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5 Résultats de l’enquête récit-parcours

5.1 Regards sur la ville : Saint-Bruno comme une entité définie

5.1.1 Le mot : indicateur de l’orientation des discours

Aux fins d’analyse, les mots ont été catégorisés en verbes, noms, adjectifs et adverbes. En général, la majorité du discours est au temps présent. Le verbe « être » au présent est le plus important (c’est=345233 et est=742) parce qu’on est dans la démonstration et dans

la qualification des choses et des lieux. « Faire » et « aller » (fais=756, va=498) arrivent tout juste après. Ils sont employés pour décrire les habitudes et les activités quotidiennes ainsi que la direction des parcours. Les verbes plus passifs expriment une volonté, une opinion ou une connaissance (peut=145, peux=141, sais=222, pense=168, veux=145, faut=127, trouve=124). Les autres verbes importants sont « regarder », « voir » et « dire » (regardes=130 et regarde=129, vois=208, dis=139). Ces verbes sont employés de façon récurrente pour apporter une attention envers une particularité du paysage ou mettre une emphase sur ce qui est dit. À l’infinitif, les verbes sont majoritairement actifs (faire=383, aller=276, dire=187, montrer=123, prendre=90, passer=73). Ceci est dû à la méthode qui implique une mise en action performative dans l’espace. Lorsqu’on parle d’une action terminée, les verbes « bâtir » et « construire » deviennent importants et sont évoqués en rapport aux quartiers, au développement de la ville, aux rues, aux condos et aux maisons. Dans l’ensemble, une emphase est mise sur les verbes d’action (trouver, partir, faire, aller, etc.), les verbes impliquant la vue ou la voix (voir, regarder et dire) et on est beaucoup plus dans la démonstration (être) que dans la possession (avoir). En revanche, les discours semblent démontrer peu de sentiments personnels faisant référence à l’expérience (aimer, détester, ressentir, vivre, éprouver, etc.).

En ce qui concerne les adjectifs, ils sont généralement positifs (bien=352, beau=130, belle=74). Ces adjectifs concernent surtout les aspects de la ville que l’on valorise (le mont, le village, les activités, les quartiers, les bâtiments, les maisons, la nature). On utilise « bien » aussi pour dire « beaucoup » ou pour décrire un sentiment général de bien- être. « Beau » est également employé pour décrire les lieux lors d’une température particulière (« quand il fait beau… »). « Belle » concerne surtout la ville, certaines vues, la

qualité de vie, l’activité, la montagne et les maisons. Il y a aussi une emphase sur ce qui est petit (petit=266, petite=95, petits=95, petites=55), « loin » (144) et « vieux » (79). « Petit » est majoritairement utilisé pour décrire les composantes naturelles de Saint- Bruno (lac, boisé, sentier, parc, ruisseau, chemin) mais aussi le centre-ville. « Loin » permet de nous positionner par rapport aux composantes de la ville (« c’est un peu plus loin »). Lorsqu’on parle de « vieux », c’est généralement en fonction des quartiers et du patrimoine. En revanche, on ne parle pas beaucoup de ce qui est « laid », « nouveau » ou « mauvais ». Seul l’adjectif « mal » est employé mais de façon moins importante. Dans les moins populaires, les adjectifs « nouveau », « vieille », « long », « grosse », « grande » et « haut » concernent plutôt la morphologie urbaine puis « correct », « tranquille », « résidentiel » et « cher » qui qualifient plutôt l’environnement et la vie.

Pour les noms, ceux-ci s’organisent en quatre grands thèmes : les lieux, l’habitat et le transport, les personnes et le temps. Les noms les plus populaires concernent les lieux « Saint-Bruno » (636) et la « Ville » (348) sont les lieux les plus cités. Les autres lieux importants de nature urbaine sont la « rue » (225), le « quartier » (180), le « village » (135), la « place » (110) et le « centre » (109) (centre-ville). On parle également de lieux naturels tels que le « parc » (225), le « lac » (132) et la « montagne » (125). Lorsqu’on compare Saint-Bruno à d’autres villes, on mentionne surtout les villes de « Montréal » (63), « Longueuil » (51) et « Boucherville » (51). Par la suite, en termes d’importance, on parle de l’habitat et de transports : la « maison » (253) ou les « maisons » (248), les « condos » (63) et la « voiture » (53). « Maison » et « maisons » combinés représentent le 2e nom le plus important. Lorsqu’on parle des personnes, on parle surtout de « gens »

(290), de « jeunes » (161), d’ « enfants » (105), du « monde » (77), des « personnes » (54) et des « familles » (41). Il est à noter que les « jeunes » occupent une place significative et plus importante que celle des « enfants » et des « familles ». En ce qui concerne le temps, ce qui est assez inattendu c’est que l’on parle beaucoup de l’ « été » (251). Le mot « temps » est aussi populaire (151) ainsi qu’« ans » (83) et « années » (63).

À la lumière des résultats, on peut conclure que les discours émergent du moment présent, de la présentation et de la démonstration des choses dus à l’exercice de guide. Il en ressort surtout des descriptions et des verbes d’action (faire, aller, prendre, passer, regarder, dire) plutôt que des expériences et des sentiments face aux lieux (sentir, aimer, détester, etc.). On peut également ajouter que les lieux urbains et la ville de Saint-Bruno détiennent une proportion importante et considérable dans les discours des résidants si bien que, mise à part le Parc national, les lieux naturels ont moins d’importance que les lieux urbains. Les composantes naturelles, qui ne sont pas forcément des lieux, tels que les arbres, les boisés, les fleurs ou même la nature, n’occupent pas une position majeure dans la constitution des récits. Plus encore, la référence au caractère rural de Saint-Bruno semble quasi absente à l’exception du terme « village » qui est employé couramment. En effet, le village occupe une position centrale dans les discours. Ceci est particulièrement révélateur dans la mesure où on emploie également « centre-ville » de façon importante. Le terme « campagne » en revanche est rarement utilisé. Ce constat soulève une dimension importante dans les discours : le caractère identitaire ambivalent et fluctuant de Saint-Bruno.

5.1.2 La ville dans sa matérialité : composantes anthropiques et