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La m´ ethode de Descartes pour les normales et les tangentes

Normales, tangentes, aires et rectifications dans la g´eom´ etrie

3.1 La m´ ethode de Descartes pour les normales et les tangentes

Descartes ouvre la voie, en pr´esentant, d`es le deuxi`eme livre de la G´eom´etrie3, sa m´ethode pour la recherche des normales. C’est, d’apr`es lui, le plus g´en´eral des probl`emes de g´eom´etrie, et il ne croit pas inutile de le r´ep´eter4 :

[. . .] ie croyray auoir mis icy tout ce qui est requis pour les elemens des lignes courbes, lorsque i’auray generalement donn´e la fa¸con de tirer des lignes droites qui tombent a angles droits sur tels de leurs poins qu’on voudra choisir. Et i’ose dire que c’est cecy le problesme le plus vtile & le plus general, non seulement que ie s¸cache, mais mesme que i’aye iamais desir´e de s¸cauoir en Geometrie.

Je vais exposer d’abord la m´ethode de Descartes en suivant la pr´esentation que celui-ci en donne dans la G´eom´etrie5. Je montrerai en suite comment celle-ci peut ˆetre reformul´ee, et enfin comment elle fut simplifi´ee par Florimond de Beaune.

3.1.1 La pr´esentation m´ethode dans la G´eom´etrie

Descartes se r´eclame d’entr´ee de la tradition de l’analyse g´eom´etrique6 :

Ie suppose la chose desia faite, & que la ligne cherch´ee est MG [fig. 1], laquelle ie prolonge iusques au point G o`u elle rencontre la ligne droite HA, que ie suppose estre celle aux poins de laquelle on rapporte tous ceux de la ligne ME.

La courbe AN est ici une courbe quelconque et on n’a mˆeme pas besoin de supposer qu’on sache la construire. Cela n’empˆeche pas Descartes de la dessiner, et mˆeme de supposer que sa tangente TF et sa normale MG sont connues. Il suffit de tracer une ligne courbe quelconque et deux droites passant par un de ses points, en faisant attention, dans la suite de l’argument, que la nature particuli`ere du dessin ne justifie pas l’une ou l’autre des inf´erences qui constituent cet argument. Ce qu’il y `a de nouveau est que cette courbe se rapporte `a un axe fixe sur lequel on a marqu´e une origine, de telle sorte que la position de chacun de ses points relativement `a cet axe et `a cette origine respecte une certaine condition exprim´ee

2Cf. Descartes (1637), 341. 3Cf. Descartes (1637), 342-352. 4Cf. Descartes (1637), 341-342.

5Sur la m´ethode des tangentes de Descartes, cf., entre autres, Galuzzi (1980).

6Cf. Descartes (1637), 342. Pour des raisons d’uniformit´e, j’ai modifi´e les lettres choisies par Descartes pour indiquer les diff´erents points de sa figure. Je ferai de mˆeme dans la suite lorsque je le jugerai utile.

par une ´equation Alg´ebrique. Cette ´equation est la seule donn´ee dont on disposer. C’est la donn´ee de cette ´equation qui permet `a l’analyse de se servir du formalisme de l’Alg`ebre. La m´ethode de Descartes consiste que en une proc´edure employant ce formalisme, propre `a passer de cette ´equation `a une expression Alg´ebrique exprimant un segment dont d´epend la construction de la normale. La synth`ese s’arrˆete lorsque cette expression est donn´ee, laissant cette construction sous-entendue.

Pour simplifier sa tˆache, Descartes suppose que la courbe donn´ee coupe l’axe `a l’origine A. L’´equation exprimant la courbe doit donc ˆetre satisfaite par les positions x = 0 et y = 0. Bien que cela puisse apparaˆıtre comme une hypoth`ese arbitraire qui mine la g´en´eralit´e de la m´ethode, il est facile de voir comment proc´eder pour r´eduire toute ´equation Alg´ebrique exprimant une courbe donn´ee `a une ´equation de cette sorte. D’ailleurs, si l’on consid`ere le probl`eme de d´eterminer la tangente d’une courbe comme ´etant un probl`eme qui porte sur cette courbe et non pas sur l’´equation qui l’exprime, alors on doit aussi concevoir cette ´equation comme r´esultant d’un choix relatif au syst`eme de coordonn´ees auquel la courbe et r´ef´er´ee et `a la position de cette courbe par rapport `a ce syst`eme, et rien n’empˆeche de choisir ce syst`eme et de positionner la courbe par rapport `a lui de mani`ere `a rendre cette ´equation la plus simple. Une fois le syst`eme de coordonn´ees fix´e, l’´equation sur laquelle la m´ethode de Descartes op`ere doit ainsi ˆetre pens´ee comme un ´el´ement d’une classe d’´equivalence form´ee par toutes les ´equations exprimant la mˆeme courbe, prise dans des positions diff´erentes par rapport `a ce syst`eme. C’est sur cette classe d’´equivalence que porte, en derni`ere instance, la m´ethode.

En supposant que l’origine du syst`eme de coordonn´ees se trouve sur la courbe, Des-cartes fait donc un choix qu’il aurait certes pu ´eviter (au prix d’une l´eg`ere complication des ´equations qui interviennent dans son argument), mais qui n’a aucune cons´equence sur la g´en´eralit´e et la nature de sa m´ethode. Ceci n’est pourtant pas le seul choix fait par Descartes, qui suppose aussi que les coordonn´ees auxquelles la courbe est r´ef´er´ee sont or-thogonales. S’il est certes, encore une fois, ais´e de transformer une ´equation exprimant une certaine courbe par rapport `a un syst`eme de coordonn´ees non orthogonales en une autre ´equation exprimant la mˆeme courbe par rapport `a un syst`eme de coordonn´ees orthogonales, il reste que cette m´ethode se sert de l’orthogonalit´e des coordonn´ees comme d’une condition essentielle.

Supposons donc que la courbe AMN est r´ef´er´ee `a un syst`eme de coordonn´ees orthogonales d’origine A, et posons AP = x et PM = y, l’angle AˆPM ´etant droit. En supposant que MG est la normale `a cette courbe au point M, Descartes imagine qu’autant ce segment que le segment PG, qui en d´epend, sont connus, et pose MG = s et AG = v. L’angle AˆPM ´etant droit, le triangle PGM est rectangle, et donc, dit Descartes, le carr´e de l’hypot´enuse MG est ´egal `a la somme des carr´es des cath`etes PG et MP, ce qui donne

s2= (v− x)2+ y2 (3.1)

et donc :

y =√

s2− v2+ 2xv− x2

x = v−ps2− y2 (3.2)

qui expriment les relations induites par la nature g´eom´etrique du probl`eme entre les coor-donn´ees x et y, qu’on suppose donn´ees, et les segments inconnus s et v.

∗ ∗ ∗

Avant de continuer dans l’exposition de la m´ethode de Descartes, arrˆetons-nous un ins-tant sur cette premi`ere ´etape de son argument. Si le passage de l’´egalit´e (3.1) `a l’´egalit´e (3.2) ne tient qu’aux r`egles de l’Alg`ebre des segments, la premi`ere de ces ´egalit´es ne peut pas ˆetre justifi´ee par ces mˆemes r`egles. Elle tient `a la possibilit´e d’exprimer, par les moyens de cette Alg`ebre, des relations g´eom´etriques pr´ealablement donn´ees. Si un math´ematicien moderne n’a aucune difficult´e `a justifier cette ´egalit´e en se r´eclamant du th´eor`eme de Pythagore, ce n’est que parce qu’il pense directement ce th´eor`eme comme l’´enonc´e d’une relation entre les mesures (ou aires) des carr´es construits sur les cˆot´es d’une triangle rectangle. Ceci ne semble pourtant pas pouvoir ˆetre le point de vue de Descartes. Pour justifier l’´egalit´e 3.1, il faut donc se r´eclamer d’un argument interm´ediaire que Descartes laisse implicite, et qu’il convient ici d’expliciter.

D’abord, il faut ´etablir une relation entre un carr´e et son cˆot´e. Comme il s’agit de deux grandeurs non comparables, cette relation ne peut ˆetre exprim´ee que par un syst`eme de proportions faisant intervenir deux carr´es et les cˆot´es correspondants. Si a et b sont deux segments quelconques, pris comme les cˆot´es de deux carr´es, Q(a) et Q(b) ce syst`eme de proportions est ´evidemment :

a : b = α : β = β : γ

Q(a) : Q(b) = α : γ (3.3)

o`u α, β et γ sont, comme dans le chapitre pr´ec´edent, des quantit´es homog`enes quelconques, dont l’une est fix´ee de mani`ere arbitraire et les autres d´etermin´ees `a partir de celle-ci, comme des quatri`emes proportionnels. Il suffit alors de poser β = u, ou, simplement, d’´eliminer β entre les deux premi`eres proportions pour tirer de l`a la proportion

Q(a) : Q(b) = a b :

b a = a

2: b2 (3.4)

Or, si a et b sont les cˆot´es d’un triangle rectangle dont h est l’hypot´enuse, on aura, d’apr`es le th´eor`eme de Pythagore,

Q(h) = Q(a) + Q(b) (3.5)

Quel que soit le segment h, de la proportion (3.4) on peut alors tirer les nouvelles proportions Q(h) : Q(b) =a2+ b2 : b2

Q(h) : Q(b) = h2: b2 (3.6)

d’o`u il s’ensuit :

a2+ b2= h2 (3.7)

comme l’affirme justement Descartes.

∗ ∗ ∗

Apr`es avoir ´etabli les ´egalit´es (3.2) Descartes suppose que “le rapport qu’ont tous les poins de la courbe ME a ceux de la droite HA” est exprim´e par une ´equation Alg´ebrique enti`ere entre x et y. En utilisant l’une ou l’autre des ces ´egalit´es, on pourra alors ´eliminer

de cette ´equation une de ces deux “quantit´es ind´etermin´ees”7, en obtenant une nouvelle ´equation enti`ere contenant s, v, et soit x soit y8, disons x9.

Or, la normale MG = s peut ˆetre pens´ee comme le rayon d’un cercle de centre G. S’il en ´etait ainsi, les ´egalit´es (3.2) se convertiraient en deux ´equations, l’une et l’autre exprimant ce cercle par rapport au mˆeme syst`eme de coordonn´ees auquel la courbe ME est r´ef´er´ee. La perpendiculaire TF `a MG serait ainsi, en mˆeme temps, tangente `a ce cercle et `a cette courbe ; le cercle de centre G et rayon MG serait donc un des cercles tangents `a la courbe ME au point M, c’est-`a-dire qu’il “touchera[it] la ligne courbe ME sans la coupper”10. Cela ne serait pourtant vrai — continue Descartes — qu’`a condition que MG soit bien la normale en M `a la courbe ME. Si ce n’´etait pas le cas (c’est-`a-dire que PG ne soit pas la sous-normale) ce cercle couperait la courbe ME en deux points et l’´equation qui r´esulterait de la composition de l’´equation de la courbe avec l’une ou l’autre des ´egalit´es (3.2) aurait (au moins) deux racines (r´eelles) distinctes en l’inconnue x. Il s’ensuit que, parce que MG soit la normale cherch´ee, il suffit que cette derni`ere ´equation ait deux racines “´egales” en cette inconnue11.

Ceci ´etant, voici le passage crucial de l’argument de Descartes :

De plus, il faut considerer que, lorsqu’il y a deux racines esgales en vne ´equation, elle a necessairement la mesme forme que si on multiplie, par soy mesme, la quantit´e qu’on y suppose estre inconnu¨e, moins la quantit´e connu¨e qui luy est esgale ; & qu’apr´es cela, si cete derniere somme n’a pas tant de dimensions que la precedente, on la multiplie par vne autre somme qui en ait autant qu’il luy en manque : affin qu’il puisse y auoir separement ´equation entre chascun des termes de l’vne & chascun des termes de l’autre.12

En s’appuyant sur un lemme qu’il laisse implicite et qu’il n’´enoncera explicitement et sous forme g´en´erale, sans pour autant le d´emontrer, que dans le III`eme livre13, Descartes r´eduit la condition pr´ec´edente — qu’il justifie en se r´eclamant d’une ´evidence de nature g´eom´etrique, en ayant foi en une sorte de principe de continuit´e — `a une condition relative `

a la forme d’une ´equation. C’est justement ce qui permet de passer de la g´eom´etrie classique

7Cf. Descartes (1637), 342.

8Descartes pr´esente trois exemples de cette simple proc´edure Alg´ebrique [cf. Descartes (1637), 343-345], tous portant sur des ´equations exprimant des courbes pr´ealablement introduites de mani`ere ind´ependante de ces ´equations : une ellipse ; une cubique exhib´ee par construction grˆace `a l’emploie d’un outil form´e de trois r`egles et d’une parabole ; et enfin une courbe caract´eris´ee g´eom´etriquement par la double position MO1= O1A + z, MO2= O2A + kz, M ´etant un point courant de la courbe, O1 et O2 deux points donn´es, A le point d’intersection entre la courbe et la droite O1O2, k une raison donn´ee, et enfin z une variable auxiliaire.

9Evidemment le choix de la variable `´ a ´eliminer n’a aucune cons´equence sur le r´esultat final. Il convient donc de choisir cette variable de sorte `a rendre les calculs n´ecessaires pour parvenir `a ce r´esultat les plus simples possibles.

10Cf. Descartes (1637), 345. 11Cf. Descartes (1637), 346-347. 12Cf. Descartes (1637), 347.

13Cf. Descartes (1637), 372 : “Et on voit euidemment [. . .] que la somme d’vne ´equation qui contient plusieurs racines, peut toujours estre diuis´ee par un binˆome compos´e de la quantit´e inconnu¨e, moins la valeur de l’vne des vrayes racines, laquelle que ce soit ; ou plus la valeur de l’vne des fausses”. En d’autres termes : si z = z0 est une racine (r´eelle) de l’´equation enti`ere F (z) = 0, alors le binˆome z− z0 est un facteur du polynˆome F (z), c’est-`a-dire que le quotient z−zF (z)

0 est encore un polynˆome. Ce sont justement les coefficients de ce dernier polynˆome, dont l’existence est suppos´ee, que Descartes invite `a d´eterminer par la m´ethode des coefficients ind´etermin´es : cf. la section 3.1.2.

`

a l’Alg`ebre.

En effet, dire que l’´equation dont il est question, par exemple F (x) = 0, “a la mesme forme” qu’une autre ´equation, telle que (x− x0)2P (x) = 0 — o`u x = x0 est une racine double de la premi`ere ´equation et P (x) est un polynˆome ind´etermin´e de degr´e m− 2, m ´

etant le degr´e de F (x) — signifie dire que la premi`ere de ces ´equations est Alg´ebriquement r´eductible `a la deuxi`eme. Il s’ensuit que les coefficients d’une mˆeme puissance de l’inconnue dans l’une et dans l’autre de ces ´equations doivent ˆetre s´epar´ement r´eductibles les uns aux autres par des r`egles Alg´ebriques, et donc qu’ils sont ´egaux. On aura ainsi m + 1 ´egalit´es qui pourraient ˆetre prises comme autant d’´equations lin´eaires pouvant servir `a d´eterminer successivement les m− 1 coefficients ind´etermin´es intervenant dans le polynˆome P (x) et les inconnues s et v. C’est la premi`ere ´enonciation, limit´ee au cas finitaire, de ce qui, sous le nom de “m´ethode des coefficients ind´etermin´es (de Descartes)” deviendra au XVIII`eme

si`ecle l’outil fondamental de l’analyse14.

Supposons donc que, au moyen de ces ´equations, on soit effectivement en condition de d´eterminer non seulement les coefficients du polynˆome P (x), mais aussi au moins une des inconnues s et v. Cela signifie que de la comparaison de ces ´equations il est possible de tirer soit une ´egalit´e telle que s = S(x0), soit une ´egalit´e telle que s = V (x0), o`u S(x0) et V (x0) sont des expressions Alg´ebriques o`u intervient x0. Il suffit alors d’interpr´eter x0comme une des coordonn´ees du point M pour disposer d’une prescription univoque pour la construction du point G, pourvu qu’un des segments AP et PM soit donn´e. Le probl`eme de la normale serait ainsi r´esolu. Il suffirait enfin, la normale `a la courbe ME ´etant donn´ee, d’en construire une perpendiculaire passant par le point M, pour obtenir aussi la tangente `a cette courbe donn´ee en ce mˆeme point.

3.1.2 Reformulation de l’argument de Descartes

Apr`es avoir expos´e son argument, Descartes se limite `a pr´esenter quelques exemples qui ont pour fonction d’´eclairer la m´ethode. Au lieu de le suivre dans la pr´esentation de ces exemples, je vais chercher `a reformuler cet argument, en le r´ef´erant `a une ´equation Alg´ebrique enti`ere quelconque, de mani`ere `a rendre explicite certaines des conditions dont il d´epend, qui restent cach´ees dans l’exposition de Descartes.

Pour plus de clart´e, distinguons d’abord entre les coordonn´ees ind´etermin´ees du point M, qui, bien que quelconque, est cens´e ˆetre fix´e, et les variables x et y qui entrent dans l’´equation de la courbe. Si on pose AP = X et PM = Y , il s’ensuit que le point M est caract´eris´e par les positions x = X et y = Y . Si on pose ensuite MG = s et AG = v, le th´eor`eme de Pythagore permet alors, grˆace `a l’argument interm´ediaire que j’ai explicit´e ci-dessus, d’´ecrire l’´egalit´e

Y2= s2− (s − X)2 (3.8)

En rempla¸cant dans cette ´egalit´e X par Y respectivement avec x et y, on obtient l’´equation

y2= s2− (v − x)2 (3.9)

14Cf. Panza (1992a), parties II et III. C’est Descartes lui-mˆeme qui pr´econise ce large usage de sa m´ethode [cf. Descartes (1637), 351] : “Mais ie veux bien, en passant, vous auertir que l’inuention de supposer deux equations de mesme forme, pour comparer separement tous les termes de l’vne a ceux de l’autre, & ainsi en faire naistre plusieurs d’vne seule, dont vous au´es vˆu icy vn exemple, peut seruir a vne infinit´e d’autres Problesmes & n’est pas l’vne des moindres de la m´ethode dont ie me sers.”

qui est l’´equation du cercle de centre G et de rayon MG = s, r´ef´er´e au syst`eme de coordonn´ees cart´esiennes orthogonales d’abscisse AH et d’origine A. Il est clair que cette ´equation est parfaitement ind´ependante de la nature de la courbe AMN, et peut de ce fait ˆetre entendue comme une ´equation standard et g´en´erale, exprimant la nature g´eom´etrique du probl`eme de la normale (et de la tangente) d’une courbe quelconque, r´ef´er´ee `a un syst`eme de coordonn´ees cart´esiennes orthogonales15.

Supposons que la courbe AMN est exprim´ee, relativement au syst`eme de coordonn´ees cart´esiennes orthogonales d’abscisse AH et d’origine A, par l’´equation nF (x, y) = 0 — qu’on suppose de degr´e n et telle quenF (0, 0) =nF (X, Y ) = 0. Pour ´eviter le cas trivial o`u cette courbe se r´eduit `a une droite, on suppose que n ≥ 2. En composant l’´equation

nF (x, y) = 0 avec l’´equation (3.9) et en ´eliminant soit la variable y soit la variable x, on obtient une ´equation respectivement en x ou en y, dont le degr´e d´epend de la nature particuli`ere de la premi`ere de ces ´equations. Supposons qu’il convienne d’´eliminer la variable y16. On obtiendra une r´esultante en , disons de degr´e m (en g´en´eral plus grand que n et toujours plus petit ou ´egal `a 2n).

Soit mR(s,v)(x) = m X i=0i(s, v)] xi= 0 (3.10)

cette ´equation, Γi(s, v) (i = 0, 1, . . . , m) ´etant des coefficients donn´es par des expressions Alg´ebriques o`u interviennent en g´en´eral les inconnues s et v. Rien n’empˆeche de supposer que la puissance xmapparaˆıt dans cette ´equation sans ˆetre affecte d’aucun coefficient — ce qui de notre point du vue revient `a poser Γm(s, v) = 1 — car s’il en ´etait pas ainsi, il serait facile de r´eduire l’´equation obtenue `a une autre ´equation qui respecte cette condition. Comme l’´equation (3.9) est homog`ene, si l’´equationnF (x, y) = 0 l’est aussi — et il faut le supposer, si l’on se place du point de vue de Descartes —, l’´equation (3.10) est elle-mˆeme homog`ene, et donc tous ses termes sont donn´es par le produit de m segments ´egaux, ´eventuellement affect´es par un nombre (r´eel). Ses racines r´eelles dans l’inconnue x, donneront, de surcroˆıt, les abscisses des points d’intersection entre la courbe d’´equation nF (x, y) = 0 et le cercle

15Imaginons que les coordonn´ees choisies ne soient pas orthogonales et posons AR = X et RM = Y , en supposant que l’angle MˆRH form´e par les coordonn´ees est connu et ´egal `a %. Le triangle form´e par les cˆot´es MG = s, RM = Y et RG = v− X ne sera alors pas rectangle et on ne pourra pas lui appliquer le th´eor`eme de Pythagore. Il est pourtant facile de voir que la donn´ee des cˆot´es RM = Y et RG = v− X de ce triangle, et de l’angle MˆRH = % que ces cˆot´es forment entre eux, d´etermine de mani`ere univoque le cˆot´e MG = s. On aurait en effet l’´egalit´e

Y2= s2− (v − X)2+ 2Y (v− X) cos %

Il suffira alors de remplacer X et Y respectivement par x et y, pour obtenir l’´equation du cercle (passant par M) de centre G et de rayon MG = s, r´ef´er´e au syst`eme de coordonn´ees cart´esiennes d’abscisse AH, d’origine A et d’angle % :

y2= s2− (v − x)2+ 2y(v− x) cos %

Aussi cette ´equation est parfaitement ind´ependante de la nature de la courbe AMN ; elle est donc une ´equation standard et g´en´erale, exprimant la nature g´eom´etrique du probl`eme de la normale (et de la