Chapitre 2. La cellule de commutation
2.2. Le modèle électromagnétique d'une cellule de commutation
Les travaux de cette thèse prennent en compte les caractéristiques d’un onduleur de puissance
industriel, que nous cherchons à représenter sous forme d’un schéma électrique. Le schéma de la Fig.
2.1 par exemple, est assez intuitif mais difficile à identifier à partir d'une géométrie tridimensionnelle
complexe comme peut l'être celle d'un onduleur de traction ferroviaire composé de nombreux
condensateurs en parallèle et de bus bars (l'exemple de la chaine de traction ONIX 671 d'Alstom illustre
clairement la difficulté, Fig. 2.5). Nous utilisons alors un moyen générique pour tenir compte de toutes
les inductances parasites d’un convertisseur à partir de sa géométrie [3]. La Fig. 2.4 présente un
hacheur développé pour la validation expérimentale du modèle et la Fig. 2.5 présente le convertisseur
ONIX 671 d’Alstom qui servira comme cas d’étude pour l’optimisation dans un chapitre suivant. Les
deux structures ayant le même rôle et donc la même topologie de circuit électrique, nous allons
illustrer notre représentation générique sur ces deux exemples distincts.
Time
451.00us 451.50us 452.00us 452.50us 453.00us 453.50us 454.00us 454.50us 455.00us
450.64us 455.43us V(M3:d) 0V 20V 40V 60V 80V 100V 120V 140V Time 451.5us 452.0us V(M3:d) 0V 20V 40V 60V 80V 100V 120V 140V
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Fig. 2.4. Banc expérimental (hacheur) pour la validation du modèle proposé. Le dessus de la carte contient le plan positif (+) du circuit et le dessous de la carte contient le plan négatif (-).
Fig. 2.5. Onduleur triphasé d’Alstom ONIX 67, 1.7kV / 1200A. A gauche, l’aperçu global du convertisseur ; à droite 3x18 condensateurs électrolytiques associés (condensateur filtre).
Afin de modéliser les effets inductifs dus aux interconnexions, une option possible consiste à
utiliser la méthode classique PEEC [4]. Celle-ci permet de remplacer chaque conducteur par un
ensemble de résistance et d’inductance couplées avec le reste de la structure. Cependant, cette
solution génère autant de topologies de circuits équivalents électriques que de géométries
considérées, et ne permet pas une étude générique des phénomènes présents dans une commutation.
De plus, l'utilisation de de bus bars laminés ne facilite pas l'identification des différentes parties d’un
circuit car le trajet du courant dans une plaque n'est pas connu a priori. Nous proposons donc d'utiliser
une approche globale basée sur le nombre d'entrées/sorties d'un conducteur [3].
Si un conducteur associe seulement deux points, il sera remplacé par une seule impédance
(couplé au reste de la structure). Cependant, s'il est utilisé pour connecter N_port> 2 ports, le circuit
électrique sera composé de N_port-1 impédances (inductances et résistances). Un point parmi les
ports d’entrée/sortie sera considéré comme une référence et lié aux autres par des circuits R-L (ainsi
que ses couplages). Il est à noter que la matrice PEEC complète de cette représentation présente une
partie à la fois réelle et imaginaire. En d'autres termes, non seulement les inductances, mais également
les résistances sont couplées. Physiquement, cela correspond à un chemin résistif commun dans le
même conducteur et à des courants de Foucault induits dans le reste de la géométrie. Cette
représentation générique a déjà été utilisée et validée dans plusieurs articles précédents [5] [6]. C'est
également celle qui est utilisée dans le solveur PECC Q3D d'Ansys. [7]
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La Fig. 2.6 présente un exemple simple de cette représentation. Tout d'abord, nous identifions
les entrées/sorties du système qui correspondent aux points d'interface entre le modèle de câblage
(bus bars) et d'autres composants du système. Ensuite, tous les points sont connectés électriquement
par groupes. Parmi chaque groupe, un point de référence est choisi arbitrairement. Ainsi, avec cette
représentation, il est possible de calculer les impédances (et les couplages) entre le point de référence
et les autres points du conducteur.
Fig. 2.6. Exemple de représentation de circuit en prenant en compte les ports d’entrée/sortie et un port de référence (Input+ et Input-). (Figure issue de [3])
Pour illustrer cette approche, considérons un circuit imprimé simple reliant un condensateur
électrolytique C
filter, un condensateur de découplage C
dec, un MOSFET, une diode et les points
d’entrées/sorties (Fig. 2.7). Deux conducteurs sont impliqués dans la commutation : un plan positif et
un plan négatif. Le plan positif (haut de la carte) relie les bornes positives de C
filter, C
decet la cathode de
la diode, et le plan négatif (bas de la carte) relie les bornes négatives de C
filter, C
decet la source du
MOSFET. Sur chaque conducteur, nous pouvons déplacer les bornes de C
decet ainsi faire varier
l’inductance parasite de la cellule de commutation (L
cond2sur la Fig. 2.). Nous avons défini les points de
référence Ref+ et Ref- sur le circuit électrique équivalent qui est représenté sur la Fig. 2.8.
Nous prenons en compte le comportement inductif et résistif parasite intrinsèque des
condensateurs, l’ESL (Equivalent Series inductance : inductance série équivalente) et l’ESR (Equivalent
Series Resistance : résistance série équivalente) [8]. Ce circuit peut être simplifié en associant les
impédances parasites en série (et en recalculant les couplages), ce qui conduit au circuit générique de
la Fig. 2.9, en prenant comme référence les bornes de C
dec. Par conséquent, R
filteret L
filtersont les
résistance et inductance parasites de C
filteren série avec une partie des éléments parasites du bus bar
; R
decet L
decsont les résistances et inductances parasites de C
decen série une autre partie des éléments
parasites du bus bar ; R
packet L
packsont la résistance et l'inductance parasites du boîtier du MOSFET [9]
en série avec le reste des éléments parasites du bus bar. Toutes les valeurs des éléments parasites sont
obtenues avec une simulation 3D du banc expérimental de la Fig. 2.7 en utilisant le logiciel Q3D d’Ansys
(avec une méthode similaire à celle présentée dans l’Annexe A). Les mutuelles entre toutes les
inductances et résistances parasites ont également été calculées, mais dans le cas particulier de cette
géométrie, leurs valeurs étaient si faibles qu'elles ont été négligées. Les valeurs des ESL et des ESR des
condensateurs de filtrage et de découplage ont été identifiées à l'aide de mesures d'impédance.
La même démarche peut être appliquée sur un convertisseur plus complexe tel que l’ONIX 671
d’Alstom représenté sur la Fig. 2.5. L’ONIX 671 est un onduleur triphasé plus une phase rhéostatique.
Le bus continu est composé de 3x18 condensateurs électrolytiques et de 2 bus bars d’alimentation
reliant chaque interrupteur de puissance à 8 condensateurs de découplage (Fig. 2.10, Fig. 2.11, Fig.
2.12).
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Fig. 2.7 Banc expérimental (hacheur buck) pour la validation du modèle proposé. Le dessus de la carte contient le plan positif (+) du circuit et le dessous de la carte contient le plan de masse (-). En bleu foncé, les points de référence de chaque plan ainsi que les points d’entrées/sorties.
Fig. 2.8. Circuit équivalent du banc expérimental de la Fig. 2.7 (couplage entre les inductances non représenté).
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Fig. 2.10. L’onduleur triphasé d’Alstom ONIX 671 : vue des bus bars de puissance (DC et phases) et des condensateurs de découplage.
Fig. 2.11. L’onduleur triphasé d’Alstom ONIX 671: vue des IGBTs et des cartes de distribution des signaux de commande (allumeur pas représenté).
3 IGBTs par phase
1 carte distribution
par phase
Refroidisseur à
vent vitesse
Bus bar
Moins
Phase
Rhéostatique
Bus bar
Plus Bus Phase
Condensateurs de
découplage
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Fig. 2.12. Identification des points communs Mod1+ et Mod1- sur les bus bars qui relient les condensateurs filtre (en haut) et les bus bars qui relient les condensateurs de découplage et les semi-conducteurs (en bas).
Les points “Mod1 +” et “Mod1-” sur les bus bars sont définis comme les points de référence
et son circuit équivalent est présenté sur la Fig. 2.13, qui a exactement la même topologique que pour
le cas de la maquette simple en PCB Fig. 2.7 malgré des géométries très différentes. Bien évidemment
la même simplification qu'en Fig. 2.9 pourra être effectuée. Les condensateurs associés en parallèle
(filtrage et découplage) sont considérés comme deux composants uniques : pour l'association en
parallèle de condensateurs de filtrage, les imperfections du bus bar sont intégrées aux ESL des
composants en parallèle, pour les condensateurs de découplage, nous négligeons l’impact du bus bar
central devant les deux bus bars de phase latéraux qui contribuent à la cellule de commutation. Nous
avons évalué les inductances partielles à l'aide du logiciel Q3D et validé cette hypothèse : en effet les
bus bars de phase n'ont que très peu de recouvrement plus-moins, et sont donc bien plus inductif que
le bus barre central. Ces résultats sont présentés dans l’Annexe A.
C1_IGBT1
C2_IGBT1
E1_IGBT1
E2_IGBT1
C1_IGBT2
C2_IGBT2
E1_IGBT2
E2_IGBT2
C2_IGBT3
E1_IGBT3
E2_IGBT3
C1_IGBT3
Cdec-
Cdec+
Mod1+
Mod1-
HT-
HT+
Cfiltre1-
Cfiltre1+
Cfiltre2-
Cfiltre2+
Cfiltre3-
Cfiltre3+
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Fig. 2.13. Circuit équivalent de l’ONIX 671 (avant simplification).
Pour reproduire les effets d'une commutation à l’aide d’un modèle simplifié, sans devoir
prendre en compte tous les paramètres des semi-conducteurs, nous remplaçons les interrupteurs de
puissance par une source de courant linéaire simple (avec un dI/dt constant) et une impédance en
parallèle (modèle de Norton) (Fig. 2.14). Cette impédance est définie par la capacité de sortie du
semi-conducteur, C
oss, pour garder un lien physique entre le model proposé et l’interrupteur réel. Cette
approche a déjà été utilisée par exemple dans [10]. Par conséquent, le nombre de paramètres pour
configurer la commutation est réduit au minimum : la vitesse de commutation (dI/dt) lors du blocage
du MOSFET, et C
oss. Ces deux éléments, ainsi que les inductances parasites et la capacité de
découplage, sont les principaux paramètres des événements de commutation, des dépassements et
des résonances [11]. Le modèle complet du circuit qui représente le banc expérimental de la Fig. 2.7
est présenté sur la Fig. 2.15. On note que la source de puissance est représentée par une source de
courant I
buspour obtenir le point de polarisation sans modifier les phénomènes de commutation
comme cela aurait été le cas avec une source de tension. Ainsi I
busassure la bonne polarisation du
transistor car idéalement tout le courant issu de l'émetteur se retrouve dans le collecteur et une très
petite variation de la tension induit une grande variation du courant impactant la commutation lors de
la représentation proposé dans la Fig. 2.14.
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Dans le même ordre d'idée, la tension aux bornes du condensateur de filtrage peut être
considérée comme continue (C
filterest suffisamment grand pour conserver une tension constante
pendant la commutation), de sorte qu'il est remplacé par une source de tension continue, V
bus.
Evidemment, les éléments parasites de C
filtersont conservés. La validation et les limitations du modèle
proposé seront discutées dans les sections qui suivent.
Fig. 2.15. Schéma du modèle complet utilisé pour définir la matrice équivalente du système de la Fig. 2.7.