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Chapitre 3. Cristallisation en microfluidique

3.2. Les différents matériaux utilisés en microfluidique

Avant tout, il est important de préciser qu’il existe deux types de dispositifs microfluidiques qui vont nécessiter des matériaux aux propriétés différentes pour leur fabrication :

- les puces microfluidiques où les canaux et jonctions microfluidiques sont imprimés directement sur le matériau (Figure 17c). Les techniques de fabrication de ces puces nécessitent généralement l’utilisation de matériaux ayant un point de fusion relativement faible.

- les dispositifs microfluidiques à base de capillaires (souvent appelés dispositifs « Plug and Play ») pour leur facilité de montage (Figure 17a et b). Ces dispositifs sont généralement constitués de capillaires en polymère fluoré et de jonctions en PEEK dérivés des montages HPLC.

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Figure 17. (a) Schéma d’un dispositif microfluidique à base de capillaires48, (b) jonction microfluidique en Té 49, (c) puce microfluidique50

Il existe un grand nombre de matériaux utilisés pour la fabrication de systèmes microfluidiques. Le choix des matériaux qui constitueront un système microfluidique est une étape importante. Ce choix est déterminé par plusieurs facteurs tels que le coût, la rapidité de fabrication, les équipements et technologies disponibles et surtout la nature des fluides utilisés. En effet, le système microfluidique doit être compatible avec tous les solvants couramment utilisés en cristallisation, comme les solvants organiques.

3.2.1. Le Polydiméthylsiloxane

Le Polydiméthylsiloxane (PDMS) est un matériau très utilisé pour la fabrication de puces microfluidiques. Il s’agit d’un élastomère silicone qui a la particularité d’être hydrophobe et souple. Le PDMS est compatible avec la quasi-totalité des produits biologiques, il est donc devenu le matériau de prédilection des puces microfluidiques dédiées à la biologie et est très utilisé pour la cristallisation de protéines. Ce matériau comporte une excellente transparence même pour des épaisseurs importantes et les puces microfluidiques en PDMS sont faciles à fabriquer et peu onéreuses. Cependant pour changer de géométrie, il est nécessaire de créer un nouveau moule. Car les canaux microfluidiques sont imprimés sur une surface par lithographie douce, constituant le moule dans lequel le PDMS sera coulé puis réticulé en chauffant dans une étuve. De plus, des solvants organiques (acétone, acétate d’éthyle…) sont régulièrement utilisés en cristallisation, avec lesquels le PDMS n’est pas compatible51. Les puces microfluidiques en PDMS sont donc réservées à la cristallisation de molécules solubles dans l’eau. Par ailleurs, le PDMS est légèrement poreux à l’eau et aux gaz.

44 Il ne peut donc être utilisé que pour des temps de cristallisation courts (quelques heures) et à température peu élevée (<50 °C).

3.2.2. Le verre

Le verre est un matériau intéressant, car il est peu réactif chimiquement et présente une excellente transparence. Les puces microfluidiques en verre ont l’avantage d’être compatibles avec tous les solvants organiques utilisés en cristallisation. Cependant, c’est un matériau très dur, cassant et la fabrication de ce type de puces est complexe et onéreuse. De plus, le verre présente des propriétés hydrophiles, l’eau est alors utilisée comme phase continue pour la formation de gouttes, ce qui limite son utilisation (car certains solvants organiques utilisés pour la cristallisation sont miscibles dans l’eau). Cependant, il est possible de traiter les puces en verre pour les rendre hydrophobes, mais cela rajoute une étape de fabrication et les traitements de surface permettant une homogénéité parfaite sont coûteux et peuvent être fastidieux.

3.2.3. Les thermoplastiques rigides

Les matériaux thermoplastiques rigides, tels que le COC (Cyclic Olefin Copolymer) ou le PMMA (Polyméthylméthacrylate), sont des matériaux hydrophobes, peu onéreux et faciles à préparer. Ils ont également une bonne transparence et sont compatibles avec les produits biologiques. Bien que ces matériaux aient une meilleure compatibilité avec les solvants organiques que le PDMS, ils restent incompatibles avec certains solvants couramment utilisés en cristallisation tels que l’acétone pour le PMMA, ou le toluène pour le COC52.

Le PEEK (Polyether ether ketone) est un polymère thermoplastique organique ayant une excellente résistance aux solvants organiques. Cependant, c’est un matériau opaque et son point de fusion est élevé (343 °C), c’est pourquoi il n’est pas utilisé pour la fabrication de puces microfluidiques. En revanche, le PEEK est très utilisé en microfluidique à base de capillaires pour jouer le rôle de jonction.

3.2.4. Les polymères fluorés

Les polymères fluorés comme le PFA (Perfluoroalkoxy), le FEP (Fluorinated Ethylene Propylene) ou le PTFE (polytétrafluoroéthylène) sont des matériaux intéressants pour la microfluidique, car ils sont très hydrophobes, inertes chimiquement et souples. De plus, ils présentent une excellente résistance avec les solvants organiques utilisés en cristallisation. Cependant, ils ne sont pas totalement transparents aux UV et aux rayons X ce qui peut les pénaliser dans le cadre de certaines applications. À cause de leur point de fusion élevé (250-300 °C) ces matériaux ne sont pas utilisés pour la fabrication de puces microfluidiques, cependant ils sont très utilisés en microfluidique à base de capillaires. Par ailleurs, il a été montré que la vitesse d’évaporation des gouttes est moins rapide dans des capillaires en PTFE

45 que dans une puce PDMS49. Ainsi des gouttes peuvent ainsi être stockées dans des capillaires en polymère fluoré pendant plusieurs mois.

Le THV (tetrafluoroéthylène, hexafluoropropylène et fluorure de vinylidène) est un matériau présentant des propriétés similaires, mais avec un point de fusion plus faible (120 °C) permettant son utilisation en puces microfluidiques. Mais bien qu’il ait une bonne résistance à certains solvants organiques, son utilisation n’est pas compatible avec l’acétone et l’acétonitrile.

3.2.5. Avantages des systèmes « Plug and Play »

Les systèmes microfluidiques « Plug and Play » sont composés de capillaires en polymères fluorés et de jonctions en PEEK leurs permettant une excellente compatibilité avec la majorité des solvants organiques. Ces systèmes sont dérivés de montages d’HPLC (High Performance Liquid Chromatography) et d’UHPLC (Ultra High Performance Liquid Chromatography). Les différents éléments, canaux et jonctions se connectent à l’aide de férules permettant un prototypage rapide et un grand choix de géométries et donc de procédés. Ceci est un avantage considérable par rapport aux puces microfluidiques (COC ou PDMS) pour lesquelles les canaux et les jonctions étant figés, le nombre d’expériences est limité et l’utilisation est même souvent unique (non recyclable). Enfin, les systèmes « Plug and Play » permettent d’avoir une grande versatilité ce qui est particulièrement appréciable lors des étapes de recherche et de développement d’un montage microfluidique.

3.3. Exemples d’outils microfluidiques pour la