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2. CADRE DE RECHERCHE

2.2 LA PSYCHOTHÉRAPIE ET LE PROCESSUS DE

2.2.1 Les approches comportementales et cognitives

L’approche comportementale offre une conception théorique radicalement différente par rapport à l’approche psychanalytique. En effet, les deux processus conscients et inconscients ont été remplacés par les principes théoriques qui font appel aux comportements appris ou désappris. Dans la tradition comportementale classique, il n’existe pas de théorie des émotions en soi, mais ces dernières sont vues comme résultant d’un apprentissage au même niveau qu’un comportement ouvert. De plus, ces types de comportements vont être annulés par l’absence d’un renforcement continu. Deux courants principaux ont dominé les théories comportementales des émotions. Les premières orientations théoriques se représentaient l’individu comme une sorte de tabula rasa, c’est-à-dire un organisme qui apprend les réponses émotionnelles en réaction aux contingences environnementales. A cet individu, on attribuerait une flexibilité élevée dans la capacité humaine à apprendre des réponses émotionnelles variées. La deuxième orientation théorique, par contre, postule que les émotions auraient, au moins en partie, une prédisposition innée. De nombreux auteurs d’orientation expérimentale, provenant de la tradition de Watson et Skinner adhéraient plutôt à la première orientation, plus précisément en se focalisant sur le rôle joué par le conditionnement classique pour l’apprentissage des réponses émotionnelles non désirées. Les auteurs comme Miller (1951, in Greenberg, 1987) et Mowrer (1960, in Greenberg, 1987) se basent plutôt sur le rôle de l’émotion dans l’apprentissage conditionnel. Ces auteurs ont tendance à regarder la peur et l’anxiété comme le centre de gravité de l’émotion, car elles sont considérées comme étant des émotions essentielles dans l’apprentissage d’évitement. La position de Mowrer se distingue de celle de Miller de différentes façons. Pour Mowrer, les émotions seraient centrales dans l’apprentissage et il en propose quatre : la peur, l’espoir, le soulagement et la

déception. La peur et l’espoir détermineraient les réponses

alternatives dans des situations où un but serait menacé. La personne pessimiste répondrait à ce type de situation par la peur, alors que la personne optimiste y répondrait par l’espoir. Quand un stimulus qui déclenche la peur disparaît, alors apparaîtrait comme

émotion le soulagement. La nouvelle idée de Mowrer sur les émotions, dans l’approche comportementale, serait que l’émotion représenterait le pôle central de l’organisme et serait initiée par des stimuli appris et désappris.

Au début des années soixante, Wolpe et Rachman (in Comer, 1995) proposent la théorie de la peur conditionnée. Wolpe, en se basant sur les expérimentations effectuées avec les chats, est de l’avis que la peur s’estomperait par le processus appelé inhibition

réciproque. Dans ce processus, l’anxiété serait déclenchée et la

personne appliquerait en même temps une réponse pertinente. Dans cette situation, la réponse adéquate inhiberait et effacerait la réponse anxieuse. La relaxation, utilisée dans la désensibilisation systématique, ferait partie de ces réponses adéquates. Rachman, de son côté, pensait qu’une simple théorie sur le conditionnement n’était pas suffisante pour expliquer la génération et le maintien de la peur. Il était de l’avis que les peurs quotidiennes peuvent être acquises par des processus indirectes, comme l’apprentissage vicariant. A ce sujet, il ne faut pas oublier la théorie sociale cognitive de Bandura (1986, in Comer, 1995) qui est basée sur la notion d’interaction. D’après cet auteur, le comportement résulte d’un déterminisme réciproque des facteurs personnels, environnementaux et comportementaux. Ce modèle de causalité triadique et réciproque n’implique ni que chacun des trois facteurs intervienne avec la même force dans une situation donnée ni que les trois facteurs soient concernés en même temps. La bi- directionnalité de l’influence signifie que les personnes sont à la fois produit et productrices de leur environnement. Pour Bandura les croyances d’un individu à l’égard de ses capacités à accomplir avec succès une tâche sont à compter parmi les principaux mécanismes régulateurs des comportements. Ces croyances constituent le mécanisme le plus central et le plus général de la gestion de soi. Ainsi, dans cette perspective, les personnes évitent les situations et les activités qu’elles perçoivent comme menaçantes, mais elles s’engagent à exécuter les activités qu’elles se sentent aptes à accomplir.

Le traitement psychothérapeutique de l’anxiété et de la peur se base sur trois approches fondamentales : la désensibilisation systématique, le flooding3 et le modelage.

En résumé, le rôle de l’émotion dans la thérapie comportementale a été assez uniforme : l’émotion étant vue comme une réponse indésirable qui doit être supprimée ou contrôlée.

L’approche cognitive

Un thème qui a notamment permis d’unifier la théorie cognitivo- comportementale a été le fait de conceptualiser l’émotion comme un phénomène post cognitif. Ceci bien que certains théoriciens appartenant au courant cognitivo-comportemental présupposent la supériorité causale cognitive, c’est-à-dire que les cognitions précéderaient les émotions. De plus, les réactions individuelles seraient déterminées par les pensées intérieures. Ainsi, le rapport subjectif de leurs idées, sentiments et désirs fournissent le matériel brut des thérapies cognitives pour expliquer l’expérience humaine. En effet, on se réfère à un contenu spécifique d’une interprétation d’un événement qu’on croit être lié avec une réponse émotionnelle spécifique. Les pensées déviantes représentent les distorsions cognitives qui créent les troubles émotionnels. Ces pensées personnelles constituent les premières tâches de changement dans la thérapie cognitive.

La thérapie cognitive de Beck se base sur les pensées automatiques et erronées. Les pensées automatiques sont conceptualisées comme des processus cognitifs rapides et critiques qui ne sont pas complètement conscientes et qui soulignent les réactions émotionnelles négatives. Le but des techniques cognitives appliquées en thérapie consiste à ce que le client mette en évidence ses propres pensées. Ainsi, le thérapeute met à jour progressivement les monologues intérieurs en questionnant le client lors de moments de fortes émotions. Ces moments sont utilisés par les thérapeutes pour avoir accès aux schémas cognitifs. Le but consiste à aider le client à modifier la conception négative

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Il s’agit de l’exposition directe au stimulus actuel de la peur. Cette technique vise la prévention du comportement évitant et l’extinction ou l’habituation de la réponse anxieuse.

du monde et de lui-même qui en résulte. Le thérapeute peut aussi utiliser le jeu de rôle reproduisant les situations génératrices de sentiments négatifs.

Une autre technique consiste à ce que le client tienne à jour des fiches qui, en cas de sentiments négatifs, permettent de noter les circonstances dans lesquelles sont apparues les émotions négatives et les pensées automatiques qui les ont accompagnées. Ainsi, il se peut qu’apparaissent des thèmes récurrents qui s’organisent sous forme de postulats.

En effet, il existe de nombreuses formes de techniques pour la mise en évidence des convictions personnelles. Parmi ces techniques on compte par exemple, la fiche de modification des pensées

automatiques ou la flèche descendante4(downward arrow

technique). En général, le but de ces techniques ne consiste pas à

confronter le client avec son erreur mais, par un jeu subtil et progressif de questions et de réponses, appelé aussi dialogue

socratique, on lui fait prendre conscience du caractère

dysfonctionnel, illogique et déficitaire des principes cachés qui régissent son comportement. En rapport avec ces techniques, on suppose que le thérapeute incitera le client à développer la capacité d’effectuer des raisonnements alternatifs par rapport à ces postulats. Ce traitement permet au client submergé par l’affect négatif et dominé par des pensées irrationnelles de remplacer ses distorsions illogiques par des réponses plus en rapport avec la réalité. L’application de ces techniques permet au client de réduire les symptômes dépressifs par exemple dans un bref délai, de mieux comprendre les causes de ses états émotionnels, de développer l’autocontrôle et de réduire le danger de rechute (Burns, 1989). Dans une même perspective, dans la thérapie cognitive de Ellis (1978), appelée aussi thérapie rationnelle émotive, les problèmes émotionnels seraient dus au système de croyance irrationnel de l’individu. D’après cet auteur, les émotions ne sont pas isolées de l’organisme ou de l’environnement. La perception, l’émotion, le comportement et la pensée sont reliés entre eux et opèrent ensemble. Les émotions intenses interfèrent avec l’intégration de

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Cette technique, utilisée dans cette recherche, va être expliquée de façon plus approfondie dans le chapitre suivant.

ces processus. Dans la thérapie de Ellis, le but consiste à aider les clients à changer ou à contrôler l’émotion intense et inappropriée. Les comportements des clients sont influencés par des croyances maladaptées et la thérapie se focalise justement sur la modification de ces dernières. Ainsi, la thérapie rationnelle émotive agit sur les croyances irrationnelles du client, surtout par deux moyens: a) le thérapeute travaille ouvertement comme contre propagateur qui s’oppose aux arguments auto dommageables du client; b) le thérapeute encourage le client, il essaie de le convaincre et il l’incite dans l’exercice à effectuer ce qu’il craint. Cela permet de réévaluer efficacement sa conviction insensée.

Ces techniques thérapeutiques visent à intérioriser une vision de vie rationnelle de la même façon qu’auparavant lorsque le client avait intériorisé et appris les postulats irrationnels de ses parents et de son environnement. La conception de base de cette technique repose sur le fait que l’homme n'est pas touché d’une façon déterminante par d’autres hommes et événements extérieurs, mais plutôt qu'il adhère aux attitudes de ses prochains et aux événements extérieurs. Ces constats démontrent que la personne présente presque un pouvoir sans limite en modifiant ses convictions auto- suggestives qui lui permettent de changer. Ainsi, elle a la possibilité de devenir telle qu’elle le voudrait.

Dans une perspective similaire à d’Ellis, Beck, comme on l’a vu précédemment, utilise une technique particulière pour se focaliser sur les pensées automatiques dysfonctionnelles.

Une troisième approche de thérapie cognitive, appelée aussi

thérapie auto-instructive de Meichenbaum (1977, in Greenberg

1987), vise à accroître la conscience de ses propres affirmations négatives, mais ceci ne conduit pas à une analyse rationnelle des croyances erronées du client. Cependant, cette thérapie se focalise sur l’apprentissage de comportements spécifiques de coping et de résolution de problèmes. D’après cet auteur, la population normale se distinguerait de la clinique non par l’absence de pensées irrationnelles, mais par la gestion de types de techniques utilisées pour affronter ces pensées et ces sentiments.

Les approches présentées ci-dessus présentent les émotions soit comme une réponse apprise, soit comme un phénomène cognitif.

Toutefois, le développement théorique, tel qu’il a été présenté dans le chapitre précédent concernant le traitement de l’information, a permis de proposer d’autres traitements thérapeutiques.

Dans cette nouvelle optique, Rachman (in Comer, 1995) qui provient d’une orientation comportementale traditionnelle, suggère aux thérapeutes de modifier les problèmes à partir des affects. Il propose d’utiliser des techniques qui permettent de réduire les réactions affectives indésirables et qui facilitent l’interdépendance entre les systèmes affectifs et cognitifs. Il est de l’avis que les thérapeutes devraient développer de nouvelles voies pour avoir accès directement au système affectif.

En résumant, on peut conclure que les théories comportementales de l’apprentissage ne jouent actuellement plus de rôle dans les modèles explicatifs des thérapies comportementales, et qu’elles ont été remplacées par les concepts provenant de la psychologie cognitive et ceux dérivant du traitement de l’information. Aujourd’hui, en tenant compte de cette évolution, on parlera plus justement de la thérapie cognitivo-comportementale.