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Les résultats précédents convergent avec toutes les observations que j‟ai pu mener sur la recherche d‟information (Brandt-Pomares, 2003, 2006, 2008, 2011c). Ils s‟accordent avec de nombreux auteurs sur la nécessité de former les élèves (Blondel, 2001, 2003 ; Blondel, Goffard, Goffard, & Schwob, 2004 ; Beaufils, 2003 ; Bruillard & Baron, 2006 ; Drot-Delange, 2011 ; Ladage & Ravestein, 2012 ; Ravestein, Ladage, & Johsua, 2007 ; Serres & Le Deuff, 2009 ; Serres & Thiault, 2010) et l‟intérêt d‟appréhender la recherche d‟information en tenant compte du caractère multi dimensionnel de l‟activité (Allen, Karanasios, & Slavova, 2011 ; Dinet, Chevalier & Tricot, 2012 ; Karasavvidis, 2009 ; Spasser, 2007 ; Wilson, 2006, 2008 ; Xu & Liu, 2007).

L‟analyse de l‟activité des élèves m‟a permis de mettre en évidence la distance entre ce que l‟enseignant demande de faire et ce que les élèves font réellement sur Internet. Pour ce faire, la distinction entre le prescrit et le réel de l‟activité s‟est avérée particulièrement pertinente. Finalement, les élèves ont passé du temps à réaliser ce que l‟enseignant leur demandait de faire et ont tant bien que mal réussi à produire ce qu‟il attendait d‟eux. Pour autant, si le but de la tâche n‟était pas explicitement de leur apprendre à se servir d‟Internet pour rechercher de l‟information il sous entendait que les élèves en étaient capables. Or les résultats révèlent que les élèves peuvent avoir recours à Internet pour rechercher de l‟information y compris en contexte scolaire mais que pour autant ils ne se livrent pas vraiment à ce que l‟enseignant croit provoquer comme activité parce qu‟ils ne maîtrisent pas ce qui pourrait les aider à mieux utiliser les potentialités d‟Internet pour obtenir l‟information recherchée. Cette analyse de l‟activité des élèves met en évidence ce qu‟ils devraient savoir faire et ce sur quoi l‟enseignement devrait donc porter pour accroitre leurs possibilités d‟action. D‟autant que les élèves ont facilement

recours à Internet pour faire des recherches. Comme certains auteurs le soulignent à propos de la motivation (Retchitzki & Gurtner, 1997), j‟ai pu constater dans toutes mes observations l‟attrait des activités sur ordinateur auprès des élèves. Ils vont plus volontiers rechercher sur Internet que dans les livres et citent Internet en priorité quand on leur demande quels sont les moyens qu‟ils utiliseraient pour préparer un exposé (Brandt-Pomares, 2011 ; Borlet, 2007). Cependant leur activité sur Internet révèle des faiblesses sur différents points : la fiabilité de l‟information, la sélection de l‟information, la navigation et le réseau, les mots clés et les outils de recherche.

1.3.1 La fiabilité des informations,

Les élèves ne font pas de distinctions entre les différentes sources d‟informations et tiennent pour vraies toutes les informations consultées. En fait, ils ne mettent pas plus en doute ce qu‟ils consultent sur Internet que ce qu‟ils consultent ailleurs. Ils font confiance aux informations qu‟ils trouvent sur le Web et n‟estiment pas nécessaire qu‟elles soient vérifiées ou prouvées. Cette confiance absolue, voire ce manque d‟esprit critique, ouvre la porte au relativisme. Pourtant, les élèves ont l‟intuition que toutes les informations et tous les moyens d‟édition ne se valent pas, mais ils ne sont pas suffisamment armés pour détecter les informations qui pourraient s‟avérer plus fiables que d‟autres, notamment du point de vue de la source de l‟information. J‟ai déjà souligné le caractère d‟outil psychologique d‟Internet au sens que lui donne Vygotski, mais justement, la capacité d‟internet de donner accès à des informations et d‟agir sur ses propres connaissances doit s‟assortir des moyens intellectuels de critiquer ces informations. C‟est flagrant avec Wikipédia, l‟affichage résolument encyclopédique, avéré par la quantité et la variété des informations disponibles ne permet pas aux élèves de prendre conscience que, contrairement à une encyclopédie classique (Bruillard, 2007 ; Ladage & Ravestein, 2012), n‟importe qui peut rédiger les articles sur ce site et que ce ne sont donc pas forcément les personnes les plus indiquées, les plus

compétentes ou les plus reconnues qui s‟expriment mais celles qui s‟autoproclament (Brandt-Pomares, 2011c). Il n‟en demeure pas moins que la possibilité offerte à tous de réagir à ce qui est écrit en tant que contributeur en fait un procédé qui porte sur un collectif d‟édition et une régulation sans précédent.

1.3.2 La sélection de l‟information

Devant la liste de résultats que procure l‟outil de recherche, les élèves ont toujours tendance à n‟exploiter que le premier résultat. Il apparait d‟emblée comme le meilleur, alors qu‟un processus de régulation devrait permettre l‟examen des résultats suivants, afin de trouver l‟information la plus pertinente par rapport à l‟objet de la recherche. Pour lutter contre la difficulté à filtrer l‟information, là où plus l‟information est surabondante et moins l‟attention est grande (Simon, 1971), tout se passe comme si le premier résultat se substituait au tri de l‟information comme solution de moindre charge cognitive.

1.3.3 La navigation hypermédia et le réseau

Les limites du document ne se posent pas sur Internet de la même façon que dans les formes traditionnelles. La notion de site n‟apparaît pas de manière aussi flagrante que celle de page ou de livre. L‟écran fixe un cadre matériel, qui fait que très souvent, seul le contenu apparaissant d‟emblée à l‟écran est consulté sans utiliser les barres de défilement ou accéder à d‟autres pages du même site (onglet, lien...). L‟architecture des sites n‟est pas immédiatement visible alors que le déplacement de page en page affiche un enchaînent successif. Pour se déplacer et éviter de se perdre, les élèves développent une stratégie fil d‟Ariane (Brandt-Pomares, 2003) qui leur permet de suivre grâce aux fonctions page précédente et page suivante le fil de leur navigation. Cette stratégie les aide à se repérer mais seulement dans l‟enchaînement des pages

consultées. En suivant une logique séquentielle, les élèves empruntent des chemins inutilement longs, alors que la recherche peut être raccourcie voire simplifiée par un accès direct. S‟ils n‟utilisent que les fonctions page précédente ou page suivante c‟est parce qu‟ils n‟en maîtrisent pas d‟autres. La façon dont ils opèrent montre qu‟il faut les aider à se repérer dans le réseau et à accéder seuls là où ils veulent aller. Leur action doit être guidée par une conception du réseau auquel on peut effectivement accéder directement. Pour élever le degré de conscience de ce qu‟ils font quand ils naviguent sur Internet, il faut que les élèves sachent se repérer grâce aux différentes fonctionnalités qui peuvent être utilisées (page précédente et page suivante, multifenêtrage, URL dans la barre d‟adresse, historique, favoris…) dans la diversité des pages consultables (sites officiels, réseaux sociaux, blogs, pages perso,) et dans la manière d‟y accéder (accès direct par l‟adresse URL, mots clés dans les moteurs de recherche…).

1.3.4 Les mots-clés et les outils de recherche

Les élèves ne savent pas comment les pages sont indexées et comment fonctionnent les moteurs. Pas plus qu‟ils ne connaissent la notion de mots-clés. Ils écrivent dans le masque de saisie de la recherche des termes, en pensant que l‟ordinateur va chercher de lui-même, tout ce qui est en rapport avec le terme (Brandt-Pomares, 2000). Le formalisme des requêtes repose davantage sur l‟orthographe que sur la notion d‟appariement. Le champ des possibles apparaît nettement plus restreint dans l‟activité des élèves que dans celle modélisée. Moins de modes opératoires disponibles, moins de requêtes, moins de résultats consultés, moins de mots-clefs variés. L‟aspect cyclique de l‟activité de recherche ne s‟observe pas de manière flagrante chez les élèves. Ils font preuve d‟assez peu d‟interactions avec le système et ont du mal à interpréter les réponses qu‟il lui renvoie. Ils ne font que peu ou pas évoluer leurs recherches en changeant de mots clés, d‟outils, en reformulant, en faisant de nouvelles tentatives pour la même recherche.

Ces résultats qui montrent bien la diversité des apprentissages nécessaires (fonctionnalités des logiciels, architecture réseau, champ de connaissances lexicales et conceptuel sur lequel porte la recherche, indexation,…) m‟ont conduit à m‟interroger sur la mise en œuvre d‟outils informatisés dans les situations scolaires au regard spécifiquement des processus d‟enseignement-apprentissage.

2 LE ROLE DES OUTILS INFORMATISES DANS LES PROCESSUS

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ENSEIGNEMENT-APPRENTISSAGE