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2.2 Le transport des constituants

2.2.1 Les canaux

La partie la plus importante du réacteur est bien sûr constituée des canaux, puisque c’est là qu’ont lieu la plupart des fissions et que les neutrons issus de la décroissance des précurseurs ont la plus grande importance. Malheureusement, dans un sixième du réacteur, les canaux sont au nombre de 300 environ, et il est impossible de les simuler tous individuellement. Cependant, on peut considérer que le comportement d’un canal est proche de celui de ses voisins, et qu’il suffit d’en simuler quelques-uns, les autres se déduisant par interpolation. La figure 2.5 montre les canaux que l’on a choisi de simuler. Ils sont au nombre de douze, plus nombreux vers le centre et les barres de contrôle, où les gradients de flux peuvent être forts, que près du bord du réacteur. Considérant que, loin du bord, le flux dépend essentiellement du rayon et non de la position an-gulaire, les canaux simulés sont placé le long d’un rayon du réacteur. Le choix de l’interpolation découle de la même constatation : plutôt que d’interpoler en coordonnées cartésiennes, nous le ferons en coordonnées cylindriques.

Nous voulons pouvoir calculer une grandeur quelconque dans un canal arbitraire du réacteur comme une combinaison linéaire de la même grandeur calculée sur les douze canaux simulés.

FIG. 2.5 – Le réseau de canaux. En hachuré, les canaux pour lesquels une simulation complète est réalisée.

Pour trouver les coefficients de la combinaison linéaire, les douze canaux simulés, ainsi que toutes leurs images par les symétries du réacteur, sont placés sur un plan en fonction de leurs coordonnées cylindriques (r,θ). Une triangulation de Delaunay [56] est opérée sur l’ensemble

de points ainsi formé. Elle fournit un ensemble de triangles tels que le cercle circonscrit à chaque triangle ne contienne aucun des autres points. Ceci garantit qu’aucun triangle ne soit très allongé. La triangulation obtenue est montrée figure 2.6. Maintenant, chaque canal du réacteur est soit simulé directement, soit compris à l’intérieur d’un triangle. Dans le premier cas, la grandeur recherchée est connue directement. Dans le deuxième, le point correspondant au canal recherché est exprimé comme le barycentre des trois sommets du triangle. dans lequel il se trouve. Les coefficients barycentriques sont précisément les coefficients de la combinaison linéaire que nous recherchions. Cette méthode d’interpolation a été testée sur la distribution spatiale des densités de fission. L’écart entre la valeur réelle et la valeur issue de l’interpolation à partir des 12 canaux choisis n’était nulle part supérieure à 1%, et presque partout bien inférieure. Nous considérerons donc cette interpolation comme légitime.

θ r

FIG. 2.6 – Triangulation utilisée pour les interpolations entre les canaux simulés. Les douze canaux de départ sont entrourés d’un cercle, les autres points sont leurs images par les symétries du réacteur.

et dans le canal le plus rapide, le nombre de Reynolds vaut environ 900, l’écoulement est donc laminaire. Nous négligerons donc tous les termes de turbulence. Comme les canaux sont petits devant la taille du réacteur, les variations de flux neutronique sont négligeables dans le sens trans-verse à l’écoulement. De ce fait, lorsqu’on considère un canal particulier, le problème possède une symétrie cylindrique. Notons que ce ne serait pas le cas dans un réacteur de type MSBR, où les canaux ont un diamètre dix fois plus grand. La simulation hydraulique sera donc choisie de type bidimensionnelle axisymétrique, ce qui permet de limiter grandement le temps de calcul nécessaire.

La vitesse d’entrée du sel au bas du canal est imposée. Elle est déduite de mesures effectuées par l’ORNL sur une maquette à taille réelle du MSRE, avant la construction de celui-ci. Ces mesures indiquaient que la vitesse dans les canaux décroissait linéairement avec la distance du canal au centre du réacteur, le rapport de vitesse entre les canaux périphériques et les canaux centraux étant proche de 0.8. Combinée à la connaissance du débit de sel dans le circuit, cette donnée permet de calculer le débit dans chaque canal. La vitesse est supposée uniforme sur la face d’entrée du canal.

Reste à définir le maillage utilisé pour la simulation. Sa finesse est imposée par un phénomène d’accumulation de précurseurs au bord du canal. La création de précurseurs est proportionnelle au taux de fission dans le sel, donc homogène sur toute la section du canal. Cependant, la vitesse du sel au bord étant nulle, les précurseurs créés près du bord du canal sont emportés beaucoup moins rapidement par le sel que ceux créés près du centre du canal. Il y a donc accumulation au cours du temps de précurseurs sur les bords du canal. Deux phénomènes limitent cette accumu-lation. Tout d’abord la durée de vie des précurseurs limite le temps d’accumuaccumu-lation. Il est clair que les précurseurs dont la durée de vie est la plus longue seront les plus sujets à ce phénomène

d’accumulation. D’autre part la diffusivité des précurseurs dans le sel, non nulle, leur permet de se rapprocher du centre du canal et d’être emportés par le flux de sel. Il est difficile de connaître la valeur de cette diffusivité. Cependant, des études concernant les actinides et les lanthanides dans le fluorure de lithium et de béryllium [6] permettent de définir un intervalle probable de 10−9 à 10−7 m2s−1. La finesse du maillage au bord sera donc déterminée par le temps de vie le plus long des précurseurs et la valeur de diffusivité la plus petite, qui donneront la concentration la plus piquée près du bord. La figure 2.7 montre les distributions de précurseurs à l’équilibre pour les valeurs extrêmes de temps de vie et de diffusivité.

(a) D=10−9m2s−1, groupe 0 (b) D=10−7m2s−1, groupe 0 (c) D=10−9m2s−1, groupe 5

FIG. 2.7 – Distributions spatiale de la concentration de précurseurs dans le canal central, pour différentes diffusivités et différents groupes de précurseurs. Le groupe 0 est le plus lent à se dés-intégrer, le groupe 5 le plus rapide. Pour plus de lisibilité, la dimension verticale a été compressée d’un facteur 50. Le bleu symbolise la concentration minimum, et le rouge la concentration maxi-mum.

Le maillage choisi permet de décrire même la plus fine des couches de précurseurs qui peuvent s’accumuler. Il comporte 13 mailles radialement, chacune 25% plus fine que la précé-dente, de façon à obtenir des mailles très fines au bord du canal. Le nombre de mailles verticales est de 322. De cette façon, les mailles centrales sont environ cinq fois plus hautes que larges. Il est intéressant de noter que dans le cas d’un réacteur de type MSBR, la présence de turbulence empêche cette accumulation de précurseurs en surface.