• Aucun résultat trouvé

La situation critique de l’emploi scientifique

Dans le document RAPPORT GÉNÉRAL SÉNAT N° 108 (Page 105-109)

C. UN FINANCEMENT « EN CREUX » DE GRANDE AMPLEUR : 6 MILLIARDS

1. La situation critique de l’emploi scientifique

En France, en 20121, 412 000 équivalents temps plein étaient consacrés à la recherche. Sur une période allant de 2001 à 2011, ces emplois ont connu une augmentation de 22 %. Concernant plus particulièrement la population des chercheurs (hors personnels de soutien), la croissance des effectifs sur la même période (2001-2011) est plus importante encore puisqu’elle atteint 40 % sur 10 ans.

a) Une évolution contrastée entre secteurs public et privé

L’emploi scientifique est aujourd’hui plus important dans le secteur privé que dans le secteur public : l’un compte 239 000 équivalents temps plein, l’autre seulement 163 400.

Cette différence s’explique en partie par le fait que la croissance des effectifs entre 2001 et 2011 est principalement intervenue dans le secteur privé : les effectifs de chercheurs y ont cru de 68 % en dix ans, contre une hausse des effectifs de 13 % seulement dans le secteur public.

En dépit de cette évolution, l’effort de recherche des entreprises privées demeure encore insuffisant comme l’a déjà souligné le présent rapport.

b) Dans le secteur public, la question de la qualité de l’emploi

(1)Une inflexion des départs en retraite

Les plafonds d’emplois des opérateurs de recherche augmentent ces dernières années et ils connaissent également une hausse en 2015, mais ces plafonds sont rarement atteints, en raison de la stabilisation, voire pour

1 Source : réponse au questionnaire budgétaire.

certains opérateurs, d’une baisse des crédits de fonctionnement accordés aux laboratoires.

L’évolution du plafond d’emplois des opérateurs de la recherche

2014 2015

Programme concerné État Opérateur État Opérateur

172 (et 187) 66024 70551

193 2417 2417

190 4637 4560

192 1267 2268 1248 2563

186 1121 1093

142 2696 929 2719 1215

Total « Recherche » 3963 77396 3967 82399 Source : commission des finances du Sénat, d’après les documents budgétaires

Ainsi, en 2013, au CNRS, on comptabilisait 25 882 ETP pour un plafond d’emploi de 28 632 ETPT, soit un écart de 2750 emplois (9,6 %) et à l’INSERM les chiffres étaient de 5 863 ETP pour un plafond de 6 246, soit un différentiel de 383 emplois (6,1 %).

La question du financement et de la pérennisation de ces emplois est donc posée, d’autant plus que, pour des raisons démographiques, la diminution progressive depuis 2 ans et pour 3 à 4 ans encore, du nombre de départs en retraite va mécaniquement réduire le nombre d’embauches de chercheurs, d’ingénieurs et techniciens, quand bien même les remplacements de ces départs se feraient à un taux de un pour un. À cela s’ajoute l’effet de la loi dite Sauvadet sur la conversion des emplois précaires en emplois permanents.

Dans les universités, le nombre des enseignants chercheurs partant en retraite devrait ainsi baisser de 1 957 à 1 389, soit une diminution de 30 %, entre 2012 et 2017. Au CNRS, sur la même période, la baisse des départs devrait être comparable, de 760 à 472, soit une diminution de 38 %.

(RAPPORTEUR SPÉCIAL :MICHEL BERSON)

Prévisions de départ en retraite des chercheurs des EPST de 2014 à 2019

Source : réponse au questionnaire budgétaire

(2)D’un point de vue qualitatif, de nombreux emplois non titulaires D’après les informations transmises par le Gouvernement à votre rapporteur, « la proportion de contractuels financés sur projet a augmenté depuis 2005 ». En effet, le financement sur projet est peu propice à un recrutement sur la longue durée – se pose dès lors, une fois le projet achevé, la question de la pérennisation des emplois créés.

La part de l’emploi non titulaire est ainsi loin d’être marginale : les établissements publics scientifiques et technologiques rémunéraient en 2012 42 600 emplois titulaires et environ 18 600 emplois contractuels (exprimés en équivalents temps plein travaillé). Environ un tiers des emplois rémunérés par les EPST sont donc contractuels.

Pr évis ions de dé par ts en r etr aite pour les ense ignants -cher cheurs et le s che rche ur s des EPST (hor s IFSTTAR)

0 200 400 600 800 1 000 1 200 1 400 1 600

2014 2015 2016 2017 2018 2019

(2) hors IFSTTAR. Sourc e : MENESR-DGRH A1-1 et EPST

Ens eignants -c hercheurs Chercheurs des EPST (hors IFSTTAR)

Répartition de l’emploi des EPST entre emploi contractuel et emploi titulaire

Source : commission des finances du Sénat, d’après les réponses au questionnaire budgétaire

Pour certains opérateurs, comme l’INED ou l’Inserm, cette proportion est proche ou dépasse 50 %. D’après les chiffres fournis par le Gouvernement, l’INRIA compte même davantage d’emplois contractuels que d’emplois titulaires.

(1)Un plan pour l’emploi scientifique pérenne est nécessaire

L’ensemble de ces éléments conduisent à prendre acte de la réalité d’une crise de l’emploi scientifique : au-delà des mouvements sociaux récents, il s’agit d’une préoccupation forte de l’ensemble des acteurs que votre rapporteur spécial a pu rencontrer. Le Comité national de la recherche scientifique1 (CoNRS) s’est d’ailleurs réuni sur ce thème en juin 2014, et ce, pour la cinquième fois en soixante-dix ans d’existence ; c’est dire l’importance de cet événement.

Votre rapporteur spécial est convaincu que le dynamisme de l’emploi scientifique et le maintien d’un haut niveau de qualité de recrutement constituent une des clés de la croissance future : il importe à ce titre de sanctuariser les financements qui lui sont dédiés et de dégager des marges de manœuvre sur d’autres postes de dépenses pour garantir aux jeunes chercheurs des perspectives d’emploi satisfaisantes.

1 Le travail de cette instance, qui regroupe notamment le conseil scientifique du CNRS, des conseils scientifiques des instituts du CNRS et les sections chargées du recrutement et de l'évaluation, ne concerne pas seulement le CNRS : les universités et les autres organismes y sont aussi représentés.

Part de l'emploi titulaire dans les

EPST 70%

Part de l'emploi contractuel dans

les EPST 30%

(RAPPORTEUR SPÉCIAL :MICHEL BERSON)

C’est pourquoi votre rapporteur spécial a proposé que les marges de manœuvre, dégagées par la suppression de la dépense fiscale liée aux cessions de brevet, qui a coûté 400 millions d’euros à l’État en 2014, soient réinvesties dans l’emploi scientifique et permettent d’augmenter le nombre d’emplois titulaires dans les organismes de recherche.

2. La difficile intégration des jeunes doctorants au marché du

Dans le document RAPPORT GÉNÉRAL SÉNAT N° 108 (Page 105-109)