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CHAPITRE III : LA MÉTHODOLOGIE

3.1 LA DÉMARCHE MÉTHODOLOGIQUE

3.1.2 Le processus d’échantillonnage et de recrutement

Le processus d’échantillonnage et de recrutement a été réalisé dans le cadre de l’étude plus vaste de Céline Bellot (2012a). Le terrain de recherche lié au volet des jeunes autochtones était situé dans la région de l’Abitibi-Témiscamingue. Des partenariats avaient été conclus au préalable avec différents organismes et institutions de cette région qui sont concernés par les enjeux liés aux jeunes autochtones en protection de la jeunesse: le Centre jeunesse de l’Abitibi-Témiscamingue, la maison d’hébergement La Piaule, le CSSS de la Vallée-de-l’Or, auxquels s’est joint plus tard le Centre d’amitié autochtone de Val-d’Or (CAAVD).

Dans un premier temps, les partenaires ont été rencontrés afin d’établir avec eux un mode de fonctionnement pour le choix et le recrutement des jeunes. S’il était nécessairement question de jeunes autochtones issus de la protection de la jeunesse, les partenaires ont exprimé la volonté de recueillir les témoignages de ceux vivant en milieu urbain, considérant le fait que les jeunes des communautés autochtones de la région avaient été grandement sollicités dans le cadre d’autres recherches. Les personnes présentes à cette rencontre ont aussi exprimé leur désir d’entendre la voix et le point de vue des jeunes autochtones résidant en milieu urbain puisque, selon eux, ce point de vue est trop souvent négligé. Ces commentaires corroborent les propos de Mathieu-Joffre Lainé (2012), agent de recherche au Regroupement des centres d’amitié autochtones du Québec (RCAAQ) qui faisait remarquer, lors d’une conférence dans le cadre du colloque du Centre interuniversitaire d’études et de recherches autochtones (CIÉRA), que le domaine de la recherche tend à ignorer les Autochtones en milieu urbain. Pour ce qui est de l’âge des jeunes, nous avons ciblé un échantillon se situant entre 18 et 24 ans. La période ciblée a été choisie en fonction de la fin de la prise en charge pour que les jeunes aient un certain recul pour en parler et en dégager le sens, mais nous souhaitions aussi que cette expérience soit récente afin que les jeunes en soient encore imprégnés. Quatre critères ont donc été identifiés pour l’échantillon: 1) être âgé entre 18 et 24 ans; 2) appartenir à un groupe des Premières Nations; 3) avoir vécu une prise en charge par la protection de la jeunesse; 4) résider en milieu urbain. Le choix de s’en tenir qu’à ces quatre critères s’explique par une volonté de rendre compte de la diversité des expériences de prise en charge des jeunes autochtones.

Il faut préciser que, dès la décision prise de rencontrer des jeunes résidant en milieu urbain, une collaboration avec le Centre d’amitié autochtone de Val-d’Or nous a paru essentielle, à la fois pour faciliter le processus de recrutement, à la fois par souci éthique – nous en discuterons plus loin. Nos objectifs de recherche en lien avec les jeunes autochtones ayant vécu une prise en charge par la protection de la jeunesse, cette collaboration s’est faite plus directement avec la clinique Minowé dont les bureaux sont situés à l’intérieur du Centre d’amitié autochtone de Val-d’Or. La clinique Minowé a comme mandat de supporter en milieu urbain les parents autochtones qui éprouvent des difficultés dans l’exercice de leur rôle parental.

Il a été convenu avec les partenaires qu’ils aborderaient les jeunes pour questionner leur intérêt à participer à la recherche et, le cas échéant, ils seraient mis en contact avec la chercheure pour fixer une rencontre. Une affiche a également été distribuée dans les différents lieux de recrutement afin que les jeunes puissent directement prendre contact avec nous. Une première entrevue avec un jeune a été réalisée par téléphone avant la collecte de données sur le terrain afin de s’initier à la dynamique de l’entretien non-directif. Il nous est alors apparu qu’une présence empathique dans un entretien en face-à-face était primordiale pour que les jeunes se sentent à l’aise à approfondir leur vécu; des émotions fortes y étant souvent associées. Pour ce qui est des entretiens sur le terrain, ils ont eu lieu dans un endroit au choix des jeunes : certains se sont déroulés à leur domicile, d’autres dans un local des organismes ou institutions partenaires. Avec l’accord des jeunes, les entretiens ont été enregistrés sur bande audio.

3.1.2.1 Les caractéristiques de l’échantillon

Nous avons rencontré sept jeunes dans le cadre de cette étude. L’éloignement du terrain de recherche ainsi que les contraintes financières et temporelles associées à l’exercice d’un mémoire ont fait en sorte qu’il n’a pas été possible d’élargir davantage notre échantillon. Il faut toutefois rappeler que cette recherche s’appuie sur la volonté de réaliser une étude en profondeur d’un groupe restreint et relativement homogène, plutôt que d’une vison globale d’un groupe hétérogène (Pires, 1997). Les critères de diversification interne de l’échantillon concernent entre autres l’origine des jeunes (Anishinabeg/Algonquin, Eeyou/Cri, Atikamekw), leur lieu de naissance (communauté autochtone, ville) et leur trajectoire de prise en charge

(l’âge lors de la prise en charge, les motifs de la prise en charge, les placements, les déplacements, les lieux de placement, la durée de la prise en charge). Nous avons également réussi à rejoindre un nombre à peu près équivalent de jeunes femmes et de jeunes hommes. Afin de garder l’anonymat des jeunes rencontrés, le terrain de recherche étant lui-même un milieu restreint, nous n’exposerons pas les caractéristiques précises de notre échantillon.

Par ailleurs, après les sept entretiens, nous avons remarqué certaines redondances dans les informations recueillies auprès des jeunes, notamment en ce qui concerne le vécu lié à la situation de prise en charge, ce qui nous laissait présager une certaine saturation empirique. Toutefois, comme le mentionne Côté (2013), la saturation empirique ne signifie pas nécessairement l’atteinte de la saturation théorique, c’est-à-dire qu’ « aucune donnée nouvelle ne vienne modifier la théorie construite » (Laperrière, 1997, p. 324). Cependant, lors de l’analyse des données, nous avons pu constater une certaine saturation théorique puisque l’ensemble des données a permis la construction d’un modèle théorique cohérent.