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La conquête de la représentation nationale

En 1910, le football français compte deux instances nationales, plus une pari- sienne, au sein desquelles le football est devenu un enjeu majeur. En février 1912 L’USFSA, entrée en contact avec le CFI dès 1911, demande officieusement par l’intermédiaire du journaliste Frantz REICHEL, rugbyman avant d’être footballeur et pourtant président de la commission centrale de football de l’Union, son intégration au CFI qu’elle obtiendra le 5 janvier 1913. Elle souhaite, malgré tout, ne pas s’isoler tant au niveau international que national pour deux raisons. Premièrement, parce que l’AFA entreprend de nouvelles négociations avec la Fédération anglaise. À cette époque en effet la FIFA, toujours dirigée par le président de la FA D.B. WOOLFALL, est officielle-

ment mandatée pour organiser le tournoi olympique de football créé depuis 1908 par le CIO dont la conception « coubertinienne » du sport est très proche des valeurs défen- dues par les dirigeants de l’AFA. Deuxièmement, parce qu’elle vient de subir un échec au Trophée de France face aux clubs parisiens de la Ligue de football et ne veut pas voir partir le reste de ses clubs de football vers le CFI, comme cela avait été pratiquement le cas en 1909 en Lorraine2. L’Union développe en conséquence son réseau régional, non

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En tant que joueur, G. DUHAMEL a remporté la Coupe MANIER en 1898 et le Trophée de France en 1908. Il fut rédacteur à l’hebdomadaire Football. Voir le Dictionnaire de biographie française, Tome 12, 1970.

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Des groupements dissidents voient le jour au cours de la première décennie du siècle, contes- tant le centralisme et les prérogatives des principales unions sportives parisiennes. L’Union des sociétés cyclistes du Nord-Est (USCNE), par exemple, créée en 1903, entre en conflit avec l’UVF. Mais encore, la Fédération sportive indépendante lorraine (FSIL) fondée en 1909 à Nan- cy, qui compte des clubs de football prêt à s’affilier au CFI, brave pendant deux ans l’autorité du Comité lorrain de l’USFSA. Ce mouvement prend logiquement fin à partir du moment où les

sans difficulté, et stimule ses Comités locaux pour qu’ils disputent des matches oppo- sant des sélections régionales dans le but de composer une sélection nationale compéti- tive1. Elle formalise cette volonté en instituant à partir de la saison 1910-11 la Coupe

INGHRAN, challenge offert au Comité de Paris de l’USFSA par la maison londonienne

« J. G. INGHRAN and Son » et remis en jeu chaque année entre les Comités régionaux.

D’une valeur de 500 francs [10 000 frs], cette compétition à élimination directe, que les sélections doivent emporter trois fois afin de se l’approprier définitivement, préfigure la Coupe des provinces françaises. La Bretagne remporte la première édition de ce chal- lenge après avoir écarté Paris en demi-finale et le Languedoc en finale ; ce qui, selon ce journaliste sportif du Nouvelliste de Bretagne, doit permettre l’accès de quelques joueurs locaux à la reconnaissance nationale : « Enfin nous avons prouvé notre valeur ! Devant 2 500 spectateurs (recette : 950 F [16 417 frs]) emballés, trépignants, notre équipe a démontré la force et l’adresse des footballeurs bretons. (...). La bonne tenue de certains de nos jeunes nous permet d’espérer quelques capes [sélections] de joueur in- ternational. »2

À partir de 1913, l’Union organise une autre compétition toujours par élimina- tion directe, qui prend le nom de « Coupe nationale interfédérale », à laquelle partici- pent des équipes de sélection. Dans le Nord, l’industriel et commerçant Henri JOORIS, successeur d’André BILLY à la présidence de l’Olympique Lillois, reprend à son compte

l’idée des matches « Paris-Nord » qu’avait mis en place l’ancien président lillois et la rebaptise « Lions des Flandres-LFA ». L’équipe des Lions des Flandres, qui affronte à trois reprises (1914, 1918 et 1919) celle de la Ligue, est une sélection régionale essen- tiellement composée de joueurs de l’US Tourcoing, du RC Roubaix et de l’Olympique Lillois. Bien qu’elles se déroulent sous la tutelle du CFI, d’après le témoignage de Ga- briel HANOT, ces rencontres n’en sont pas moins le lieu de combats acharnés : « La ri- valité, de pacifique qu’elle semblait être au premier abord, s’est rapidement transfor-

dirigeants de l’Union demandent leur affiliation au Comité français interfédéral en 1912. Voir P. Arnaud, op. cit., 1987, pp. 309 et 311.

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Le premier match organisé par le Comité de Bretagne de l’USFSA a lieu le 20 mars 1910 entre une « sélection des meilleurs USFSA » et le Stade Rennais UC qui n’aligne que son équipe réserve.

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mée en une sorte de conflit des races (...). L’USFSA jurait d’exterminer la Ligue et celle-ci ne parlait rien moins que de faire place nette, de se débarrasser une fois pour toutes de l’antique et puissante Fédération. »1 Il est vrai que l’histoire de ces deux or- ganismes est loin de favoriser des relations amicales. Chacune d’elle souhaite bien évi- demment prendre l’ascendant sur l’autre, mais aussi être représentée par un plus grand nombre de joueurs au sein de la sélection officielle du CFI, désormais seule instance reconnue par la FIFA.

En marge de ces matches franco-français2, les sélections de l’USFSA, de la LFA et bien sûr du CFI affrontent des clubs ou des sélections étrangères, jusqu’en 1919, an- née de la fondation de la Fédération française de football (FFF). La France a donc connu une situation très particulière puisqu’au niveau des rencontres internationales de 1910 à 1914, elle était « représentée » par trois sélections nationales distinctes. En 1910, par exemple, le même jour à Paris, la sélection de l’USFSA joue contre celle de l’Amateur football association, tandis que l’équipe formée par la LFA dispute un match face à celle de la Football association anglaise. La composition de la sélection de la Ligue re- pose essentiellement sur cinq joueurs du Red Star AC et trois du CA Paris. Alors qu’elle vient de demander son affiliation au Comité français interfédéral, aucun de ses joueurs n’est à la disposition du CFI avant le mois de janvier 1911 pour participer aux ren- contres internationales qu’il organise. En effet, cette même année, lors de ses trois confrontations internationales, la sélection du comité ne compte dans ses rangs qu’une majorité de joueurs de la FGSPF (de l’Étoile des Deux Lacs) et seulement deux ou trois footballeurs de la FCAF (du CA Vitry). Ainsi, les compositions successives de l’équipe de France « officielle » permettent, à partir de l’adhésion du CFI à la FIFA, de rendre compte des stratégies de la Ligue et tout autant de l’Union pour la conquête du mono- pole de la sélection nationale et de la représentation du football français au niveau du terrain et par là même auprès des plus hautes instances du football international. Tout se passe comme si l’USFSA souhaitait reprendre la place qu’elle occupait quelques années auparavant dans le football « mondial », non plus par les voies institutionnelles mais par

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Journal L’Auto, le 5 janvier 1914, cité in A. Wahl, op. cit., 1989, p. 158. 2

Pour le récapitulatif des matches des sélections françaises, voir les Tableaux D1 et D2 en fin de chapitre.

la reconnaissance de la qualité de ses joueurs en leur imposant de manière autoritaire leur rassemblement au sein d’une sélection décrétée obligatoire sous peine de sanction1. Car même si un semblant de comité de sélection a été mis en place par Charles SIMON,

Henri DELAUNAY et Louis CHAILLOUX (respectivement ex-secrétaire général de la

FGSPF et ex-président de la FCAF) depuis l’entrée du CFI à la FIFA, les luttes qui avaient agité le football français depuis le début du siècle perdurent, notamment suite au droit de regard obtenu par les dirigeants de l’USFSA à partir du mois de janvier 1913 sur la composition de l’équipe de France. Le comité de sélection passe en effet de neuf à douze membres. Le CFI va ainsi rapidement être dépossédé de son pouvoir de composer l’équipe qui représente le football français au niveau « international ».

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Voir page suivante la convocation du 26 novembre 1913 envoyée par l’USFSA à R. DUBLY pour le match amical de la sélection du CFI contre l’Entente anversoise, in P. Delaunay & alii., op. cit., 1994, p. 62.

___________________________________________________________ Convocation de R. DUBLY à un match international en 1913.

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Une première rupture, très nette, intervient à l’occasion du match opposant la France à la Hongrie le 1er janvier 1911. Six mois après son intégration au CFI, la Ligue exige d’une part que le match soit joué sur le terrain du CA Paris et que sept de ses joueurs de club y participent. Jusqu’à cette date, la sélection du CFI comprenait essen- tiellement des footballeurs issus des patronages. Sur les deux ans à venir, la LFA aligne- ra de cinq à neuf joueurs en matches internationaux officiels contre deux à six pour le CFI. Ne pouvant s’appuyer sur un nombre important de clubs1 et de joueurs, elle fonde sa nouvelle légitimité sur les résultats probants que ceux-ci enregistrent au Trophée de France entre 1911 à 1913. Le CA Paris le remporte deux fois et le Red Star s’incline en finale face à l’Étoile des Deux Lacs en 1912. Ces victoires ne sont pas le fruit du hasard, mais la suite logique d’une stratégie de mutations et de concentration des meilleurs footballeurs français dans quelques clubs. Certains d’entre eux, de l’USFSA comme des patronages, n’hésitent pas à quitter leur club d’origine pour rejoindre ceux de la Ligue, à partir du moment où ils ont l’assurance que celle-ci adhère au CFI, afin de jouer des rencontres internationales et aussi de profiter des avantages matériels et financiers of- ferts par leur nouvelle situation. Quelques clubs aussi changent de tutelle : le Football Étoile Club de Levallois, club de l’Union fondé en 1894, et le CA Vitry, club de la FCAF, rejoignent la LFA entre 1911 et 1912 ; trois ans plus tard, le Club Français, l’un des premiers clubs affiliés par nécessité à l’USFSA, les rejoint au sein de la Ligue.

Ainsi, la première vague des départs de joueurs se concentre majoritairement vers le Red Star et aussi vers le FEC Levallois. Gaston BARREAU (27 ans), Alfred

GINDRAT (26 ans), Eugène MAËS (20 ans) et Pierre CHAYRIGUÈS (19 ans) sont les pre-

miers et les plus célèbres d’entre eux à muter. L’accès au statut d’international — ou sa préservation comme, par exemple, pour Julien DU RHÉART — passe inéluctablement, à

ce moment précis de l’histoire institutionnelle du football français et de son organisation administrative, par un changement de club en raison des règlements qui excluent les joueurs unionistes de l’équipe de France CFI. Leurs stratégies de mutations sont relati- vement claires par rapport aux positions dominantes des clubs du Comité donnant nais- sance aux formes embryonnaires d’un marché de l’élite du football national2. Par exem-

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À cette époque, l’USFSA et la FGSPF comptent environ dix fois plus de clubs que la LFA. 2

ple, E. MAËS s’étant vu refusé par son club ses deux premières sélections contre la Bel-

gique et l’Angleterre en avril 1910, a logiquement quitté le Patronage Olier, club de la FGSPF, pour le Red Star. Ceci dit, la mobilité des joueurs français reste limitée au ter- ritoire national malgré les conditions financières et sportives qu’offrent les clubs étran- gers. La réponse faite par de P. CHAYRIGUÈS aux propositions du club anglais de Tot-

tenham en est un exemple concret.

L’engagement du gardien de but Pierre CHAYRIGUÈS au Red Star est un des

premiers exemples dévoilés ultérieurement dans la presse quant aux rapports purement marchands que peuvent entretenir les joueurs avec les dirigeants. En 1929, le journal

L’Auto publie ses mémoires où il raconte sa carrière de joueur et ses rapports au football

de haut niveau à ses débuts. Issu de milieu populaire, P. CHAYRIGUÈS joue successive- ment au patronage de la Jeanne d’Arc de Levallois, puis à l’US Clichy et enfin, à partir de 1911, au Red Star où il fera toute sa carrière. Pour s’offrir ses services, le Red Star lui a versé une somme de 500 francs [8 640 frs] pour sa signature, le rémunère 400 francs [6 912 frs] par mois, plus une prime de 50 francs [864 frs] à chaque victoire en compétition nationale. Immédiatement après avoir intégré ce club, il devient le gardien de but de l’équipe de France, poste qu’il conserve jusqu’en 1925. Conscient de la valeur footbalistique qu’il représente, il affirme n’y jamais avoir joué sans que la Fédération française de football ou la Ligue de Paris lui verse, sous forme de frais de déplacements, de frais médicaux ou pharmaceutiques, d’indemnité journalière pour cause de blessure, etc., des sommes allant de 1 000 à 3 000 francs [en moyenne de 6 480 à 25 922 frs].

Depuis le 29 octobre 1911, alors qu’il est devenu un titulaire indiscutable de l’équipe de France, sa carrière internationale connaît un premier coup d’arrêt. Le 9 mars 1913, après sept sélections consécutives, il est déclaré forfait. Cette même année, il est contacté par plusieurs dirigeants de clubs étrangers. Les Anglais de Totteham lui pro- pose un statut de joueur professionnel et 25 000 francs [432 025 frs] pour sa mutation

sous estimation des mouvements de joueurs, ici les internationaux, évoluant dans les clubs pha- res de la capitale. Un repérage des « transferts » étendu à l’ensemble des clubs français, comme nous l’avons fait pour le Stade Rennais (Cf. Chapitre 2), confirmerait la densité d’un marché de joueurs au niveau local. Il montrerait, par ailleurs, que ce marché n’a d’intérêt à l’échelle natio- nale que pour les joueurs déjà entrés dans une logique et un processus de professionnalisation.

outre-Manche. Malgré cette proposition pour le moins intéressante, P. CHAYRIGUÈS

refuse. En effet, sans être explicitement reconnu en France comme un footballeur de métier — statut social illégal car non réglementé, donc laissant des marges de manœu- vre beaucoup plus larges pour les négociations entre joueurs et dirigeants —, les condi- tions financières et sportives pour lesquelles P. CHAYRIGUÈS reste exercer ses talents de

footballeurs au Red Star et en sélection nationale semblent avoir eu raison de son dé- part.

Dans les mois qui suivirent, il fut de nouveau forfait en sélection, tout comme A.

GINDRAT, E. MAËS, G. BARREAU. Le 29 mars 1914, Henri BARD se permet même de

refuser sa sélection face à l’Italie s’il ne touche pas les bénéfices financiers dont certains de ses coéquipiers bénéficient. Appelés en équipe de France pour leurs compétences, les joueurs estiment pourtant, à plus d’un titre, être en droit d’attendre du CFI une indemni- sation au moins équivalente à celle qu’ils perçoivent régulièrement en compétition offi- cielle avec leur club respectif. De plus, en multipliant le nombre de matches en sélec- tion, ils augmentent les risques de blessure susceptible de les pénaliser, eux et leur club, sans qu’ils soient pour autant dédommagés de manière systématique et à hauteur du préjudice causé. Au lendemain du premier conflit mondial, P. CHAYRIGUÈS contracte une blessure aux Jeux interalliés qui l’éloigne des terrains pendant trois ans et demi. De retour en janvier 1923, il joue son dernier match le 21 mai 1925 contre l’Angleterre à l’âge 33 ans. La blessure de P. CHAYRIGUÈS, qui l’oblige à cesser ses activités au sein de son équipe, pose plus généralement le problème de la conduite d’une carrière de footballeur entre la sélection nationale et le club. Elle objective aussi l’opposition entre les intérêts économiques et sociaux qu’ont les dirigeants fédéraux à composer une équipe de France performante, outil de légitimation de leur pouvoir, et ceux des prési- dents de clubs qui subviennent quotidiennement aux besoins des joueurs et qui sont plus ou moins réticents à voir leur joueur évoluer pour le compte des fédérations. L’insuffisance des profits matériels et financiers qu’offre une sélection nationale jus- qu’au début des années 1920 nécessite de nombreuses réclamations de la part des joueurs auprès de la direction du Comité interfédéral qui n’a pas encore les moyens de payer leurs prestations et leurs soins. Celle-ci se voit d’ailleurs, tout comme l’USFSA, dans l’obligation d’édicter un règlement rendant la sélection obligatoire sous peine de

sanctions. Pour y échapper, les joueurs feront tout pour demeurer au sein de l’élite des clubs où ils auront l’assurance de cumuler les avantages de leur activité quotidienne avec ceux de la sélection nationale.

Tableau E – Mutations des joueurs internationaux entre 1905 et 1919.

Nom Prénom Année naissance Premier club Deuxième club Troisième club Quatrième club Garnier Georges 1878 Club Français (i) CA Paris (1905)

Allemane Pierre 1882 Passy Club Français RC France (1905,i) CA Société Générale

Gindrat Alfred 1884 St Français Red Star AC (1910,i)

Royet Marius - US Paris (i) St Français (1910) Maes Eugène 1890 Patronage Olier Red Star AC (1910,i)

Nicolaï Eugène - US Club (i) St Français Red Star AC (1910)

Barreau Gaston 1883 Club Français Standard AC FEC Levallois (1910,i)

Chayriguès Pierre 1892 JA Levallois US Clichy Red Star AC (1911,i)

Du Rhéart Julien - SA Montrouge (i) Club Français (1908,i) Red Star AC (1911,i)

Compeyrat Alfred 1890 JA Levallois (i) CA Rosaire (1911,i)

Verbrugge J. - AS Française (i) Red Star AC (1911,i)

Gascard André - St Montpellier O Sète (1911) SH Marseille (1912) St Michelet (1913)

Sergent Victor 1887 RC France (i) St Saint-Raphaël (1913,i)

Jourde Etienne 1890 CA Vitry (i) CS Athlétiques (1914,i)

Ducret Jean* 1887 Puteaux Etoile des Deux-Lacs (i) O Lillois (1914,i) St Français

Devic Emilien 1888 RC France (i) Red Star AC (1914,i) CA Société Générale (1919,i) RC France (1920-1921,i) Bard Henri* 1892 Servette de Genève RC France (1912,i) FC Lyon (1918) CA Paris (1919-1920,i)

Hanot Gabriel 1889 US Tourcoing (i) AS Française (1919,i)

Mathieu Maurice - CA Société Générale (i) Red Star AC (1919,i) Triboulet Marcel 1890 FEC Levallois (i) RC France (1919,i)

Sources : Tableau construit par nos soins à partir de J.-M. Cazal, P. Cazal & M. Oreggia, op. cit., 1992 ; P. Delaunay & alii., op. cit., 1994 ; J.-P. Réthacker & J. Thibert, La fabuleuse histoire des joueurs de

football, Paris, La Martinière, 1994 ; J.-Y. Reuzeau & G. Vidal, op. cit., 1997. i : club où les joueurs ont obtenu leur sélection en équipe de France CFI. Entre parenthèse, l’année de mutation des joueurs dans leur nouveau club. En caractères normaux, les clubs de l’USFSA.

En caractères italiques, les clubs de la FGSPF. En caractères italiques gras, les clubs de la LFA. * : J. DUCRET et H. BARD ont connu un cinquième club.

De 1913 à 1919, le mouvement de joueurs s’inverse. Les footballeurs de la Li- gue et de la FGSPF se dirigent alors vers les clubs de l’USFSA, non plus pour accéder à la sélection française mais plutôt pour conserver leur rang d’international. Pour des « ligueurs », tels Étienne JOURDE, Émilien DEVIC et Marcel TRIBOULET, c’est en quel- que sorte un retour aux sources. En revanche, la mutation de Jean DUCRET, originaire de

l’emblématique club des patronages catholiques de l’Étoile des Deux Lacs, à l’Olympique Lillois n’est pas sans soulever une vive émotion chez des journalistes et dans le milieu du football. Ainsi, l’histoire officielle ne retenant que des indignations oublie que la majorité des mouvements de joueurs est, depuis déjà quelques années, fondée sur la recherche des clubs les plus en vue du moment, c'est-à-dire ceux offrant les plus grandes « chances de profits » symboliques et économiques. L’Olympique Lil- lois, présidé par Henri JOORIS, promoteur de la coalition « US Tourcoing-RC Roubaix-

Olympique Lillois », fait partie de ceux-là. Son club sera ainsi le dernier à remporter l’ultime édition du Trophée de France avant la Première Guerre mondiale. En fin d’année 1912, le match « Paris-Nord », devenu un classique, est aussi remporté par la sélection nordiste. À partir de cette date, le pouvoir de l’USFSA s’est considérablement renforcé au niveau sportif et institutionnel. Paul BARNOLL est « sélectionneur » de l’équipe de France du Comité. Cet ancien joueur du Club Français a été membre de la « commission football » à l’USFSA et est devenu journaliste sportif puis directeur de

Football, hebdomadaire spécialisé dans le football et le rugby présent dans les kiosques

entre 1909 et 1914. Il va de nouveau ouvrir les portes de l’équipe de France aux foot- balleurs de l’Union. Gabriel HANOT, joueur de l’US Tourcoing, est l’un des premiers à y être réintroduit en janvier 1913. Mi-mars, huit joueurs du Nord dont quatre de