le premier cas de figure, les radicaux alkoxyles se transforment en produits oxygénés de première génération au biais de leur réaction avec O2 ou en radicaux RO2 par décomposition ou isomérisation (Aumont et al., 2005). Les espèces secondaires oxygénées de première génération sont sujettes aux mêmes chaînes réactionnelles (e.g. procédés itératifs) conduisant à la formation d‟espèces gazeuses oxygénées de deuxième, troisième génération et ainsi de suite. L‟oxydation d‟un précurseur sera considérée complète lorsque les dernières réactions chimiques aboutiront à la formation de CO2.

Figure 5 – Schéma d‟oxydation d‟un COV.

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1.3.1-3 Durée de vie des COV

La durée de vie d‟une espèce dépend d‟une part (1) de la réactivité propre de l‟espèce vis-à-vis des différents oxydants présentés en Section 1.3.1-1, (2) de la température ambiante (selon la loi d‟Arrhenius) et (3) de la capacité oxydative de l‟atmosphère déterminée essentiellement à partir des concentrations en radicaux hydroxyles OH.

En considérant l‟oxydation par le radical OH comme principale voie de dégradation des COV dans l‟atmosphère, la durée de vie des composés est principalement liée aux constantes cinétiques

d‟oxydation par le radical OH (Atkinson and Arey, 2003). Le temps de vie atmosphérique des

COV peut être de l‟ordre de quelques heures pour les composés les plus réactifs (exemple de

l‟isoprène) à plusieurs dizaines de jours (pour les gaz les plus stables) (Tableau 1).

Tableau 1 - Constantes cinétiques (cm3.molécule-1.s-1) et durée de vie des principaux COV avec le radical OH 1

[OH] = 1.106 molécules.cm-3 -- j : jours ; h : heures

Composé 1012 kOH Durée de vie (τOH) 1

Ethane 0.3 47 j Propane 1.1 11 j n-butane 2.4 4.9 j n-hexane 5.6 2.1 j n-octane 8.1 1.4 j n-nonane 9.7 1.2 j Ethylène 8.5 1.4 j Propène 26.3 5.3 h Isoprène 100 1.5 h Acétylène 0.9 13 j Benzène 1.2 9.5 j Toluène 5.6 2.1 j M-Xylènes 23.1 12 h O-Xylènes 13.6 22 h Ethylbenzène 7.0 1.7 j 1.2.3 Triméthylbenzène 32.7 4.2 h Acétaldéhyde 15 9 h Acétone 0.2 68 j Méthylvinylcétone 20 14 h Méthacroléine 29 4.8 h

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De toutes les familles de composés chimiques, les alcanes se distinguent avec des temps de vie longs ; les alcanes légers réagissant lentement avec OH. De manière générale, plus un composé est léger, plus son temps de résidence dans l‟atmosphère est important.

1.3.1-4 Rôle des COV dans la formation d’espèces secondaires (a) COV comme précurseurs d‟ozone troposphérique

Dans la troposphère, il a été estimé qu‟environ 20 % de l‟ozone provenait des échanges (mélanges vertical et horizontal) depuis la stratosphère. Les 80 % restants résultent de réactions photochimiques issues de la transformation, sous l‟effet du rayonnement solaire, de composés chimiques tels que le monoxyde de carbone (CO), les COV et les NOx (Académie des sciences, 1993 ; Mouvier, 1998).

L‟ozone est un composé secondaire gazeux par excellence, puisqu‟il ne possède aucune source primaire.

Initialement, l‟ozone se forme par la photodissociation du dioxyde d‟azote (NO2), qui sous

l‟effet du rayonnement solaire (280 < λ < 430 nm), va produire une molécule de monoxyde d‟azote (NO) et un atome d‟oxygène à l‟état fondamental O(3

P) (R1.9). Ce dernier va se combiner avec une molécule d‟oxygène (O2) (R1.10).

NO2 + hν (280 < λ < 310 nm) → NO + O(3P) (R1.9) O(3P) + O2 → O3 (R1.10)

Néanmoins, l‟ozone ainsi formé va réagir avec NO (à l‟issue de la photolyse de NO2), entrainant la régénération de ce dernier selon l‟équation suivante (R.11) :

O3 + NO → NO2 + O2 (R.11)

À partir de ces trois réactions, un équilibre photochimique s‟établit entre NO, NO2 et O3 sur une échelle de temps de quelques minutes. Dans des conditions d‟équilibre, la concentration en ozone peut être déterminée de la manière suivante (Eq.2) :

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Où J1.8 correspond au coefficient de photodissociation du NO2 et k1.10 représente la constante cinétique de la réaction (R1.11).

Ce cycle, dit « cycle de Leighton », au bilan en ozone nul, peut être perturbé par l‟émission d‟autres espèces gazeuses (CO, NOx et COV), comme l‟illustre la Figure 6.

La production nette d‟ozone ne peut être effective que lorsque NO est converti en NO2, sans faire intervenir la réaction R1.11. La présence de COV (ici notés RCH3) et leur dégradation (R1.12), notamment par le radical OH, conduit à la formation d‟espèces radicalaires (R1.13), telles que les radicaux péroxyles (RO2). Ces radicaux vont alors oxyder NO en NO2 (R1.14), concurrençant ainsi la réaction avec O3 (R1.11) et en conduisant à la formation de composés carbonylés et d‟un radical hydroperoxyle HO2 (R1.15). Ce radical convertit NO en NO2, restituant ainsi le radical OH (R1.16). Le radical OH est alors capable d‟initier une nouvelle chaîne d‟oxydation.

Figure 6- Principaux mécanismes impliqués dans la formation d‟ozone troposphérique par action

[52] RCH3 + OH → RCH2+ H2O (R1.12) RCH2 + O2 + M → RCH2 O2 + M (R1.13) RCH2 O2+ NO → RCH2 O+ NO2 (R1.14) RCH2 O+ O2 → RCHO+ HO2(R1.15) HO2+ NO → NO2 + OH(R1.16)

Finalement, l‟équilibre entre l‟ozone et ses précurseurs permet de comprendre les mécanismes qui conduisent à une production ou à une destruction d‟ozone. La production d‟ozone fait appel à des processus chimiques non linéaires qui dépendent principalement des rapports NOx/COV.

Cette dépendance entre les niveaux de COV, NOx et O3 est usuellement illustrée par un diagramme

isoplèthe (Figure 7).

Figure 7 - Diagramme isoplèthe de l‟ozone. Adapté de Seinfeld et Pandis, 1998.

Ce diagramme permet de représenter les concentrations d‟ozone en fonction des niveaux de concentrations initiaux en NOx et en COV. Il permet de distinguer trois principaux « régimes »

chimiques aux sensibilités NOx/COV/O3 différentes :

 Régime limité en NOx (lorsque le rapport COV/NOx >15) : Pour des concentrations faibles en NOx et des concentrations élevées en COV (cas en milieu rural, par exemple), les niveaux d‟ozone augmentent avec ceux des NOx de façon quasi linéaire et ne sont que peu influencés par les variations en COV.

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 Régime limité en COV ou Régime saturé en NOx (lorsque le rapport COV/NOx < 4) : Pour des concentrations très élevées en NOx et de plus faibles concentrations en COV (cas en milieu urbain, par exemple), les niveaux d‟ozone diminuent lorsque les niveaux de NOx augmentent (cas où l‟O3 est détruit par titration avec NO). Réciproquement, les niveaux d‟ozone augmentent lorsque les niveaux de NOx diminuent (cas où NO est détruit par titration par O3).

 Régime standard (lorsque le rapport 4 < COV/NOx < 15) : La production d‟ozone dépend à la fois des concentrations de NOx et de COV. Les diminutions de NOx et/ou de COV entraînent une diminution des concentrations d‟ozone.

En troposphère polluée (cas d'une grande agglomération), les émissions de COV et de NOx sont importantes. En s‟éloignant des centres urbains, on observe un basculement d‟un régime limité

en COV (ou saturé en NOx) à un régime limité en NOx (Figure 8). Un tel basculement est expliqué par une diminution des émissions par le trafic routier, accompagnée d‟un dépôt plus rapide pour les NOx (faible durée de vie) que pour les COV, à laquelle s‟ajoutent des émissions complémentaires de COV principalement émis par la végétation. Dans les premières heures après l‟émission dans les panaches des grandes agglomérations, les taux de formation photochimique de l‟ozone sont plus rapides, et dès lors l‟ozone sera présent en quantité plus importante dans les zones périurbaines à

rurales.

Figure 8 - Évolution schématique du profil de concentrations d‟ozone (haut) et des espèces azotées (bas) d‟une région source (ici zone urbaine) vers une région

réceptrice (par ex. : zones périurbaines, rurales). Tiré de Camredon and Aumont (2007).

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(b) COV comme précurseurs d‟aérosols organiques secondaires

Les COV sont également impliqués dans la formation d‟aérosols organiques secondaires (AOS). Les phénomènes d‟oxydation des COV gazeux par les principaux oxydants (OH

, NO3 ou O3) peuvent conduire à la production de composés semi-volatils (COSV). Ces espèces possèdent des pressions de vapeur saturante suffisamment faibles pour permettre leur condensation (en phase particulaire ou sur des particules préexistantes) et prendre ainsi part à la formation d‟aérosols organiques. Ce schéma réactionnel peut être considéré de la manière suivante :

COSV + Ox → P + α1P1 + α2P2 (R1.17)

Où Ox correspond aux différents oxydants atmosphériques (OH, NO3 ou O3), P1 et P2 des COV et α1 et α1 des coefficients stœchiométriques (Sportisse, 2008). Les composés impliqués dans ces réactions peuvent être d‟origine biogénique (notamment l‟isoprène, les terpènes, les limonènes) et d‟origine anthropique (en particulier les composés aromatiques).