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Chapitre 1 : La maladie d’Alzheimer

1.9 Les différentes hypothèses

Le fait que le peptide Aβ se voit débalancé par toutes les mutations FAD d’APP, PSEN1 ou PSEN2 qui a fait émettre l’hypothèse à des chercheurs qu’il pourrait être à la source de la MA (6, 44, 115). L’exemple le plus révélateur est cette étude qui a démontré qu’il suffisait d’être porteur de la mutation protectrice islandaise A673T pour ne jamais développer la maladie (34, 38).

Il y a toujours eu un débat sur cette hypothèse sachant que les plaques amyloïdes avaient toujours été observées avec des NFTs, et il était bien difficile d’estimer lequel était

le précurseur. L’hypothèse est qu’un individu sain métabolisera toute sa vie le peptide Aβ de façon optimale et qu’il n’en accumulera jamais ou très peu dans son cerveau. Un malade Alzheimer en revanche, présentera un problème dans la production ou l’élimination de ce peptide et ce déséquilibre mènera au développement de la MA (115). L’accumulation des peptides Aβ prendrait forme de dépôts observables, créant un stress cellulaire dû à l’inflammation déclenchée par les astrocytes et microglies qui produiraient une grande quantité de radicaux libres. Ce phénomène altèrerait les phosphatases et kinases, provoquant l’hyperphosphorylation de la protéine Tau et donc des NFTs. Ce changement désorganiserait les synapses et induirait l’inflammation généralisée et la dégénérescence. Cette neuro- dégénération provoquerait alors des troubles cognitifs et mémoriels (38, 116).

Cette hypothèse est soutenue par plusieurs faits solides, comme, par exemple, le fait qu’il n’existe aucune FAD liée au gène de la protéine Tau (6). Une autre observation vient des individus touchés par la Trisomie 21 (syndrome de Down). Possédant trois chromosomes 21, ils ont également trois copies du gène APP. Bien qu’étant non altéré par aucune mutation, les personnes trisomiques vont développer à coup sûr des pathologies très semblables à la MA. L’autopsie de jeunes patients trisomiques a démontré une accumulation précoce de plaques diffuses dans leur cerveau, et ce, dès la fin de l’adolescence, certaines plaques ayant même été détectées chez un enfant de 8 ans (38, 117). L’absence de NFTs ou d’inflammation dans leur cerveau appuie le fait que les plaques se forment les premières et que la surexpression du gène APP suffit à provoquer la MA.

Les études sur modèles cellulaires apportent aussi de nombreux arguments à la théorie de l’amyloïde. L’apparition des modèles de souris Alzheimer et des cellules souches pluripotentes induites (« induced pluripotent stem-cell » ou iPSC) a permis d’obtenir de très bons modèles d’études de neurones. Plusieurs expériences marquantes ont été réalisées. Des neurones de souris exprimant Tau humaine in vitro ont été supplémentés avec des oligomères d'Aβ humain, ce qui a provoqué l’hyperphosphorylation de Tau (118). Si, par contre, des anticorps anti-Aβ sont incorporés en même temps, le phénomène ne se produit jamais (119). Avec les neurones issus d’iPSC ou avec les neurones induits (« Induced Neurons » ou iNs) de patients, l’observation des phénotypes montrent que l’accumulation d’Aβ précède la formation de NFTs (38, 120, 121).

Il y a pourtant un élément important qui vient contrer cette théorie. En effet, les travaux de Braak décrivant la progression de la maladie fait corréler la propagation de l’atrophie cérébrale avec la propagation des NFTs, et non pas celle de la plaque amyloïde (11-13). Il est vrai que cette échelle très largement utilisée montre que les plaques ne suivent pas la dégénérescence. Cependant, il est important de se rappeler qu’aujourd’hui il est plutôt démontré que ce sont les oligomères d’Aβ solubles qui sont liés à la toxicité et qu’ils suivent également parfaitement l’atrophie neuronale (38, 92, 109). Un exemple intéressant est la fameuse « étude des nonnes » effectuée dans les années 1980 dans un couvent aux Etats-Unis (122). L’étude avait démontré que certaines nonnes présentaient des signes de démence mais ne présentaient pas de dépôt de plaques problématiques alors que d’autres en avaient de façon bien plus importante et gardaient néanmoins une capacité cognitive normale.

1.9.2 Hypothèse revisitée : la maladie Alzheimer serait initiée par Aβ mais toxique de façon Tau dépendante – L’axe de Tau

Il semblerait que Aβ et Tau travaillent en binôme dans la MA. En effet, une inhibition de la phosphorylation de Tau causé par GSK3 empêcherait la mort cellulaire même si les cellules étaient supplémentées en Aβ (123). Des neurones primaires de souris en culture dépourvus de Tau (Tau -/-) ne subiront aucun déficit induit normalement par l’Aβ (101, 124). Cette expérience a été reproduite avec succès in vivo (125). On peut donc se demander quel élément de Tau donnerait sa toxicité à Aβ. Ittner et Götz ont formulé une théorie appelée l’axe de Tau (101). La toxicité d’Aβ serait déclenchée par l’hyperphosphorylation de la protéine Tau, avant son agrégation en NFTs. Tau interagirait avec une protéine kinase Fyn pouvant phosphoryler une sous-unité du récepteur NMDA (N-méthyl-D-aspartique) en changeant sa localisation cellulaire vers la partie somatodendritique (126). Une fois transloquée, Fyn phosphoryle le récepteur NMDA, qui est hyper-stimulé et augmente donc la signalisation glutamate. Il est connu que cette action augmente la toxicité neuronale et les peptides Aβ s’accumulant aux jonctions synaptiques, leur effet cumulé à l’activité glutamate créerait la toxicité (101, 127-129).

Plusieurs autres hypothèses viennent rajouter des pièces à ce qui pourrait être une hypothèse globale de l’apparition de la MA. Toutes ces théories avancent des arguments sur le fait qu’un facteur activerait la toxicité de Aβ, mais tous sont d’avis que le peptide reste le

noyau du problème. On trouve l’hypothèse cholinergique (130), l’hypothèse de la neuro- inflammation (131), l’hypothèse du calcium (132, 133), l’hypothèse du stress oxydatif ou de la cascade mitochondriale (134), l’hypothèse métabolique (135, 136) ou la très récente hypothèse lysosomale (137).

Toutes ces hypothèses pourraient très bien n’être que des pièces du tableau général qui expliquerait le mécanisme complet de la MA. Il ne faut pas oublier qu’étant multifactorielles, toutes ces hypothèses suppositions ou interprétations sont peut-être justes.

1.10 Traitements pour la maladie d’Alzheimer

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