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LES CLIENTS DE LA FONCTION RH/ LES PARTIES PRENANTES ?

Dans le document Le pouvoir d'influence du DRH (Page 34-38)

La nature des clients de la FRH et ses relations avec ceux-ci a évolué simultanément avec son appellation. D’abord au service des dirigeants pour des tâches de nature plutôt administrative en lien avec la gestion du personnel, la fonction RH a renforcé son interaction avec les différentes parties prenantes de l’entreprise.

Selon Jean-Marc Peretti, « la fonction RH travaille aujourd’hui pour quatre catégories de clients internes dont les attentes sont très diverses (Peretti, Ressources Humaines, 2017) » :

• Les dirigeants de l’entreprise qui attendent le support de la DRH pour la mise en œuvre de la stratégie, qu’elle soit un acteur de la compétitivité au service de la création de valeur ;

• Les managers opérationnels qui attendent le support de la DRH en termes de management, la fonction RH est garante de l’engagement des managers ;

• Les salariés qui voient la fonction RH comme le garant de l’équité, de l’employabilité et de l’éthique ;

• Les représentants du personnel pour lesquels la fonction RH est garante de l’écoute, de la conformité et de la dynamique sociale.

Les dirigeants de l’entreprise attendent de la fonction RH qu’elle soit dans une démarche « amont » consistant à insuffler la dimension humaine dans la stratégie de l’entreprise et à mettre en œuvre les actions nécessaires à son déploiement. La FRH est considérée comme

27 http://www.manpowergroup.fr/les-nouveaux-visages-de-la-transformation-de-lentreprise-qui-sont-les-drh-du-cac- 40/#infographie

28 Marie-Françoise DAMESIN, DRH Renault 29 Franck MOUGIN, DRH VINCI

un facilitateur qui met en œuvre des solutions permettant la résolution de problèmes, le tout au service de la création de valeur pour l’entreprise, ses collaborateurs et ses actionnaires : « Le DRH est un facilitateur qui met en œuvre des solutions et non des problèmes (Yves Metz, Président d’Ingérop)». Ce qu'attendent les dirigeants et les autres parties prenantes du DRH « c'est qu'il aille au-delà de leurs attentes en proposant des initiatives, en sachant les faire accepter, en accompagnant le changement et tout ceci en maîtrisant les coûts »30.

Au-delà des missions régaliennes de la FRH, la DG attend d’elle qu’elle « soit en capacité de s’engager et à faire ses preuves dans les chantiers suivants (Eysette & Bessyre, 2014) » :

• La transformation de l’organisation avec reporting chiffré sur des thématiques en lien avec la globalisation du business, la révolution numérique, la RSE ;

Le management des talents : « on attend de la FRH qu’elle traduise en profils humains les plans stratégiques de l’entreprise en sachant questionner la stratégie » (Eysette & Bessyre, 2014) ;

• Savoir faire bouger les lignes tout en restant le garant de la culture de l’entreprise. Les attentes de la DG peuvent cependant varier selon le type d’organisation, l’activité et la situation économique et financière de l’entreprise. Plus l’entreprise est petite, plus la fonction RH et son titulaire doivent maitriser toutes les dimensions du métier, du droit social à la stratégie RH en passant par le support opérationnel, « Le DRH de PME est souvent un expert, il y en aura toujours » (Eysette & Bessyre, 2014).

Le rôle de la FRH et de ses représentants dépasse donc largement la maitrise de l’environnement juridique. Il s’agit d’être à la fois expert et dirigeant, « Aujourd’hui le rôle de la DRH est un plus un rôle de ET que de OU » (Added, Dartiguepeyroun, Lamothe, & Sappe, 2014). La FRH doit à la fois traiter les sujets quotidiens récurrents et s’inscrire dans une action dans le temps, « Le DRH est le gestionnaire des contradictions, l’architecte de la culture et du sens de l’entreprise (Added, Dartiguepeyroun, Lamothe, & Sappe, 2014) ». Interrogés par MERCER en 2016 sur les attentes prioritaires vis-à-vis des DRH, les DG citent les sujets suivants :

• Recrutement, attractivité, marque employeur ; • Digitalisation de l’entreprise ;

• Fidélisation des talents clés ;

• Développement du management du leadership ; • Action en faveur de l’engagement des collaborateurs.

Ces attentes sont à mettre en perspective avec les résultats de l’enquête menée par la CEGOS en 2016 qui laissent apparaitre des réalités très différentes. Les répondants indiquent passer 29% de leur temps sur des tâches de nature administrative (+15,5% par rapport à 2012) et 17% pour des missions en lien avec la conduite du changement et

l’accompagnement stratégique (en 3ème position après le conseil aux opérationnels, -5,5% par rapport à 2012). En outre, 81% d’entre eux ajoutent dédier la majeure partie de leur temps à la négociation d’accords suite aux évolutions règlementaires, 76% indiquent passer beaucoup de temps « à éteindre des incendies ». Des résultats en contradiction avec les attentes de la DG, des salariés et des DRH eux-mêmes…

Les managers attendent de la fonction RH un soutien quotidien actif qui nécessite d’allier dimension humaine et contraintes opérationnelles. Elle est considérée comme un facilitateur au service du business en charge d’apporter le support nécessaire aux managers notamment en matière de recrutement. Depuis le début des années 2000, la gestion du capital humain est considérée comme prioritaire par les entreprises qui dédient une partie importante de leur budget formation pour former les managers au management ainsi qu’à la gestion des RH. C’est l’ère du « Tous DRH » comme le décrit Jean-Marie Peretti dans son ouvrage paru en 200331. Le concept est intéressant car il met en avant l’importance de la

dimension humaine et sa nécessaire prise en compte par les managers. Il met également en évidence la nécessité de partager la FRH entre la DRH et les opérationnels. Le concept semble avoir cependant atteint ses limites car à force de vouloir décentraliser les missions de la FRH pour responsabiliser les managers, la fonction a perdu en influence. Dans certaines entreprises, les managers ont pris le pouvoir et les DRH sont devenus des « yesmen »32 (Eysette & Bessyre, 2014). La FRH est considérée comme une « boite à

outils » et les membres de son équipe comme « des auxiliaires chargés de l’exécution » (Eysette & Bessyre, 2014).

Pour éviter ces dérives, la DRH doit intervenir auprès des managers en qualité d’agent de la cohésion. Elle participe à leur formation, à leur acculturation au management afin de leur permettre d’acquérir les clés de compréhension de l’organisation et de l’humain : « la DRH est à la manœuvre pour la sélection et le développement des dirigeants…sélection et formation des managers au permis de conduire managérial »33 (Added, Dartiguepeyroun, Lamothe, & Sappe, 2014). En apprenant aux managers à faire grandir leurs équipes, la DRH participe au développement des compétences individuelles et collectives, elle crée de la valeur pour l’entreprise et ses parties prenantes. L’action de la DRH s’inscrit dans la durée, elle favorise la diversité au sein des équipes et limite les risques de « consanguinité » auquel Henry Mintzberg fait référence dans son ouvrage « Des managers, des vrais, pas des MBA ! » (MINTZBERG, 2005). Il y porte un regard critique sur le management et son enseignement dans les écoles et au sein des entreprises.

Les salariés, quant à eux, voient la FRH comme un agent de l’équité, ils attendent « un traitement équitable » de sa part en matière d’évaluation, de reconnaissance du mérite individuel, et de rétribution. Ils attendent également de la FRH qu’elle mette en œuvre les actions nécessaires au développement des compétences pour favoriser leur employabilité (interne et externe) et qu’elle agisse en faveur de la communication au sein de l’entreprise.

31 « Tous DRH », sous la direction de Jean-Marie, 2003, Eyrolles

32

Préface de Muriel Pénicaud

De récents sondages réalisés auprès de salariés d’entreprise de taille et de secteurs d’activité différents font ressortir une insatisfaction générale des salariés vis-à-vis de la FRH. L’enquête menée par la CEGOS en 2016 révèle un degré de confiance des salariés vis-à-vis de la DRH de 5,4/10. Les principaux reproches adressés à la DRH concernent l’insuffisance de la prise en compte du facteur humain (56%, +19% par rapport à 2012) et le manque de transparence (42%, +16% par rapport à 2012). A noter que 15% des répondants soulignent un manque d’innovation de la part de la DRH.

Une autre étude menée par le site emploi qapa.fr en 201734 révèle que 84% des femmes et 82% des hommes interrogés considèrent que les DRH sont davantage au service de la direction que préoccupés par les intérêts du personnel de leur société. Conséquence de ce manque d’intérêt, 78% de femmes et 71% d’hommes se déclarent insatisfaits de la FRH considérant qu’elle ne répond pas à leurs attentes. Ils reconnaissent néanmoins l’importance de la fonction au sein d’une société puisque 78% de femmes et 71% d’hommes déclarent qu’elle contribue au succès de l’entreprise. Le manque d’interaction entre la DRH et les salariés ne contribue pas à améliorer l’image de la FRH qui reste principalement connus des salariés pour son action en faveur du recrutement et de la GPEC et par voie de conséquence les licenciements et les procédures disciplinaires (cf. tableau ci-dessous)

Les représentants du personnel quant à eux voient dans la FRH un interlocuteur privilégié en matière de dialogue social. Selon différentes enquêtes menées par l’ANDRH, leurs attentes varient en fonction de l’activité de l’entreprise et de son organisation mais de manière générale, les représentants du personnel déclarent vouloir s’inscrire dans une démarche de co-construction avec la FRH. Ils attendent d’elle écoute et échange au service d’un dialogue social constructif mais aussi une action continue en matière de mise en conformité pour garantir le respect de la loi et les droits des salariés.

L’interaction de la fonction RH ne se limite pas aux clients internes, selon son type d’activité et son organisation, elle peut également concerner des parties prenantes externes comme les actionnaires, les clients ou les pouvoirs publics. Les attentes des actionnaires peuvent être associées à celles de la direction générale. Elles peuvent variées selon qu’ils soient actionnaires et salariés ou simples actionnaires. Ils attendent de la FRH qu’elle bâtisse une stratégie RH au service de la création de valeur et du développement de la performance économique de l’entreprise.

Les clients et les partenaires externes de l’entreprise voient dans la DRH le garant des pratiques managériales de l’entreprise. La DRH est également l’interlocuteur privilégié des clients externes en matière de responsabilité sociale et environnementale, deux sujets qui sont désormais devenus indissociables du business et pour lesquels l’action de la fonction RH est prépondérante.

Cette action se poursuit au-delà des frontières de l’entreprise puisque la DRH doit être à l’écoute du marché et être en capacité de jouer un rôle de lobby en matière d’évolutions règlementaires et sociales afin d’anticiper leurs effets sur l’activité et la performance de l’entreprise.

Dans le document Le pouvoir d'influence du DRH (Page 34-38)