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Les contacts cellule-matrice extra cellulaire

Chapitre II : Structure et organisation des épithéliums

4- Les contacts cellule-matrice extra cellulaire

3.3- Les desmosomes

Les desmosomes sont des jonctions d’ancrage reliées aux filaments intermédiaires cytoplasmiques afin de maintenir l’architecture épithéliale (Holthöfer et al., 2007). Ces jonctions sont constituées de deux protéines de la famille des cadhérines : la desmogléine (DSG) et la desmocolline (DSC). Ces molécules créent des liaisons homophiliques avec les cellules voisines et sont sensibles au calcium. Elles sont connectées à la desmoplakine de la plaque desmosomale via les protéines « armadillo »; la plakophiline et plakoglobine (Broussard et al., 2015).

3.4- Les jonctions communicantes

Les jonctions communicantes constituent la dernière catégorie de jonctions intercellulaires. Ce sont des jonctions perméables, formant des canaux reliant le cytoplasme de deux cellules adjacentes. Cela permet les échanges d’ions et de petites molécules entre les cellules (pour revue, Meşe, Richard, et White 2007). Le canal formé par l'hexamère des protéines connexines peut être ouvert ou fermé selon le pH intracellulaire et la présence de calcium libre dans le cytoplasme (Segretain and Falk, 2004).

4- Les contacts cellule-matrice extra cellulaire

Les cellules épithéliales interagissent entre elles mais également avec la matrice extra-cellulaire (MEC), ce qui contribue à assurer leur survie et leur migration.

4.1 La matrice extra-cellulaire

La MEC assure la délimitation des tissus et des organes et intervient dans le maintien physique des composants cellulaires. Elle est présente dans tous les tissus bien que sa composition varie d’un organe à l'autre. Elle est synthétisée, organisée et dégradée par les cellules qui l’entourent et exerce en retour une forte influence sur ces cellules ; un véritable dialogue existe entre la MEC et les cellules (épithéliales dans le cas des épithéliums).

La MEC est composée de trois grands types de macromolécules :

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- les glycoprotéines telles que la fibronectine et les laminines

-les chaines polysaccharidiques tels que les glycosaminoglycanes, permettant la formation d’un gel hydraté (Frantz et al., 2010).

L’ensemble forme un réseau fibreux dense. Dans ce réseau, se trouvent des cellules immunitaires, des cellules du système vasculaire et des fibroblastes. L’ensemble « MEC + cellules immunitaires, vasculaires et fibroblastes » constitue le stroma (ou tissu conjonctif). La membrane basale est une MEC particulière, située à l’interface entre l’épithélium et le tissu conjonctif. Elle est majoritairement composée de laminine V mais également de collagène de type IV et de glycosaminoglycanes.

4.2- Les récepteurs interagissant avec la matrice extracellulaire

La MEC interagit avec les cellules épithéliales grâce à différents récepteurs protéiques tels que les intégrines et les récepteurs à domaines discoïdines (DDR).

4.2 .1- Les intégrines

Les intégrines sont une famille glycoprotéines transmembranaires comprenant plus d’une vingtaine de membres. Ces protéines ont la capacité de transmettre à la cellule les signaux mécaniques et moléculaires provenant de l’extérieur. La cellule, en retour, peut transmettre des signaux à l’extérieur afin de contrôler la liaison des intégrines à la MEC (Miranti and Brugge, 2002).

Les intégrines sont des hétérodimères liés de manière non-covalente, présentant une sous-unité alpha et une sous-unité beta. Il existe 18 sous-unités α et 8 sous-unités β. Un nombre limité de combinaison est possible ; chaque type de sous-unité α ne peut s’associer avec toutes les sous-unités β. Les intégrines sont réparties en sous-familles selon leur composition ou selon la nature de leur ligand. Par exemple, dans les cellules épithéliales, les hémidesmosomes forment de larges structures d’adhésion à la lame basale, formées d’un type particulier d’intégrines (α6 β4). Ils se lient d’un côté aux kératines par l’intermédiaire de protéines adaptatrices, la plectine et BP230, et de l’autre à la laminine V de la lame basale (Bustin, 2015).

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Chaque type cellulaire présente un répertoire d’intégrines différent qui varie en fonction de son état de différenciation. Au sein de la glande mammaire, les cellules myoépithéliales, en contact direct avec la membrane basale riche en laminine V, sont enrichies en intégrines β1 et α6. En revanche, les cellules luminales, ayant peu de contact avec la membrane basale, expriment faiblement ces sous-unités. Néanmoins, au cours de la lactation, lorsque les cellules épithéliales développent des contacts avec la membrane basale, l’expression de l’α3β1 augmente (Raymond et al., 2012).

Les intégrines sont présentes sous forme active ou inactive. Sous forme active, les intégrines se regroupent afin de former une plaque d’adhésion dense où de nombreuses intégrines sont ancrées au cytosquelette d'actine. Cette large structure complexe permet de renforcer les adhésions à la matrice. Ce type de structure est particulièrement observé in vitro, entre des fibroblastes et la fibronectine (adhésions focales) (Schoenwaelder and Burridge, 1999; Zimerman et al., 2004).

Le site de liaison aux intégrines le mieux décrit à l’heure actuelle est la séquence RGD (Arginine-Glycine-Aspartate), retrouvée notamment dans la protéine fibronectine. Les intégrines ont la possibilité de se lier avec d’autres composants de la MEC, comme le collagène et la laminine, bien que leurs sites d’interactions ne soient pas bien définis (Bustin, 2015). Du côté cytoplasmique, les intégrines se lient principalement au cytosquelette d’actine grâce à des interactions avec des protéines telles que la taline, impliquée également dans l’activation des intégrines, et l’α-actinine (Hemmings et al., 1996; Horwitz et al., 1986; Vicente-Manzanares et al., 2009b; Zhang et al., 2008). Ces deux protéines recrutent une protéine de liaison à l’actine, la vinculine, qui peut à son tour recruter la paxilline, afin de renforcer la stabilité du complexe d’adhésions focales (FAs pour Focal adhesions) et l’interaction avec le cytosquelette d’actine. (Bays and DeMali, 2017; Burridge and Mangeat, 1984; Carisey et al., 2013; Gilmore and Burridge, 1996) (Figure 12). Traditionnellement, l’activation des intégrines est considérée comme nécessaire au regroupement des composants des FAs et à la formation de nouvelles adhésions cellulaires à la matrice (Calderwood et al., 2000; Carman and Springer, 2003). Néanmoins, plusieurs observations ont montré que l’assemblage de ces adhésions requièrent la présence d'actine déjà polymérisée, suggérant que l’actine, avec un sous-groupe de molécules impliquées dans les adhésions, initieraient la formation d’une nouvelle adhésion qui sera ensuite stabilisée via son interaction avec les intégrines. Par exemple, en réponse à des signaux impliqués dans la formation de protrusion membranaire, le complexe Arp2/3 se lie transitoirement à la vinculine. Cette liaison

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transitoire pourrait être un des mécanismes mis en jeu dans la coordination entre la polymérisation d’actine (et notamment la formation de protrusion) et la formation des adhésions à la matrice dépendantes des intégrines (DeMali et al., 2002; Serrels et al., 2007).

Figure 12: Adhésions cellule-matrice via les intégrines. Les intégrines (représentées par leurs sous-unités α et β transmembranaires) se lient de façon directe à la taline. La taline se lie à son tour à l’actine et à d’autres protéines du complexe d’adhésion, telle que la vinculine. La vinculine interagit directement avec l’actine et l’α -actinine. L’α-actinine et la vinculine sont ancrées à la membrane plasmique. Enfin, la vinculine et les protéines d’adhésions focales (FAK) se lient au complexe Arp2/3 qui promeut la nucléation des filaments d’actine (Figure adaptée de (Vicente-Manzanares et al., 2009b).

Les interactions entre les cellules épithéliales et la MEC via les intégrines sont impliquées dans de nombreux processus physiologiques tels que la prolifération, la survie ou encore la migration cellulaire. La signalisation régulée par les différentes intégrines est très complexe et variée d’un type cellulaire à un autre. Cette signalisation est très souvent couplée à celle des récepteurs tyrosine kinases (RTKs). De manière simplifiée, les intégrines interagissent avec RTKs, tels que l’EGF-R, la PDGF-R ou encore le récepteur à l’insuline et facilitent leur activation (Giancotti and Tarone, 2003). La stimulation par des facteurs de

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croissance favorise préférentiellement l’activation des RTKs associés aux intégrines. Plusieurs évidences suggèrent que la proximité physique des intégrines et des RTKs facilite leur activation réciproque et leur capacité à contrôler conjointement les voies de signalisation nécessaires à la prolifération, la survie et la migration cellulaire (Baron et al., 2002). Les intégrines, suite à leur liaison à la MEC, entraînent notamment l’activation de FAK et ses effecteurs, l’activation de la cascade de signalisation Ras-ERK ou encore de PI3K et protéines de la famille Rho, telle que Rac1, essentielle à la migration cellulaire (Giancotti and Tarone, 2003; Mitra and Schlaepfer, 2006). De nombreuses études ont montré un changement du niveau d’expression des intégrines dans les cellules tumorales (Desgrosellier and Cheresh, 2010), corrélé à la progression tumorale, notamment dans les cancers du sein ( Diaz et al. 2005; Friedrichs et al. 1995; Sloan et al. 2006). Au sein des cellules cancéreuses, la signalisation intégrine-RTK est dérégulée, favorisant la survie et la prolifération des cellules tumorales (Guo and Giancotti, 2004).

4.2.2- Les récepteurs à domaines discoïdines

Les récepteurs à domaines discoïdines (DDR) sont des récepteurs à activité tyrosine kinase se liant au collagène natif dans sa conformation en triple hélices. Cette liaison permet l’activation des récepteurs DDR (Vogel et al., 1997) . Il existe deux types de DDR ; DDR1, qui lie les collagènes de I à V et DDR2 qui ne lie que les collagènes I et III. Les cellules épithéliales expriment seulement DDR1. La liaison de DDR1 au collagène entraîne sa dimérisation, suivi d’un réarrangement structural permettant l’activation des domaines tyrosine kinases intracellulaires. Une fois activé, DDR1 phosphoryle les tyrosines de ses substrats et initie ainsi une signalisation intracellulaire. Il est impliqué dans la migration cellulaire et la dégradation de la MEC (Leitinger, 2014). De plus, via des interactions avec les protéines de polarité du complexe Par, Par3 et Par6, DDR1 favorise l’invasion collective des cellules squameuses tumorales en diminuant l’actomyosine au niveau des contacts intercellulaires (Hidalgo-Carcedo et al., 2011). Par ailleurs, l’expression de DDR1 est dérégulée dans de nombreux carcinomes, notamment dans les cancers du sein, bien qu’il soit difficile d’avoir une image claire de son rôle dans la progression tumorale. En effet, selon le type et le grade du cancer considéré, l’expression de DDR1 peut être élevée ou au contraire plus faible, par rapport aux cellules saines (Valiathan et al., 2012).

Comme nous venons de le voir, les complexes jonctionnels et les adhésions à la matrice sont formés de complexes protéiques finement régulés, préservant l’intégrité des

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épithéliums et permettant les mouvements cellulaires. L’intégrité du tissu et le bon positionnement de ces complexes sont permis grâce à la mise en place d’une polarité apico-basale des cellules épithéliales.

Chapitre III : Organisation de la polarité apico-basale des cellules