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CHAPITRE 3 : L’ENGAGEMENT : UN CONCEPT PLURIEL

3.3. L’engagement et ses dimensions

3.4.1. Le modèle intégratif de l’engagement psychologique

Brault-Labbé et al. (2009, p.120) indiquent que « Dans ce modèle, l’engagement est

défini comme l’interaction dynamique de trois éléments, les forces affective, comportementale et cognitive, qui font qu’une personne initie, puis maintient une ligne d’action ou de pensée envers un objet social important et valorisé ». Ce modèle multimodal de l’engagement

psychologique distingue l’engagement optimal, le surengagement (excès d’engagement) et le sous-engagement (manque d’engagement). Chacune des trois modalités de l’engagement est organisée autour de trois forces interactives (Brault-Labbé & al., 2009, p.120). « La force

affective, l’enthousiasme, est considérée comme étant souvent responsable du déclenchement du processus d’engagement et correspond au plaisir, à l’intérêt personnel ou à l’attirance ressentie par l’individu à l’égard de l’objet d’engagement » (Brault-Labbé & al., 2009, p.120).

Elle intègre également une part motivationnelle (Brault-Labbé & al., 2008, p.731), considérée souvent comme responsable du déclenchement de l’engagement. Elle correspond à la combinaison de l’intérêt que l’individu accorde à l’objet de son engagement et de l’énergie qui caractérise l’engagement face à cet objet. « La force comportementale, la persévérance, est

considérée comme favorisant pour sa part, la poursuite des actions et des efforts que nécessite l’engagement, en dépit des obstacles rencontrés » (Brault-Labbé & al., 2009, p.120). Quant à

la force suivante, « La force cognitive, elle correspond à la capacité de réconcilier les éléments

positifs et négatifs consécutifs à l’acte d’engagement. Cette composante réfère en réalité, à la capacité de comprendre et d’accepter et de supporter les aspects difficiles auxquels il faut faire face, afin de pouvoir profiter des avantages qu’il comporte » (Brault-Labbé & al., 2009, p.120),

l’adversité étant un véritable baromètre de l’engagement (Brickman, 1987 ; Lydon & Zanna, 1990, cités par Brault-Labbé & al., 2009, p.121). En lien avec la dimension cognitive, les évaluations du sujet prendraient en compte les difficultés et obstacles éventuelles de l’engagement, qui impactent les choix d’activités, la dépense d’énergie, la production d’effort et la persistance dans une conduite donnée (Brault-Labbé & al., 2008, p.4). Il convient de considérer la pénibilité et la charge ressenties par les personnes dans leur engagement en formation, celles-ci sont confrontées à de nombreux, éléments nouveaux, susceptibles d’être des sources de difficultés, en termes de rythmes de vie modifiés, de connaissances à intégrer, d’organisation (espace/temps) à mettre en place, de relations sociales à reconfigurer, etc.). Selon les auteurs, le modèle tridimensionnel présente un avantage d’applicabilité clinique puisqu’il évalue la perception qu’a l’individu de ses propres mécanismes affectifs, cognitifs et comportementaux inhérents à l’engagement (Brault-Labbé & al., 2010, p.82) et permet

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d’amener la personne à réfléchir aux mécanismes psychologiques qui sous-tendent son fonctionnement engagé plutôt que de se baser sur des indicateurs observables ou sur les jugements de personnes de son entourage.

Il s’agira pour nous, d’emprunter le modèle de l’engagement psychologique scolaire d’étudiants universitaires, développé par Brault-Labbé et al. (2008, 2009, 2010), et de l’appliquer au contexte des adultes en formation professionnelle continue, puisqu’un « des avantages de ce

modèle réside dans le fait qu’il est élaboré, de façon à pouvoir s’appliquer à tout objet d’engagement, et qu’il offre donc, une approche intégrative pour tenter de comprendre les mécanismes psychologiques qui génèrent un fonctionnement engagé chez l’être humain, dans toutes ses sphères d’activités » (Brault-Labbé & al., 2008, p.731).

Dans les dispositifs de formation ciblés par notre recherche, l’engagement psychologique s’exprime sur un horizon temporel ponctué de trois types de décisions dont celle relative à l’entrée dans le dispositif (la prise d’informations, l’évaluation, la comparaison, etc.), suivi de l’implication dans l’appropriation des savoirs (présence aux cours, soumission aux exigences et contraintes de la formation, etc.) et enfin, la troisième relative à l’élaboration d’un nouveau rapport (de rupture ou de continuité) à la formation et à son environnement (Kaddouri, 2011, p.71). L’engagement est aussi action et tout au long de la formation, des situations inédites apparaissent, proposent et imposent des tâches, des rencontres et des adaptations diverses avec des interlocuteurs imprévus et requièrent la mobilisation de savoirs et de compétences sociales diverses. Dans les formations pour adultes, l’engagement est la condition minimale. Les raisons de cet engagement sont multiples et elles constituent même la base de toute forme de motivation en formation (Fenouillet, 2005, p.105).

SYNTHESE DU CHAPITRE 3

Il y a un engouement de la recherche pour le concept d’engagement (Peretti, 2012). Cet intérêt grandissant n’a pas permis jusqu’à nos jours, d’offrir à la communauté scientifique, une définition consensuelle de ce concept (Brault-Labbé & al, 2008, 2009, 2010 ; Fredricks, Blumenfeld & Paris, 2004), autant sur le contenu du construit que sur le nombre de composantes (Bernet, 2010 ; Brault-Labbé & al, 2008, 2009, 2010). Il est traité dans une perspective affective (Connell & Wellborn, 1991 ; Furrer & Skinner, 2003) et relative à la valorisation de l’école, les réactions affectives, l’intérêt et la valeur accordée aux activités d’apprentissage (Janosz,

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Georges & Parent, 1998 ; Schiefele, 1991 ; Wigfield & Eccles, 2000). Lorsqu’il est traité dans une perspective cognitive, l’engagement est relatif à l’importance de l’investissement de l’élève avec effort et persévérance dans ses apprentissages (Connell & Wellborn, 1991 ; Newmann, Wehlage & Lamborn, 1992), et sa capacité à utiliser des stratégies cognitives et métacognitives pour apprendre efficacement (Alexander, Graham & Harris, 1998 ; Archambault & al., 2004 ; Pintrich & al., 1990) la qualité et la manière de conduire les apprentissages (Fredricks & al., 2004). Lorsqu’il est traité dans une perspective comportementale (Finn & al., 1995 ; Finn & al., 1997 ; Fredricks & al., 2004), l’engagement est relatif à la conduite de l’élève, au temps passé à la tâche et au respect des règles, à la participation aux activités d’apprentissage et d’enseignement et à l’implication dans les activités parascolaires.

Face à la diversité définitionnelle et opérationnelle, nombre d’auteurs (Archambault, Janosz, Fallu & Pagani, 2009 ; Fredricks & al., 2005 ; Fredricks & al., 2011 ; Fredricks & McColskey, 2012 ; Glanville & Wildhagen, 2007) en appellent à une homogénéisation de ce construit (Fredricks & al., 2004, cités par Vayre & al., 2014, p.4). Mais un consensus s’établit néanmoins sur la multidimensionnalité du construit (Bernet, 2010 ; Brault-Labbé, 2008, 2009, 2010 ; Vayre & al, 2014). C’est dans ce sens que Brault-Labbé et al. (2008, 2009, 2010) proposent une perspective intégrative et multidimensionnelle du concept, sur laquelle nous nous appuyons dans le cadre de cette recherche.

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