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LA TECHNIQUE DES QUOTAS

Les enquêtes par sondages

I. HISTOIRE DES SONDAGES

1. LA TECHNIQUE DES QUOTAS

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Cette technique est dite parfois technique "rationnelle" ou de choix raisonné parce qu’elle fait appel dans une certaine mesure au raison-nement [62] logique. Dans ce procédé, la détermination de l’échantillon comporte deux phases : on construit d’abord une sorte de modèle réduit de l’univers de l’enquête, le plan d’enquête ; ensuite, dans le cadre de ce plan d’enquête, on détermine les quotas, c’est-à-dire les catégories de personnes que chaque enquêteur aura à interro-ger.

a) Le plan d’enquête

Le plan d’enquête doit être établi de telle manière qu’il représente aussi exactement que possible la population globale de l’univers de l’enquête. Pour ce faire, on reproduit à une échelle réduite, mais dans les mêmes proportions, les caractéristiques connues de l’univers. On suppose que les caractéristiques non connues, que l’enquête a pour but de découvrir, obéiront à la même logique et seront présentes au sein de l’échantillon dans les mêmes proportions que dans la population totale.

• Cette construction du plan d’enquête peut se décomposer en trois étapes : a) dans un premier temps, il faut analyser les caractéristiques connues de l’univers à partir des renseignements dont l’on dispose sur celui-ci, ce qui suppose la possession d’informations assez précises sur sa structure ; b) dans un second temps, il faut déterminer, parmi ces caractéristiques, les catégories qui seront sélectionnées pour cons-truire le plan, c’est-à-dire choisir les caractères à retenir pour définir l’échantillon. Ces caractères devront être pertinents, en entendant par là qu’ils devront à la fois être caractéristiques de l’univers étudié et

avoir une relation logique avec les objectifs de l’enquête. Par exem-ple, la taille des personnes interrogées n’a aucune importance pour une enquête électorale, elle peut en avoir pour une enquête sur le confort des automobilistes ! c) dans un troisième temps, il faut trans-poser dans l’échantillon les proportions de ces caractéristiques qui existent dans l’univers global. Ainsi, si l’univers compte 49 % d’hommes et 51 % de femmes, on devra retrouver dans l’échantillon 49 % d’hommes et 51 % de femmes, etc.

L’échantillon ainsi construit se présentera, comme ci-dessous sous la forme d’une nomenclature de catégories caractéristiques, de pour-centages indiquant l’importance relative de ces catégories dans l’univers et de nombres de personnes à interroger définis par ces pourcentages rapportés au volume global de l’échantillon. Un élément de complexité de l’opération tient ici au fait que, dans la réalité, l’on est obligé, pour que l’échantillon soit vraiment représentatif, de retenir plusieurs catégories, de les combiner, de les croiser. Dans l’exemple on a "croisé" trois catégories : le sexe, l’âge, la qualification socio-professionnelle. Ce "croisement" des catégories est un facteur de complication de la technique : d’une part, par cette imbrication des catégories au niveau de la construction de l’échantillon ; d’autre part, par les exigences que cela fait peser sur les enquêteurs qui peuvent de ce fait avoir à rechercher en fin d’enquête des individus aux caracté-ristiques extrêmement précises.

Cette complexité est d’autant plus grande que l’on étudie des uni-vers plus importants et plus complexes. Ainsi, dans les enquêtes élec-torales, on retient souvent les six catégories suivantes : sexe (homme, femme) ; âge (18/34, 35/49, 50/64, + 65 ans) ; situation de famille (cé-libataire, marié, marié avec 1, 2, 3, 4, 5 enfants) ; catégorie socio-professionnelle : agriculteurs, ouvriers, employés, fonctionnaires, pro-fessions libérales, commerçants, etc ; catégorie d’habitat : aggloméra-tions de moins de 2000 h, de 2000 à 20000 h, de 20 000 à 40000 h, de 40000 à 100000 h, de + 100000 habitants ; enfin résidence régionale, en général selon le découpage des régions économiques.

• Cet exposé fait apparaître les limites de l’utilisation de ce procé-dé. D’abord, sa mise en œuvre suppose que l’on dispose de rensei-gnements précis et récents sur la structure de l’univers que l’on veut étudier, sur les catégories qui le constituent, sur les proportions d’individus correspondant à ces catégories. Il est donc impossible de l’utiliser lorsqu’on n’a pas de données précises sur l’univers. Par ail-leurs il n’est pas possible de reproduire dans l’échantillon toutes les catégories "caractéristiques" de l’univers susceptibles d’avoir un rap-port avec l’objet de l’enquête. En pratique, pour des raisons de com-modité, on ne peut "croiser" plus de cinq à six types de catégorie. Un choix entre les catégories possibles est nécessaire pour retenir les plus pertinentes, avec le risque de sélectionner des catégories sans intérêt réel et d’en éliminer de déterminantes.

b) Les quotas

La détermination des quotas consiste dans le cadre défini par le plan d’enquête à attribuer à chaque enquêteur un contingent de per-sonnes à interroger, dont les caractéristiques lui sont désignées par une feuille de quotas. Ce groupe de personnes attribué à chaque en-quêteur (ici : 25) reflète la composition du plan d’enquête : chaque catégorie de l’échantillon y figure dans les mêmes proportions que dans l’échantillon. Les quotas de chaque enquêteur reproduisent ceux de l’échantillon et constituent donc un modèle réduit du modèle réduit qu’est l’échantillon.

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Au terme de l’interrogation, les 25 personnes qui auront été in-terviewés devront présenter collectivement les caractéristiques pré-vues dans la feuille de quotas. Ainsi 13 devront être des femmes et 12 des hommes. Dans la pratique, à mesure que l’enquêteur réalise ces entretiens, il barre sur sa feuille les catégories correspondant aux su-jets déjà interrogés. Ainsi la feuille reproduite fait apparaître que l’enquêteur a déjà interrogé 3 personnes, dont 2 hommes et une fem-me, une personne de moins de 35 ans, une de 36 à 50 ans, une de plus de 65 ans. Deux de ces personnes sont des cadres et une un agri-culteur. Désormais l’enquêteur ne peut plus interroger de cadres puis-qu’il à épuisé ce quota. A mesure que l’enquête progresse la liberté de l’enquêteur se restreint et la 25e personne à interroger sera précisé-ment identifiée par son sexe, son âge, sa profession : par exemple une femme, agricultrice de plus de 65 ans.

• Il est à noter ici que les instructions données à chaque enquêteur contiennent donc deux sortes d’indications : la référence à des catégo-ries et des nombres, à l’exclusion de toute instruction nominative.

Dans ce cadre, l’enquêteur reste en principe libre du choix des per-sonnes correspondant aux catégories qu’il a à interroger. Par exemple, s’il à interroger un ouvrier, celui-ci peut être aussi bien Mr X que Mr Y ouvrier. Cette liberté de l’enquêteur est un élément qui peut par-fois compromettre la rigueur de l’échantillonnage en y introduisant

des biais inattendus. L’enquêteur peut être en effet tenté de choisir des individus présentant une caractéristique non prévue, celle, par exem-ple, de lui être facilement accessible. Ainsi, en interrogeant des per-sonnes appartenant à ses amis ou à ses relations, résidant dans son quartier, habitant des rez-de-chaussée plutôt que des étages, ou des immeubles avec ascenseurs !

Pour remédier aux inconvénients que peut présenter cette liberté des enquêteurs, on s’efforce parfois de la limiter. Dans certains cas, on utilise pour cela la technique des itinéraires, qui consiste à imposer à l’enquêteur un itinéraire géographique à travers une ville, un quartier, au long duquel il doit choisir ses enquêtés (technique de Politz). Dans d’autres cas, les instructions de l’enquêteur lui interdisent d’interroger des personnes qu’il connaît ou qui se connaissent entre elles. Enfin, lorsqu’on utilise [65] des enquêteurs ayant reçu un embryon de forma-tion, on s’efforce de les mettre en garde contre cette tentation.