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primé le 1er juillet 19402. À cette même date, il est créé au ministère des Travaux publics un Institut géographique national (IGN), dont le rôle est d’exécuter dans le domaine géodésique, topographique et cartographique tous les travaux d’inté- rêt général. Le centre de documentation scientifique de l’actuel IGN étant situé à Champs-sur-Marne, les archives de d’Ocagne y sont peut-être entreposées ? Il est également possible que ces archives soient visibles au château de Vincennes, au Service historique de la Défenses (SHD). Une autre piste à exploiter est la pos- sible appartenance de ce fonds au « fonds de Moscou » : un très important lot d’archives saisi par l’armée allemande en 1940, transporté dans les territoires du Reich afin d’y être exploité, puis récupéré par l’Armée rouge après la capitulation du régime nazi. Conservé pendant cinquante ans aux Archives spéciales centrales de l’État de l’URSSà Moscou, il a été progressivement restitué à la France à la fin du siècle dernier après la chute du bloc soviétique3.

2.2 Le cas particulier des archives nomographiques

D’Ocagne semblait persuadé qu’un jour, des personnes s’intéresseraient à son travail, et il a fait son maximum afin de simplifier d’éventuelles recherches. Le 24 mars 1927, au moment de prendre sa retraite, il fait don à la bibliothèque de l’École des ponts et chaussées, de toute sa collection d’ouvrages, de brochures, de dossiers et graphiques ainsi que de la volumineuse correspondance qui lui a été adressée au sujet de la nomographie (voir fig. 2.1)4. Dans son article publié dans la Revue générales des sciences pures et appliquées5, il expose le contenu de

son dépôt :

«La partie réservée à la bibliothèque de l’École des Ponts et Chaussées, où elle forme maintenant un fonds spécial (tenu à la disposition des tra- vailleurs autorisés à fréquenter cette bibliothèque, mais dont nulle pièce ne doit, sous aucun prétexte, sortir, même momentanément, de la biblio- thèque), constitue un dépôt d’archives nomographiques comprenant :

2. Albert Lebrun (27 juin 1940). « Décret portant suppression du service géographique de l’armée et création de l’Institut Géographique National ».République française.

3. Sophie Coeuré (2013).La mémoire spoliée : les archives des Français, butin de guerre nazi puis soviétique, de 1940 à nos jours. Nouvelle édition revue et actualisée. Payot et Rivages.

4. Maurice d’Ocagne (24 mars 1927b).Lettre d’abandon du fonds d’archives concernant la nomo- graphie de Maurice d’Ocagne à l’École des ponts et chaussées. Une lettre.

Figure 2.1– Lettre d’abandon de d’Ocagne de ses archives nomographiques (1927). Source : ENPC

1. tous les ouvrages relatifs à la nomographie qui m’ont été offerts par leurs auteurs ;

2. toutes les brochures (généralement tirées à part de divers périodiques), provenant également de dons de leurs auteurs et réparties en 16 boîtes à l’intérieur desquelles elles sont classées par ordre alphabétique de noms d’auteurs ;

2.2. Le cas particulier des archives nomographiques 35 même en 9 boîtes (dont 2 contenant toute la correspondance reçue entre mon premier livre sur la nomographie (1891) et mon grand traité de cette science (1899), et 7 où est réunie toute la correspondance reçue depuis la publication de ce grand traité) ;

4. une collection de nomogrammes séparés, de grand format.

Il convient de noter que, parmi les nomogrammes de cette dernière col- lection, il en est qui, bien qu’ayant effectivement et même beaucoup servi, sont encore inédits, tels que ceux, en grand nombre, qui, pendant la guerre ont été utilisés pour les besoins de l’artillerie et de l’aviation, ceux aussi (construits par M. l’ingénieur Potin) qui ont permis d’effectuer, avec le maximum de célérité, les calculs d’autofrettage des pièces d’artillerie lourde fabriquées, au cours de la guerre, par les établissements Schneider, etc. . . » Pendant de nombreuses années, ce fonds n’avait pas été répertorié. D’Ocagne demande dans un premier temps que toute cette collection reste dans le cabinet qu’il a occupé pendant 26 ans comme chef du service des cartes et plans afin qu’il puisse au besoin la consulter. Selon Anne Lacourt6, archiviste à l’ENPC, et Guillaume Saquet7, documentaliste, certains ouvrages ont dû être entrés dans les collections de la bibliothèque. Mais comme tant d’autres fonds privés arri- vés au 20e siècle, et en l’absence de service d’archives à l’École, ces documents

sont restés dans des cartons pendant plusieurs décennies. Bien qu’identifiés à Paris dans les anciens locaux de l’ENPC, rue des Saint-Pères, ils n’avaient jamais été catalogués. Il est probable que les bibliothécaires et magasiniers de l’époque connaissaient l’existence de ce fonds et savaient le retrouver, mais avant 1994 il n’y avait pas d’archiviste. Lorsque Mme Lacourt arrive à l’ENPC en 1995 pour créer le service d’archives, elle a pour mission de s’occuper seulement des fonds d’archives d’origine publique et de laisser de côté les fonds privés qui ont donc déménagé tels quels à Champs-sur-Marne. Ce fonds s’est alors retrouvé dans un magasin de conservation, en attente d’être traité ou d’avoir des demandes pour le faire passer en tête. Se rendant compte que, bien que peu connus à l’extérieur, il y avait tout de même des demandes de la part de chercheurs sur ces fonds pri- vés, elle établit un état en 2000 en essayant de traiter les fonds pour lesquels elle reçoit des chercheurs, au cas par cas. C’est à cette époque que Konstantinos Chat-

6. Anne Lacourt est, en 2018, chargée de mission Archives, responsable des collections d’objets et mobilier et chargée de la conservation des collections à l’ENPC.

7. Guillaume Saquet est, en 2018, documentaliste spécialiste du fonds Ancien, archives et photothèque à l’ENPC.

zis, chercheur à l’ENPC, fait appel, sur la demande de Dominique Tournès, à la bibliothèque de l’École. À partir de là, M. Saquet commence à rechercher tous les éléments du fonds pour les rassembler parce qu’un ancien collègue en avait mo- difié la configuration en déplaçant les boites dans un ordre qui ne tenait qu’à lui, et en avait retiré des éléments, notamment des imprimés, pour les intégrer à la bibliothèque. Heureusement, d’Ocagne avait bien identifié ses boîtes, et M. Tour- nès a ainsi pu les reclasser. Mme Lacourt a fait récemment (en 2018) restaurer les grandes planches qui peuvent désormais être consultées, même si certaines sont dans un état très moyen. Il est également prévu de mettre le descriptif du fonds en ligne et de le valoriser dans une exposition virtuelle sur la guerre.