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Chapitre 3. Stress, burnout et engagement

2.1 Le burnout

Les études sur l’engagement et le burnout mettent en avant l’idée que le burnout est une érosion de l’engagement à son travail (Maslach et Leiter, 2008 ; Schaufeli, Salanova, Gonzàlez-Romà et Bakker, 2001). Le burnout est conceptualisé par un ensemble d’états psychologiques qui s’opposent sur un continuum allant de l’épuisement à l’engagement au travail (Maslach et Leiter, 2008). Le burnout est décrit par trois états qui sont : l’épuisement ou perte d’énergie avec des symptômes dépressifs ; le cynisme ou dépersonnalisation qui est une mise à distance d’autrui (client, élève, ou patient) et l’apparition d’un sentiment d’inefficacité personnelle (croyance en son inaptitude).

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La traduction littérale du terme anglais ≪engagement » pourrait être en français ≪engagement » ; or cette

traduction française est souvent utilisée pour traduire «commitment » en anglais qui est totalement différent d’ « engagement ». Pour commitment, nous préférons la traduction « attachement » en français qui représente mieux son sens. Aussi, afin d’éviter les confusions entre concepts, nous nous proposons d’utiliser

« engagement » en français pour traduire l’« engagement » anglais car elle reflète l’ensemble du concept anglais d’« engagement » tel que défini par les auteurs.

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La composante de la fatigue émotionnelle ou épuisement professionnel est considérée par la plupart des auteurs comme une dimension centrale du burnout liée à la pression individuelle. C’est la dimension qui a été la plus largement étudiée du syndrome de burnout. La mesure de la fatigue émotionnelle permet d’identifier le sentiment d’être sur-exténué et vidé de ses ressources émotionnelles et physiques. Cette dimension ne permet pas de rendre compte des aspects relationnels du burnout (liée au cynisme) mais elle indique un risque possible à long terme de provoquer une distance émotionnelle et cognitive avec son travail de manière à faire face à cette fatigue et que l’on désigne comme le cynisme ou dépersonnalisation. Ainsi, la dimension du cynisme représente la dimension interpersonnelle du syndrome de burnout. Elle réfère à la réponse négative liée à l’insensibilité ou au détachement excessif envers les différents aspects de son travail. Cette attitude est reconnue comme étant une tentative de se mettre à distance des diverses aspects de son travail en réaction à la fatigue émotionnelle, ce qui explique les forts liens trouvés dans la littérature entre ces deux dimensions (Maslach et Leiter, 2005). Les deux dimensions cynisme et fatigue émotionnelle sont toujours reliées dans les études, elles apparaissent et disparaissent ensemble quand le sentiment d’engagement est retrouvé (Maslach et Leiter, 2008). Enfin, le sentiment d’inefficacité ou réduction de l’accomplissement représente la dimension de l’auto-évaluation du burnout. Elle réfère aux sentiments d’incompétence et au manque d’accomplissement et de productivité dans son travail. Cette dernière dimension entretient une relation plus complexe avec les deux autres dimensions. En effet, parfois elle entretient une relation directe, parfois elle est plus indépendante.

Burnout et dépression

Du point de vue de la santé, les symptômes du burnout ressemblent à ceux du diagnostic psychiatrique de neurasthénie reliée au travail (Maslach et Leiter, 2008). Même si les symptômes de burnout sont distincts de ceux d’une maladie mentale plus sévère comme la dépression, les deux phénomènes peuvent être reliés (Bakker, Schaufeli, Demerouti, Janssen, Van Der Hulst, Brouwer, 2000). En effet, les symptômes de dépression se traduisent par de la fatigue, un retrait social et un sentiment d’échec (Beck, 1970, Beck, Brouwn, Epstein, et Steer, 1988) qui font se corréler les symptômes de burnout et de dépression (e.g., Maslach et Jackson, 1986). Cependant, Bakker, Schaufeli, Demerouti, Janssen, Van Der Hulst, Brouwer (2000) ont comparé les liens entre les symptômes de burnout et la dépression mesurée par 4 dimensions (activité somatique réduite, affect dépressif, perte des affects positifs et interpersonnels), et ils trouvent que le manque de réciprocité dans la sphère professionnelle

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est relié au burnout tandis que le manque de réciprocité dans la sphère intime est lié à la dépression.

Pour les auteurs, la dépression peut être indirectement le résultat d’un burnout prolongé parce que la dépression est un phénomène plus global et indépendant du contexte tandis que le burnout est directement relié au travail.

Conséquences du burnout

Un ensemble de recherches sur le burnout montre que le burnout est associé à la dépression (Schaufeli et Enzmann, 1998), à une mauvaise santé perçue (Melamed, Shirom, Toker, Berliner et Shapira, 2006), à des problèmes de sommeil (Grossi, Perski, Evengard, Blomkvist et Orth-Gomer, 2003) et à des problèmes de santé comme des douleurs musculo-squelettiques (Armon, Melamed, Shirom et Shapira 2010), des maladies cardiovasculaires et le diabète de type 2 (Melamed et al., 2006). Le burnout est associé aussi à de plus forts risques de mortalité chez les jeunes employés, mais aussi aux absences pour maladies, aux intentions de quitter l’organisation et à la réduction de l’attachement organisationnel (Lee et Ashforth, 1996). Pour finir, le burnout est associé à davantage de turnover (Jackson, Schwab et Shuler, 1996) et de faibles comportements de citoyenneté, de faibles performances en dehors du rôle prescrit par son poste et à une faible satisfaction des clients (Taris, 2006). De hauts niveaux de burnout sont ressentis en association avec de fortes demandes du travail telles que des surcharges, des conflits de rôle, ou un manque de clarté dans les rôles, mais aussi en lien avec les conflits entre le travail et la vie familiale (Allen, Herst, Bruck et Sutton, 2000 ; Netemeyer, Boles et McMurrian, 1996). Inversement, des recherches (Lee et Ashforth, 1996, Maslach et al. 2001) ont montré que disposer de ressources au travail telles que percevoir du contrôle dans ses tâches (autonomie), percevoir du soutien social et obtenir du feed-back régulièrement permet de réduire le burnout.

L’importance de ce modèle du burnout est qu’il place l’expérience de burnout au cœur du contexte de travail en incluant aussi dans sa mesure des aspects personnels mais aussi interpersonnels (Maslach, 1993). Il est vrai que sur le plan individuel, Alarcon, Eschleman et Bawling (2009) expliquent dans une méta-analyse qu’au sein d’un environnement de travail stressant, certaines personnes plus que d’autres risquent de développer un burnout en fonction du niveau de leurs facteurs de protection liés à la personnalité. En effet, les traits de personnalité faibles sur : l’estime de soi, le sentiment d’auto-efficacité générale, le locus interne, la stabilité émotionnelle, la conscienciosité, l’agréabilité, l’affectivité positive, la robustesse, la proactivité et l’optimisme sont corrélés significativement aux trois dimensions du burnout. Cela implique qu’aider les personnes à renforcer ces facteurs de personnalité dans

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des programmes de gestion individuelle du stress pour les aider à mieux résister à des conditions de travail stressantes reste valable à condition que l’on modifie aussi les facteurs organisationnels qui causent le stress. A l’origine, l’instrument de mesure standard du burnout est le MBI (Maslach Burnout Inventory) de Maslach et Jackson (1981). Il était utilisé tout d’abord pour le personnel des services à la personne (par exemple dans le secteur éducatif, la santé ou le social) puis des versions de cet instrument de mesure se sont succédées pour pouvoir adapter la mesure du burnout à tout type de poste, il s’agit du MBI GS (Maslach Burnout Inventory General Survey) développé par Schaufeli, Leiter, Maslach, et Jackson (1996). Cet outil présente une structure factorielle consistante à travers les différentes professions (Maslach, Jackson et Leiter, 1996).

Sous l’impulsion du développement de la psychologie positive (Seligman et Csikszentmihalyi, 2000) qui s’intéresse au fonctionnement optimal et aux forces liées au comportement humain ; un intérêt croissant à considérer les aspects inverses du burnout s’est développé. Un certain consensus dans la littérature s’est forgé autour du concept d’engagement au travail. Nous allons définir ce qu’est l’engagement au travail selon la perspective de Maslach, Schaufeli et Leiter (2001).