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: Le socialisme préscientifique français :

Le socialisme scientifique ce sera le socialisme de Marx, c’est lui-même qui utilisera ce terme pour qualifier sa pensée. La différence principale entre le socialisme scientifique et le socialisme

préscientifique, c’est la suivante :

Le socialisme scientifique propose ou cherche à comprendre le fonctionnement de la société capitaliste et se limite à cet aspect en mettant l’accent sur les concepts comme le concept

d’aliénation, de lutte des classes. Le socialisme préscientifique (que Marx appelle le socialisme utopique) n’a pas de base théorique sérieuse donc il ne peut pas vraiment comprendre les raisons du fonctionnement du système capitaliste (ou la manière dont fonctionne le système capitaliste) et s’intéresse essentiellement à un problème (auquel Marx ne s’intéresse pas du tout) qui est la description de la société post-capitaliste (utopique) ce qui pour Marx est impossible à faire précisément parce que la société post capitaliste n’est pas encore là. Donc on ne peut pas savoir comment elle va fonctionner et toute description de cette société capitaliste tient plutôt du roman, de la littérature, plutôt que de la science.

Tous les penseurs socialistes préscientifiques sont persuadés que le changement de la société capitaliste à une société socialiste se fera de manière progressive grâce à un homme providentiel, d’un messie, se fera par contagion, parce que cet homme providentiel aura réussi à convaincre les élites de la société dans laquelle il vit de la nécessité du changement. Pour Marx, cette position est très naïve parce que les élites en place ne vont pas accepter de céder leur position et de changer de société et donc le changement ne peut arriver que de manière conflictuelle.

Un des principaux préscientifique est Saint-Simon. Il était comte et a abandonné son titre à la

révolution française. Il a développé une théorie qu’on peut appeler l’industrialisme parce que ce c’est un socialisme qui repose sur l’industrie et qu’il différencie quand même du libéralisme.

1. La théorie de l’histoire de Saint-Simon (1760-1825).

Comme tous les socialistes, il a avant tout une théorie de la manière dont l’Histoire se déroule. Il pense que les sociétés humaines suivent une processus, une évolution qui contient du progrès (..) et qui alterne des périodes de crises avec des périodes de croissance, des périodes d’ordre avec des périodes de désordre.

Donc il y a cette idée que les sociétés humaines évoluent vers plus de progrès, donc il y a une tendance vers le progrès mais cette tendance consiste dans une succession de phases de conflits et de phases pacifiques.

 Les phases pacifiques, les phases d’ordre sont des phases de création pendant lesquelles les sociétés fonctionnent autour de valeurs communes qui assurent la cohésion sociale, et la croissance est possible dans ces phases là parce qu’il y a cette cohésion, cette cohérence autour de valeurs communes.

 Les phases de crises, de désordre, sont des périodes de destructions pendant lesquelles tout ce qui a était construit avant est remis en cause ou détruits. C’est nécessaire parce qu’il s’agit de préparer la phase suivante, qui sera une nouvelle phase de croissance, d’ordre. Donc ces phases de destruction sont des phases de destruction créatrice d’une certaine façon.

 Il y a cette succession jusqu’au moment où on atteint le moment du passage à la société socialiste. Il n’y a pas de raison de précipiter le changement, le changement arrivera quand il arrivera. C’est comme chez Marx, mais chez Saint-Simon contrairement à marx, il y a cet homme providentiel qui aura compris que « c’est le moment ».

Pourquoi est ce que cette alternance de phase conduit à un changement qui doit arriver au début du 18° siècle ?

Le début du 18° siècle est la dernière phase critique qui annonce une phase « organique », une nouvelle phase de progrès, et la révolution française marque la basculement vers cette nouvelle phase. Saint-Simon va expliquer comment il faut préparer l’avènement de la société socialiste.

Plus précisément, il identifie 3 états de la société, c.-à-d. 3 périodes dans l’histoire des Hommes - d’abord les sociétés primitives qui sont fondées sur l’usage de la force : dans lequel le

pouvoir va à ceux qui possèdent la force militaire.

- La période des sociétés de légiste : fondées sur le droit (celle qui précède la révolution française). Ce qui domine dans cette période, c’est le savoir, la connaissance, le droit comme base du pouvoir, de la domination.

- La période des sociétés industrielles : Fondées sur l’industrie mais aussi sur la science. La période qui s’annonce au début du 19° siècle est cette période dans laquelle le but sera donc de produire des richesses, des biens, d’organiser le travail de façon à améliorer cette production industrielle, et donc la production industrielle, la science, remplacent la guerre, la conquête et même le droit comme mode d’organisation politique, de la société…

On voit chez Saint-Simon un peu la même chose que chez Montesquieu et chez les libéraux dans le sens où la violence peut être supprimée non pas par le commerce mais par l’industrie.

2. Le rôle de l’industrie.

C’est en 1824 que Saint-Simon a inventé le terme d’industrialisme pour mettre l’accent sur

l’économie tout en se distinguant du libéralisme. La différence fondamentale avec le libéralisme, c’est la notion de planification. Dans le libéralisme, l’ordre est spontané, il émerge dans un processus ascendant c.-à-d. que l’ordre est la conséquence, le résultat des actions individuelles, mais il n’y a aucune intentionnalité, aucun désir de créer de l’ordre. Pour l’industrialisme, il y a au contraire l’idée ou la notion que l’ordre est planifié, il est produit intentionnellement donc l’ordre est le résultat d’un processus descendant.

Donc Saint-Simon pense qu’il faut organiser le fonctionnement de la société comme il faut organiser le processus de production dans les entreprises. Et donc l’industrie devient un principe politique.

Pour bien comprendre ce que signifie l’industrialisme, il faut penser à une parabole qu’a inventé Saint-Simon : Imaginons que la France perde en 1 jour 3000 personnes, les 50 meilleurs de chaque science, de chaque industrie, de chaque métiers. Alors, le pays ne s’en relèverait pas. En revanche, imaginons que la France perde tous les ministres, hommes politiques, nobles, religieux, alors il n’en résulterait aucun mal politique. Saint-Simon a été poursuivi pour avoir écrit ça, parce qu’on l’a accusé d’apologie du crime, d’incitation au crime. Cette parabole nous montre que pour Saint-Simon, les personnages importants dans un pays sont ceux qui produisent des richesses et pas les

administrateurs, les gestionnaires, les propriétaires.

Donc on voit que Saint-Simon n’oppose pas les patrons aux ouvriers par exemple, il oppose ceux qui produisent à ceux qui ne produisent pas. Cette idée-là est au cœur de cette doctrine industrialiste.

Deux caractéristiques de cette société peuvent être soulignées :

- Dans la société industrielle ce sont les industriels qui remplacent les hommes politiques.

Donc les hommes politiques sont enlevés du système, ils n’ont plus de responsabilité, parce que « il faut libérer l’industrie des interventions des pouvoirs politiques » et parce que les seuls qui ont vraiment l’habitude ou les capacités de résoudre les problèmes d’organisation ce sont les industriels. Donc l’industrialisme de Saint-Simon est une doctrine profondément technocratique.

- Il faut soustraire l’industrie à la concurrence. L’organisation de l’économie doit-être encadrée par une constitution industrielle, il faut aussi des tribunaux de commerce et des tribunaux d’industrie, il faut des conseils d’industrie, et toute cette structure

institutionnelle conduit donc à un gouvernement qui est un gouvernement industriel, et ce gouvernement industriel est ce qu’on pourrait appeler une administration des choses c.-à-d. une administration de la production, des objets et on gouverne les hommes comme s’ils étaient des objets.

Retenir : l’aspect socialiste est dans la planification.

Le Saint-Simonisme a attiré relativement peu de personnes, on va parler de secte à propos d’eux, mais malgré cela, il va avoir une influence indirecte relativement importante, beaucoup d’industriels français du 19° siècle seront convaincus par les idées de Saint-Simon, par exemple Lesseps qui est l’ingénieur du canal de Suez. On trouve des héritiers de Saint-Simon jusqu’à aujourd’hui, les socialistes français ne sont pas indifférents aux thèses de Saint-Simon.

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