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Chapitre 2 Conception optique

2.3 Les surfaces en optique

2.3.2 Lentille à forme libre

Le grand développement des méthodes de production au cours des dernières années a permis une utilisation croissante des lentilles à forme libre dans les designs. Dans le cadre de ce mémoire, l’appellation lentille à forme libre inclura aussi les lentilles asphériques à symétrie de révolution nécessitant une description plus complexe que la modification de la constante conique. Dans la plupart des logiciels optiques, elles sont définies par une suite de polynômes comme suit où le premier terme représente le terme sphérique et la constante conique:

( )

( √ ( ) )

(2.17)

Il est théoriquement possible de décrire n’importe quelle surface symétrique pourvu que n soit assez grand. Cependant, il est nuisible d’utiliser des polynômes au-delà de l’ordre douze. Des variations reliées à des polynômes plus élevés peuvent créer des angles d’incidence exagérément élevés et des effets de bords comme des redressements, ce qui rend le système extrêmement sensible aux perturbations. De plus, les logiciels de conception optique échouent bien souvent à bien choisir les coefficients appropriés si le nombre de terme est trop élevé [10]. Par exemple, l’ajout de terme supplémentaire peut parfois mener l’algorithme d’optimisation à faire en sorte que l’un compense les effets d’un autre sans pour autant améliorer le système. De plus, lorsqu’il est question de créer physiquement la lentille, la fonction la décrivant sera bien souvent utilisée pour créer une lentille plus grande que requis pour laisser une marge de

21 manœuvre au fabricant. Une fonction capricieuse avec un fort rebroussement en dehors de la zone précise d’intérêt peut grandement compliquer sa fabrication.

La figure 2.6 présente un exemple simple d’optimisation utilisant des polynômes. L’optimisation avait pour but de minimiser la taille RMS de la tache d’un front d’onde plan reflété par un miroir ayant un foyer paraxial au plan image. L’expérience fut d’abord tenté avec les polynômes d’ordre 4,6 et 8 et après, avec ceux allant jusqu’à 16. Par la suite, l’optimisation fut répétée pour un tilt de 1° du miroir. Le graphique à barres présente le ratio entre les coefficients pour chaque situation. On peut voir que les variations pour les deux premiers ordres sont plutôt similaires dans les deux cas. Dans le cas du polynôme à trois termes, la variation du troisième terme est presque nulle alors qu’on peut observer, pour le cas allant jusqu’à l’ordre 16, une variation des termes élevés. Au niveau de la performance, on peut voir que dans les deux cas, avec ou sans tilt, l’optimisation n’utilisant que trois polynômes est nettement meilleure. Dans le cas sans tilt, la solution converge vers l’équivalent d’une parabole alors que son homologue à 16 ordres n’y arrive pas. Lorsqu’un tilt est présent, la tendance se maintient et on observe de meilleures performances de la part du polynôme allant jusqu’à l’ordre 8. De plus, sa convergence est beaucoup plus rapide. Cela montre la difficulté rencontrée par le logiciel pour optimiser un nombre élevé de coefficients.

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Tableau 2 – Taille RMS de la tache pour différentes surfaces

Situation Taille RMS de la tache (μm)

Sphérique 134.000

Sphérique avec tilt de 1° 142.729

Polynôme d’ordre 16 0.648

Polynôme d’ordre 16 avec tilt de 1° 30.960

Polynôme d’ordre 8 0.000

Polynôme d’ordre 8 avec tilt de 1° 27.176

Figure 2.6 – Exemple de variation des coefficients de polynômes

En bleu, le rapport entre les coefficients des polynômes de 16e ordre. En rouge, le rapport pour les coefficients des polynômes de 8e ordre.

Seul des termes pairs sont utilisés en vertu de la symétrie de révolution présente dans la grande majorité des cas. Bien qu’intuitive en apparence, cette définition mathématique de surface est bien loin d’être idéale et ne permet pas

23 une analyse ou une compréhension profonde des différents effets sur le système optique. Ces surfaces sont habituellement générées via un processus d’optimisation progressif où l’on débloque terme à terme des coefficients d’ordre croissant. Il n’existe pas encore de processus intuitif ou analytique général permettant d’intégrer une lentille à forme libre avec des paramètres prédéfinis dans un système.

Néanmoins, une nouvelle définition mathématique comportant de nombreux avantages a été présentée dans les dernières années. Il s’agit de la représentation des asphères via les polynômes orthogonaux de Forbes [11] tel que présenté à la figure 2.7 et au tableau 3.

Figure 2.7 – Représentation des six premiers polynômes orthogonaux de Forbes

. Les polynômes d’ordre plus élevés ont plus de maximum locaux, tels que présentés au tableau 3. Source [10]

Ceux-ci furent développés notamment en réponse à l’instabilité des solutions polynomiales ayant un nombre de termes élevé. L’un des aspects les plus importants reliés à l’orthogonalité de la base est une grande réduction du nombre de chiffres significatifs nécessaires à la description d’une surface pour un même nombre de polynômes. Cette réduction peut atteindre un facteur trois pour six ordres de polynômes. De plus, les résultats issus des méthodes existantes de

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recherche des meilleurs coefficients lors de l’optimisation sont beaucoup plus stables et intuitifs que ceux se basant sur les polynômes en puissance habituels. Avec ceux-ci, une légère variation de la fonction cible peut entraîner de grands changements sur tous les coefficients alors que pour une base orthogonalisée et normalisée sur l’ouverture, tels que les polynômes de Forbes, on peut noter que de petits changements n’aurons de conséquences que sur les derniers coefficients, le dernier étant le plus affecté. Cela revient donc à dire que l’ajout de coefficients n’influence que les variations d’ordre élevé sans modifier la forme de base. Cette propriété peut s’avérer très utile pour le tolérancement et l’optimisation.

Dans certains cas où la symétrie rotationnelle du système ne peut pas être respectée, par exemple dans un système désaxé, il est essentiel d’utiliser une définition prenant en compte cette asymétrie. Les polynômes en puissance sont peu recommandables étant donné que l’augmentation de termes rend l’optimisation instable. Déjà fortement utilisés lors de l’analyse de surfaces optiques, les polynômes de Zernike présentent une option intéressante pour cette application [12]. La surface est alors décrite comme suit :

( √ ( ) )

∑ ( )

(2.18)

Le premier terme représente le terme sphérique et la constante conique. Les Cj sont les coefficients devant chacun des polynômes de Zernike Zj tel que présentés au tableau 3. Comme dans la plupart des cas, il est avantageux de se limiter à un certain ordre de polynôme, habituellement seize. La présence de termes non symétriques et l’orthogonalité de cette base normalisée permettent, tout comme les polynômes de Forbes, d’obtenir des résultats plus fiables.

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Tableau 3 – Les cinq premiers polynômes de Forbes et cinq polynômes de Zernike

Ordre Zernike Forbes

0

1 ( )

2 √ ( ) ( )

3 √ ( ) ( ( ( ))) 4 √ ( ) ( ( ( )))

Contrairement aux polynômes de Zernike [12], les polynômes de Forbes sont à symétrie de révolution et une seule variable suffit à les décrire. La variable u représente (

) où r est la coordonnée radiale.

Une autre approche peut être effectuée en utilisant une sommation de courbes gaussiennes décrivant une surface comme suit [13] :

( ) ∑ ( ) ( ) (2.19)

Ici, les termes wi représente les poids alors que M est la matrice de la covariance. En sélectionnant, un nombre adéquat de courbe gaussienne, il est possible d’optimiser les poids pour obtenir une surface répondant aux critères sélectionnés. Un exemple est présenté à la figure 2.8.

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Figure 2.8 – Construction d’une surface par des courbes gaussiennes On a ici tenté de reconstruire une surface sphérique avec une somme de courbes gaussienne. En a), la courbe rouge montre la somme de six gaussiennes. La courbe noir est la référence sphérique. En b), onze courbes furent utilisées. En c), une représentation en 3D d’une surface sphérique créée avec une grille 6x6 de courbes gaussiennes. Source [13].

Étonnamment, cette technique a présenté de meilleurs résultats , c’est-à-dire un gain de 18.5% sur la MTF moyenne du système, que les polynômes de Zernike ou les polynômes en puissance dans un cas particulier de design d’asphère anamorphique présenté dans l’article. Ceci montre l’importance que peut avoir la définition de la surface sur la qualité de la solution finale obtenue.

27 Même si les représentations de surfaces à forme libre présentées précédemment sont les plus populaires actuellement, plusieurs autres avenues sont actuellement explorées par des groupes de recherches à tra vers le monde. On fait ici référence à des surfaces définies par des sommes de fonctions différentes de celles présentées tels que des superconiques [14] ou encore à des procédés géodésiques gaussiens utilisant des éléments statistiques dans leur design [15]. Malgré tout, dans la majorité des cas, l’implémentation de ces techniques s’avère compliquée et les bénéfices à en retirer sont maigres ou inexistant face aux autres techniques.

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