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Depuis une dizaine d’années, les récepteurs membranaires de la famille ErbB ont été décrits au sein des noyaux. Pour ErbB1 et ErbB2, les plus étudiés, il est généralement admis que cette localisation est consécutive à la liaison du ligand sur le domaine extracellulaire du récepteur membranaire et que c’est le récepteur entier qui se retrouve ainsi dans les noyaux. Pour ErbB4, c’est également le ligand qui induit la translocation nucléaire même si, après clivage, seul le domaine intracytoplasmique est présent dans les noyaux. Pour ces récepteurs, quelques promoteurs cibles ont été caractérisés, mais la nature même du mécanisme de localisation nucléaire consécutif à l’activation par le ligand, diminue l’intérêt de leur étude. En effet, ces récepteurs restent, au moins dans un premier temps, sensibles aux anticorps monoclonaux thérapeutiques et aux inhibiteurs d’activité kinase. Il en va autrement d’ErbB3, presque totalement déficient pour l’activité kinase d’une part et qui est exprimé sous forme de variants nucléaires, dont ErbB380kDa, qui ne nécessitent pas la liaison du ligand pour être transloqués dans les noyaux, d’autre part.

La localisation nucléaire du récepteur ErbB3 est décrite dans des lignées de cellules de cancer du sein (SKBr3, MCF-7 et BT474) du poumon (H226 et SCC6) de la tête et du cou (SCC6 et SCC1) et du colon (LoVo et CaCO2) (Brand et al., 2013b), sans qu’un lien clair soit établi avec les données chez les patients. En revanche, ErbB3 a été retrouvée dans les noyaux de tissus normaux et tumoraux de prostate et, bien que les données soient parfois contradictoires, cette localisation semble corrélée avec la progression tumorale et la dissémination métastatique (Koumakpayi et al., 2006; Cheng et al., 2007).

Nous avons donc choisi de poursuivre l’étude de l’isoforme ErbB380kDa dans le modèle du cancer de la prostate. Ces données seront intégrées dans une publication en préparation.

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1. Recherche de l’expression d’ErbB380kDa dans les tumeurs de prostate.

a) Sélection des patients et fabrication des blocs TMA (Tissue MicroArray)

168 tumeurs provenant de patients traités au centre hospitalier Universitaire de Poitiers pour un cancer de la prostate, ont été sélectionnées pour l’étude et se répartissent comme suit : - 137 échantillons de tumeurs localisées hormono-sensibles (HS), obtenus après

prostatectomie radicale chez des patients n’ayant pas reçu de traitement hormonal. Age médian des patients 64 ans (48-74). Taux de PSA médian 13ng/ml (10-35). Classification TNM : 97pT2 et 40 pT3b. Score de Gleason : 6 pour 38 patients, 7 pour 83 patients, et 8 ou plus pour 16 patients.

- 31 échantillons, obtenus par résection trans-urétrale de tumeurs hormono-résistantes (CRPC). Le statut CRPC est défini après 2 augmentations consécutives du taux de PSA à 1 semaine d’intervalle, et un taux sérique de testostérone de 50ng/dl. Age médian des patients 72 (60-85).

Les TMA sont réalisées avec 3 échantillons pour chaque tumeur (0,6µm) et du tissu non tumoral provenant de 50 patients traités par prostatectomie radicale est également inclus.

b) Immunocytochimie

Le marquage immunocytochimique est réalisé après déparaffinage et blocage de la peroxydase endogène, avec les anticorps primaires indiqués dans le tableau 2. Les contrôles négatifs sont obtenus en utilisant des IgG monoclonales de lapin. Des échantillons de lymphome du manteau ont été utilisés comme contrôles positifs des anticorps anti-Ki67 et Cycline D1.

Les lames sont analysées en double aveugle. Les résultats sont analysés avec le logiciel StatView 5.0 Software (Abacus Concepts, Inc, Berkeley, CA). La comparaison entre chaque groupe est réalisée avec un test de Chi 2. Un test Mann Whitney non paramétrique est utilisé pour comparer dans chaque tumeur le pourcentage de cellules tumorales présentant une localisation nucléaire d’ErbB3 (Valeur continue). La relation entre 2 valeurs est estimée avec un test de corrélation non paramétrique de Spearman.

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c) Résultats

Expression et localisation d’ErbB3 dans les tissus prostatiques

Dans tous les échantillons positifs pour l’anticorps Ab-5, dirigé contre le domaine extracellulaire N-ter du récepteur ErbB3185kDa, le marquage est principalement membranaire et aucun marquage nucléaire n’est observé (Figure 25, a). Par ailleurs, aucun marquage nucléaire n’est observé pour ErbB3 dans les tissus sains adjacents à la tumeur (Figure 25, b).

Un marquage nucléaire est observé chez 60 tumeurs /168 (35%) avec l’anticorps C-17 dirigé contre le domaine intra-cytoplasmique du récepteur (Figure 25, c). Ce marquage est retrouvé dans 43 des 137 tumeurs hormono-sensibles (31%) et 17 des 37 tumeurs hormono- résistantes (53%) (p=0,03 test de Chi 2). De plus, le nombre de cellules qui présentent un marquage nucléaire est plus important dans les CRPC (médiane 10%, intervalle 2-95%) que dans les HS (hormono-sensible) (médiane 2%, intervalle 1-20%) (p=0,02, Mann Whitney). Enfin, dans les tumeurs sensibles, aucune corrélation n’existe entre le marquage nucléaire et le score de Gleason (p=0,7), le stade TNM (p=0,5) et l’expression du récepteur aux androgènes (p=0,4, test de Spearman).

Ces premières données suggèrent que la protéine ErbB3 nucléaire est dépourvue du domaine extracellulaire, puisqu’elle n’est pas détectée avec l’anticorps Ab-5, contrairement à la forme membranaire. Par ailleurs, on observe un marquage nucléaire plus fréquent dans les CRPC que dans les HS, et le nombre de cellules exprimant ErbB3 nucléaire est aussi plus important dans les CRPC, en accord avec l’idée d’un rôle d’ErbB3 dans la progression tumorale.

86 Puisque nous avons montré, dans les cellules H358, la liaison d’ErbB380kDa sur le promoteur CCND1, nous avons recherché l’expression de la cycline D1 chez les patients. Dans les tumeurs hormono-sensibles, la médiane de l’expression de cycline D1 est de 15% (intervalle 0-70%) alors qu’elle est de 20% (intervalle 0-80%) dans les CRPC. Le taux médian de prolifération estimé par l’expression de Ki67 est de 1% dans les tumeurs HS (0-10%) et de 20% dans les CRPC (5-90%). Dans les tumeurs HS, aucune corrélation (test de Spearman) n’est observée entre l’expression nucléaire d’ErbB3 et l’expression de la Cycline D1 (p=0,09;) ni entre ErbB3 nucléaire et Ki67 (p=0,1). En revanche, dans les CRPC, l’expression nucléaire d’ErbB3 est associée à l’expression de cycline D1 avec une corrélation positive (p=0,01). Cette corrélation n’est pas significative avec Ki67 (p=0,07) (Figure 25, c-e et f-h).

En résumé, la protéine ErbB3 nucléaire est fortement et fréquemment exprimée dans les CRPC et corrèle avec l’expression de la cycline D1, alors qu’aucune corrélation ne peut être mise en évidence dans les tumeurs hormono-sensibles.

Figure 25 : Expression et localisation d’ErbB3 dans les tissus prostatiques non tumoraux et tumoraux.

Dans tous les tissus l’anticorps Ab-5 (ErbB3 N-ter) montre un marquage exclusivement membranaire (a, X20). Aucun marquage nucléaire n’est détecté avec l’anticorps C-17 (ErbB3 C-ter) dans les tissus non tumoraux (b, X20). Dans les CRPC, un fort marquage nucléaire avec C-17 (c, X40) est corrélé à une forte expression de cycline D1 (d, X40) et tend à être associé à une plus forte prolifération (e, X40). Dans les CRPC ne présentant pas de marquage nucléaire d’ErbB3 (f, X40), l’expression de cycline D1 (g, X40) et Ki67 (h, X40) est faible.

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Expression et localisation d’Ebp1 dans les tissus prostatiques

Ebp1 est un partenaire d’ErbB3 qui interagit avec le domaine cytoplasmique du récepteur. Nous avons donc également recherché s’il existait un lien entre l’expression et la localisation d’Ebp1 dans les tumeurs de prostate.

Ebp1 est exprimé dans le cytoplasme des cellules glandulaires de la prostate saine adjacente à la tumeur aucun marquage nucléaire n’est observé dans les tissus non tumoraux (Figure 26, a et b). Un marquage cytoplasmique d’Ebp1 a été retrouvé sur 69 tumeurs hormono-sensibles parmi 109 testées préalablement pour ErbB3 (63%) et sur 18 tumeurs hormono-résistantes parmi 28 testées pour ErbB3 (64%) (p=0,9 ; Chi2). Un marquage nucléaire d’Ebp1 a été observé dans une seule tumeur HS (1/109) et dans 10 des 28 CRPC (36%). La localisation nucléaire d’Ebp1 est significativement plus fréquente dans les cancers avancées que dans les cancers hormono-sensibles (p<0,001 ; Chi2).

Dans les tumeurs HS, l’expression nucléaire d’ErbB3 est inversement corrélée à l’expression cytoplasmique d’Ebp1 (p=0,001; Kruskall Wallis) (Figure 26, c-d versus e-f) mais aucune corrélation n’existe entre l’expression nucléaire d’ErbB3 et l’expression nucléaire d’Ebp1 (p=0,58, Mann Whitney).

Dans les CRPC, même si aucune corrélation significative n’a pu être mise en évidence entre ErbB3 nucléaire et Ebp1 cytoplasmique (p=0,3, Kruskall Wallis), les données tendent vers l’existence d’une corrélation négative. De même, aucune corrélation significative n’a pu être mise en évidence entre ErbB3 nucléaire et Ebp1 nucléaire (p=0,1, Mann Whitney), mais les données tendent vers une corrélation positive.

Pour conclure, dans les tumeurs le marquage nucléaire d’ErbB3 est (ou tend à être) associé à une faible expression d’Ebp1 dans le cytoplasme (Figure 26, e-h). Dans les CRPC, le marquage nucléaire d’ErbB3 est (ou tend à être) associé à un marquage nucléaire d’Ebp1 (Figure 26, g-h).

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d) Conclusion

Cette étude sur les tissus tumoraux indique que ce n’est pas la forme entière d’ErbB3 que l’on retrouve dans le noyau des cellules tumorales chez les patients, puisqu’aucun signal nucléaire n’est obtenu avec les anticorps ciblant le domaine extracellulaire (N-ter) du récepteur. L’expression nucléaire d’ErbB3, si elle est retrouvée dans certains cas de tumeurs hormono-sensibles est cependant significativement plus fréquente dans les CRPC, où elle est corrélée avec l’expression de la cycline D1 et la prolifération cellulaire. Par ailleurs, dans les tumeurs sensibles aux androgènes, quand la protéine Ebp1, régulateur négatif du RA, est fortement exprimée dans le cytoplasme il n’y a pas d’expression nucléaire d’ErbB3. A l’inverse l’expression cytoplasmique d’Ebp1 est très faible dans les tumeurs HS exprimant ErbB3 nucléaire.

Figure 26 : Expression et localisation d’ErbB3 et Ebp1 dans des tissus prostatiques non tumoraux et tumoraux. Dans les tissus normaux adjacents à la tumeur, la protéine Ebp1 est fortement et exclusivement

exprimée dans le cytoplasme (a-b, X20). Dans les tumeurs, l’expression cytoplasmique est plus faible que dans les tissus normaux. Les tumeurs hormono-sensibles présentent 2 profils selon le statut d’ErbB3 : soit l’expression d’ErbB3 est membranaire et corrélée à une forte expression cytoplasmique d’Ebp1 (c-d, X40), soit l’expression d’ErbB3 est nucléaire et corrélée à une faible expression cytoplsmique d’Ebp1 (e-f, X40). Dans les CRPC, si aucune corrélation significative n’est trouvée entre ErbB3 nucléaire et Ebp1 cytoplasmique, la localisation nucléaire d’ErbB3 tend à être associée à la localisation nucléaire d’Ebp1 (g-h, X40).

89 Ces données confirment l’importance de la localisation nucléaire d’ErbB3 dans le cancer de la prostate et dans sa progression.

2. Caractérisation des lignées cellulaires de prostate pour l’expression d’ErbB3

Pour tenter de comprendre les mécanismes moléculaires qui impliquent ErbB3 nucléaire dans la progression tumorale, nous avons sélectionné trois modèles cellulaires (tableau 3) correspondant à :

- des cellules de prostate normales immortalisées (RWPE),

- des cellules hormono-sensibles issues de cellules de prostate métastasées au niveau des ganglions lymphatiques (LNCaP),

- des cellules hormono-résistantes issues de cellules de prostate métastasées dans l’os (PC3).

Avant toute chose, nous avons caractérisé l’expression d’ErbB3 dans ces lignées au niveau transcriptionnel et au niveau protéique.

a) Analyse par RT-PCR et qRT-PCR des isoformes d’ErbB3 dans les lignées

Comme nous l’avons vu, plusieurs transcrits d’ErbB3 qui correspondent à des protéines dépourvues des domaines extracellulaire et transmembranaire, et qui possèdent des séquences NLS permettant d’envisager leur localisation nucléaire, ont été trouvés (NCBI Aceview portal). Trois d’entre eux semblent pouvoir correspondre en structure et en taille à l’isoforme que nous avons appelée ErbB380kDa : AK300909.1, AK124710.1 et AK125028.1. L’alignement de ces variants avec la forme entière ErbB3185kDa (NM_001982.3) est représenté ci-dessous (Figure 27, a). Nous avons donc recherché l’expression de ces différents transcrits par RT-PCR, puis par qRT-PCR.

90 Pour la RT-PCR, les amorces 5’ ont été choisies dans la région 5’UTR (5’ UnTranslated Region) des transcrits variants potentiels et l’amorce 3’ est située dans la région codante. La taille attendue des produits d’amplification est indiquée dans le tableau (Figure 27, b). La migration sur gel des produits d’amplification obtenus montre la présence d’un signal dans les trois lignées avec les amorces permettant l’amplification du variant AK300909.1 mais aucun signal avec les autres couples (Figure 27, c). Ceci indique que les variants AK124710.1 et AK125028.1 ne sont pas exprimés dans les lignées de prostate. En revanche, l’homologie complète entre la séquence AK300909.1 et la séquence NM_001982.3 ne permet pas d’affirmer que l’isoforme AK300909.1 est exprimée, car les amorces utilisées

Figure 27 : Recherche des isoformes des transcrits d’ErbB3 dans les lignées cellulaires de prostate. a)

Représentation schématique de l’alignement des isoformes avec l’ARNm codant ErbB3185kDa. La position des

différents couples d’amorces est indiquée. b) Tableau récapitulatif des amorces utilisées pour la RT-PCR et taille des amplicons attendus. c) Résultats de RT-PCR après migration sur gel d’agarose 1%. d) Tableau récapitulatif des amorces utilisées pour la qRT-PCR et taille des amplicons attendus. e) Répartition quantitative des transcrits NM_001982.3 et AK300909.1 dans chacune des lignées.

91 amplifient les deux ADNc. Compte-tenu de sa structure, il n’est pas possible de proposer des amorces spécifiques du seul variant AK300909.1.

Nous avons donc recherché par RT-PCR quantitative l’expression du transcrit NM_001982.3 à l’aide d’amorces situées dans la partie 5’ spécifique à ce transcrit et nous l’avons comparée à l’expression obtenue avec des amorces situées dans la région commune avec AK300909.1 (Figure 27a et d). Il apparaît ainsi que les lignées tumorales PC3 et LNCaP expriment à des taux sensiblement identiques (60/40 ou 50/50) les deux transcrits NM_001982.3 et AK300909.1. En revanche, le transcrit NM_001982.3, correspondant à la forme entière ErbB3185kDa est très majoritaire dans les cellules non tumorales RWPE (Figure 27e).

b) Analyse par western blot de l’expression endogène d’ErbB3 dans les lignées

L’expression endogène d’ErbB3 a été recherchée par western blot dans les trois lignées, en utilisant l’anticorps dirigé contre l’extrémité C-ter du récepteur (C-17, santa cruz) qui permet de détecter la forme membranaire ErbB3185kDa et la forme nucléaire que nous appelons ErbB380kDa, quand elle existe (Figure 28).

Dans la lignée immortalisée RWPE, la forme ErbB3185kDa, qui correspond au récepteur entier est exprimée majoritairement, même si un très faible signal est observé à 80kDa, validant ainsi au niveau protéique les résultats de PCR quantitative. Les deux lignées tumorales LNCaP et PC3 expriment ErbB3185kDa et l’isoforme ErbB380kDa, dans des proportions quasi équivalentes, à nouveau en accord avec les données sur les transcrits. La présence de la forme courte dans les lignées tumorales et sa faible expression dans la lignée immortalisée valide donc ces cellules pour la poursuite de nos travaux.

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c) Analyse par western blot de la localisation intracellulaire des isoformes ErbB3

Afin de s’assurer de la présence d’ErbB3 dans les noyaux cellulaires, des extraits cytoplasmiques (correspondant à tout ce qui est non nucléaire) et nucléaires ont été préparés (selon Andrique et al., 2012) et déposés sur gel d’acrylamide en quantités décroissantes 40- 10µg par puits (Figure 29 a-c). Dans les trois lignées cellulaires, la forme entière ErbB3185kDa est trouvée majoritairement dans les extraits dits cytoplasmiques (cytoplasme et membrane plasmique), alors que l’isoforme ErbB380kDa est majoritairement dans les noyaux. Des traces d’ErbB380kDa sont détectées dans le cytoplasme des cellules LNCaP, et un faible signal correspondant à ErbB3185kDa est observé dans les noyaux de RWPE et LNCaP. La quantification des isoformes dans chaque lignée a été réalisée indépendamment, après normalisation sur le marqueur cytoplasmique PAK1 (p21 protein (Cdc42/Rac)-activated kinase 1) pour ErbB3185kDa et sur le marqueur nucléaire C23 pour ErbB380kDa. Ces données confirment que les cellules RWPE expriment majoritairement ErbB3185kDa cytoplasmique (moyenne 85%) alors que les cellules LNCaP et PC3 expriment majoritairement ErbB380kDa nucléaire (moyennes 80% et 86% respectivement) (Figure 29d). La comparaison de l’expression des deux isoformes dans les lignées LNCaP et PC3 par rapport à l’expression dans la lignée RWPE, montre que les trois lignées expriment quasiment la même quantité d’ErbB3185kDa cytoplasmique, alors que la lignée LNCaP exprime 12 fois plus d’ErbB380kDa

Figure 28 : Expression endogène de la protéine ErbB3 dans les lignées de prostate. Succinctement, les

cellules sont lavées en PBS 1X (Phosphate buffered saline) puis lysées en tampon Tris HCl pH7.5 10 mM, NaCl 120 mM, EDTA 1 mM, NP40 0.25%, SDS 0.05%, DTT 1 mM avec 1/50ème de cocktail inhibiteur de protéases, à 4°C. Les extraits sont ensuite soniqués et les débris cellulaires sont éliminés par centrifugation à 13000 rpm, à 4°C. La concentration protéique est déterminée par dosage à l’acide bicinchoninique (BCA, SIGMA) selon les indications du fournisseur, afin de disposer 40µg de protéines totales endogènes par dépôt. Le western blot est réalisé selon la procédure standard en utilisant l’anticorps ErbB3 C-ter (C-17, Santa cruz), révélé par chemiluminescence (Luminata Crescendo, Millipore). L’actine est utilisée pour valider la quantité de protéines déposées dans chaque puits. La quantification des signaux est effectuée grâce au logiciel Image J.

93 nucléaire que la lignée RWPE, et la lignée PC3 exprime 8.5 fois plus d’ErbB380kDa nucléaire que la lignée contrôle (Figure 29e).

Ces résultats montrent que dans les lignées tumorales, l’isoforme ErbB380kDa prédomine dans le noyau, alors que la forme entière ErbB3185kDa est majoritairement présente dans les trois lignées dans le cytoplasme et au niveau membranaire.

L’importance du rôle d’ErbB3 nucléaire dans la progression du cancer de la prostate, en dépit de données parfois contradictoires, est illustrée par les données immunocytochimiques que nous avons obtenues. Cette deuxième partie des résultats présente la recherche de gènes cibles d’ErbB380kDa associés à la progression du cancer de la prostate.

Figure 29 : Expression des isoformes d’ErbB3 dans les lignées cellulaires. Les extraits cytoplasmiques et

nucléaires sont déposés séparément à raison de 10, 20, 30 et 40 µg de protéines totales pour la lignée RWPE (a), LNCaP (b) et PC3 (c). La protéine ErbB3 est détecté par l’anticorps C-17 (Santa cruz) sous sa forme entière 185 kDa dans le cytoplasme et sous sa forme courte 80 kDa dans le noyau. La qualité de la purification est validée par l’utilisation de deux anticorps spécifiques de protéines cytoplasmique (PAK1, Santa cruz)) ou nucléaire (C23, Santa cruz). d) Répartition des deux isoformes ErbB3185kDa et ErbB380kDa dans le cytoplasme et le noyau de

chaque lignée cellulaire. e) Expression relative des isoformes dans les lignées tumorales LNCaP et PC3 par rapport à la lignée RWPE. La quantification d’ErbB3185kDa cytoplasmique est normalisée sur l’expression de

94 Notre démarche s’est déclinée en 5 étapes :

- Mise au point de l’immunoprécipitation de chromatine sur les lignées de prostate - ChIP-on-chip

- Analyse bio-informatique - Validation de cibles génomiques - Initiation des études fonctionnelles

B. Recherche de cibles génomiques du variant ErbB3

80kDa

1. Mise au point et validation de l’immunoprécipitation de chromatine sur les lignées de prostate

a) Immunoprécipitation d’ErbB3 endogène dans les lignées de prostate

Dans notre première publication (Andrique et al., 2012), l’immunoprécipitation de chromatine (ChIP) avait été réalisée sur la lignée de carcinome pulmonaire H358 avec un anticorps polyclonal dirigé contre l’extrémité C-ter d’ErbB3 (C-17, Santa cruz). Nous avons testé cet anticorps sur des extraits cytoplasmiques et nucléaires préparés à partir des 3 lignées de prostate en réalisant une immunoprécipitation « classique » dans des conditions de ChIP et dans des conditions d’expression endogène d’ErbB3 (Figure 30). Succinctement, 2 µg de l’anticorps C-17/ou un sérum non relevant (contrôle négatif) ont été utilisés pour immunoprécipiter ErbB3 dans 500 µl d’extraits contenant 400 µg de protéines cytoplasmiques ou nucléaires. Après une étape de pre-clearing pour réduire la fixation aspécifique des protéines sur les billes de protéine G-sepharose, les extraits protéiques ont été incubés une nuit à 4°C sous agitation avec l’anticorps C-17 ou le sérum, et le lendemain le complexe C- 17/ErbB3 a été précipité par des billes de protéine G-sepharose pendant deux heures. Après dénaturation du complexe, un western blot a été effectué et la protéine ErbB3 détectée avec un anticorps monoclonal anti C-ter d’ErbB3 (G-4, Santa cruz) (Figure 30a).

Dans le noyau des lignées tumorales, le variant ErbB380kDa est majoritairement détecté, même si un signal très faible est observé pour le récepteur entier. Dans les extraits cytoplasmiques, les deux isoformes ErbB3185kDa et ErbB380kDa sont immunoprécipitées, ce qui est logique car ErbB380kDa transite par le cytoplasme avant d’aller dans le noyau. Ces résultats renforcent d’une part la pertinence de l’isoforme ErbB380kDa dans le noyau, et valide d’autre part la capacité de notre anticorps anti C-ter d’ErbB3 à immunoprécipiter la forme nucléaire d’ErbB3 dans les conditions d’expression endogène.

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b) Immunoprécipitation de chromatine dans les lignées de prostate

L’immunoprécipitation de chromatine a été effectuée selon le protocole décrit précédemment (Andrique et al., 2012). Succinctement, dix millions de cellules sont utilisées pour chaque condition. Après fixation covalente des complexes ADN-protéines, les cellules sont lysées et les noyaux sont purifiés. Seule modification du protocole, la chromatine est ici digérée à la nucléase micrococcale pour obtenir des fragments d’ADN de taille variant entre 400 et 1000 pb, et non soniquée. L’immunoprécipitation est effectuée avec :

- l’anticorps anti-ErbB3 C-ter (C-17, Santa cruz)

- un anticorps anti-histone H3 (D2B12, Cell Signaling), comme contrôle positif - un sérum normal IgG de lapin, comme contrôle négatif.

L’ADN immunoprécipité dans ces trois conditions est élué et purifié. L’expérience est validée par ChIP-qPCR (Tableau 8, annexe) sur quatre promoteurs témoins, GAPDH, Cycline D1, ErbB3 et PSA, en mesurant tout d’abord le taux de fixation de l’histone H3 (contrôle