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II. VARIABILITE GENETIQUE DU HCV

1. Molécules antivirales utilisées actuellement

1.1 Les interférons

Les IFN sont des protéines appartenant à la famille des cytokines. Produits à la suite d’infections virales, ils induisent dans les cellules un état de résistance à l’infection. Ils présentent également des propriétés anti-prolifératives et anti- tumorales (Pestka et al., 2004). Ce sont les premières cytokines utilisées en thérapeutique. Il existe chez tous les vertébrés deux familles d’IFN : les IFN de type I constitués de nombreux sous-types (IFN-α, -

β

, -

ε

, -

κ,

-

ω

, -

δ

, et -

τ

) et l’IFN de type II

avec un seul représentant : l’IFN-γ (Neta & Salvin, 1981). L’IFN-δ et l’IFN-τ ne sont pas retrouvés dans l’espèce humaine. Les gènes des IFN de type I sont situés sur le bras court du chromosome 9. L’IFN-κ est exprimé dans les kératinocytes mais ne présente qu’une faible activité anti-virale. L’IFN-ε est exprimé au niveau du placenta et joue un rôle dans la reproduction. L’exposition des cellules aux virus ou aux ARN double brins induit la production d’IFN-α, -β et -ω. Le niveau d’expression de ces trois IFN varie selon les tissus et, la nature du virus (Pestka et al., 2004).

Une nouvelle famille d’IFN de type I a été découverte : les IFN-λ 1, 2, et 3 (ou IL-29, IL28A et IL-28B). Bien que leur homologie de séquence avec les IFN de type I soit faible, les IFN-λ ont les mêmes caractéristiques biologiques que les IFN-α/β, ils partagent les mêmes molécules de transduction du signal et régulent les mêmes gènes. Ils sont inductibles par les infections virales dans de nombreuses lignées

cellulaires. Toutefois, ils ne se lient pas au même recepteur (Kotenko et al., 2003; Sheppard et al., 2003).

L’IFN-γ est composé de 2 sous-unités protéiques de masse moléculaire de 17,5 kDa formant un dimère actif de 35 kDa (Ealick et al., 1991). L’IFN-γ est produit principalement par certaines cellules du système immunitaire comme les cellules NK, les lymphocytes T CD4 et les cellules CD8+ cytotoxiques (Young, 1996).

Induction de la synthèse d’interféron de type I

La plupart des gènes des IFN sont physiologiquement réprimés dans la cellule. Les cellules produisant naturellement de l’IFN sont les cellules dendritiques plasmacytoïdes CD4+CD11c- type 2. Ces cellules sont capables de produire jusqu’à 1000 fois plus d’IFN que les autres cellules sanguines après stimulation virale (Siegal

et al., 1999). Chez le sujet sain, les IFN ne sont pas détectables dans le sang, ni

dans le LCR. Les taux sont normalement inférieurs à 1 UI/mL (Samuel, 2001). Les IFN-α et β sont essentiellement induits chez l’homme par une infection virale (Gresser, 1997). La plupart des types cellulaires produisent de l’IFN-α en culture en réponse à une infection virale (Fitzgerald-Bocarsly, 1993). La synthèse d’IFN-β est induite dans les cellules fibroblastiques, épithéliales et endothéliales par la présence d’ARN bicaténaire viral. La pénétration dans la cellule de virus capables de synthétiser de l’ARN bicaténaire est donc nécessaire (Jacobs & Langland, 1996). La capacité à induire la synthèse d’IFN de type I varie considérablement selon le virus. Cette induction de la synthèse d’IFN est liée à la quantité d’ARN double brins produite au cours du cycle viral. De façon générale les virus à ADN produisent moins

d’ARN double brins que les virus à ARN et sont donc de moins bons inducteurs d’IFN (Jacobs & Langland, 1996). Le HCV est un faible inducteur de la production d’IFN par les hépatocytes (Mihm et al., 2004a). L’IFN n’est pas détectable dans le sérum chez les patients non traités chroniquement infectés par le HCV.

La transcription des IFN de type I nécessite l’action conjuguée de trois facteurs : ATF2/c-Jun (activating transcription factor 2), nuclear factor (NF)-κB et IRF3 (IFN regulatory factors 3). ATF2/c-jun, NF-κB sont activés par phosphorylation suite respectivement, à l’activation de la voie des MAP Kinases et du complexe IKKα/β/γ, en réponse à de nombreux stimuli, comme des facteurs de croissance ou des molécules pro-inflammatoires. La phosphorylation de IRF3 est réalisée par les kinases TBK1 (Tank binding kinase 1) et IKKε (Jefferies & Fitzgerald, 2005).

La liaison de molécules issues des agents pathogènes, tels que les ARN simple ou double brins ou les lipopolysaccarydes bactériens au niveau des TLR induit le recrutement d’un adaptateur au niveau du domaine cytoplasmique des TLR. Le TLR- 3, présent au niveau des endosomes, reconnaît les ARN double brins et recrute l’adaptateur nommé TRIF (TIR domain-containing adapter inducing IFN-β) (Yamamoto et al., 2002). Celui-ci active alors TBK1 et IKKε (Fitzgerald et al., 2003). TRIF peut aussi activer les voies NF-κB et MAP kinases (Jefferies & Fitzgerald, 2005). Les TLR-7, -8 et -9 présents au niveau endosomal sont exprimés uniquement dans les DC plasmocytoïdes. Ils recrutent l’adaptateur MyD88. Ceci induit la phosphorylation de l’IRF-7 et l’induction de la production d’IFN-α (Kawai et al., 2004) (Figure 9).

Figure 9 : Voie d’induction des IFN d’après Pichmair et al (Pichlmair & Reis e Sousa, 2007)

Une autre voie d’induction de l’IFN de type I au niveau cytoplasmique passe par l’activation d’hélicases spécifiques de l’ARN, telle que RIG-I (retinoid inducible gene 1) ou MDA-5 (melanoma differentiation associated gene-5) (Yoneyama et al., 2004). L’activation de celles-ci conduit à l’activation d’ATF2/c-Jun, de NF-κB, d’IRF3 et d’IRF7. Récemment, un nouvel adaptateur dans la cascade de signalisation de

Endosome

Cytosol

Agoniste

Récepteur

Adaptateur

Kinase

Facteur de

Transcription

RIG-I a été décrit, nommé Cardiff (CARD adaptor inducing IFN) ou IPS-1 (interferon promoter stimulator 1) (Meylan et al., 2005). Il est capable de recruter les kinases IKKα/β/ε et ainsi activer NF-κB et l’IRF3 (Pichlmair & Reis e Sousa, 2007) (Figure 9).

Récepteur et signalisation cellulaire

Les IFN-α, β et ω ont un récepteur commun constitué de 2 sous-unités : IFNAR-1 et IFNAR-2 (Mogensen et al., 1999). Les gènes codant ces 2 sous-unités sont localisés sur le chromosome 21. Il n’existe qu’une seule forme de la sous-unité IFNAR1, alors qu’un épissage alternatif du gène codant pour IFNAR2 permet d’obtenir trois formes : une forme courte (2b) une forme longue (2c) et une forme soluble (Mogensen et al., 1999; Prejean & Colamonici, 2000).

La transduction du signal après fixation de l’IFN-α sur son récepteur passe par la voie Jak-STAT (Darnell et al., 1994). Les kinases Jak-1, Jak-2 et Tyk-2 ainsi que les facteurs de transcription STAT-1 et STAT-2 jouent un rôle central en tant que médiateurs des réponses biologiques dépendantes de l’IFN, incluant les propriétés anti-virales (Stark et al., 1998) (Figure 10).

La kinase Tyk-2interagit avec la sous-unité IFNAR-1 et la kinase Jak-1 avec la sous-unité IFNAR-2 du récepteur des IFN-α/β. L'activation des Jak associées au récepteur entraîne la phosphorylation des facteurs de transcription STAT, qui se lient avec une protéine appelée IRF-9 (IFN regulatory factor 9). Le trimère formé est appelé ISGF3 (IFN-stimulated gene factor 3). Ce complexe est transloqué dans le noyau, où il se lie aux séquences d’ADN au niveau des promoteurs des gènes induits par l’IFN nommés : ISRE (IFN-stimulated response element) (Stark et al.,

1998). Bien que la voie Jak-STAT soit la voie de transduction du signal la plus connue, d’autres voies ont été décrites impliquant les MAP-kinases et la phosphatidylinositol 3-kinase (Goh et al., 1999; Pfeffer et al., 1997).

Figure 10 : Voie de signalisation induite par l’IFN de type I Jak1 Tyk2

IFNAR-2c

IFNAR-1

Y Cytoplasme P P P P

Domaine SH2

Stat1

Stat2

IRF-2 ISRE GAS Noyau IRF-9

Stat1

Stat2

P P ISGF-3

Stat1

Stat1

P P AAF IRF-7, IP-10, 2 ’5 ’OAS, PKR IRF-1

IFN-αααα/ββββ

Jak1 Tyk2

IFNAR-2c

IFNAR-1

Y Cytoplasme P P P P

Domaine SH2

Stat1

Stat2

IRF-2 ISRE GAS Noyau IRF-9 IRF-9

Stat1

Stat2

P P P ISGF-3

Stat1

Stat1

P P AAF IRF-7, IP-10, 2 ’5 ’OAS, PKR IRF-1

IFN-αααα/ββββ

Les effecteurs de la réponse anti-virale

Les propriétés biologiques des IFN sont pléiotropes. Elles mettent en jeu l’expression de nombreux gènes cellulaires et la synthèse de novo de protéines. Parmi les protéines induites par l'IFN−α impliquées dans la réponse anti virale, la protéine kinase dépendante des ARN bicaténaires (PKR), la 2’,5’ oligoadenylate synthétase et les protéines Mx sont les mieux caractérisées.

La PKR est une sérine thréonine kinase jouant de nombreux rôles dans la régulation des processus de transcription et de traduction. En position N-terminale elle comporte un site de liaison pour les ARN double brins et en position C-terminale un domaine catalytique (Meurs et al., 1990). La PKR est présente à l’état inactif dans la cellule et est activée par les ARN double brins ou par d’autres polyanions sous forme de dimère. La fixation de l’ARN double brins entraîne un changement de conformation qui permet de démasquer le site catalytique. Celui-ci pourra alors auto- phosphoryler les résidus sérine et thréonine du dimère (Robertson & Mathews, 1996). Tous les ARN double brins peuvent activer la PKR, aucune séquence particulière n’est requise. Elle est activée par de faibles concentrations d’ARN mais inhibée par de fortes concentrations. Ce mécanisme est utilisé par les adénovirus pour contourner l’effet antiviral de l’IFN en produisant de grande quantité d’ARN (Kitajewski et al., 1986).

Une fois activée la PKR présente de nombreuses activités de régulation cellulaire. Elle peut alors phosphoryler d’autres protéines. Elle peut inhiber la traduction des protéines en phosphorylant la sous-unité α du facteur eucaryote d’initiation de la traduction eIF2 et empêche le recyclage des facteurs d’initiation de

la traduction (Clemens & Elia, 1997). Ainsi l’activation de la PKR induit un arrêt de la synthèse des protéines cellulaires ou virales. La PKR module aussi la transduction du signal via NF-κB en réponse aux ARN double brins (Alexopoulou et al., 2001; Bonnet et al., 2006). La surexpression de la PKR dans la cellule entrainerait l’apoptose par un mécanisme dépendant de Bcl2 ou des caspases (Lee et al., 1997). Il a été montré que la PKR est un des médiateurs de l’apoptose des macrophages après activation du TLR-4 (Hsu et al., 2004).

Les 2’5’ OAS sont activées par liaison avec les ARN double brins. Elles ont la capacité de synthétiser des oligomères d'adénosine possèdant des liaisons 2'-5'. Les 2’5’ aligoadénylates sont intrinsèquement capables de fixer et d'activer une RNAse cellulaire, la RNase L, bloquant ainsi la synthèse protéique par déplétion en ARN. Il existe 3 formes de 2-5A synthétases humaines, de différents poids moléculaires (40/46, 69/71 et 100 kDa) (Rebouillat & Hovanessian, 1999). Elles polymérisent les molécules d’adénosine tri-phosphate (ATP) en 2’5’ aligoadénylates. Les 2’5’OAS sont présentes à l’état basal dans de nombreuses cellules et elles sont activées par l’IFN. L’oligomérisation de ces enzymes est nécessaire à leur activité. Les 2’5’ oligoadénylates activent des RNases L sous forme de trimère, par dimérisation des RNases L. La RNase L activée catalyse le clivage d’ARN simple brin, ce qui inhibe la synthèse protéique (Kerr & Brown, 1978). Ce système inhibe la réplication de nombreux virus et peut également modifier la croissance cellulaire. Les 2’5’ oligoadénylates sont extrêmement labiles, l’activation de la RNase L dépend de la présence de 2’5’ OAS activée dans la cellule, ce qui assure la destruction préférentielle des ARN viraux (Nilsen & Baglioni, 1979).

Les protéines Mx sont inductibles par l’IFN de type I et appartiennent à la superfamille des larges GTPases, de haute masse moléculaire. Leur expression au cours de l’infection reste transitoire (Goodbourn et al., 2000). Cette superfamille des GTPases s’apparente aux dynamines, protéines connues pour être impliquées dans l’invagination des membranes cellulaires et le trafic vésiculaire. Une propriété unique aux protéines Mx est leur fonction antivirale (Haller et al., 1998). Lors d’une infection virale, la protéine humaine MxA s’accumule dans le cytoplasme de la cellule et son activité antivirale s’exerce sur un large spectre de virus à ARN, qui comprend des virus de la famille des Orthomyxoviridae et des Bunyaviridae. L’activité antivirale nécessite une oligomérisation, la liaison au GTP et son hydrolyse (Richter et al., 1995). L’un des modes d’action de la MxA consiste en une interaction directe de la protéine avec certaines nucléocapsides virales. C’est le cas des virus influenza et du virus La Crosse contre lesquels MxA agit en séquestrant et/ou en redistribuant les nucléocapsides virales au sein de la cellule infectée (Haller & Kochs, 2002). Celles-ci ne sont alors plus disponibles pour générer de nouvelles particules virales et, par conséquent, la réplication virale est inhibée. Dans le cas du virus de la rougeole, la protéine MxA agit au niveau de la synthèse des glycoprotéines virales (Schnorr et al., 1993). Cependant, pour la plupart des virus contre lesquels elle agit, les mécanismes antiviraux de la MxA ne sont pas encore élucidés.

L’adénosine désaminase dépendante des ARN double brins (ADAR) est un autre effecteur de l’activité anti-virale des IFN. Cette enzyme reconnaît les ARN double brins et les déroule en remplaçant systématiquement les adénosines par une inosine. Etant donné que de nombreux virus à ARN ont un ARN double brins comme intermédiaire de réplication, ce processus s’avère mutagène et les substitutions

décrites au sein des génomes viraux sont compatibles avec une telle activité. Une ribonucléase spécifique de l’inosine pourrait agir en synergie avec l’ADAR pour détruire les ARN viraux ainsi modifiés (Samuel, 2001).

Les IFN de type I présentent également de nombreuses activités immuno- modulatrices, antiprolifératives et antitumorales (Pestka et al., 2004; Theofilopoulos

et al., 2005). L’élévation de l’expression à la surface membranaire de protéines HLA

de classe I augmente l’efficacité des réponses immunes cellulaires anti virales. Les IFN α/β augmentent l’activité cytotoxique des NK, des lymphocytes T, des monocytes et des macrophages (Ortaldo et al., 1983). Les IFN-α/β augmentent la production d’IFN-γ par les DC favorisant l’inductionet le maintien de la réponse immune Th1. Ils induisent la synthèse d’IL-15 qui stimule la division des lymphocytes T mémoires (Tough et al., 1999). Ils peuvent induire l’expression de gènes pro-apoptotiques, tels que les caspases et peuvent réprimer les gènes anti-apoptotiques (Clemens, 2003).

Les infections virales sont souvent associées à une réduction transitoire du nombre de cellules circulantes (polynucléaires neutophiles, plaquettes) suite à une suppression de l’hématopoïèse au niveau de la moelle osseuse, un effet lié à la production d’IFN (Binder et al., 1997).

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